Vendu à 600 FCFA, le litre est passé à 800 FCFA. Station-service au carrefour Mvog-Mbi, le compteur à la pompe affiche zéro. Sur un format placardé au mur, les usagers peuvent lire « pas de pétrole. En attente de livraison ». Voilà plus de trois semaines qu’il y’a rupture de stock de pétrole lampant dans cette station-service à Yaoundé. Même scénario au carrefour Coron. « Je suis à ma cinquième station depuis ce matin. Toujours pas de pétrole. Soit j’arrive en retard que le stock vient de finir. Soit il n’y a pas de pétrole depuis des semaines », affirme Benjamin, détaillant au quartier Mvan.

A quelques mètres, cette fois au lieu-dit Atangana Mballa, c’est l’effervescence. Le rang s’étale à perte de vue. Bidon en main, chacun veut rentrer avec le précieux sésame. « Je suis à la recherche du pétrole depuis des jours. C’est mon frère qui m’a appelé et m’a dit que je pouvais en trouver ici. Là je suis en rang j’attends mon tour depuis des heures », confie Milaine. Ici, l’attente est longue, il faut faire preuve de résilience. « Je suis en rang depuis sept bonnes heures. Je suis fatiguée. Je n’ai pas le choix. Il faut bien que je fasse à manger à ma famille », ajoute clémence, ménagère.

Pour espérer satisfaire tout le monde, chacun n’a droit qu’à un seul bidon de 10 litres de pétrole pas plus. Puisque, même s’il y’en a, le pompiste affirme que les quantités sont insuffisantes pour espérer satisfaire la grande demande. « Ce n’est pas de notre faute. Nous avons passé la commande pour 9000 litres de pétrole mais on nous a livré juste 4000 litres », explique le gérant des lieux.A la  Société camerounaise des dépôts pétroliers (Scdp) en charge de la distribution et du stockage des produits pétroliers au Cameroun, on semble ignorer la pénurie. « L’information d’une quelconque pénurie de pétrole lampant n’est encore arrivée à notre niveau. Les stations-services sont quotidiennement approvisionnées. Tout se passe bien », affirme un responsable.

Pourtant, la rareté et pénurie pétrole sur le marché entraîne une flambée des  prix. Le litre vendu à 600 Fcfa est désormais vendu à 800 Fcfa dans certains marchés et quartiers du pays. Dans l’évaluation de ses performances de l’exercice 2024, le conseil d’administration de la Caisse de stabilisation des prix des Hydrocarbures (CSPH), réuni en session ordinaire le 27 juin 2025, confirmait que le marché national a enregistré une légère hausse de la demande des carburants terrestres (super, pétrole et gasoil ), de 3%.  Après l’incendie des installations de la Sonara, survenu en fin mai 2019, le Cameroun s’approvisionne en produits pétroliers exclusivement à partir des importations.

Selon les données officielles, les produits pétroliers à travers un mécanisme de subvention ont englouti près de 700 millions de Fcfa en 2022. La rareté et la pénurie actuellement observée du pétrole dans des points de ventes agréés, fait craindre un  problème structurel plus important.Les usagers ont encore à l’esprit la pénurie de produits pétroliers qui avait paralysée les activités économiques en juillet 2022, qui révélait la difficulté du gouvernement à pouvoir garantir un maintien des prix à la pompe. La situation s’annonce d’autant plus difficile de l’avis d’experts, avec les tensions au Moyen-Orient. Ces derniers redoutent une flambée de la facture énergétique dans les pays de la zone Cemac, ultra dépendant des importations.