L’artiste Pascal Marthine Tayou expose Human Being jusqu’au 22 novembre
Pour sa 53e édition, la Biennale de Venise bat tous les records de participation avec 77 pays qui exposent, des artistes nationaux et des pavillons qui dérangent, avec des uvres souvent macabres. Comme « Le Rouge et le Noir »: point de littérature mais du sang et du pétrole, version Andreï Molodkin, qui expose au pavillon russe deux petites statues reproduisant La Victoire de Samothrace, célèbre sculpture grecque exposée au Louvre à Paris. « Grâce à des pompes, les statues se vident et se remplissent continuellement, l’une de pétrole et l’autre de sang, ce dernier donné par sept soldats russes qui ont combattu en Tchétchénie. Le sang est le prix à payer pour le pétrole, des gens se tuent pour l’or noir », explique l’artiste d’une quarantaine d’années, l’un des plus en vue de sa génération. Au pavillon hongrois, Peter Forgacs expose un mur d’une soixantaine de vidéos d’archives de prisonniers de guerre. Certaines ont été enregistrées dans des camps, d’autres lors d’interrogatoires, montrant des visages parfois émaciés, des regards vides, ou un crâne dont on prend les mesures. Pour compléter ce sombre tableau, un détour par la piscine, creusée devant le pavillon des pays nordiques – Danemark, Finlande, Norvège, Suède: le corps d’un suicidé flotte dans les eaux turquoises.
Intitulée Construire des mondes, la sélection opérée par le jury pour cette année a laissé certains perplexe : ni préférences nettes, ni directions établies, ni nouveautés. Les expositions présentées dans la longue enfilade de salles de l’Arsenal sont traditionnellement diverses, mais, d’ordinaire, une question, une tonalité, un mode d’expression se dégagent. Cette fois, le spectacle semble présenter une énumération sans fil conducteur et sans grande intensité.
Une uvre a cependant retenu l’attention de nombreux visiteurs, celle de Pascale Marthine Tayou, artiste d’origine camerounaise qui vit aujourd’hui à Gand, en Belgique. Human Being, gigantesque installation de capharnaüm. L’ uvre en question conjugue la vidéo, le son, l’installation, l’assemblage et la scénographie. S’il fallait réduire l’ uvre à un sujet, ce serait les hybridations de l’Afrique et de l’Occident, qu’elles affectent l’économie, la culture, les religions ou les arts – mais elle est trop vaste, trop polymorphe, trop surprenante pour être bornée à une formule. Cette uvre très provocatrice et parallèlement apprécié de nombreuses critiques occidentales du monde de l’art présente un tableau obscur des réalités socio-économiques en Afrique, en s’inspirant du vécu camerounais. Misère, pauvreté immigration continuelle, tout y passe. Cette uvre du camerounais qui bien évidemment ne peut pas être du gout des autorités locale a été exposé dans de nombreuses galeries du monde.
Qu’est ce qui justifie le succès de ces uvres venues d’Afrique? Nombreux sont ceux qui pense que c’est parce que leurs auteurs sont portés par une nécessité d’expression, personnelle ou collective, par une histoire souvent cruelle, par une colère toujours légitime. Ils savent pourquoi ils travaillent.

Pascale Marthine Tayou)/n