Ela, une école porteuse d’espoir pour les enfants autistes

Le centre Ela tient à rappeler que trois mille enfants souffrant de troublent du comportement naissent chaque année au Cameroun, sans moyens réels pour les aider

Le centre Ela, situé à Yaoundé la capitale du Cameroun, accueille actuellement 60 enfants dont l’âge varie entre trois et seize ans. Pourtant, la demande est plus élevée. «Chaque année, je rencontre près de 400 enfants autistes. Ils viennent de Douala (capitale économique), Bafoussam (ouest), Bamenda (Nord-ouest) et d’autres villes du Cameroun. Certains parents viennent même du Gabon avec leurs enfants», explique Lilly Wonkam, la directrice du centre Ela, rencontrée à Yaoundé.

L’autisme est une maladie qui se manifeste par un trouble du comportement. Elle touche plus de garçons que de filles et c’est généralement vers l’âge de deux ou trois ans que les parents commencent à constater que leur enfant est diffèrent des autres. «A cet âge, les enfants peuvent déjà dire de petites phrases, appeler leur parents, prendre un objet ou venir lorsqu’on les appelle. Très souvent, les parents constatent que le langage ne se développe pas bien chez leur enfant. L’enfant ne s’exprime pas et n’exécute pas les consignes simples», explique l’orthophoniste Lilly Wonkam, précisant qu’il s’agit là juste des signes les plus fréquents mais non exhaustifs.

L’enfant peut également être violent vis-à-vis de son entourage et de lui-même. Il arrive alors qu’il s’automutile. Il a des gestes répétitifs. En l’absence de diagnostic clair, les parents camerounais ont souvent tendance à assimiler ce trouble de comportement à la sorcellerie. D’autres enfants sont enfermés chez eux. «Les parents ont honte et préfèrent cacher leur enfant. Parfois l’enfant grandi sans qu’on ne puisse établir un diagnostic ni l’accompagner», explique Gaëlle Ondoua, une éducatrice spécialisée.

«J’ai été chassée de mon foyer. Ma belle-famille a estimé que mon fils autiste est sorcier et que c’est moi qui lui ai transmis cette sorcellerie», témoigne par exemple Yvette N., mère d’un enfant autiste. «J’ai erré chez les médecins spécialistes et aucun n’a pu me dire avec exactitude de quoi souffrait l’enfant. J’ai été chez les marabouts. J’ai rencontré les prêtres exorcistes, nous avons fait des dizaines de séances de désenvoutement sans succès. Je suis allée au Nigeria et même au Benin pour rencontrer des prêtres vaudou», ajoute la mère. Depuis que son fils de 10 ans est pris en charge dans un centre spécialisée, la dame dit constater des changements: «Il est plus calme. Il dit quelques mots. Il sait par exemple dire bonjour, merci, je veux manger. Moi également j’ai appris à m’occuper de lui et surtout à comprendre ses réactions».

Les parents arrivent généralement au centre Ela dans un état de désarroi, après avoir eu un long cheminement chez plusieurs médecins et même dans différentes écoles classiques. «Leur première réaction est généralement un soulagement de pouvoir enfin mettre un nom sur le trouble de l’enfant, de savoir de quoi il souffre», reconnait Wonkam. Face à ce désarroi, le centre Ela organise régulièrement des séminaires pour les parents afin de les conduire au processus de compréhension et d’acceptation de la maladie de leur enfant.

D’après le ministère de la Santé publique, près de 3000 enfants naissent autistes chaque année au Cameroun. La maladie est mal connue. Il n’y a pas de statistiques sur le nombre de personnes vivant avec. Le diagnostic est difficile à poser car les spécialistes manquent. Les laboratoires camerounais ne font pas d’examens génétiques.

Le centre Ela qui existe depuis 2008 emploie 18 éducatrices ayant une formation de base d’institutrices et s’étant spécialisées sur le tas. Certains parents envoient leurs enfants dans l’école classique jusqu’à ce qu’à un moment, l’enfant ne puisse plus y aller soit parce qu’il a été exclu de l’école soit parce qu’il n’arrive plus à avancer», explique Wonkam, orthophoniste formée en Belgique et ayant encadré des enfants autistes dans le même pays et en Suisse avant de revenir s’installer au Cameroun.

La prise en charge de ces enfants est lourde. Les classes doivent avoir huit enfants au maximum. Lorsque les troubles sont très importants, les classes ne comprennent que cinq enfants au maximum avec deux éducatrices par classe. Il faut également un matériel éducatif qu’on ne trouve pas au Cameroun. Il n’y a pas d’écoles pour former les éducateurs spécialisés. D’ailleurs, il n’y a même pas d’écoles publiques spécialisées pour ce type d’enfants. Deux écoles privées exisistent la première est le centre Ela, à Yaoundé la capitale politique, et l’autre école est à Douala, la capitale économique du Cameroun. Pour toutes ces raisons, les enfants autistes ne sont généralement pas scolarisés. Le centre Ela se présente alors comme l’école de la dernière chance pour les enfants autistes de Yaoundé et de ses environs.

Le centre Ela à YAoundé accueille actuellement 60 enfants dont l’âge varie entre trois et seize ans
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