32,2% soit 23 PCA sur les 71 illégaux ont rang de ministre avec une longévité au poste qui varie de 6 à 33 ans.
Dans une étude rendue publique le 12 juin dernier, Viviane Ondoua Biwolé fait un constat alarmant sur la gestion des entreprises publiques au Cameroun. Selon la professeure, 71 Présidents de Conseils d’Administration (PCA) sur les 112 des entités publiques que compte le Cameroun agissent dans l’illégalité. Soit un taux de non-conformité de 63,39%. Plus précisément, 50 PCA sur 75 des établissements publics sont illégaux soit 66,66% et 21 sur 37 entreprises publiques soit 56,75%. En faisant une répartition selon le genre, elle révèle que seulement 14 femmes sur les 71, soit 19,71% font partie de cet effectif. Tous ont une longévité allant de 6 ans à 33 ans.
Record de longévité
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Dans son étude, le Pr Viviane Ondoua Biwolé dresse la liste des entreprises concernées et les noms des PCA dont les mandats sont échus. Parmi les plus anciens, l’on a : Luc Ayang PCA de l’office national du cacao et café (ONCC) depuis 33 ans ; Fai Yengo Francis, PCA de l’agence d’électrification rurale depuis 25 ans ; Albert Ekono Nna, PCA de la mission d’étude pour l’aménagement de l’océan (MEAO) depuis 25 ans ; Gana Fomban Rose epse Leke est PCA de l’institut de recherche médicales et d’études des plantes médicinales (IMPM) depuis 23 ans ; Jules Doret Ndongo est PCA du crédit foncier du Cameroun (CFC) depuis 20 ans ; Monkam Nitcheu Jean Fabien, PCA du bureau central des recensements et des études de population (BUCREP) depuis 20 ans ; Emmanuel Nganou Djoumessi est PCA de l’Institut nationale de la statistique (INS) depuis 19 ans; Catherine Ndoumbe Manga est PCA de l’office du baccalauréat du Cameroun (OBC) depuis 18 ans ; Madeleine Tchuinte est PCA de l’autorité de sûreté radiologique et de sécurité nucléaire (ASRAN) depuis 18 ans. Un constat qui « traduit une tendance à la banalisation de la conformité. Les lois n’étant ici que des gadgets », regrette le Pr Viviane Ondoua Biwolé.
Impact sur la performance des entreprises
Pourtant comme le souligne le Pr. Viviane Ondoua Biwolé, cet état de fait, entrave considérablement la prise de décision et freine la performance des entités publiques. Parmi les conséquences, l’on a notamment : la nullité des actes posés par les concernés ; l’insécurité juridique pour les entreprises publiques et les établissements qui transigent avec les partenaires privés et internationaux ; les entreprises publiques concernées ne peuvent pas être introduites en bourses ; la fragilité de l’État de droit et de la République exemplaire. D’autant plus encore que l’étude révèle que l’ensemble des PCA concernés sont de hauts fonctionnaires de l’administration publique. 23 PCA ont rang de ministres, soit une proportion significative de 32,39%. Situation qui « les oblige à une devoir particulier d’exemplarité tant au regard de leur statut que de leur rôle dans la conduite des affaires publiques », soutient l’universitaire.
Dans le souci de renforcer la bonne gouvernance et d’accroître la performance des entreprises publiques, mais surtout le respect du principe de rotation systématique des dirigeants tel qu’institué par les lois n°10 et n°11 du 12 juillet 2017, le Pr. Viviane Ondoua Biwolé suggère au président de république, Paul Biya, de procéder d’ici le 12 juillet 2025 au remplacement de tous les PCA dont les mandats sont arrivés à expiration. « Une telle mesure ne relèverait nullement d’un règlement de comptes, mais d’une application rigoureuse et équitable de la loi dans le respect des principes de l’égalité et de bonne gouvernance », confie-t-elle. Pour cela il y’a toutefois une nécessité de séquencer les remplacements. « On pourrait d’abord remplacer tous les PCA des entreprises défaillantes et les établissements publics très endettés au sens des analyses réalisées dans le document du MINFI (Annexe de la loi de finances 2024 et disponible dans le site du MINFI). Suivront tous les PCA de plus de 9 ans de mandat », propose l’universitaire.