Le Tchad a rappelé son ambassadeur au Cameroun. Niveau de crise diplomatique jamais atteint entre ces deux » pays frères ».
Dans un communiqué de la présidence de la république tchadienne aux termes rageurs, il est question de » La prétendue acquisition des actifs de l’ex-Esso par la nébuleuse Savannah Energy ». Dans ce même communiqué lu solennellement au journal télévisé du soir à la télévision officielle tchadienne, on peut lire, avant la conclusion -qui est aussi la sanction-: » Aussi, le Tchad, se trouve une fois de plus, dans l’obligation de défendre ses intérêts et sa respectabilité « ... Lorsque dans un face à face, une partie évoque sa » respectabilité », elle accuse implicitement l’autre de non-respectabilité. En mots simples, de voyous.
Au-delà des explications complexes du monde pétrolier et des contours diplomatiques, l’affaire, en termes compréhensibles, peut être ainsi résumée: le Pipe Line Tchad Cameroun est la propriété de trois entités : Exxon Mobile, l’Etat du Tchad, et l’Etat du Cameroun. Exxon Mobile décide de quitter l’affaire. Comme il est de coutume dans les associations de business, les acteurs pour l’acquisition de ces parts ce sont en priorité les associés.
Seulement, une entreprise dénommée Savannah Energy se présente, afin d’acquérir les parts désormais libérées. Sourcilleux, le gouvernement tchadien est réticent, car cette entreprise ne représente rien dans l’échiquier mondial des entreprises pétrolières. Les Tchadiens auraient voulu avoir à faire avec une autre » Major » du pétrole mondial. Sinon, pour leurs intérêts ils auraient repris pour eux-mêmes, ces parts de ce qui est après tout » leur » pétrole…
Sur ces entrefaites, arrive à N’Djamena, par jet privé, courant septembre 2022, M. Frank Emmanuel Biya qui est reçu par le général Mahamat Itno Deby, président de la transition du Tchad. Le motif de la visite de M. Frank Biya est sans ambages: il plaide auprès du président tchadien, la cause de Savannah Energy. En toute politesse, entre » fils de », les deux hommes se serrent la main et se séparent.
Mais l’un a à cœur les intérêts de son pays et l’autre fait le VRP pour des intérêts privés. Après cette visite, le Tchad freine des quatre fers sur le dossier. Du 21 au 30 novembre 2022, une délégation conduite par M. Elung Paul Che, secrétaire général adjoint à la présidence de la République du Cameroun séjourne à N’Djamena et mène des discussions avec les autorités compétentes du Tchad. Cette délégation appuie une fois de plus la transaction par l’entreprise Savannah Energy, que les Tchadiens jugent inapte pour l’opération.
Le dernier rebondissement, celui qui a provoqué l’ire des tchadiens, est lisible dans leur communiqué : le Cameroun, à l’insu de son partenaire tchadien, a subrepticement signé avec » La nébuleuse Savannah Energy ». (20 mars 2023). Cette crise diplomatique, qui pourrait déboucher sur le pire – Le Tchad joue sa survie et son honneur- ne concerne point les intérêts du Cameroun et des Camerounais. Elle résulte de l’utilisation du sceau de l’Etat du Cameroun, au service d’intérêts privés…
Nous nous gardons de qualifier ce qui se passe. Les Camerounais, suite à cette affaire – gravissime- devraient comprendre à quel niveau se trouve leur pays, dont on ne sait plus qui est le véritable chef.