Informaticien en service à Elections Cameroon, l’accusé a ouvert un compte à Afriland First Bank en utilisant une fausse carte nationale d’identité établie au nom d’une tierce personne qui a été spoliée de son salaire.
L’enquête est menée par Kalara. En détention provisoire à la prison centrale de Yaoundé Kondengui depuis octobre 2021, M. Adabawas Tchenem, informaticien, en service à la direction générale d’Elections Cameroon (Elecam) depuis 2011, est poursuivi par Afriland First Bank pour faux en écriture privée de commerce, faux et usage de faux en écriture publique et authentique, usurpation d’identité devant le Tribunal de première instance (TPI) de Yaoundé centre administratif.
Pour sa défense, il déclare que son objectif était de démontrer la fragilité du système de sécurité de la prestigieuse entreprise bancaire. En effet, faisant usage d’une fausse carte nationale d’identité (CNI) frauduleusement établie au nom de M. Seinou, M. Adabawas Tchenem est accusé d’avoir ouvert un compte dans les livres d’Afriland First bank pour faire virer le salaire de ce dernier. Le 25 septembre 2021, le premier virement dudit salaire a été effectué à hauteur de 156 mille francs.
C’est alors que le véritable Seinou avait découvert que son compte avait été transféré à son insu à Afriland First Bank. Une enquête ouverte par cette banque avait permis de découvrir, d’une part, que l’accusé était l’auteur des faits dont se plaint M. Seinou et qu’il avait, d’autre part, déposé dans cette banque une demande de crédit d’un montant de 3,5 millions de francs.
Migration
Pour sa défense le 5 mars 2022, M. Adabawas Tchenem a raconté au tribunal qu’en juin 2020, il a sollicité un bulletin de solde au nom de M. Seinou qu’il ne connaît pas auprès des intermédiaires qui proposent des services divers aux alentours du ministère des Finances (Minfi). C’est ainsi que muni de ce document, l’accusé est allé à la Direction générale d’Afriland First Bank où il a demandé et obtenu une ouverture d’un compte bancaire.
« La gestionnaire qui m’a reçu m’a présenté une liste de documents que je devais produire. Je suis rentré chez moi et j’ai moi-même fabriqué une fausse CNI, une attestation effective au poste, une demande d’ouverture de compte et quatre photos 4X4 », a déclaré le mis en cause. Le lendemain, sans vérifier l’authenticité ou nom de ces documents, la gestionnaire lui a délivré une attestation d’ouverture de compte au nom de M. Seinou.
Par la suite, M. Adabawas Tchenem dit avoir sollicité la migration du compte de M. Sienou qui se trouvait dans une autre banque pour son nouveau compte logé à Afriland First Bank. « Un mois plus tard, la banque m’a appelé pour m’informer que ma carte magnétique était déjà disponible et je suis allé la récupérer. Trois mois après, j’ai reçu un sms disant que mon compte a été approvisionné d’une somme de 156 000 Fcfa. Je me suis de nouveau rendu à la banque, la gestionnaire m’a signé un chèque de guichet et j’ai retiré la somme en question à la caisse ».
Poursuivant son propos, l’informaticien déclare avoir sollicité un crédit de 3,5 millions de Fcfa à Afriland First Bank. La gestionnaire qui ne doutait de rien, lui a indiqué les formalités à remplir et à déposer un délai de 72h. M. Adabawas Tchenem soutient qu’il est revenu à la banque le lendemain avec 156 000 francs qu’il a retirés la veille. C’est à ce moment que la gestionnaire s’est rendu compte que son compte nouvellement ouvert avait un problème.
L’accusé dit avoir rencontré le propriétaire du compte piraté qui lui a demandé de lui restituer les sommes perçues ainsi que l’attestation d’ouverture du compte. N’ayant pas trouvé un compromis au terme de leurs discussions, M. Adabawas et M. Seinou se sont retrouvés dans une unité de gendarmerie et le prévenu a été interpellé.
Mode opératoire
Il ajoute qu’en posant cet acte il souhaitait se faire recruter comme consultant à la banque pour pallier les défaillances dans le système de sécurité des comptes bancaires qu’il avait décelé dans cette entreprise bancaire. «Car avec leur système de sécurité actuel, il est facile pour n’importe quelle personne de décaisser sans effort de l’argent dans un compte d’un client de la banque», a –t-il confié.
Il ajoute «Je me suis fait établir une fausse carte CNI au nom de M. Sienou en utilisant uniquement son nom et sa date de naissance. Les autres informations contenues sur cette pièce sont fausses. J’ai ensuite obtenu son bulletin de solde sans mentionner son matricule. Sa banque d’origine a transféré son argent à Afriland First bank sur la base de fausses informations. La gestionnaire m’a donné 72 h pour aller dans n’importe quel guichet retirer le crédit que j’ai sollicité. Tous ces manquements démontrent que le système de sécurité de nos banques n’est pas fiable ».
Convaincu de ce que l’accusé protège un réseau où une tierce personne, la représente du ministère public a, lors de ses réquisitions, sollicité la condamnation de M. Adabawas. Elle a indiqué que le mis en cause a reconnu les faits à l’enquête préliminaire, et a plaidé devant le tribunal non coupable.
« L’accusé a manipulé et falsifié les documents bancaires. Il a usé d’une fausse CNI qu’il a lui-même fabriquée et a également usé des manœuvres pour obtenir un crédit à la banque au nom d’une autre personne, crédit qui aurait été accordé si M. Sienou n’était pas intervenu. Ce dernier a eu cinq mois pour se repentir. Il a ciblé la victime et avait ses informations personnelles », a confié le magistrat du parquet.
L’avocat d’Afriland First bank est allé dans le même sens que le parquet et a sollicité la somme d’un million de francs pour le préjudice que son client aurait subi. Le dénouement de cette affaire est attendu le 7 avril prochain.