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81 bougies et 31 ans de règne.: Paul Biya a-t-il atteint le seuil d’Illich ?

Par Joseph Flavien Kankeu Le penseur Ivan Illich, né le 4 septembre 1926 à Viennes en Autruche met en évidence,…

Par Joseph Flavien Kankeu

Le penseur Ivan Illich, né le 4 septembre 1926 à Viennes en Autruche met en évidence, dans l’une de ses plus importantes théories, le risque de la contre-productivité dans le travail. Démontrant qu’après un certain seuil de temps passé sur une activité, notre efficacité diminue et devient même négative. Après 31 ans au pouvoir, Paul Biya gouverne-t-il encore? Le penseur et intellectuel Ivan Illich est très connu pour ses travaux en matière d’éducation. Décédé le 2 décembre 2002 à Brême en Allemagne, cet Italien de nationalité croate a pu démontrer qu’au-delà d’un seuil de travail horaire, le temps passé n’est plus efficace. Dans sa théorie, il prouve que le temps de concentration optimal chez l’homme est de 45 minutes. Et conseille à ses semblables d’accepter leur limite et de prendre des pauses ou de changer d’activité en cas de nécessité. Sa théorie s’inspire d’une enquête auprès des paysans qui avaient remarqué qu’en doublant la quantité de travail agricole on ne double pas la quantité de blé produite. De même, plus on approche d’une certaine limite, plus il faut ajouter le travail pour obtenir toujours moins de blé supplémentaire. « Au-delà, on entre dans la zone dite des rendements décroissants. Appliqué à la vie au travail de nos jours, cela implique notamment que passé un certain seuil de temps sur une activité, notre efficacité diminue et devient même négative», écrit Ivan Illich.

Ce phénomène embarrassant peut peut-être justifier l’inertie qui caractérise le régime Biya aujourd’hui. Né le 13 février 1933 à Mvomeka, Paul Biya fait des études universitaires en France, avant de retourner au Cameroun en 1961. C’est le début d’une longue carrière qui se poursuit encore. En 1962, il est nommé chargé de mission à la présidence de la République par Ahmadou Ahidjo. En 1968, il est nommé ministre, secrétaire général de la présidence de la République, puis Premier ministre en 1975, avant d’accéder à la présidence de la République le 6 novembre 1982 après la démission de son prédécesseur. A son accession à la magistrature suprême, Paul Biya est plein d’énergie. Il met sur le marché un livre intitulé Pour le libéralisme communautaire qui donne les grandes orientations de sa politique. Pendant les 10 premières années, ce fils de Mvomeka est applaudi par tous. Il est d’ailleurs réélu lors d’une élection présidentielle anticipée à plus de 98%. Mais avec le temps, Paul Biya s’use. Il est de moins en moins présent au pays. Bouder les sommets sous régionaux de grande envergure devient son sport favori. L’homme du 6 novembre 1982 préside de moins en moins les réunions, descend de moins en moins sur le terrain et prends plusieurs mois de congés par an au travers de ce que les officiels désignent «visite privée en Europe»

De plus, Paul Biya est devenu lent à la réaction. La dernière illustration de cette lenteur, c’est l’annonce d’un plan d’urgence le 31 décembre 2013 qui n’a pas été suivi de faits alors même que le président faisait le diagnostic le plus sérieux de la situation du pays. Entre très long séjour à ses fonctions et son âge avancé (81 ans ce jour), ils sont nombreux, les Camerounais qui parient que le chef de l’Etat, qui n’aurait plus rien à apporter au Cameroun, a atteint le seuil d’Illich. Un état, dont la responsabilité ne peut lui être imputée, puisqu’il s’agit simplement de la volonté de la nature.


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