Nigeria: Grève généralisée et conflits ethniques sévissent

Au risque de guerre civile entre musulmans et chrétiens, s'ajoutent des violences sociales qui se sont intensifiées ce lundi 09…

Au risque de guerre civile entre musulmans et chrétiens, s’ajoutent des violences sociales qui se sont intensifiées ce lundi 09 janvier

Une trentaine de chrétiens ont été tués dans le nord-est du Nigeria depuis le 05 janvier dans des attaques en partie revendiquées par le groupe islamiste Boko Haram. Suite à une série d’attentats antichrétiens meurtriers le jour de Noel, le président du Nigeria, Goodluck Jonathan, avait pourtant décrété le 31 décembre l’état d’urgence dans des Etats du centre et du nord-est concernés par ces violences de Boko Haram. Mais les attaques se sont poursuivies depuis et même multipliées après l’expiration mercredi soir d’un ultimatum de Boko Haram ordonnant aux chrétiens vivant dans le nord du Nigeria de quitter cette partie du pays majoritairement musulmane. Boko Haram, qui exige notamment l’imposition de la charia (loi islamique) dans tout le pays, a par ailleurs revendiqué la dernière série d’attaques visant des chrétiens. La plus violente a fait 17 morts vendredi 06 janvier à Mubi, dans l’Etat d’Adamawa (nord-est), où des hommes armés ont ouvert le feu sur un rassemblement de chrétiens en deuil, selon des témoins.

La coïncidence n’aurait pas pu tomber plus mal. Au moment où le Nigeria est confronté à cet activisme sanglant des islamistes dans le Nord, il devait aussi faire face, ce lundi 09 janvier, à une grève générale illimitée ajoutant encore à l’ambiance de chaos qui règne en ce début d’année dans ce géant de l’Afrique. La fronde sociale s’est nouée autour de la fin des subventions au carburant qui a entraîné une hausse de l’essence, de 0,30 euro le litre à près de 0,66. Le président Goodluck Jonathan a justifié sa décision en répétant, non sans raison, que le coût de cette aide était devenu insupportable pour le budget de l’État. Le soutien aux prix de l’essence est estimé à 8 milliards de dollars l’an dernier. Ce que le chef de l’État ne dit pas, c’est qu’en 2010 la mesure n’avait coûté que 4 milliards, un doublement sans autre justification que la corruption délirante d’une partie des élites et la gloutonnerie des importateurs. Car c’est là l’un des nombreux paradoxes du Nigeria: second producteur de brut du continent avec 2 millions de barils par jour, il doit importer la majorité de son carburant. La faute en revient à des raffineries, des entreprises publiques et obsolètes. Le gouvernement espère que la fin des subventions les rendra plus concurrentielles. La grogne populaire était attendue, tant la question du prix de l’essence est sensible au Nigeria. Pour la population, dont 70% vivent avec moins de 2 dollars par jour, la subvention était le seul petit coup de pouce donné par l’État. Pour eux, les augmentations à la pompe signifient non seulement une flambée des prix des transports, mais aussi, par ricochet, celle de tous les produits de base.

Manifestants du Nigeria Labour Congress contre la suppression des subventions aux carburants
Reuters)/n

Lundi, le chef de l’État a encore haussé le ton menaçant les complices de Boko Haram au sein de l’appareil d’État, de l’armée et de la police et faisant un parallèle entre le Nigeria d’aujourd’hui et celui du début des années 1960 avant la guerre civile du Biafra qui fit plus d’un million de morts. Le Pape et Barack Obama avaient vivement condamné ces crimes. De son côté, Nicolas Sarkozy a adressé une lettre à son homologue lui assurant de tout son soutien. À chaque fois, les attaques ont été revendiquées par la secte islamiste, devenue l’ennemi numéro un du Nigeria. Ces dernières années, le groupe, fondé en 2002, s’est divisé en au moins trois branches et s’est radicalisé. L’une des factions aurait, selon les services secrets algériens, noué des liens avec al-Qaida, au Maghreb islamique. Pour l’heure, l’escalade est surtout verbale. Les cibles Boko Haram se trouvent toutes dans le nord du pays, surtout dans son fief de Borno, et dans la capitale, Abuja, majoritairement musulmane. Le Sud, chrétien, et Lagos sont épargnés. S’ils devaient être touchés, les chrétiens qui dénoncent déjà, non sans raison, un nettoyage ethnique ont promis de répliquer.

Les zones religieuses du Nigéria
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