Romance : on s’aimera « Nchallah »

Dans son dernier roman, Jacques Fulbert Owono raconte une idylle improbable qui bat en brèche le modèle identitaire imposé par la religion ou la culture.

« Nchallah » (si Dieu le veut) est une histoire d’amour comme on n’en trouve que dans les romans : celle d’Akoa, « guerrier » camerounais chrétien cherchant la vérité (il fait des études en philosophie) et de Samira, jeune magrébine moulée dans les principes de l’Islam. En Allemagne, où ils vivent tous les deux, leur idylle est une curiosité. Comment un Africain chrétien, Noir qui pis est, a-t-il pu conquérir une musulmane blanche d’Afrique du nord? C’est la grande question que se posent leurs proches respectifs. Ceux qui ne se la posent pas s’en éloignent. Samira a carrément été abandonnée par ses amies qui considèrent qu’elle a trahi les principes musulmans en s’amourachant d’un « kahlouche ».

Pourtant, cet amour improbable- qui n’est pas rose tous les jours- bravera les clichés et les stigmates. Il bravera même une révolution. En effet, dans le petit village africain où vit la famille de Samira, la colère gronde. Les conditions de vie se sont dégradées et le pouvoir en profite pour écraser le petit peuple. Djamila, veuve, employée à la préfecture du village, est renvoyée de son travail un bon matin. Humiliée, déconfite, la jeune femme décide de s’immoler par le feu. De quoi faire déborder la coupe déjà pleine.

L’humain au centre des préoccupations

La révolution qui s’ensuit porte son nom : le printemps Djamila. Ali, le père de Samira, en est l’un des leaders. Et, au beau milieu de ce chaos que le couple Akoa – Samira décide d’assumer son amour. Ils savent tous les deux que les barrières culturelles et religieuses ne joueront pas à leur avantage mais ils sont prêts à affronter le rejet. Heureusement, Akoa a de la répartie. Ça suffira pour remettre en question les profondes convictions « traditionalistes » du vieil Ali, d’abord sceptique par l’union souhaitée par ces deux jeunes gens.

Au-delà de l’histoire d’amour entre un homme et une femme,  « Nchallah », paru en avril 2017, questionne le sens des différences, notamment religieuses.  L’humanité n’est-elle pas antérieure aux religions et aux traditions auxquelles les Hommes s’accrochent viscéralement ? L’amour n’est-il pas le message du Christianisme, de l’Islam et de toutes les autres obédiences ? D’où vient donc cette intolérance culturelle ? Quid du racisme dont sont victimes les Noirs en Occident ? Eux qui ont déjà bien assez de mal à y vivre car, il faut nourrir, soigner et blanchir la famille restée au pays. L’auteur s’interroge et milite pour que l’humain revienne au centre des préoccupations. Et seul l’amour est capable d’un tel exploit. Akoa et Samira en sont la preuve.

Hans De Marie Heungoup: «un radicalisme religieux rampant travaille la société camerounaise»

L’analyste pour le Cameroun de l’International Crisis Group revient sur les conclusions présentées dans un récent rapport de l’institution

Les prémices du radicalisme religieux apparaissent dans la société camerounaise, qu’est-ce qui vous permet d’affirmer cela?
Disons que depuis 30 années, le Cameroun est travaillé par un ensemble de dynamiques à l’intérieur des courants religieux, chrétiens et musulmans, qui font que, peu à peu, l’orientation doctrinaire et idéologique de ces courants religieux va vers des voies fondamentalistes et des voies radicales. Si vous prenez par exemple l’islam au sein du Cameroun, vous vous rendrez compte qu’à partir des années 1960, il y a eu peu à peu la Tidjaniya, qui est l’islam traditionnel camerounais, l’islam Soufi, qui a été supplanté à certains endroits par le sunnisme. A partir des années 1980, il y a eu un prosélytisme qui est venu d’Egypte, des pays du Moyen Orient, mais aussi des Camerounais qui sont allés se faire former à l’étranger, au Soudan, en Egypte et dans ce Moyen Orient. Peu à peu, ils ont ramené dans leurs bagages un islam qui est soit proche du wahhabisme, soit proche du salafisme. Donc, c’est tout cela qui, mis ensemble, avec également la montée en puissance des églises de réveil, permet de penser qu’il y a aujourd’hui des dynamiques qui sont beaucoup plus rigoristes, plus fondamentalistes; et qui, mises en relation avec beaucoup d’autres échos au sein de la société camerounaise, sont potentiellement conflictogènes.

Ça veut dire que le radicalisme religieux, ce n’est pas seulement Boko Haram, c’est un phénomène bien plus large que cela?
Oui, c’est un radicalisme rampant qui travaille la société camerounaise, et qui, mis en corrélation avec le contexte actuel, est à tout le moins menaçant.

Pourquoi ces idées radicales, rigoristes, du côté des musulmans attirent-elles les jeunes dans le pays ?
Disons qu’il y a plusieurs raisons pour expliquer cela. D’une part, il y a de plus en plus une conversion à l’islam de non-Peuls et de non-Haoussas. Et lorsque ceux-ci se convertissent à l’Islam, pour certains, pour échapper à la domination qui reste prégnante même si elle est aujourd’hui relative de Peuls et de Haoussas dans l’Islam camerounais, préfèrent aller disent-ils vers la source, c’est-à-dire vers l’Arabie Saoudite, vers le Soudan, vers les pays du Golfe, où ils subissent un processus d’arabisation. Ils rentrent parfois avec, dans leurs bagages, un islam qui peut être rigoriste. Les jeunes aussi parce qu’il y a un problème de fracture générationnelle au sein des instances représentatives de l’Islam.

Concernant le Christianisme, les églises du réveil sont en plein essor depuis plusieurs années, pourquoi sont-elles porteuses d’intolérance religieuse selon vous?
Le premier tient au fait que ce sont des églises qui, du point de vue de leur fondement doctrinaire, ont une interprétation libéraliste et exclusiviste de la doctrine chrétienne ou de la foi chrétienne. Elles se coupent elles même de la relation avec les autres communautés chrétiennes: catholiques, protestants ou même pentecôtistes traditionnels du pays. L’autre élément tient au fait qu’il s’agit des églises qui pour certaines s’auto-excluent elles même des initiatives de dialogue interreligieux. Bien entendu, ce ne serait pas complètement exact de ne pas relever le fait aussi que ces églises sont mal perçues et parfois perçues avec une certaine condescendance par d’autres tendances du christianisme camerounais. Je pense notamment aux catholiques pour qui ces églises sont purement et simplement des sectes.

Quels sont les risques que fait peser la montée de ce radicalisme, à la fois du côté musulman et du côté chrétien?
Les risques sont de deux ordres. Le premier risque est la montée de l’intolérance religieuse au sein des deux communautés parce que qui dit radicalisme dit se couper de l’autre, dit moins de dialogue interreligieux, moins de compromis. Le deuxième risque est lui lié au développement de la menace Boko Haram: c’est qu’il puisse y avoir un acte de jonction d’intérêts entre les radicaux les plus endurcis dans l’Islam; et ceux qui sont proches de la mouvance véritablement théorique des djihadistes de Boko Haram.

Le gouvernement au Cameroun a-t-il pris la mesure du phénomène pour vous?
Le gros des efforts du gouvernement camerounais est concentré à la lutte contre Boko Haram, c’est la menace visible. Mais pour ce qui est de la menace beaucoup plus insidieuse, celle du radicalisme religieux, il y a des initiatives éparses qui sont prises par le gouvernement mais il n’y a pas encore une politique réelle de lutte contre la radicalisation.

Consulter le rapport d’ICG: « Cameroun: la menace du radicalisme religieux »

Hans De Marie Heungoup
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Le livre du Camerounais Clavaire Elanga sur la « La logique de Dieu », Best Seller aux Etats-Unis ?

Conférencier émérite, il compte parmi les écrivains les plus engagés

Résumé de l’ouvrage
Dieu est-il logique ? Une question philosophique d’essence métaphysique. Autour de celle-ci gravitent nombre de préoccupations existentielles, ou s’affrontent anthropologues, biologistes, astrophysiciens, kabbalistes et exegetes de tous bords. Qui est Dieu, être suprême, loi impersonnelle ou principe? Quelle est l’origine des inégalites sociales ? Pourquoi Dieu si puissant et bienveillant, permet-il que le croyant souffre ? Existe-t-il dans le cosmos des forces qui determinent nos activites et qui font de nous des êtres differents? Avec toutes ces forces, l’homme peut-il encore être libre? Dans une approche dialectique sous-tendue d’experiences extraordinaires, l’auteur fustige les célèbres courants idéologiques des derniers siecles. Ce faisant, il ouvre de vastes horizons à la démystification des entités mésocosmiques et phénomènes paranormaux.

Quelle est la logique de Dieu ?
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Un mot sur l’auteur…
Ex professeur des Ecoles normales Cameroun, l’auteur a dû vaincre les forces du mal pour parvenir au but. Entré en 6ème au CES d’Akonolinga, c’est au Collège Madeleine à Yaoundé qu’il passe et réussit le BEPC (Allemand) en 1981. Il n’est pas une lumière comme élève, mais assez éloquent d’expression et téméraire. Ne pouvant payer ses études de la 2nd en Terminale, il devient pongeur de restaurant, man uvre, domestique tout en allant aux cours du soir. En 1983, il entre à l’ENIA d’Ebolowa (Délégué et Major de Promotion). Autodidacte par excellence, il s’illustre par une grande curiosité intellectuelle; on le dit même prétentieux.

Après plusieurs péripéties, il décroche une licence en Psychologie, et est admis simultanément à deux concours du 2nd cycle de l’ENS en 2002 (filières Philosophie et Sciences de l’Education). Il choisit l’enseignement normal tout en suivant parallèlement ses cours de Maîtrise en Psychologie Sociale. Après son DIPEN II (Août 2004), il est affecté comme Professeur de Psychologie a l’ENIEG d’Abong-Mbang. Il occupera par entre temps et par la suite des postes de responsabilité dans son administration d’origine. Frustré par son affectation dans la région de l’Est Cameroun, il demande sa retraite anticipée. En dernier ressort, il immigre aux Etats-Unis d’Amérique où il suit une formation à Ramsey Academy au Texas, et est recruté comme fonctionnaire. Ce qui ne l’empêche pas en privé de dispenser des cours dans différents centres universitaires et d’organiser des conférences.

Clavaire Elanga dans ses méditations
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