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La France pays des droits de l’homme. Tous les hommes? Le cas de Michel Thierry Atangana

Par Bernard Benaïem, Avocat au barreau de Paris La libération du dernier otage français donne à chacun l'occasion de se…

Par Bernard Benaïem, Avocat au barreau de Paris

La libération du dernier otage français donne à chacun l’occasion de se réjouir.

Elle laisse cependant un goût d’amertume à ceux qui comme moi s’interrogent sur les raisons qui ont conduit notre pays à se désintéresser du sort du français, Michel Atangana, détenu arbitrairement pendant 17 ans dans une geôle camerounaise.

Pourquoi notre pays, si prompt à s’émouvoir partout dans le monde des violations des Droits de l’Homme, a-t-il détourné son regard quand l’un de ses enfants privé de liberté espérait son intervention ?

Pourquoi a-t-il fallu attendre une pression internationale et une décision de l’ONU pour qu’enfin Michel Atangana puisse recouvrer sa liberté ?

Pourquoi cette libération n’a-t-elle suscité en France que très peu d’intérêt alors qu’à l’ONU et qu’aux Etats-Unis, Michel Atangana devenait le symbole du combat contre l’arbitraire et un exemple pour tous ceux qui comme lui, s’accrochent du fond de leur cachot à la vie et à la liberté.

Les réponses à ces questions inquiètent sur la capacité de la France à protéger ses nationaux partout dans le monde et à s’opposer efficacement à des geôliers qui ne seraient pas des terroristes sanguinaires mais des états souverains, censés respecter les règles internationales.

Le manque d’engagement de la France pour la libération de Michel Atangana ne peut pour autant s’expliquer qu’au travers du prisme des relations que la France entretient avec le Cameroun et l’Afrique.

Force est de constater que certains de nos otages suscitent plus d’intérêt et de compassion que d’autres.
Alors que pour certains, leur libération s’accompagne d’une couverture médiatique et politique à la hauteur de l’événement et d’un rapatriement par avion sanitaire, Michel Atangana, après 17 ans de détention arbitraire dans des conditions particulièrement innommables, a été contraint de rejoindre Paris par un vol régulier, après avoir lui-même acheté son billet retour.

Un exemple parmi d’autres, des humiliations auquel cet homme a été soumis depuis son arrivée en France, lui qui en 17 ans ayant tout perdu, devait apprendre à recommencer à vivre dans un monde qu’il ne connaissait plus, ayant au passage perdu sa famille, ses ressources et son relationnel.

Après un rapide passage au Val-de-Grâce, la seule aide concrète que la France lui attribua en sa qualité d’ancien otage, fut celle de lui fournir les services d’une assistance sociale pour obtenir un RMI, que par dignité il préféra refuser.

Ce comportement indigne des autorités s’accompagne d’une volonté manifeste de réduire Michel Atangana au silence et à l’oubli.

J’en veux pour preuve, le fait que le Parquet, le Doyen des Juges d’Instruction, puis la Cour d’Appel de Paris, lui refusèrent le droit élémentaire de voir instruite sa plainte pour séquestration, avant de se faire rappeler à l’ordre judiciaire, par la Chambre criminelle de la Cour de cassation.

De façon surprenante cette situation ne suscite aucune réaction de la part de notre Garde des Sceaux, Madame Taubira, pourtant si prompte à réagir à la violation des Droits de l’Homme institutionnels aux Etats-Unis…

Pourtant Michel Atangana présente lui aussi la caractéristique d’être noir et mériterait que l’on s’interroge sur une éventuelle corrélation entre ce statut et le traitement qui lui est réservé.

La France semble se contenter pour Michel Atangana d’une liberté retrouvée sans sa collaboration, quand l’ONU pour sa part, réclame que les responsables de cette détention arbitraire, soient poursuivis et jugés par les autorités camerounaises et que Michel Atangana soit indemnisé pour le préjudice financier, matériel et moral subi.

Il est pour le moins paradoxal que le Département d’Etat américain uvre depuis plusieurs mois au respect de cette décision de l’ONU, alors qu’en France, Michel Atangana attend encore un peu de reconnaissance et de dignité.

Michel Thierry Atangana
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