Le concept «Cinémboa» du CCF de Douala projette ce samedi 08 janvier le long-métrage de ce jeune réalisateur camerounais. Entretien.
Serge Yomzak parlez-nous un peu de votre film, «Fany, la fin d’une malédiction» qui sera projeté ce samedi à Douala
C’est un film qui porte sur les questions liées au mariage. A travers ce film je voudrais montrer que le mariage est quelque chose de sacré, lorsqu’on y entre on n’en sort pas, quelque soit la faute de l’un ou l’autre conjoint. Le pardon est obligatoire. Fanny c’est une femme qui fait six ans de mariage sans enfant, elle-même née d’une relation adultérine. Sa maman pense donc que c’est comme une hérédité et que la fille devrait commettre l’adultère pour procréer avec son mari. Elle décide de ne pas subir le même sort que sa mère. Pour elle, si elle prend une grossesse de quelqu’un d’autre, elle devra aller avec ce dernier. Ce qui va effectivement arriver, elle sort avec l’un de ses anciens copains, tombe enceinte de lui et décide de fuguer à l’insu de son mari. Elle organise son voyage qui ne va pas aboutir, le mari va y mettre un terme et lui pardonner son adultère. Les deux vont continuer de vivre ensemble et finalement Fanny va enfanter de son mari, le couple continuera harmonieusement sa vie.
Ce samedi 08 janvier au CCF de Douala, ce sera l’avant-première, qu’est-ce que cela représente pour vous?
Oui ce sera l’avant-première, le film est fini en mars et depuis que je suis rentré au pays c’est le CCF qui m’a ouvert les portes et ça représente beaucoup pour moi. J’ai eu un choc quand je suis arrivé ici, je ne savais pas qu’il n’existait pas de salle. Donc à mon arrivée je me suis presque précipité à Douala Bercy, ils m’ont balancé une somme faramineuse ce qui m’a un peu découragé parce que j’avais déjà beaucoup investi dans le film. Je rentre avec un équipement pour installer un studio de production donc forcément je ne suis plus à même d’affronter ce genre de coup. Je me présente alors au CCF pour savoir comment je peux avoir une projection, ils me disent qu’ils ont justement un concept qui s’appelle Cinémboa, concept que je trouve très bien par ailleurs. Je dépose mon film et on m’appelle plus tard pour me dire qu’il est retenu, je crois que c’est une bonne chose. Ça fait un ouf de soulagement. Vous savez qu’actuellement chez nous le cinéma ce n’est pas l’art qui nourrit son homme. En réalité c’est que les camerounais se méprennent un peu par rapport à ce métier. Quand j’arrive en famille, je suis cinéaste, ça fait bouder un peu, parce qu’on ne sait pas comment tu vas nourrir ta femme, tes enfants! Là j’annonce que mon film passe au CCF, j’ai des invitations, ça devient un peu sérieux. Vous voyez un peu!
Vous le dites vous-même, ce métier ne nourrit pas son homme mais qu’est qui vous y motive?
Ma motivation est que c’est une passion ce qui est terrible avec mon parcours cinématographique c’est que je n’ai pas été un cinéphile, je n’aime pas trop regarder les films mais je profite de ce que je suis à Cotonou, un salarié dans une structure et un investisseur vient installer l’Institut Supérieur de l’Audiovisuel et forme pour le cinéma. C’est cela qui constitue l’appel. Les coûts de l’inscription sont très élevés, je m’y engage avec le concours de ma grande s ur qui vit à Cotonou et c’est là que je découvre en réalité la passion pour le cinéma et cette passion se manifeste parce que mon premier court-métrage Bissima fait parler de lui à l’école, le promoteur de l’institut l’emmène en Europe pour le présenter aux partenaires, etc. C’est comme cela que je découvre ce talent pour le cinéma. Rentré chez moi, je me dis que nous avons tellement d’histoires, chacun de nous quand nous regardons dans nos familles, il y a tellement d’événements qui nous arrivent à nous-mêmes, à nos frères et s urs et que nous pouvons transformer en de très bons scénarios. Ma passion est aussi encouragée par mon frère qui est un bon romancier parce que pour moi le cinéma africain souffre de scénario. Nous avons de très belles histoires, nous avons une très grande culture, mais nous avons très peu de scénaristes capables de nous faire des bons textes. Je me dis à partir de ce moment qu’en adaptant les uvres de mon frère, je pourrai faire parler du Cameroun à travers le cinéma.
Il n’y a peu être pas de très bons scénaristes mais on sait qu’au Cameroun il y a de talentueux acteurs, est-ce qu’il y en a dans votre film?
Oui j’ai tourné le film à Cotonou avec des acteurs camerounais et béninois, c’est vrai que ce sont des camerounais résidents et certains comme moi envisagent de rentrer au pays. Mais je dois dire par rapport aux acteurs camerounais, il n’y a pas de formation, la CRTV essaie mais. Actuellement pour tous les films camerounais que j’ai vu, les camerounais jouent très bien, il n’y a pas à redire pour le jeu d’acteur, cependant ce qui manque ce sont les textes. C’est-à-dire que souvent on regarde le texte et on sent que le sujet n’a pas été bien traité. Aussi, les camerounais en général confondent un peu l’humour au cinéma. Pour moi Fany, la fin d’une malédiction c’est un film pour le cinéma, pour le grand écran, ce n’est pas le genre de film à s’asseoir et regarder à la volée et je suis sûr que vous n’en tirerez rien. C’est un film pour lequel il faut de la concentration, c’est pourquoi il doit être projeté en salle. Lorsque vous envoyez des films comme cela dans les familles en DVD parce qu’on a besoin d’argent, ce n’est pas sûr que le message passera parce que la masse populaire aime les voitures qui se cognent, les coups de fusils, etc, alors que généralement dans des films comme les films d’auteurs, il faut s’asseoir et essayer de chercher la philosophie que le réalisateur veut transmettre.
Quelle est la feuille de route que vous avez tracée pour votre film?
En dehors du CCF, moi je prospecte encore les télévisions parce que je ne me presse pas d’aller dans la rue pour vendre les DVD. Après ce tour des télévisions et si possible avec un sponsoring, je pourrai aller en salle. C’est après ce circuit que je pourrai éventuellement faire des DVD.
