Les licences récemment accordées à Orange et MTN Cameroon témoignent d’une évolution technologique notable, juge l’Union internationale des télécommunications
La mutation du Cameroun vers la téléphonie mobile de 3G+, proche de la 4G, elle-même annoncée dans un délai d’un an suite au renouvellement par les autorités de Yaoundé des licences 2G exploitées par les compagnies Orange-Cameroun et Mtn-Cameroon, témoigne d’une évolution technologique notable, juge l’Union internationale des télécommunications (UIT).
D’une valeur de 75 milliards de francs CFA (150 millions de dollars) chacune, les nouvelles licences des filiales locales respectives des opérateurs français Orange et sud-africaine Mtn offrent une progression vers l’adaptation aux progrès de la téléphone mobile, déjà appréciée dans le pays depuis l’entrée en service il y a six mois de Nexttel, filiale du vietnamien Viettel et détentrice de la première licence 3G.
De l’avis de Jean-Jacques Massima Landji, représentant-résident à Yaoundé de l’UIT pour l’Afrique centrale et Madagascar, « c’est d’abord une remise à niveau par rapport à l’évolution technologique. Comme vous le savez, les premiers réseaux de technologie 2G avaient très peu de priorité dans les données et vous vous rendez bien compte maintenant de l’ensemble des données qui circulent sur le réseau, que ce soit Internet ou les réseaux de téléphonie mobile ».
« Donc », a précisé dans un entretien à Xinhua ce responsable onusien, « on parle maintenant de la nécessité du haut débit dans la téléphonie mobile qui doit vous permettre de transférer des fichiers de plus en plus importants, des images, des photos et même des films, et de recevoir même des informations télévisées sur votre portable, vu la disponibilité de ces terminaux de nouvelle génération ».
A la différence de leur concurrent Nexttel et en attendant la mise en service d’une quatrième licence 3G attribuée à l’opérateur étatique Cameroon Telecommunications (CAMTEL), de retour dans le mobile après avoir vendu sa licence Gsm à Orange-Cameroun en 1999, Orange-Cameroun et Mtn-Cameroon sont autorisés à exploiter les réseaux de 3G+ avec une perspective de 4G.
« 3G+, c’est tout ce qui est plus avant la 4G. C’est pour cela qu’on parle de 3,5G. Ça veut dire que les équipements logiciels sont devenus un peu plus performants, de manière à ce que quand vous envoyez un SMS, il arrive instantanément. Avant, la règle était qu’un SMS arrivait trois heures après », explique Massima Landji.
L’expert en télécommunications de nationalité gabonaise a ajouté que « ce n’était pas une exigence de qualité du service dans les réseaux 2G, puisque les données étaient d’abord stockées et n’étaient envoyées que quand il y a de l’espace libre sur les réseaux. Aujourd’hui avec le haut débit, ces données sont transmises instantanément, exactement comme la voix ».
En dehors d’une baisse des tarifs de communication déjà annoncée par les deux compagnies après le renouvellement de leurs licences (valables pour 15 ans) la semaine dernière, l’enjeu de la mutation technologique favorisée après d’âpres négociations avec les autorités camerounaises réside prioritairement donc dans l’amélioration du réseau.
Avant l’attribution des deux nouvelles licences, le Cameroun se caractérisait par une qualité de réseau médiocre, de 60% alors que la norme internationale exige au moins 80%. Plus soucieux de la rentabilité de leurs investissements que du respect du cahier des charges, les opérateurs ont depuis longtemps accordé peu d’ importance au renforcement des équipements, constate le représentant-résident de l’UIT.
« Nous avons un travail de modernisation de notre réseau d’accès à faire. Nous devons également améliorer les infrastructures de données », admet le directeur général d’Orange-Cameroun, Elizabeth Medou Badang, indiquant que ce chantier implique « un effort d’ investissement significatif ».
Contrairement à Mtn-Cameroon qui, pour répondre aux besoins ses 11 millions d’abonnés, annonce un investissement de plus de 500 milliards de francs CFA (1 milliard USD) jusqu’en 2017, l’ entreprise à capitaux français (plus de 7 millions d’abonnés) se refuse à dévoiler ses prévisions de dépenses pour son nouveau plan d’action.
« Nous sommes en train de développer un réseau de backbone en fibre optique, en capitalisant sur la fibre optique de CAMTEL », fait cependant savoir en outre Medou Badang pour qui la faible contribution des télécommunications de l’information et de la communication au PIB camerounais (moins de 2%) ne reflète pas le potentiel du secteur, pour lequel des projections allant jusqu’à 5% sont plutôt faites.
Un projet mené avec l’aide de la coopération chinoise, la pose pat le gouvernement de 6.000 km de fibre optique sur le territoire national avec une extension jusqu’à N’Djamena au Tchad s’impose comme un atout pour la vulgarisation d’Internet et d’Internet mobile, selon le ministre des Postes et Télécommunications, Jean- Pierre Biyiti bi Essam.
Un bémol, la Banque mondiale doute quant à elle qu’avec quatre licences 3G le marché camerounais de quelque 22 millions d’ habitants de la téléphonie mobile soit suffisant pour que les quatre opérateurs en compétition « soient en mesure de rentabiliser les nécessaires investissements liés à la migration tout en ayant des offres de type 3G data performantes (11, 21, 42 Mbps) et une couverture nationale ».
« Il est fort probable que, poursuit ce document dont Xinhua a obtenue copie, les opérateurs concentreront leurs investissements sur les mêmes zones à forte valeur et délaisseront le reste du territoire,renforçant ainsi la fracture numérique intra-Cameroun », note un rapport oublié en novembre et où il est aussi observé que ces licences auraient même dû être attribuées entre 2007 et 2010.
Dans la région, le Tchad a pris une longueur d’avance, avec l’exploitation par deux opérateurs de licences 4G. « Les autres réseaux sont encore en 3G. Je crois que d’ici un an ou deux ans la plupart des pays d’Afrique subsaharienne seront tous en 4G », prédit toutefois Jean-Jacques Massima Landji.

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