Par Maurice Nguepe, Secrétaire général de l’Organisation Jeunesse Africaine
12 avril 2015: 400 nouveaux morts en Méditerranée –
L’Organisation Jeunesse Africaine décrète une semaine de deuil continental.
Dimanche, 12 avril 2015, s’est jouée en Méditerranée, aux larges des côtes italiennes, la plus grande tragédie maritime du début du XXIème siècle : une embarcation de fortune, transportant plus de 550 migrants clandestins, parmi les lesquels de très nombreux jeunes, a fait naufrage et causé la mort de plus de 400 Africains.
Pourtant, depuis lors, nulle part en Afrique, on n’a entendu de déclarations des chefs d’État au sujet de ce drame. L’Union africaine, que l’Organisation Jeunesse Africaine avait saisi, le 3 octobre 2013, à la suite du drame de Lampedusa qui avait fait 200 morts, est restée elle aussi immobile, au moment où le monde attend toujours une véritable politique africaine de gestion de l’émigration clandestine méditerranéenne incluant la bonne gouvernance, la surveillance et la prise en charge les rescapés.
Face à cette indifférence sans nom, et considérant que l’émigration clandestine des jeunes Africains est la conséquence directe de la tyrannie des gouvernants, de l’injustice sociale, du manque de liberté et de démocratie véritables, de la violence policière et militaire, des persécutions et des exclusions ethniques qui caractérisent les systèmes de gouvernance des pays africains, l’Organisation Jeunesse Africaine décrète une semaine de deuil continental qui ira du vendredi 17 au jeudi 23 avril 2015.
Les jeunes Africains à travers le continent et le monde sont invités, chacun à son niveau, non seulement d’observer chaque jour et pendant ces sept jours, une minute de silence en mémoire de ces morts, mais aussi à organiser des campagnes de sensibilisation sur les dangers de la traversée de la route la plus meurtrière du monde, la Méditerranée, à bord des embarcations de fortune.
L’Organisation Jeunesse Africaine les invite aussi, de même que toutes les organisations de la société civile africaine, à saisir les autorités politiques de leurs pays respectifs afin de les forcer à élaborer, dans le cadre de l’Union Africaine, une véritable politique de gestion de ces drames interminables afin qu’à jamais ces horreurs cessent de faire honte à l’Afrique.
Pour l’Organisation Jeunesse Africaine, Maurice NGUEPE, Secrétaire général Le 16 avril 2015
Françoise Foning est partie, sans être faite héroïne nationale. Pourtant, Paul Biya en personne a tout donné, et les Rdpcistes de la diaspora, principalement ceux de France et du Canada, ont tout fait lors de ses obsèques, mais rien n’y a fait. C’est que Françoise Foning était loin d’être la Mère Theresa du Cameroun. Elle était certes une femme de poigne, mais on sait dans ce pays comment on devient homme ou femme de poigne. Il suffit que le régime vous entoure de gendarmes et mette des milliards entre vos mains pour acheter les consciences, et vous devenez «élites».
Elle était, disais-je, certes une femme de poigne, mais elle avait choisi d’utiliser cette force pour construire et déconstruire, susciter les joies à gauche et provoquer les pleurs à droite. Comme d’ailleurs bon nombre de Camerounais d’aujourd’hui, avides d’autorité, qui utilisent la moindre parcelle de pouvoir pour tordre le cou aux désespérés et aux pauvres, et favoriser l’ascension de ceux qui sont prêts à se compromettre pour la gloire de Paul Biya et de son régime. À telle personnalité controversée, impossible de rendre hommage, sauf d’avoir retourné sa veste.
La députée et mairesse de Douala Vème est donc partie, laissant derrière elle les milliards qu’elle avait brassés, qu’elle avait distribués çà et là au gré de ses humeurs, découvrant au grand jour le mode de gestion calamiteuse des finances publiques, gestion basée sur l’amateurisme. Pour n’avoir pas été à l’école, le professionnalisme dans la gestion de la cité et des finances lui échappait, à juste titre, tout comme son art oratoire approximatif dicté par les souffleurs positionnés derrière elle, à l’abri des caméras, à chaque sortie publique.
L’histoire dira donc que c’est ainsi que le Rdpc construisait ses «élites», car c’est ainsi que le régime l’avait construite, elle, et de surcroit «élite» d’une ville universitaire, c’est-à-dire d’un département qui compte des centaines de milliers d’intellectuels. C’est pathétique de constater qu’au Cameroun de Biya, c’est finalement toujours les amateurs et les amatrices qui mènent le bal pendant que les intellectuels les acclament! C’est que le régime, ayant peur des intellectuels, a choisi d’élever, par la force de l’argent, des personnes qui, à leur tour, surfent sur l’appartenance ethnique pour annihiler la clairvoyance des hommes et femmes à la pensée libre.
La vieille technique du régime, qui consiste à choisir, au lieu des jeunes gens bien-pensants et intègres, plutôt des vieux et vieilles à la retraite, avait donc été appliquée dans la Menoua. Le drame, c’est que Françoise Foning, ainsi choisie, était en mission commandée aussi bien dans son département d’origine que dans celui du Wouri où les statistiques indiquaient une forte présence des populations de la Menoua et de la région de l’Ouest. Et, comme les élites fabriquées des autres villes et régions du Cameroun, elle y avait entrainé la jeunesse dynamique dans un aveuglement absurde, confinant les voix intelligentes dans un mutisme cinglant: «C’est la maman du village, suivons-la. Quand ton frère ou ta s ur est au pouvoir, pourquoi ne pas le ou la suivre?» Voilà la politique du village, subséquente à celle du ventre, expression la plus populaire du système du Renouveau qui a ethnicisé les rapports sociaux pendant 33 ans au grand dam de l’esprit républicain!
Avec la mort de Françoise Foning, les populations de la Menoua doivent se détourner définitivement de l’esprit corrupteur du Rdpc qui a mis à rude épreuve leur sens de l’honneur, leurs valeurs humaines et culturelles et leur patriotisme né aux premières heures de l’indépendance de ce pays.
Tant que les Camerounais, chacun dans son village, n’auront pas appris à se distancier des «élites» fabriquées par le régime pour tordre le cou à toute velléité de changement au niveau local et à tout espoir de progrès au niveau national, la sortie de l’obscurité sera encore lointaine.
Françoise Foning était née dans mon village, mais je ne suis pas Foning.
Monsieur le président François Hollande,
La Jeunesse africaine viens auprès de votre Bienveillance exprimer sa profonde gratitude pour le discours que vous avez prononcé le 30 novembre 2014 lors du XVème sommet de la francophonie à Dakar et solliciter votre ultime soutien pour mettre fin à la tyrannie qui
en a émergé en se radicalisant.
En effet, vous avez, lors de ce sommet, salué la réussite du printemps arabe en Tunisie et loué la révolution burkinabè du 30 octobre 2014: «Ce qu’a fait le peuple burkinabè doit faire réfléchir ceux qui voudraient se maintenir à la tête de leur pays en violant l’ordre constitutionnel. Parce que ce sont les peuples qui décident.»
Ce faisant, vous avez assigné à la francophonie une nouvelle mission, celle de gendarme de la démocratie dans l’espace francophone:«La francophonie, elle est soucieuse des règles de la démocratie, de la liberté du vote, du respect des ordres constitutionnels et de l’aspiration des peuples, de tous les peuples, à des élections libres… Là où les règles constitutionnelles sont malmenées, là où la liberté est bafouée, là où l’alternance est empêchée, j’affirme ici que les citoyens de ces pays sauront toujours trouver dans l’espace francophone le soutien nécessaire pour faire prévaloir la justice, le droit et la démocratie.»
Monsieur le président,
La jeunesse africaine ne peut désormais s’empêcher de souligner qu’avec ces mots, vous avez radicalement tranché avec tous les présidents de la Vème république, en même temps que vous avez réalisé votre promesse énoncée le 29 avril 2012, à une semaine de votre élection au poste de président de la République française. Ce jour-là, vous aviez déclaré haut et fort: «Je veux que le 06 mai soit une bonne nouvelle pour les démocrates et une terrible nouvelle pour les dictateurs.»
Nous nous souvenons aussi qu’à la veille du XIVème sommet de la francophonie en République Démocratique du Congo (octobre 2012), vous aviez justifié votre déplacement à Kinshasa par votre ferme volonté de mettre en pratique la nouvelle politique française en Afrique: «Tout dire partout et faire en sorte que ce qui soit dit soit fait.» C’est dire que vous aviez compris que les mots à eux seuls ne suffisent pas à ébranler les dictatures.
Au regard de ce constat, la Jeunesse africaine revient vers vous pour vous soutenir dans cette mission et vous encourager à aller jusqu’au bout, votre discours du 30 novembre 2014 ayant, en quelques jours seulement, produit les effets contraires à ceux attendus.
En effet, votre discours, au lieu d’amener les chefs d’État africains à engager des réformes démocratiques attendues, leur a donné plutôt l’occasion de supprimer le droit le plus élémentaire du citoyen, celui de manifester, sous peine de mort ! C’est le cas du Cameroun où la loi dite anti-terroriste, déposée par le chef de l’État à son retour de Dakar, a été adoptée le 04 décembre 2014 par les députés du Rdpc, Parti majoritaire au pouvoir. Cette loi, qui radicalise la tyrannie trentenaire du régime, stipule en son article 2:
«Est punit de la peine de mort celui qui, à titre personnel, en complicité ou en coaction, commet tout acte ou menace d’acte susceptible de causer la mort, de mettre en danger l’intégrité physique, d’occasionner des dommages corporels ou matériels, des dommages aux ressources naturelles, à l’environnement ou au patrimoine culturel dans l’intention de : a) intimider la population, de provoquer une situation de terreur ou de contraindre la victime, le gouvernement à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte quelconque (.); b) de perturber le fonctionnement normal des services publics, la prestation de services aux populations ou de créer une situation de crise au sein des populations; c) de créer une insurrection générale dans le pays.»
Puisqu’il s’agit de la loi la plus liberticide et la plus cruelle qui inspirera certainement d’autres dictatures francophones d’Afrique, la Jeunesse africaine sollicite votre ultime soutien pour contribuer à la retirer et à mettre fin à cette tyrannie camerounaise qui dure depuis 32 ans.
Monsieur le président François Hollande, sauvez le Cameroun. Sauvez ce pays de cette loi qui n’est rien d’autre qu’une déclaration de guerre à tout un peuple. Sauvez-le de cette dictature, la plus vieille de l’espace francophone, qui s’affiche clairement contre les principes démocratiques devant fonder les relations entre les pays de la francophonie.
Il y va de la préservation de ces principes que vous avez si bien énoncés et sans lesquels la francophonie ne saurait être un modèle de réussite politique, économique, stratégique et culturel aussi bien pour le peuple français que pour tous les peuples qui la composent.
Pour l’Organisation Jeunesse Africaine,
Maurice NGUEPE, Secrétaire général
Le 06 décembre 2014
Maurice Nguepe, Secrétaire général de l’OJAM.N. )/n
L’Organisation Jeunesse Africaine salue le courage de la jeunesse burkinabé et le renversement du régime dictatorial de Blaise Compaoré.
Lance un appel aux forces de l’opposition et à la société civile afin qu’elles fassent tout pour protéger la révolution burkinabé en cours en faisant barrage à la tentative de coup d’État militaire qui se dessine à l’horizon et qui a pour effet de protéger les dignitaires de l’ancien régime, de favoriser leur retour aux affaires et de torpiller la construction d’une démocratie véritable au Burkina Faso.
Déclare que seule une personnalité de la société civile dotée de bonne moralité et présentant un consensus national aura la légitimité de diriger la transition.
Appelle l’armée burkinabé, toutes tendances confondues, à rester dans les casernes et à s’occuper uniquement de sa mission de protection des personnes, des biens et du territoire.
Maurice Nguepe, secrétaire général de l’OJAJournalducameroun.com)/n
Ce n’était pas un match de football, c’était la guerre : la guerre-éclair, le Blitzkrieg. Cinq buts à zéro en dix-huit minutes, dont 4 en 6 petites minutes, rien n’explique le massacre de la Seleçao par la Nationalmannschaft si ce n’est une application de la stratégie du Blitzkrieg dans ce duel Brésil-Allemagne comptant pour les demi-finales de la coupe du monde FIFA le 08 juillet 2014. Mais qu’est-ce qu’alors la guerre-éclair? C’est la stratégie militaire du 3ème Reich qui consistait à éviter l’axe central, la ligne de front, et à concentrer un grand nombre de forces offensives et défensives, aussi bien terrestres qu’aériennes, sur un front excentré et relativement étroit pour pénétrer en profondeur et emporter, par l’encerclement, une série de courtes et nombreuses victoires sur l’adversaire afin d’atteindre son moral et éviter une guerre longue.
D’après cette stratégie, la force d’une armée repose sur trois piliers fondamentaux, tous interconnectés, à savoir le pilier industriel et productif (1), le pilier militaire et opérationnel (2) et le pilier politique, social et moral (3). Pour battre l’adversaire, la destruction d’un seul de ces piliers ne suffit pas, puisque les trois sont liés les uns aux autres. Ainsi, la destruction massive de la capacité militaire d’un adversaire (pilier 2) peut être compensée par une production industrielle importante (pilier 1) et par l’appel à d’éventuels alliés politiques et sociaux qui apportent une force psychologique (pilier 3) pour combler les pertes subies. La victoire totale ne s’obtient donc qu’au bout de la destruction des trois piliers.
Comment cette stratégie a-t-elle été utilisée le 08 juillet 2014 lors des demi-finales de ce mondial brésilien?
Pilier 1: Le premier pilier de l’équipe nationale brésilienne avait déjà été démoli lors du match des quarts de finale entre le Brésil et la Colombie, match au cours duquel Neymar, le meilleur joueur de la sélection, fut écarté de la compétition pour blessure grave, et Silva Thiago, le défenseur central et capitaine pour fautes et cartons. Neymar, en tant que numéro 10, était le producteur du jeu et le meilleur distributeur des ballons. Silva Thiago en tant que capitaine et défenseur central était le directeur des opérations. Les deux constituaient la colonne vertébrale du Brésil, c’est-à-dire le pilier numéro 1, celui de la défense centrale, de la production et de la distribution du jeu. Une fois les deux écartés, il ne manquait plus à l’Allemagne qu’à se concentrer sur les deuxième et troisième piliers.
Pilier 2: Dans la stratégie du Blitzkrieg, le deuxième pilier, militaire et opérationnel, consiste à ouvrir une petite brèche dans les défenses adverses, et à y concentrer un grand nombre de forces pour pénétrer rapidement en profondeur et de man uvrer librement derrière les lignes, désorganisant les défenses. C’est la technique de l’encerclement/contournement grâce à laquelle tous les buts de l’Allemagne ont été marqués. L’encerclement de la défense brésilienne, pour la prendre au dépourvu, a consisté à éviter de passer par l’axe (ligne de front) pour atteindre le dernier pilier défensif de l’adversaire. Même le cinquième but, marqué à la 29 minute a suivi la trajectoire de l’encerclement. À ce niveau, bien que Hummel soit rentré par l’axe central pour prologer sur Khedira, celui-ci a transféré le ballon sur le côté, sur Özil, afin que ce dernier contourne la défense brésilienne et ramene le ballon en pleine surface lorsque les attaquants allemands auront eu le temps de l’assiéger.
Comme on le voit, dans la stratégie du Blitzkrieg, si on contourne la défense, c’est en fait pour s’y installer et la démolir. Tous les buts allemands ont obéi à cette tactique: rapidité dans la reprise des balles, longues passes dans les couloirs, reprises par les ailiers qui foncent vers le coin et remontent par l’arrière de la défense, la prenant au dépourvu, pour trouver des joueurs qui ont pris la place des défenseurs centraux, mais qui ne sont en réalité que les attaquants de la Mannschaft prêts à faire feu.
Pilier 3 : Le troisième pilier repose sur le postulat selon lequel le maintien du moral de l’adversaire et de la cohésion sociale avec son peuple atténue considérablement les effets de la destruction du premier et du second pilier. En d’autres termes, si la cohésion sociale reste forte, la population encouragera davantage les combattants au sacrifice. La destruction de la force morale de l’adversaire et l’absence de compassion pour sa population sont donc les objectifs recherchés. Ici, c’est l’âme du peuple, le Volksgeist, que l’on cherche à anéantir, pour éviter que le peuple et son armée, par sursaut patriotique, reprennent la main. Autrement dit, si le moral du peuple est atteint, il ne transfère plus à ses guerriers le soutien et l’énergie nécessaires à la combattivité. La perte de confiance réciproque entre le peuple et ses combattants a dès lors pour effet la renonciation au sacrifice. Jouant en terre brésilienne, devant les spectateurs au départ survoltés du pays organisateur de la coupe du monde, l’Allemagne ne pouvait adopter une stratégie autre que celle visant la destruction de ce troisième pilier.
Interrogé à la fin du match, le gardien brésilien, Jùlio César, a dit être incapable d’expliquer l’inexplicable. Mais le massacre de l’équipe nationale brésilienne par la Nationalmannschaft trouve son explication dans la mise en application de la stratégie de destruction du troisième pilier. En effet, l’Allemagne aurait pu aller aux vestiaires avec un score de trois ou de cinq buts à zéro et jouer la deuxième mi-temps de façon à obtenir ce même score à la fin de la rencontre. Rien n’explique qu’après avoir marqué cinq buts contre zéro entre la 11ème et la 29ème minute de la première mi-temps, et devant un public désormais en pleurs (enfants, femmes, hommes), les Allemands aient cru bon de marquer un sixième et un septième but contre zéro en deuxième mi-temps. Argument sans doute discutable, mais rien n’explique qu’à la fin de la rencontre, les joueurs allemands n’aient pas reconforté les joueurs brésiliens abattus. Sachant bien que le distributeur maison, Neymar, et le défenseur central et capitaine, Silva Thiago, qui représentaient tous deux le pilier industriel et productif de la Séleçao, avaient été écartés depuis le match précédent, cette froideur, cette absence de compassion des vainqueurs ne fait pas la beauté du football. À ce moment crucial du désastre national brésilien, les petites attentions et marques de réconfort des joueurs allemands à l’endroit des joueurs brésiliens humiliés auraient constitué une autre forme de fair-play, peut-être la forme la plus achevée, la plus humaine.
Détruire le moral de l’adversaire, l’atteindre dans son être profond et briser la cohésion sociale de son peuple afin que celui-ci ne lui transfère aucune énergie de nature à renverser la tendance, était donc le but ultime. Par la destruction de ce troisième pilier, les joueurs de la Mannschaft, qui ne présentaient bizarrement aucun signe de fatigue sous les très chaudes tropiques amazoniennes, construisaient et faisaient montre de la toute puissance de l’Allemagne avec pour objectif non seulement de se faire craindre du reste du monde, mais aussi d’entamer le moral de son futur adversaire pour garantir la victoire finale. Ce n’était donc pas un match de football. C’était la guerre, le Blitzkrieg.
Maurice Nguepe, Secrétaire Général de l’Organisation Jeunesse AfricaineM.N.)/n
Le Cameroun s’est levé ce matin du 19 juillet 2012 avec les mains sur la tête, et pour cause, une lettre de l’archevêque de Yaoundé, Mgr. Victor Tonyè Bakot, lettre parue dans la Nouvelle Expression et appelant à la révision du nombre des membres d’une communauté ethnique camerounaise (les Bamiléké) de l’université catholique d’Afrique centrale (ucac). Raison évoquée, enseignants et étudiants bamiléké sont trop nombreux dans cette institution. Il propose alors des méthodes correctives de la situation, des méthodes dignes du système hitlérien: «A valeur égale sur le plan intellectuel, il faudrait penser aussi à recruter des enseignants venant d’autres régions et, si possible, respecter les quotas de telle manière que l’Ouest ne soit plus majoritaire en enseignants associés ni en enseignants permanents. Il en est de même du nombre d’étudiants dont l’Ouest porte un nombre plus que significatif. Outre les corrections anonymées, nous proposons de diversifier les correcteurs le plus possible pour éviter de privilégier un groupe grâce à des enseignants correcteurs venant de la même région, parce que, nous dit-on, il y a des stratégies de signes qui permettent d’identifier l’origine des candidats. Nous vous recommandons (.) de redoubler de vigilance.» Même dans sa «Mise au point» du 23 juillet 2012 parue dans Cameroon Tribune, Mgr. Tonyè Bakot ne s’excuse pas, quoique la demande de pardon soit le leitmotiv de l’église chrétienne. Il prétend que c’est l’exigence de charité et de justice qui est au fondement de sa pensée. Du coup, on se demande dans quelle mesure la charité peut-elle amener un prélat à ordonner la réduction, dans un établissement universitaire, des effectifs d’étudiants et d’enseignants parce qu’appartenant à un groupe ethnique ? De quel type de charité et de justice s’agit-il?
Outre le préambule cité plus haut, l’article 57 (3) de cette même Constitution aborde les notions d’allogénie et d’autochtonie dans une dialectique aussi contradictoire qu’absurde. En évoquant l’autorité administrative suprême qui siège à la tête de chacune des dix régions du pays, on peut lire en effet que «le Conseil régional est présidé par une personnalité autochtone de la région élue en son sein pour la durée du mandat du Conseil». Cet article laisse comprendre qu’aucun Camerounais n’a le droit, par la grandeur de sa personnalité et la qualité de ses idées, d’accéder démocratiquement à la présidence des conseils régionaux des régions où il serait considéré comme allogène. L’article 57 alinéa 3 joue donc contre les minorités qu’il prétend protéger, puisqu’il les empêche d’être eux aussi présidents des conseils régionaux d’autres régions, en même temps qu’il empêche aux Camerounais de tous bords l’exercice de leurs droits de citoyen sur toute l’étendue du territoire. Lorsqu’on lit la lettre de Mgr. Tonyè Bakot en référence à cet article 57 (3) de la Constitution camerounaise, on se demande si l’archevêque ne joue pas le rôle de président du Conseil régional. Sa correspondance n’a en effet de sens pour lui que parce que l’université catholique (ucac) est située à Ekounou, un quartier de Yaoundé qu’il cite d’ailleurs. Ainsi, il n’aurait pas commis sa lettre si l’Ucac était située dans la région de l’Ouest. Le problème, avant d’être tribal, est donc d’abord territorial, parce que encadré par une Constitution qui donne à certains Camerounais le droit de s’établir sur le territoire de leurs parents et grand-parents, et aux autres, leur en interdit. C’est, à n’en point douter, une Constitution qui cultive le sentiment antipatriotique, transforme le citoyen en étranger, l’installe dans un obscurantisme qui obstrue son avancée vers les lumières de l’universalisme. L’artiste Joe La Conscience n’avait pas trouvé meilleure expression que de traiter ce texte de «Constitution constipée», ce qui se confirme dès lors que l’on constate qu’un discours tribal à la limite ethnocidaire comme celui de l’archevêque de Yaoundé devient constitutionnel.
Les réponses à ces questions résident dans le préambule de la Constitution du 18 janvier 1996, la loi fondamentale qui règle le quotidien des Camerounais. Les concepts d’allogénie, d’autochtonie et de protection des minorités y représentent la grande nouveauté: «L’État assure la protection des minorités et préserve les droits des populations autochtones conformément à la loi». Comme on le voit dans cette sentence lapidaire, les minorités sont définies comme étant des autochtones. Mais étant donné que tous les groupes ethniques du Cameroun sont autochtones du fait qu’ils s’y sont établis depuis la période précoloniale et préesclavagiste, la question qui se pose ici est de savoir contre quels groupes majoritaires l’État protège ces autochtones minoritaires et en quoi les droits de ceux-ci sont-ils différents des droits des autres Camerounais. Le silence constitutionnel entretenu autour de la définition précise du groupe dit majoritaire et des groupes dits minoritaires en dit long sur la peur qu’avaient les constitutionnalistes de 1996 de nommer le prétendu groupe majoritaire visé: Les Bamiléké.
Toutefois, en utilisant les concepts de ces constitutionnalistes de 1996 pour faire une analyse des fondements de la lettre de l’archevêque de Yaoundé, on réalise que Mgr. Tonyè Bakot s’active, lui aussi, dans la protection des minorités. Pour lui, avec 60 % des effectifs, les étudiants originaires de l’Ouest constituent une menace, d’où les recommandations formulées pour réduire leur nombre et, par ce fait même, protéger ceux, minoritaires, des autres régions. Mais quelle drôle de protection! Pourquoi et au nom de quelle idéologie protège-t-on des personnes qui ne sont ni menacées, ni persécutées, ni violentées par ceux contre qui on prétend protéger? Dire que l’archevêque a raté sa sortie, tant sur la plan éthique, religieux, social que politique, est désormais une évidence. Mais le plus grand tort revient à la Constitution camerounaise et aux constitutionnalistes du système Biya. Car, Mgr. Tonyè Bakot risque ne pas se retrouver devant les tribunaux de la république, sa lettre antibamiléké n’étant finalement pas anticonstitutionnelle. Le dire, c’est montrer le niveau de décrépitude institutionnelle dans lequel baigne le Cameroun aujourd’hui.
Dr.Maurice NguepeJournalducameroun.com)/n
Pour le régime en place cependant, pas question de revoir la loi fondamentale du Cameroun et de la soumettre à la sanction référendaire. Déjà, pour les constitutionnalistes de 1996, les deux concepts (autochtone/allogène) n’avaient de sens que parce qu’ils percevaient les prétendues minorités sous le prisme de la paresse, voyant en elles des communautés qui ne veulent rien faire, mais aspirent à tout recevoir comme un don du ciel, d’où le mot «charité» utilisé par l’archevêque lui aussi. De plus, avec la dichotomie autochtone/allogène, le champ à une confrontation ethnique s’ouvre de façon automatique, et l’allogène est présenté comme la cause de tous les malheurs du Cameroun, ce qui permet au régime de contourner les soulèvements populaires chaque fois qu’il échoue à garantir une bonne qualité de vie aux Camerounais et particulièrement aux minorités qu’il dit vouloir protéger (adduction d’eau, électrification, routes, écoles, hôpitaux, logements sociaux adéquats, justice sociale.) On en déduit que l’encadrement constitutionnel de l’autochtonie minoritaire et de l’allogénie majoritaire sous le régime Biya vise une seule chose: susciter les provocations tribales pour détourner l’attention de toutes les autres composantes de la nation de la gestion calamiteuse des biens publics dont il s’est rendu coupable, et orienter le regard de ces composantes nationales vers le sens horizontal (tribu contre tribu) pour échapper aux revendications et aux révolutions verticales (peuple contre État). Ce n’est pourtant pas que les Camerounais sont incapables de s’élever au-delà de l’esprit villageois et tribal pour penser la nation avec des catégories universelles ! On sait dans ce pays qu’un individu appartenant à une ethnie dite minoritaire devient majoritaire lorsque, par son effort et son travail, il produit des richesses, développe des pensées révolutionnaires et universelles et gravit les échelles de la société. L’exemple de Barack Obama, issu de la minorité noire et devenu président des États-Unis, est édifiant à cet effet et est bien vu ici. On sait aussi que dans les communautés dites majoritaires, les individus deviennent minoritaires lorsqu’ils s’adonnent à la paresse et ne produisent rien.
La majorité n’est donc pas dans le nombre, mais dans le degré d’intellectualité, dans la puissance du travail et la capacité à produire des richesses. À l’inverse, la minorité n’est pas non plus dans le nombre, mais dans le refus du travail, la pratique de la corruption et du vol, la paresse, l’absence de valeurs, le manque d’éducation, l’incapacité à s’élever au-delà de son village et de sa tribu pour défendre des causes universelles. Le régime Biya, en donnant aux prétendus groupes minoritaires l’impression de les protéger, les infantilise et les amène à intégrer dans leurs attitudes et comportements les éléments négatifs très caractéristiques de la minorité et, par conséquent, à avoir une perception erronée du rôle de l’État, de la gestion des biens publics et de la gouvernance. C’est Eboussi Boulaga qui trouva des mots justes et forts pour le démontrer : «Autochtones, allogènes, ces mots sonnent pédants et barbares. Ils sont l’une des manifestations d’une inculture et d’une cupidité grandissantes (…) la protection des minorités relève d’une mauvaise écologie; on n’a pas à protéger une catégorie de citoyens comme on fait des espèces animales ou végétales en danger de disparition.»
Le Cameroun a besoin de nouveaux constitutionnalistes, de constitutionnalistes modernes et éclairés qui travailleront à la refondation complète des institutions de la république telle que le changement des mentalités populaires et des comportements citoyens en seront le corollaire. Nous espérons leur avènement pour bientôt.