Cameroun/Résultats de l’élection: Paul Biya couronné, l’opposition court-circuitée

Les membres de la coalition ont été pris de court par la longueur de la proclamation des résultats, la manifestation annoncée s’en est trouvée avortée

Paul Biya proclamé vainqueur, l’opposition discrète
Paul Biya, 78 ans et au pouvoir depuis 1982 a sans surprise, été reélu président du Cameroun pour un sixième mandat avec 77,98% des suffrages. Est déclaré président comme ayant obtenu la majorité des suffrages exprimés le candidat Paul Biya, a notamment déclaré M. Dipanda Moelle en conclusion vendredi 21 octobre 2011 vers 19 heures 30, d’une lecture de proclamation des résultats qui a débuté vers 11 heures 30 locales, et a duré plus de 8heures. Quelques personnes s’inquiétaient de la survenance des incidents, alimentés par la surenchère pacifique des autorités et avec elles certaines associations. C’est donc dans un climat presqu’électrique, que la Cour Suprême s’est réunie pour cette proclamation des résultats. Autour de ses bâtiments, de nombreux militaires et forces anti-émeute étaient mobilisés, certains visibles, d’autres plus discrets. Les partis de l’opposition qui avaient annoncé une manifestation en protestation, sont restés réservés. Des représentants de ces partis étaient présents dans la foule, et ont finalement choisi de ne pas se manifester comme initialement prévu. La journée n’a pas enregistré d’incidents particuliers. Aucune raison officielle n’a été donnée, mais il semble que les responsables signataires de la déclaration de Yaoundé ne se soient pas accordés sur la méthode. « Nous avons proposé d’adopter une certaine stratégie mais les autres ont refusé de la suivre, la présidente est déstabilisée par cette réaction des autres membres et ne comprend pas leurs réactions », a fait savoir un des responsables du CPP de Kah Walla, présent dans la foule. Dans la foule aussi on pouvait apercevoir des membres du SDF de John Fru Ndi, et de l’UDC de Ndam Njoya. Jean de Dieu Momo lui aussi membre de la coalition s’était désolidarisé la veille, du mot d’ordre de protestation. « J’ai reçu un message téléphonique de Momo, qui annonçait qu’il se désolidarisait du mot d’ordre de manifestation contre la proclamation des résultats », a fait savoir un journaliste du quotidien la Nouvelle Expression. Preuve de cette désolidarisation Jean de Dieu Momo, était présent dans la salle, contrairement aux autres membres de la coalition qui ne se sont pas présentés.

Entre calme et indifférence des populations
Les populations de Yaoundé ont vaqué normalement à leurs occupations durant toute la journée, ignorant parfois complètement ce qui se passe. Certaines personnes présentes ont attribué à la longueur du temps pris pour lire les résultats, une volonté manifeste de boucler dans une période où la nuit serait déjà tombée, ce qui rendrait impossible toute manifestation visible. Après avoir lu les résultats dans les 59 départements de l’intérieur du pays en un peu plus de 4 heures de temps, le président Alexis Dipanda Mouelle de la Cour Suprême a choisi alors qu’il était 17 heures, de lire les résultats de la diaspora pour chaque bureau de vote, au total 79. Une stratégie qui semble avoir marché. A 18 heures 30 plusieurs membres des partis qui déclaraient vouloir « profiter de la présence du corps diplomatique pour manifester », ont quitté les lieux. Une réunion de ces partis était prévue au siège de l’UDC à Yaoundé, mais aucune information supplémentaire n’en a été donnée. L’annonce des résultats n’a finalement pas donné lieu à des expressions particulières. Le chef d’Etat sortant aujourd’hui réélu, a obtenu 3.772.527 voix (77,989%) devant son opposant du Social Democratic Front (SDF) John Fru Ndi qui obtient 578.175 voix (10,712%). Le taux de participation, seul enjeu du scrutin, était en baisse. 65,82% contre 82,83% en 2004. Au total, 4 951 434 personnes sur 7 521 651 ont finalement exprimé leur voix à l’occasion de cette élection à un seul tour tenue le 09 octobre dernier. La proclamation des résultats à donné lieu à des réjouissances de la part de certains membres du RDPC, du Candidat vainqueur. Paul Biya devrait prêter serment dans la quinzaine suivant cette proclamation.

Cameroun/Contentieux électoral: Un candidat abandonne les débats

Bernard Muna a précipitamment décidé de ne plus assister aux débats à la Cour Suprême, alors qu’il était invité à plaider pour sa deuxième requête

Bernard Muna, 71 ans et candidat de l’Alliance des forces patriotiques (AFP) à l’élection présidentielle camerounaise du 09 octobre, a précipitamment quitté la Cour Suprême ce mercredi 19 octobre 2011 et jour des débats du contentieux électoral, alors qu’il était invité à plaider pour sa deuxième requête. Monsieur le président du conseil, je vais vous prier de m’excuser, mais je ne peux plus continuer de rester. Je pensais qu’on était venu ici pour dire le droit, mais visiblement ce n’est pas le cas, a-t-il fait savoir avant d’abandonner la salle des audiences. Bernard Muna a expliqué par la suite pour justifier son acte, avoir reçu séance tenante, une invitation de la Cour Suprême qui statue pour la circonstance, comme Conseil constitutionnel, à venir assister à la lecture des résultats le 21 octobre prochain.

« Nous ne pouvons pas, alors que nous demandons une annulation totale de l’élection, tout au moins une reconsidération par le Conseil Constitutionnel du déroulement du scrutin, recevoir une invitation à venir assister à la proclamation des résultats. A mes yeux c’est la preuve suffisante que la position de ce conseil est déjà arrêtée, et moi je me refuse à animer ce théâtre »

Une vingtaine de recours étaient en examen ce mercredi 19 octobre 2011, à la cour suprême. Les quelques recours jugés recevables sur la forme ont été déclarés non fondés, faute de preuves et donc rejetés sur le fond. Le cas de Jean Jacques Ekindi a été jugé irrecevable pour défaut de base légale. Il est apparu que le Candidat du MP a, dans ses conclusions, invoqué une loi qui s’appliquait aux élections législatives plutôt qu’à l’élection présidentielle. Une association de protection des droits des infirmes, basée à Eseka dans la région du Littoral, a aussi vu sa requête rejetée. Les membres du Conseil ont décidé que cette association n’avait pas qualité pour demander l’annulation de l’élection, n’étant ni membre politique, ni acteur de cette élection.

Rejetée encore la requête d’Adamou Ndam Njoya, le candidat de l’union pour la démocratie au Cameroun (UDC). Le conseil a estimé que la demande en annulation pour dysfonctionnement dans l’organisation ne s’appuyait sur aucun fondement légal et matériel. Un argumentaire qui a aussi été utilisé dans le rejet de la première requête du candidat Muna. Pour ce jour de contentieux, le candidat président Paul Biya était représenté par les ministres Grégroire Owona, Elvis Ngole et Pierre Moukoko Mbonjo, ancien membre du gouvernement. A côté de ces politiques, une équipe d’avocats volontaires était aussi présente pour défendre les intérêts du parti au Pouvoir RDPC et de son candidat.

Le conseil constitutionnel a semblé agacé par cette représentation volontaire et a déclaré sans objet les interventions de ses membres. Malgré sa création, le constitutionnel n’existe pas à proprement parler au Cameroun. Ce sont des membres de la Cour Suprême qui y siègent occasionnellement pour des questions dont ce conseil est compétent. Dans la hiérarchie administrative de la justice, le président Biya qui était aussi candidat à cette élection est le président suprême de la magistrature, dont il nomme les membres. Une situation qui jette un doute sur l’impartialité du conseil constitutionnel dans sa forme actuelle.

Bernard Muna avait introduit deux requêtes en annulation complète des élections, une avant le déroulement du vote et une autre juste après. Sur sa première requête, les membres du Conseil constitutionnel ont statué sur son caractère non fondé. La deuxième a connu le même sort.

 

Présidentielle camerounaise: Fin du décompte des votes, entrée en jeu de la Cour Suprême

La Commission de recensement général des votes a achevé lundi soir ses travaux et devrait remettre ce mardi le dossier à la Cour Suprême

La commission nationale de recensement général des votes dont les travaux sont achevés, devraient transmettre ce mardi 18 octobre 2011, les différents procès verbaux à la Cour Suprême du Cameroun pour un ultime examen. C’est lundi tard dans la soirée que cette commission a achevé les travaux de décompte général des votes aussi bien de l’intérieur que de l’extérieur du pays. La remise de ces procès verbaux annonce le début de l’examen par la Cour suprême siégeant cette fois comme Conseil constitutionnel du contentieux électoral. Une réunion de ses membres est annoncée ce même jour, pour se pencher sur les 20 recours introduits par certains candidats à l’élection présidentielle.

Les requérants demandent l’annulation partielle ou totale de ce scrutin. Cette audience de règlement est programmée demain mercredi dans la salle des audiences de la Cour suprême. Le règlement du contentieux électoral ouvrira la voie à la proclamation des résultats définitifs de l’élection présidentielle. Mais dans les coulisses, de nombreuses critiques se font entendre. Dans l’opposition on reproche le caractère inamovible et peu pertinent des membres nommés de la commission. Son président Clément Atangana, occupe ces fonctions depuis 1992 et préside aussi par ailleurs la chambre administrative de la Cour Suprême. Autre reproche, les pouvoirs de la commission qui pour certains étaient limités. Selon la loi électorale, sa seule fonction était de redresser les erreurs matérielles éventuelles des décomptes des votes, sans « toutefois annuler les procès-verbaux correspondants ». Seule compétente en la matière, la cour suprême en réalité, dont le chef suprême est le candidat président sortant Paul Biya. D’un autre côté, lors du déroulement du vote, on a remarqué une forte absence des représentants des candidats de l’opposition. Une situation qui a fait dire aux observateurs de la CEEAC (Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale), que ceux-ci risqueraient de manquer d’éléments de faits objectifs pour soutenir leurs revendications.

D’autres anomalies ont été rapportées dans le cadre des travaux de la commission. Selon une information rapportée par l’Agence de presse Chine Nouvelle, un membre de la commission représentant un candidat d’opposition a consigné dans son rapport personnel la présence devant la commission lundi matin, du président du tribunal de Kumba (sud-ouest) « pour remettre une autre version du rapport de la commission départementale à la commission nationale ». On se souvient que ces rapports du sud-ouest avaient créé la polémique en raison du retard de son acheminement. Cette agence d’information rapporte d’autres témoignages d’anomalies. « Le nombre de votants supérieur au nombre d’inscrits », des « résultats de Kogne (Ouest) introuvables « , et aussi des retards observés dans la transmission des procès- verbaux de l’élection, dans certains départements phares tels que le Wouri qui abrite Douala, la métropole économique.

Les travaux de la commission se sont déroulés sans Albert Dzongang, un des candidats à cette élection. Il n’a pas pu voter en raison de la non présence de son nom sur une liste électorale. J’ai même appelé un observateur qui passait par là pour qu’il voit de lui-même la mascarade, mais il n’a rien fait, je ne vois pas pourquoi je devrais assister aux travaux de la commission dans ces conditions là, a fait savoir le candidat de la Dynamique lors d’un point de presse. L’opinion publique retient son souffle alors qu’on approche de ce moment ultime de l’élection. Une coalition composée de 7 leaders de l’opposition a annoncé son intention de manifester contre la publication des résultats et exige une révision de la loi électorale et l’organisation d’une nouvelle élection de consensus.

Cartes électorales: Jean David Bilé expérimente la formule SMS

Le DG d’AES Sonel a procédé par le Short message service pour avoir un bon taux de participation à Mbanga, lors de la présidentielle

Idée ingénieuse
Cette technique a fonctionné le plus le jour du scrutin. Face aux multiples problèmes de repérage des noms, des bureaux de vote et surtout de récupération des cartes électorales rencontrés aussi à Mbanga, la seconde grande ville du département du Moungo, Jean David Bilé, en sa qualité de président de la commission locale pour la campagne du RDPC dans cet arrondissement, a eu une idée ingénieuse. Le président d’Aes APCO a fait installer à son QG de campagne une personne qui était chargée de recevoir ceux des militants qui n’avaient pas retrouvé leur bureau de vote ou leur nom.

Il a aussi mobilisé des Bend skin qui étaient-là, prêts à démarrer. Dès qu’un militant se présentait avec sa requête, son nom était envoyé par SMS à un représentant du RDPC dans tous les bureaux de vote. Celui-ci devait parcourir la liste pour chercher ce nom. Et celui qui le trouvait, signalait aussitôt par SMS au QG. Et le Bend skin démarrait avec le militant pour le conduire à son bureau de vote. Ce schéma, indiquent des sources généralement bien informées, a bien fonctionné jusqu’au moment où le sous-préfet a pris la résolution de limiter les mouvements des Bend skins dans la ville. Cette même technique, apprend-on, a été expérimentée en matière des cartes d’électeurs. « C’est quasiment la même chose. Quand un militant se présentait au QG, il déposait sa requête. S’il n’a pas de carte d’électeurs, on le précise aux différents représentants du RDPC dans les bureaux de vote. Celui qui trouve son nom envoie le SMS au QG et le Bend Skin le conduit à l’endroit indiqué», soulignent nos sources.

Le SMS a également joué un grand rôle avant le 9 octobre 2011. En effet, « quand un militant n’arrivait pas à récupérer sa carte, il laissait son nom et son numéro de téléphone au QG. Ces éléments étaient envoyés par SMS aux représentants du RDPC dans les différents points de distribution qui fouillaient et celui qui trouvait la carte envoyait le nom du lieu par SMS au concerné », apprend-on. « Ceci fait gagner énormément en temps et évite surtout des déplacements inutiles », précisent les mêmes sources.

Partenariat avec CAMTEL, MTN et Orange

Dans l’ensemble, c’est à travers ces astuces que Jean David Bilé a gagné un pari dans une ville caricaturée comme étant de l’opposition, et où un certain Lapiro de Mbanga ramait à contre-courant. « Dans le climat d’appel à l’abstention diffusé par Lapiro, ce n’était pas un pari gagné d’avance. Pour tout te dire, je le croyais perdu. Mais il a mouillé le maillot sur le terrain, porte à porte, associations au lieu de meeting, et je suis surpris par le résultat », témoigne un des proches de Jean David Bilé, sous le sceau de l’anonymat. «Surtout que c’est sa première expérience d’animation de campagne », précise-t-il. En effet, sur un nombre d’inscrits de 18.549, 11.126 personnes ont pu voter à Mbanga, soit un taux de participation de 59,98%.

D’après plusieurs observateurs avertis, si cette technique réservée exclusivement aux militants du RDPC était élargie aux autres électeurs, le taux de participation avoinerait les 100%. C’est pourquoi, ils pensent que les responsables d’ELECAM doivent aussi expérimenter cette technique de SMS. «Quand quelqu’un vient s’inscrire, il laisse son numéro de téléphone et dès que sa carte est disponible, on lui envoie un SMS avec le nom du quartier, du bureau de vote », proposent-ils. «C’est vrai qu’il faut un peu plus de moyens, mais un partenariat avec Camtel, Orange ou MTN ferait l’affaire », tranchent-ils. Pour nombre d’observateurs, cette méthode peut amoindrir, sinon annihiler les problèmes rencontrés dans la distribution des cartes d’électeurs.