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Cameroun : l’urgence de refonder la société civile

Par Guy Constantin Nzati, Président de Solidarité Jeunes (SOLIJ) La société civile camerounaise a une longue histoire, faite de luttes…

Par Guy Constantin Nzati, Président de Solidarité Jeunes (SOLIJ)

La société civile camerounaise a une longue histoire, faite de luttes et de renoncements, de figures héroïques et de désillusions. Ses premières manifestations, encore embryonnaires, se lisent dans les engagements militants de l’UDEFEC ou de la SOCAM, mais c’est véritablement dans les années 1990, avec l’ouverture démocratique, que naît une société civile autonome et visible.

Cette première génération fut combative, parfois téméraire. De l’Université de Yaoundé avec le Parlement estudiantin à une presse « libre » mais surtout combative incarnée par Pius Njawe, Séverin Tchounkeu ou Benjamin Zébazé, des avocats militants comme Me Yondo Black aux voix intellectuelles de Mongo Beti, Célestin Monga ou Fabien Eboussi Boulaga, tous ont porté une contestation frontale qui a arraché des espaces de liberté. Le prix en fut lourd. Répression, exils, emprisonnements, mais cette génération a façonné la conscience citoyenne moderne.

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À partir des années 2000, une deuxième génération a émergé. Plus professionnelle et institutionnalisée, elle a pris en charge des combats essentiels tels que les droits de l’homme, la souveraineté alimentaire, la justice sociale. Des figures comme Bernard Njonga, Madeleine Afité ou Cyrille Bechon en témoignent. Mais ce cycle a aussi montré de nombreuses limites comme la dépendance aux bailleurs, les compromissions avec l’État, la transformation de certaines OSC en instruments de carrière plutôt qu’en vecteurs de transformation sociale. Progressivement, cette société civile s’est essoufflée, perdant le feu de ses prédécesseurs et la confiance des populations.

Aujourd’hui, le Cameroun ne peut plus se satisfaire de ce statu quo. La crise économique, la défiance démocratique, les fractures sociales et territoriales exigent une société civile de troisième génération. Une société civile refondée, enracinée dans les luttes locales mais capable de peser sur l’agenda national, régional et international. Une société civile indépendante financièrement, autonome idéologiquement, et transformationnelle dans sa vision qui serait de bâtir un nouveau pacte social qui redonne confiance au peuple.

Nous devons relire l’histoire, puiser à la fois dans les prouesses et dans les échecs des générations précédentes. Car l’avenir ne se construira ni dans la nostalgie du combat passé, ni dans la résignation face aux dérives actuelles. Il se construira dans la capacité des jeunes, des femmes, des diasporas et des territoires oubliés à se coaliser et à réinventer une force citoyenne puissante, crédible et durable. La société civile camerounaise a su naître, puis se professionnaliser. Il est temps qu’elle se réinvente pour transformer et se transformer. Pour ce faire ici et maintenant la jeunesse doit reprendre le flambeau sous le regard protecteur et bienveillant des ainés. Il faut qu’ici et dès maintenant la société civile se réinvente.

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