Une équipe des Nations Unies a confirmé le 21 août dernier, le viol d’au moins 154 femmes par des rebelles
Entre 180 et 200 victimes
179 personnes selon l’organisation des Nations Unies, 200 selon l’International Medical Corps, c’est le nombre de jeunes filles et garçons violés à Luvungi, une localité située dans le Nord Kivu, une région en proie aux conflits en République Démocratique du Congo (RDC). Le fait qui est attribué à des rebelles rwandais et congolais date de fin juillet 2010. Selon les habitants, les assaillants étaient membres des FDLR (Forces démocratiques de libération du Rwanda), qui comptent dans leurs rangs nombre d’anciens auteurs du génocide de 1994, accompagnés de rebelles Maï-Maï, milice tribale congolaise. De nombreuses femmes ont déclaré avoir été violées chez elles, sous les yeux de leurs enfants et maris. Nombre d’entre elles ont raconté avoir été violées à plusieurs reprises par trois à six combattants. Selon des sources provenant des organisations non gouvernementales, 179 femmes avaient été soignées, mais le nombre de victimes pourrait être supérieur autant que le nombre de civils terrifiés se cachant toujours dans la forêt. Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-Moon s’est dit « scandalisé » par ces nouveaux cas de viols collectifs. Il a décidé d’y envoyer un de ses collaborateurs pour examiner la situation d’après une information rapportée ce mardi par son porte-parole. « Le secrétaire général est scandalisé » par ces viols, « commis lors d’une attaque perpétrée par des éléments des milices Maï-Maï et des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) », a déclaré le porte-parole de Ban Ki Moon, Martin Nesirky.
Une pratique devenue courante
Le viol massif et systématique est utilisé comme une arme de guerre dans l’est de la RDC (République démocratique du Congo). L’ONU a fait état d’au moins 8.300 viols en 2009, mais estime que leur chiffre réel est largement supérieur. Des sources médiatiques affirment que les assaillants ont bloqué l’accès aux voies de communication. Il est extrêmement facile de trouver des exemples montrant à quel point le système judiciaire congolais échoue à poursuivre les auteurs de viols – dans un pays où, selon le Fonds des Nations Unies pour la population, 17 500 cas de violences sexuelles ont été rapportés en 2009, ce qui ne représente qu’une infime partie du nombre total de cas, la plupart des viols n’étant pas signalés. Les élections mémorables de 2006 étaient pourtant censées aider la RDC, ce pays de 66 millions d’habitants à en finir avec ses nombreux conflits et rébellions. Mais le scrutin, dont l’organisation a coûté 500 millions de dollars, n’a permis ni l’unification de la RDC, ni le renforcement de sa position dans ses négociations avec les groupes de rebelles, dont la plupart des dirigeants se trouvent à l’étranger. Le système judiciaire et l’armée fonctionnent toujours très mal, et selon les Nations unies, les soldats congolais figurent parmi les pires agresseurs en matière de viol. De larges pans du pays, en particulier dans l’Est, restent des zones de non-droit. Les civils y sont à la merci de groupes armés qui tirent leurs revenus des attaques de villages et des enlèvements de femmes contre des rançons.
Aucune solution fiable en application
Le début de cette pratique de viols en masse semble remonter au milieu des années 1990, à l’époque où des légions de Hutus se sont réfugiées dans les forêts congolaises après avoir exterminé 800 000 Tutsis et Hutus modérés au Rwanda. Parlant une fois des miliciens hutus, John Holmes, sous-secrétaire général des nations unies en charge des questions humanitaires, disait que ce sont des gens psychologiquement détruits. Pour protéger les femmes, les casques bleus déployés dans l’est de la RDC redoublent d’efforts. Ils effectuent même des interventions nocturnes : trois camions chargés de soldats s’enfoncent dans la brousse et laissent leurs phares allumés toute la nuit afin de signaler leur présence aux civils et aux groupes armés. Au petit matin, il leur arrive de trouver jusqu’à 3 000 villageois amassés autour d’eux. Mais les ressources ne sont pas à la hauteur des besoins. Ainsi, les hôpitaux ont une capacité d’accueil limitée. Et bien que de nouvelles structures destinées aux victimes de viols soient en cours de construction, les femmes sont souvent renvoyées chez elles avant d’être totalement rétablies, à cause du flot ininterrompu de nouvelles victimes. Selon les agences d’informations de l’ONU, une solution trouvée à ce problème est le projet de tribunaux mobiles de l’Association du barreau américain (ABA). Il vise à permettre aux femmes des régions reculées d’obtenir justice – en mettant sur pied des tribunaux temporaires au sein des communautés pour juger les affaires de violences sexuelles. Le directeur de l’ABA en RDC a expliqué que l’association rémunérait à la fois les avocats des agresseurs et ceux des victimes. Mais le viol semble être enraciné dans les pratiques locales. Il y a un mois, un pasteur d’une église dite réveillée a violé une fille de treize ans dans la commune de Kezenso à Kinshasa. Des cas isolés semblables sont aujourd’hui légion en RDC et de vrais malfaiteurs profitent de la guerre pour se livrer à leur basse besogne.
