Joelle Maffo, d’esthéticienne à menuisière, la dame de 38 ans vit sa passion pour le bois sans complexe.
Vous évoluez dans un métier qui selon l’opinion est considéré comme un métier d’homme. Pourquoi avoir choisi d’être menuisier?
La menuiserie n’est pas un métier que j’ai appris. Je suis autodidacte. Je suis une personne curieuse, je peux dépanner une moto, je peux poser les carreaux, installer la lumière, j’ai même déjà coulé la dalle une fois. C’est donc mon sens de curiosité qui m’a conduit dans ce métier. Je suis pour formation coiffeuse-esthéticienne, à un moment un le business ne donnait pas j’ai voulu essayer ailleurs. Et puis un jour j’ai acheté un écran plat et j’avais envie des meubles que je vois dans les catalogues, je suis allé vers un menuisier qui ne m’a pas satisfait, j’ai acheté mon bois et j’ai fabriqué mon meuble, j’ai mis chez moi et les gens ont été intéressé. C’est de-là que tout est parti. Je me suis perfectionné en travaillant.
Quel est le regard que votre entourage porte sur vous?
Les autres ont beaucoup de respect pour moi. Je suis respecté par les personnes que je n’aurai jamais crues accosté dans la vie. Par contre plusieurs filles ont du mal à concevoir que je sois dans ce genre de métier. Vous savez les filles aujourd’hui ce sont les ongles, les greffes et moi avec mon métier c’est un encombrement que je ne peux pas me permettre. Néanmoins, elles ont du respect à mon égard. Je n’ai peut-être pas choisi la menuiserie au préalable, mais j’ai choisi de rester dans ce métier.
En tant que femme, comment organisez-vous vos journées? Est-ce que votre travail ne vous empêche pas de bien prendre soin de votre famille?
Je n’ai pas de vie. Je sors le matin, je m’en vais travailler, je rentre le soir, je suis épuisée. Heureusement je ne bois pas d’alcool. Quand je reviens chez moi le soir, c’est pour dormir. Je travaille tellement, parce que j’ai un objectif que je veux atteindre. Donc je ne me laisse pas distraire par les activités qui ne m’apportent rien pour l’instant. J’ai encore le temps, quand je vais atteindre mes objectifs je pourrai m’amuser comme je veux. Pour le moment je suis focus sur mon travail. Ma vie c’est boulot-dodo. C’est ainsi que je vis depuis 6 ans. Et comme je n’ai pas encore d’enfant, je n’ai rien qui me tienne en dehors du travail.
Quels sont les obstacles auxquels vous êtes confrontés?
Comme je suis une femme, les gens pensent qu’ils peuvent faire n’importe quoi et je ne broncherai pas. Si vous écoutez mes clients, ils diront toujours, tu parles mal aux gens. J’ai des clients qui ont failli me battre, parce que je suis une femme. Dans le métier de technicien on a tous des difficultés par rapport au délai de livraison, souvent des petits malentendus même dans les modèles etc.
Au départ il y a des hommes qui me traitaient n’importe comment parce que je suis une femme. Face à cela je me suis forgé une carapace. En fait je ne me laisse pas faire. Ma philosophie est simple : tu as ton argent et j’ai mon savoir-faire par conséquent on se respecte mutuellement.
Conseillerez-vous à une jeune fille de faire le même métier que vous?
Je vais vous répondez comme à chaque fois que cette question revient. Une jeune fille doit savoir ce qu’elle a à faire pour ne pas mourir de faim, pour ne pas dépendre d’un homme. En ce qui concerne la femme les métiers sont limités. On nous case dans la coiffure, dans la couture, secrétariat… il y a des femmes qui n’osent pas s’investir dans les métiers dit d’hommes parce que c’est salissant.
Pour ma part tout métier doit être fait avec passion et patience. C’est la passion qui m’a retenu dans la menuiserie, au départ je ne gagnais rien, mon satisfaction était de voir un travail bien faire rendre heureux mon client. Pour faire ce métier il faut être déterminé. Si je dis à une jeune fille vient on travaille, tu auras un salaire conséquent, elle va voir que c’est fini, les ongles, les greffes, elle sera sale toute la journée etc, peu de femmes peuvent être tentées de le faire. Cependant, je conseille aux jeunes filles, de laisser le complexe et les aprioris derrière elle et d’embrasser les métiers qui les passionnent, même si ce sont les métiers classés homme par la société.
Propos recueillis par Esther Fossi