Dans son premier roman, Biaga Chienku Mangus tente de montrer que la polygamie n’a pas que des aspects négatifs
C’est l’histoire d’une enfance faite de turpitudes, comme on en connaît. Mais, celle de l’auteur, autobiographe, est un tout petit peu particulière car, il est né dans une famille polygamique. Une famille où le père, « faible », n’entreprend aucun effort pour réconcilier ses deux épouses qui ne s’adressent plus la parole depuis plus de 20 ans. L’atmosphère est donc lourde entre les deux épouses qui se livrent concurrence pour mériter la confiance de leur époux commun et des membres de la famille élargie qui arrivent dans la maison familiale. Les enfants des deux épouses quand à eux ne semblent pas concernés par cette rivalité. Ils fraternisent simplement. Mais, ils doivent parfois s’affronter lorsque ça chauffe entre les deux mamans. Chacun se rangeant derrière sa propre mère. Celle qui se bat au quotidien pour son éducation et son succès. C’est dans ce contexte que l’auteur – également narrateur – grandit. Pour lui, cette expérience difficile est loin de l’assommer. Au contraire, le contexte polygamique forge sa personnalité en lui inculquant le sens de la combativité. C’est pour cela, fait-il remarquer, « sans encourager la polygamie, je ne veux pas qu’on dise que, tout est noir dans un foyer polygamique ».
Le roman est aussi le moyen pour l’auteur de témoigner à son défunt père, une profonde reconnaissance. Je saisis cette opportunité pour lui dire (au père, ndlr), un million de fois merci et que son âme repose en paix écrit-il comme dernière phrase du livre. Une conclusion hautement affective qui démontre bien que le narrateur veut remercier le père d’avoir, malgré l’atmosphère difficile du foyer conjugal, malgré ses moyens limités (avec 14 enfants à encadrer), contribué dans la paix et l’harmonie à l’édification de sa personnalité. Personnage exigent et rigoureux (du moins en ce qui concerne ses enfants), le père ne cesse d’initier ses enfants à la lecture et à développer leur goût pour la culture générale. Quoi de plus normal que de citer les paroles saintes pour le remercier.
Le livre est enfin intéressant car, il permet de se replonger dans une partie de la récente histoire du Cameroun. On pourra y découvrir comment les anglophones se constituaient en communauté au point d’occuper pratiquement tout ou partie de certains quartiers de la ville de Yaoundé. On pourra aussi découvrir à quel point la vie était moins chère tant l’inflation n’avait pas encore frappé le Cameroun. Des réminiscences et bien d’autres qui donnent au roman une saveur particulière.
Pour écrire Wisdom of Polygamy, Biaga Chienku Magnus a choisi l’autobiographie. Un style qu’adoptent généralement les auteurs pour leurs premiers livres. Reste à voir s’il pourra maintenant se surpasser pour créer une histoire à partir de son imagination et lui donner une cohérence narrative similaire.