Reporters sans frontières a pris attache avec deux rapporteurs spéciaux de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples afin qu’elle se penche sur le procès de l’ancien patron de la Crtv qui dure depuis plus de trois ans sans jugement.
Demain, 09 octobre se tient la 23 ème audience dans l’affaire Etat du Cameroun contre Amadou Vamoulké au Tribunal criminel spécial (Tcs). Un procès qui va se tenir au moment où, Reporters sans frontières (Rsf) a saisi les rapporteurs spéciaux sur la liberté d’expression et sur la détention de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples. L’Organisation non gouvernementale (Ong) demande à la commission d’étudier la situation de l’ancien patron de la Cameroon Radio and Television (CRTV) incarcéré depuis plus de trois ans sans avoir été jugé.
La saisine de Rsf se justifie par «les vingt-deux renvois consécutifs, plus de trois ans de détention et un procès qui a très largement dépassé le délai maximum de neuf mois au cours duquel les prévenus sont censés être jugés par ce tribunal (Tcs Ndlr).»
–Certificats médicaux
«Nombre record de renvois, procédure à rallonge en violation des standards internationaux et du droit camerounais lui-même, détention préventive illégale, absence de soins appropriés malgré l’établissement de plusieurs certificats médicaux, aucun journaliste de la région n’a subi un tel acharnement ces dernières années», a dénoncé Arnaud Froger, responsable du bureau Afrique de Rsf. Pour lui, «face aux possibilités limitées de recours sur place, Rsf a choisi d’accentuer la pression pour la libération de ce journaliste en saisissant deux rapporteurs spéciaux de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples.»
Ces rapporteurs font partie des leviers mis en place par la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples, organe de l’Union africaine (Ua), dont le Cameroun est membre.
Rsf a sollicité deux d’entre eux afin qu’il prenne «attache directement avec les autorités du Cameroun, d’entreprendre une visite dans le pays et d’interpeller publiquement les autorités de l’Etat pour leur demander qu’Amadou Vamoulké soit libéré.»
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Si rien n’est fait, l’Ong envisage de passer à l’étape supérieure à savoir saisir directement la commission afin qu’elle transmette le dossier Vamoulké à la Cour, «en vue de faire condamner l’Etat Camerounais pour violation des droits de ce journaliste.»
–Détournement de fonds
L’organisation de défense de la liberté de la presse et la protection des sources des journalistes, n’est pas à son premier essai pour la remise en liberté de M. Vamoulké. En mars déjà, Rsf a écrit au président de la République Paul Biya pour lui demander d’user de ses pouvoirs pour la libération d’Amadou Vamoulké. Une lettre qui est restée sans suite.
Plus tôt en janvier, l’Ong a saisi le groupe de de travail sur la détention arbitraire des Nations Unies, toujours au sujet de l’ancien Directeur général de la CRTV.
Dans une lettre ouverte datée du 31 janvier 2019, neuf parlementaires ont demandé à Emmanuel Macron et à son ministre des Affaires étrangères, Jean Yves Le Drian, de faire pression sur Yaoundé pour la libération du journaliste. Le Quai d’Orsay avait alors répondu quelques jours plus tard dans une correspondance en ces termes: « l’accusation n’a pas apporté de preuve de la pertinence de son action » et qu’il suivra « avec la plus grande attention » les conclusions du Groupe de travail sur la détention arbitraire de l’Onu saisi par Rsf.
Amadou Vamoulké est incarcéré depuis juillet 2016. Il lui est reproché un détournement de derniers publics de plus de 3 milliards et demi Fcfa dans les caisses de la CRTV, Entreprise qu’il a dirigée entre 2005 et 2016.