Modernisateur du RDPC, il doit aujourd’hui affronter les démons du RDMC avant les présidentielles de 2011
Mila Assouté, The chief
52 ans. Chef traditionnel héritier du trône de son père décédé alors qu’il n’est même pas encore né, Mila Assouté est installé et vit à Paris depuis Septembre 2005. 4 ans donc qu’il est parisien. Exilé politique et non alimentaire comme il le dit lui-même pour faire taire ses détracteurs. Il a choisi d’occuper l’espace publique à sa façon. Convaincant dans le propos, engagé dans ses missions et surtout confortable dans son discours, il compte sur la place politique camerounaise. La politique – Peut-on parler de métier – est son premier job. Et il voudrait que ce soit le dernier de sa vie. Car il se sent investi d’une mission qui va au-delà du bien être des populations de son village. Je pense avec une forte conviction que je suis porteur d’un avenir social brillant pour mon pays. La politique est un terrain violent où tous les coups sont permis. Et il le sait mieux que quiconque. L’actualité liée à la polémique au sein du parti qu’il représente fait rage. Dans son camp, sa légitimité est discutée par ses détracteurs et ses « pairs ». Mais Mila Assouté a commencé la vie politique à l’âge où de nombreux jeunes réfléchissent à leur orientation académique.
| |||
Mila Asouté |
Né le 30 mai 1957 à Nkongsamba, Mila Assouté est né chef. Son père, chasseur à ses heures perdues mourra à 28 ans avant la mort de ce dernier. Le jeune chef ne peut donc pas assurer le pouvoir et une régence est mise en place. Il fait son école maternelle et primaire à Ngwatta, dans la chefferie supérieure de Santchou dans la Menoua. Il va ensuite à Yaoundé faire ses études secondaires au collège Montesquieu à Mvog-Ada, Ces de Ngoa-Ekelle et enfin Lycée Leclerc. Il obtient son baccalauréat en 1978. La régence royale prend fin et Chief Mila Assouté, à 24 ans, est installé officiellement dans ses fonctions de chef supérieure des Mbo.
De la chefferie au palais des verres
Il est élu député de la Menoua (Ouest Cameroun) en 1983. Plus jeune député du palais, il n’en est pas le plus effacé et le plus calme. Son autoritarisme forge sa réputation et son esprit frondeur ne passe pas inaperçu. Bien au contraire, cela gêne quelques « grands frères » agacés par ce petit curieux au verbe parfois acerbe. Je n’hésitais pas à poser des questions claires aux ministres. Quand on me disait, on a construit une route, je demandais elle est où ? Forcément, ça fâche. La preuve, en 1988, il n’est pas investi à nouveau et perd le siège, tournant là, la première page de sa vie politique. Il décide alors – Comme un jeune de son âge – de s’accomplir.
Rêves de jeunesse
En 1989, contrôleur de gestion, il part du Cameroun pour Paris pour poursuivre ses études. Dess en commerce international en poche en 1991, il part aux Etats unis où il obtient un stage à l’organisation non gouvernementale United Black Fund affiliée à l’Usaid (L’Agence des Etats-Unis pour le Développement International). Il rentre au Cameroun en 1996 accrédité pour ouvrir une représentation de l’organisation au Cameroun avec pour zone de couverture toute l’Afrique centrale. Il obtient l’accord de siège et renoue avec la vie locale. Lors du congrès du rassemblement démocratique du peuple camerounais, il est invité spécial du président de la république du fait de son statut de représentant résident. Mais à ce congrès se jouera une nouvelle partition de sa vie politique puisqu’à sa grande surprise, il est nommé membre du comité central du RDPC (il y’a les membres élus et les membres désignés).
| |||
Mila Assouté |
Il saisit la balle au bond. Recommence à militer activement et veut aller plus loin, en proposant la modernisation du parti. 185 des 250 membres du comité central acceptent l’idée et s’alignent dans ce courant. D’aucuns l’accusent de trahison, de calomnie et de flagellation, mais il persiste et le livre blanc pour la modernisation du RDPC sort en 2003. Il propose des réformes dans le but de dépoussiérer sa formation politique et pour appuyer sa volonté de faire bouger les lignes, se déclare prêt à démissionner si un congrès n’est pas organisé avant les élections présidentielles de 2004. Ce qui ne sera pas fait. Dans la foulée, Mila Assouté se déclare candidat du RCNR (ralliement au changement pour la nouvelle république). Sa candidature est retirée par la garde présidentielle (la raison officielle est l’appartenance à deux partis politiques antagonistes) et il vit une année difficile au Cameroun où d’ailleurs il déjoue une tentative d’assassinat. Le spectre de 1988 s’abat à nouveau sur lui et comme en 1988, un nouveau départ s’impose.

RDMC, panier à crabes
En septembre 2005, il arrive en France, retour à la case départ et nouvelles ambitions en vue. En 2011, le Cameroun devra vivre une élection présidentielle. Il faut donc s’organiser, mais les choses ne sont pas si simples. Historique : Le ralliement au changement pour la nouvelle république, l’ancêtre du Rdmc fut créé le 12 octobre 1995 par Ferdinand Ngoubene, Jean Ewane et André Marie Essomba Messi. Jean Raoul Makondo, Paul Abouna, Machia Baniaken et Derek Dzeka Tangwa constituent l’équipe de campagne du candidat Mila Assouté en 2004. Le 27 janvier 2007, le pays organise les élections législatives et pour se faire un sang neuf, les membres du parti se réunissent en assemblée générale ordinaire à Yaoundé en l’absence de Mila Assouté, déjà en France. Ils décident alors de changer la dénomination du parti et le Rcnr devient le Rdmc. Ces élections législatives/municipales laisseront aux candidats du Rdmc un goût amer car un seul poste de conseiller à la commune rurale de Santchou dans le département de la Menoua aura été ravi. L’absence de Mila Assouté sur le territoire national n’arrange pas les choses. Pire, son activisme à Paris le fait passer pour la mascotte du parti. Il organise d’ailleurs en début octobre à l’espace mocassin à Paris une grande réunion. Qui fait le plein. Quelques jours plus tard, lors d’une conférence de presse à Yaoundé, Jean Raoul Makondo attribue un blâme à Mila Assouté et à Derek Dzeka Tangwa pour utilisation intentionnellement abusive et à des fins autres que celles entrant en droite ligne des intérêts du parti et sans autorisation expresse ou écrite des sceaux et emblèmes et identifiants du Rdmc. Jean Raoul Makondo mentionnera d’ailleurs cet élément dans la lettre qu’il a envoyé à Nicolas Sarkozy, président de la république française: Il est enfin incontestable que depuis son exil volontaire dans votre pays, le Sieur MILA ASSOUTE Pierre a multiplié les bavures et les égarements contraires à la discipline, à la moralité, et à la réglementation du parti. C’est le cas des usurpations de titre de Président auto proclamé du RDMC (.) Là encore il ne serait nullement difficile de comprendre que le concerné ait été frappé d’un avertissement et d’un blâme depuis le 19 octobre dernier publiés dans plusieurs quotidiens locaux. Le son de cloche n’est naturellement pas le même à Paris. Selon certaines sources, le parti a été infiltré par le pouvoir en place et de là est né les divisions. Aujourd’hui, il existe donc deux tendances Rdmc. La tendance conduite par Jean Raoul Makondo et celle conduite par Mila Assouté, très active dans l’hexagone. Il y a d’ailleurs 2 semaines, Cette dernière était à Strasbourg à l’invitation de Maître Armand Tenesso, conseiller, pour offrir une tribune à Mila Assouté afin qu’il présente son projet de modernisation du Cameroun. Projet édité chez l’Harmattan en septembre dernier sous le titre Projet politique alternatif pour gouverner et moderniser le Cameroun. De nombreuses batailles sont à gagner avant 2011. Et plus que personne, Mila Assouté en a conscience. C’est ça, faire de la politique un métier.
