Aucun corps de métier n’échappera à la « lecture de l’heure » dans notre pays pris en otage par des bandits. Même pas le clergé !
« Que votre cœur ne soit pas bouleversé ni effrayé. » (Jn 24, 27). Un prêtre catholique de l’archidiocèse de Bertoua au Cameroun, soupçonné d’abus sur une mineure, est en prison depuis quelques jours. Cela défraie la chronique dans les milieux ecclésiaux, surtout qu’il a été ensuite suspendu du ministère sacerdotal par son évêque le temps que la procédure judiciaire aboutisse. C’est une première au Cameroun, il faut le reconnaître. Pourtant il va falloir s’y habituer.
Restant sauve la présomption d’innocence de notre confrère, les prêtres doivent s’habituer à être traités comme des citoyens soumis aux mêmes droits et devoirs que tout le monde dans la cité. C’est une autre manière d’exorciser le cléricalisme qui dévoie le sacerdoce ministériel. Ils sont nombreux les Camerounais qui, pour moins que ça, ou pour rien du tout, croupissent dans nos sordides geôles sans que le clergé ne s’en émeuve outre mesure. Tout citoyen soupçonné de pédophilie aurait été traité de la sorte en attendant que la justice fasse son travail.
Il est vrai que le système judiciaire au Cameroun n’est pas connu pour son sens de l’équité et de l’impartialité mais le clergé devrait être le premier à se battre pour qu’il soit meilleur. Et puisque nous ne le faisons pas assez, pourquoi devrions-nous bénéficier d’un traitement de faveur ? Aucun corps de métier n’échappera à la « lecture de l’heure » dans notre pays pris en otage par des bandits. Même pas le clergé !!!!
Certains prêtres s’offusquent de la décision de l’évêque de notre confrère incarcéré de le suspendre temporairement du ministère sacerdotal, pourtant il ne s’agit que d’une mesure conservatoire qui participe bien de la politique de tolérance zéro édictée par le Vatican ces dernières années. Le clergé catholique africain doit enfin se rendre compte que « ce qui n’arrivait qu’aux autres » et qu’on croyait être « l’affaire des autres » commence déjà à lui arriver.
Plus aucun évêque ne prendra le risque de couvrir des prêtres soupçonnés d’abus sur mineurs sans prendre le risque d’être lui-même sanctionné par l’autorité vaticane. La chose est grave, et nous devons en saisir la gravité. La récréation est terminée. Un prêtre pédophile a sa place en prison.
D’ailleurs, je souhaiterais voir plus de prêtres en prison dans notre pays, non pas pour soupçons de crime, mais parce qu’ils se battent aux côtés du peuple pour la justice sociale. Saint Paul a fait la prison. Beaucoup de saints ont été emprisonnés. On peut citer, entre autres, saint Jean de la Croix et saint Ignace de Loyola. Mais c’était pour la bonne cause.
Aujourd’hui encore, des prêtres sont emprisonnés à travers le monde pour avoir défié des structures d’injustices comme celles qui écrasent le peuple camerounais. Il faudra plus d’évêques et de prêtres en prison comme beaucoup de nos compatriotes. Je pense à Bibou Nissack, Alain Fogue et bien d’autres qui y croupissent pour la cause des libertés publiques bafouées au Cameroun.
Il ne reste plus qu’à prier pour que le droit et rien que le droit soit dit dans le cas de notre confrère incarcéré à Bertoua. « Que votre cœur ne soit pas bouleversé ni effrayé » (Jn 14, 27).
Chers Frères dans l’épiscopat,
Je vous souhaite la bienvenue. Je suis très heureux de vous rencontrer à l’occasion de votre visite ad limina ! Je remercie Monseigneur Samuel Kleda, Président de votre Conférence épiscopale, pour les paroles qu’il vient de m’adresser en votre nom. Je vous demande de transmettre mes chaleureuses salutations à tous vos diocésains, en particulier aux prêtres, aux religieux et religieuses, aux laïcs engagés dans le service pastoral ainsi qu’à tous les habitants du Cameroun. J’adresse également un salut fraternel au Cardinal Christian Tumi. Que votre prière sur les tombeaux des Apôtres Pierre et Paul vous conforte dans la foi et la persévérance pour l’exercice de votre charge pastorale, au service du peuple qui vous a été confié. Ils sont pour nous les modèles que nous devons suivre dans le don total qu’ils ont fait d’eux mêmes – jusqu’au prix de leur sang – au Christ et à son Évangile.
Votre visite me donne l’occasion de vous renouveler mes encouragements et ma confiance, et de souligner l’esprit de communion que vous avez à c ur d’entretenir avec le Siège apostolique. Pour que l’Évangile touche et convertisse les c urs en profondeur, nous devons en effet nous rappeler que c’est seulement en étant unis dans l’amour que nous pouvons rendre témoignage de manière authentique et efficace. Unité et diversité sont pour vous des réalités à maintenir fermement liées pour faire droit à la richesse humaine et spirituelle de vos diocèses qui s’exprime de multiples façons. Par ailleurs, je souhaite que la bonne collaboration entre l’Église, l’État et la société camerounaise dans son ensemble, qui s’est manifestée récemment par la signature d’un Accord-cadre entre le Saint-Siège et la République du Cameroun, porte des fruits abondants. Je vous invite à mettre cet Accord en uvre concrètement, car la reconnaissance juridique de nombreuses institutions ecclésiales leur donnera un plus grand rayonnement, au bénéfice non seulement de l’Église, mais de toute la société camerounaise.
À ce propos, je tiens à saluer l’engagement considérable de vos Églises locales dans un grand nombre d’ uvres sociales. Cet engagement dans les domaines éducatif, sanitaire, caritatif est reconnu et apprécié par les Autorités civiles ; il doit être le lieu d’une féconde collaboration entre l’État et l’Église, dans le respect de la pleine liberté de celle-ci. L’engagement dans les uvres sociales fait partie intégrante de l’évangélisation, car il existe une connexion intime entre évangélisation et promotion humaine. Celle-ci doit s’exprimer et se développer dans toute l’action évangélisatrice (cf. Evangelii gaudium, n. 178). Je vous encourage donc à persévérer dans l’attention que vous portez aux plus faibles, en soutenant, matériellement et spirituellement, tous ceux qui s’y consacrent, en particulier les membres des Instituts religieux et les laïcs associés ; je les remercie tous de grand c ur pour leur dévouement et pour le témoignage authentique qu’ils rendent à l’amour du Christ pour tous les hommes.
Votre action évangélisatrice sera rendue d’autant plus efficace que l’Évangile sera réellement vécu par ceux qui l’ont reçu et le professent. Là se trouve le moyen d’attirer au Christ ceux qui ne le connaissent pas encore, en leur montrant la puissance de son amour capable de transformer et d’illuminer la vie des hommes. C’est ainsi, seulement, que nous pouvons faire face, dans la vigilance mais avec sérénité, au développement de multiples propositions nouvelles qui séduisent les esprits sans renouveler profondément les c urs. Par ailleurs, la présence importante de Musulmans dans certains de vos diocèses, est une invitation pressante à témoigner courageusement et joyeusement de la foi au Christ ressuscité. Développer le dialogue de la vie avec les musulmans, dans un esprit de confiance mutuelle, est aujourd’hui indispensable pour maintenir un climat de cohabitation pacifique, et décourager le développement de la violence dont les chrétiens sont les victimes dans certaines régions du continent.
It seems to me essential, then, as a priority, to pursue your action aimed at implanting and strengthening the faith in the hearts of the faithful. Formation is an essential element in the development of the People of God, particularly in these times where relativism and secularization are beginning to take root in Africa. Very many lay persons are involved in their parishes and in the movements, and they are indeed vital to the handing on of the faith. Their formation must be solid and ongoing. I ask you to convey to these lay faithful and to all involved in this work of formation my appreciation and my warmest encouragement.
Families, equally, must continue to be the focus of your particular care, especially today as they experience grave hardships – be they poverty, displacement of peoples, lack of security, the temptation to return to ancestral practices incompatible with the Christian faith, or even new lifestyles proposed by a secularized world. I invite you to take full advantage of the tenth Plenary Assembly of the Association of Episcopal Conferences of Central Africa held in the Congo, in whose work you took part, and which – I have no doubt – will bear abundant fruit.
Par ailleurs, il est essentiel que le clergé rende le témoignage d’une vie habitée par le Seigneur, cohérente avec les exigences et les principes de l’Évangile. Je tiens à exprimer à tous les prêtres mes remerciements pour le zèle apostolique dont ils font preuve, souvent dans des conditions difficiles et la précarité, et je les assure de ma proximité et de ma prière. Il convient néanmoins de rester vigilant dans le discernement et l’accompagnement des vocations sacerdotales – grâce à Dieu nombreuses au Cameroun – et aussi de soutenir la formation permanente et la vie spirituelle des prêtres pour lesquels vous êtes des pères attentifs, alors que les tentations du monde sont nombreuses, en particulier celles du pouvoir, des honneurs et de l’argent. Sur ce dernier point particulier, le contre témoignage qui pourrait être donné par une mauvaise gestion des biens, l’enrichissement personnel ou le gaspillage serait particulièrement scandaleux en une région ou beaucoup de personnes manquent du nécessaire.
D’autre part, l’unité du clergé est un élément indispensable du témoignage rendu au Christ ressuscité: «Qu’ils soient un, afin que le monde croie» (Jn 17,21); qu’il s’agisse de l’unité des Évêques, confrontés souvent aux mêmes défis et appelés à apporter des solutions communes et concertées, ou bien de l’unité du presbyterium que le Seigneur appelle à construire chaque jour en dépassant les préjugés, notamment ethniques.
Enfin, la vie consacrée demande à être aussi accompagnée afin que, enracinée dans le Christ au service du Royaume, elle reste toujours un témoignage prophétique et un modèle en matière de réconciliation, de justice et de paix (Cf. Evangelii gaudium, n. 117). Je vous invite à apporter votre soutien aux Instituts religieux dans leurs efforts de formation humaine et spirituelle, et à accueillir et accompagner, avec un prudent discernement, les initiatives nouvelles.
Chers frères, les efforts courageux d’évangélisation que vous déployez dans votre ministère pastoral portent de nombreux fruits de conversion. Je vous invite à en rendre grâce sans cesse et à renouveler le don de vous-même au Christ et au peuple qui vous est confié. Sans craindre les difficultés, vous irez courageusement de l’avant, avec un esprit missionnaire renouvelé, afin de porter la Bonne Nouvelle à tous ceux qui l’attendent encore ou qui en ont le plus besoin. Je vous confie tous, ainsi que vos diocèses à l’intercession de saint Jean-Paul II qui, par deux fois, visita votre pays, et à la protection maternelle de la Vierge Marie. Que Dieu vous bénisse !