Portrait du chef du commando invisible dont le profil trouble est lié à la décadence de la Côte d’ivoire
Le sergent-chef Ibrahim Coulibaly dit « Général IB », chef du « Commando invisible », est mort ce mercredi soir. Il a été tué dans les combats qui opposaient à Abobo, son fief, ses forces à celles des Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI), l’armée d’Alassane Ouattara. L’information a été annoncée sur la nouvelle télévision d’Etat ivoirienne, la TCI. Les FRCI avaient lancé une offensive contre le « Commando invisible ». Le groupe armé n’avait pas encore désarmé en dépit des injonctions du président Alassane Ouattara qui avait préconisé l’usage de la force pour contraindre ses combattants à déposer les armes. Une attitude qui avait suscité l’incompréhension dans les rangs du « Commando invisible ».
Ibrahim Coulibaly, dit « IB », aura été la bête noire de tous les régimes en place en Côte d’Ivoire durant une décennie de troubles, avant de périr mercredi sous le feu des forces du président Alassane Ouattara et de Guillaume Soro, son éternel rival de la rébellion de 2002. Sergent-chef qui se rêvait président, le « général IB », comme il se faisait appeler ces derniers temps, a été derrière les soubresauts majeurs qu’a connus le pays depuis 1999, mais sans jamais jouer longtemps les premiers rôles. Le gouvernement a annoncé sa mort après une offensive sur son fief du nord d’Abidjan. Né le 24 février 1964 à Bouaké (centre), deuxième ville de Côte d’Ivoire, Ibrahim Coulibaly entre dans l’armée en 1985. Avec sa carrure de basketteur américain, il découvre le monde politique en devenant garde du corps de plusieurs personnalités, dont l’ancien Premier ministre Alassane Ouattara.
En 2003 éclate une guerre de leadership avec Guillaume Soro, porte-parole des FN à qui il avait laissé le devant de la scène. Les combats meurtriers l’année suivante tournent à l’avantage du clan Soro, qui deviendra Premier ministre en 2007 à la faveur d’un accord de paix. « IB » fuit en France où il est arrêté en septembre 2003 à Paris, accusé de fomenter un nouveau coup de force contre Laurent Gbagbo. Mais il recouvre la liberté après 21 jours de détention et disparaît. Son exil le mène cette fois au Bénin. Même installé là-bas, il est vu derrière l’attentat visant M. Soro en juin 2007. Il est aussi impliqué dans une mystérieuse tentative de coup d’Etat fin décembre. Un piteux « Noël à Abidjan » qui se solde par l’arrestation de plusieurs personnes. Pourtant, l’ex-militaire affirme en avoir fini avec les putschs et vouloir entrer en politique, envisageant même de participer à la présidentielle alors prévue en 2008. Mais cette nouvelle carrière semble brisée par le mandat d’arrêt international délivré en janvier 2008 dans son pays. Déclaré persona non grata au Bénin, il rejoint, selon ses dires, le Ghana. Il aura fallu la crise née de l’élection de novembre 2010 pour qu’il réapparaisse. Début 2011, il revendique la paternité du « commando invisible » d’Abobo, qui dans ce quartier nord d’Abidjan met en déroute les forces pro-Gbagbo, infligeant le premier coup sévère au régime. Après l’arrestation de Laurent Gbagbo le 11 avril, il ne tarde pas à réclamer son dû: « donne à César ce qui est à César », disait-il le 19 avril à l’adresse des nouvelles autorités, lors d’un entretien à l’AFP. Sommé de désarmer par Alassane Ouattara qu’il tenait pourtant pour un « père », il a cessé mercredi soir, dans la cour d’habitations où ses anciens compagnons l’ont encerclé puis tué, d’être l’éternel croquemitaine de la politique ivoirienne.
