J’aime le pagne de chez moi: Pour 1000 Fcfa ou 1000 $?

Par Serge Tchaha, Afrique Expansion Magazine

L’idée d’écrire cette chronique est vieille de quelques mois. Elle est née car, comme on dit sur Facebook, j’ai beaucoup « like » et « share » des photos de superbes femmes, superbes certes, mais surtout drapées dans de magnifiques vêtements, considérés comme étant typiquement africains. D’ailleurs une de mes pages préférées se nomme : « J’aime le pagne de chez moi (d’Afrique, ndlr) ». L’intérêt s’est accru avec la lecture récente de nombreux articles sur le branding. Je me suis posé une question à laquelle je veux apporter un début de réponse dans ce papier : dans un monde global, où l’on parle de « macdonalisation » et de « coca-colaïsation » de la planète, peut-on voir émerger une forte vague de designers de mode africains de calibre mondial qui créeront des marques fortes et internationales à partir de tissus considérés comme africains ?

La mondialisation rapproche des cultures locales
Je me plais toujours à reprendre cette illustration de l’ancien Premier ministre français, Jean-Pierre Raffarin pour dire la distance entre la mondialisation économique et la mondialisation culturelle. Dans mon dernier ouvrage, La Francophonie économique – Horizons des possibles vus d’Afrique, je signale qu’« il faisait remarquer que la mondialisation économique a su évoluer. Elle a su simplifier les choses en établissant des normes mondialement reconnues : il n’existe dans le monde que 2 normes de voltages et 3 types d’écartements de rails. Dans le même temps, on parle 3000 langues sur la terre, car il y a une résistance culturelle. » Michaël Oustinoff, contributeur à l’ouvrage collectif Net.Langue, défend la thèse selon laquelle le décloisonnement des marchés a progressé beaucoup plus vite que la maîtrise de la langue anglaise. En clair, on n’assiste pas à un tout-à-l’anglais. Je partage assez largement leur sentiment. Il est clair que plus qu’hier, grâce à Internet et aux TI, l’interpénétration des cultures est plus forte, mais paradoxalement, au lieu de les unifier, la mondialisation a contribué à inciter les peuples à s’affirmer, à vouloir partie prenante de la définition l’agenda culturel mondial. Ainsi après les CNN, Telesur, Al Jazeera, France 24, nous avons AFRICA 24. Cette volonté de ne pas être définis par les autres s’illustre aussi naturellement par la volonté de se s’habiller – sans que ce ne soit exclusif – avec des tenues traditionnelles africaines ou des vêtements considérés comme provenant typiquement de cette partie du monde. Cette appétence rencontre, de l’autre côté la montée d’une classe de designers talentueux qui est capable de faire avec cette matière première les coupes les plus modernes. Résumons-nous. La mondialisation, contrairement à certains pronostics, a contribué, dans une certaine mesure, à provoquer chez les peuples une volonté incompressible de s’affirmer, de participer à l’agenda culturel mondial. Et c’est formidable, les mutations économiques et démographiques qui s’opèrent et s’opéreront à l’avenir donneront aux créateurs africains un marché parmi les plus vastes au monde.

De la nécessité de bâtir des marques fortes
Et dès lors, ce qui me paraît absolument essentiel, c’est la capacité de bâtir des marques fortes et qui auront même vocation à se projeter hors du continent. La création de valeur ajoutée est l’un des concepts cardinaux des économistes car c’est elle qui permet la production de richesses. À ce propos, il y a, je crois une unanimité pour dire que l’Afrique n’en crée pas assez : elle se contente d’exporter ses matières premières à l’état brut; elle les transforme très peu et demeure, par le fait même, au plus bas de la chaîne de valeur. Mon sentiment, c’est que ce sera strictement la même chose avec l’industrie de la mode si nous n’y prenons garde. Alors bien sûr, il ne s’agit pas (que) de matières premières, mais je veux dire que si nos designers ne savent pas construire des images marque fascinantes et attirantes, des univers fortement désirés, des histoires qui font rêver autour de leur création, il est à penser que le potentiel de nos designers restera en deçà de ses réelles possibilités. Autant que nous ne savons pas capitaliser sur notre cacao alors que nous en sommes les champions mondiaux de la production; autant que nous ne savons pas tirer la pleine valeur ajoutée du pétrole alors que nous en possédons 10% des réserves prouvées; autant nous ne saurons pas grimper l’échelle de la valeur ajoutée dans l’industrie de la mode.


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Que peut-on faire pour y parvenir ?
Fait rare dans cette chronique, j’ai tenu à donner la parole à deux experts de l’univers de la mode. Pour Laura Éboa Songuè, une des co-fondatrices du magazine FASHIZBLACK « Tout est une question de communication et d’image de marque. Il n’y a pas de secret. Avant de vendre des produits, les géants du luxe, sous l’égide de LVMH ou PPR vendent d’abord des marques FORTES. C’est via la communication, les relations presse et le marketing que les marques instillent des codes qui poussent les lambda à devenir des consommateurs. Mais il faut noter que ces proccess viennent en bout de chaine, il faut d’abord avoir un produit de qualité (il ne suffit pas de faire de « l’Africain », pour vendre aux Africains, il faut de la qualité!), ainsi que des ressources humaines et financières pour produire en masse. Ensuite, il faut un écosystème pour que ces marques survivent, c’est-à-dire des médias pour en parler, des fashion weeks pour les exposer, des lieux de vente pour les acheter, des leaders d’opinion pour porter leur message… » Son avis est complété par le designer de grand talent qu’est Imane Ayissi : « d’une manière générale, pour que des tissus soient utilisés par des designers (qu’ils soient Africains ou d’une autre origine) pour du haut de gamme, il faut que ces tissus soient eux-mêmes haut de gamme, c’est à dire de bonne qualité, beaux et créatifs, adaptés au mode de vie actuel en terme de confort, de poids, de facilité d’entretien.etc. Personnellement j’aimerais beaucoup utiliser plus de tissus produits en Afrique, mais c’est très difficile de trouver ce genre de tissus fabriqués ici, sans parler des difficultés d’approvisionnement, d’irrégularité de qualité, de délais de livraisons.etc. Pour tout dire c’est un peu casse-gueule et souvent je finis par acheter des tissus en France, en Italie, au Japon et même en Chine, où je suis certain de la qualité, où les fournisseurs sont fiables.etc. En Afrique je n’achète en général au final que du coton basique. »

Le travail à abattre sera donc long : de la naissance et la prospérité de média world class à la capacité de toute la chaîne logistique d’être hautement performante, rien ne devra être négligé ! Mais je surveillerai l’évolution de la mode africaine avec grande attention car, si dans Bruits, Jacques Attali nous indique que la musique est prophétique; je suis de ceux qui pensent que l’émergence de marques de mode africaines de classe mondiale – et donc leur consommation par les Africains -, qui se spécialiseront dans la conception de vêtements à partir de tissus considérés comme africains reflètera/annoncera une Afrique nouvelle. Je prétends qu’à ce moment-là, l’Afrique assumera plus son histoire, ses origines, sa culture. Quand nous aimerons le pagne de chez nous pas seulement pour 1000 FCFA (2$) mais pour 100, 500 ou 1000$, nous achèterons au-delà d’un vêtement, nous nous approprierons un univers, une légende, un style de vie. Pour reprendre une expression chère à Célestin Monga, notre self-esteem, se rapprochera du beau-fixe et il me semble que nous serons alors plus à même de contribuer à réécrire dans le Grand Livre de l’Histoire de l’Humanité. Rien de moins !


Cette Afrique qui gagne la mondialisation

Par Serge Tchaha

Le monde change! La Chine est devenue la deuxième puissance économique au monde alors qu’elle était un pays pauvre il y a quelques décennies. C’est au Brésil l’année dernière que s’est effectuée la plus grande ouverture du Capital au monde : 70 milliards USD. Selon le classement Forbes 2011, c’est Carlos Slim, un mexicain, qui est l’homme le plus riche de la planète. Le célèbre magazine américain estime sa fortune à 74 milliards USD. Ces faits symbolisent le changement que j’évoquais plus haut.

Des multinationales veulent s’installer en Afrique
Nous savons tous que l’entreprise créée par la famille Walton – WALMART – a des visées relativement au continent de Lagnidé, Billion et Kabéruka. Rappelons qu’en 2009, son chiffre d’affaires était près de 20 fois l’équivalent du PIB camerounais, soit 408 milliards USD. L’on estime par ailleurs son nombre d’employés à 2,1 millions de personnes, soit environ 1,5 fois la population gabonaise. Mais c’est une autre entreprise qui m’a particulièrement intéressé ces derniers temps. Il s’agit du Cirque du Soleil. C’est sans doute une des plus entreprises culturelles les plus impressionnantes du monde et un des fleurons canadiens. Il se trouve que depuis quelques jours et jusqu’à début avril prochain, elle produira son spectacle SALTIMBANCO en Afrique du Sud. Une première depuis 26 ans qu’existe cette entreprise dont le chiffre d’affaires s’est établi à 850 millions de dollars l’an passé, selon les dires de son Président, M. Lamarre. C’est particulièrement intéressant et de mon point de vue, car c’est annonciateur de l’Afrique de demain. Ce n’est plus seulement le continent où l’essentiel des revenus était consacré à la nourriture et au logement. Le niveau de vie s’améliore, le pouvoir d’achat augmente et le revenu disponible pour la consommation de produits culturels de cette nature s’accroit.

Des hommes d’affaires de la CÉDÉAO et de la CÉMAC qui changent le monde
À côté de ces entreprises qui témoignent du renouvellement de la perspective économique en Afrique, il y a des hommes qui permettent, comme aurait dit Alain FOKA, d’échapper au pessimisme de rigueur quand il est sujet de l’Afrique. Il faudrait sans doute des centaines de papiers pour parler de tous ceux qui pourraient être dans cette liste. Car, en plus, on pourrait bien évidemment aller au-delà de ces deux zones géographiques. Cependant, parlons tout de même de quatre de ces hommes qui font partie de la crème de la crème des businessmen africains. Mais surtout, ceux qui illustrent comment l’Afrique, elle aussi, contribue de manière créative à la prospérité de ce monde.
. Tidiane THIAM. Ancien ministre ivoirien, il est le PDG de Prudential. C’est le premier groupe d’assurance britannique. C’est le premier noir occupe au Royaume-Uni un poste dans une entreprise de cette envergure. Permettez-moi de signaler que selon un communiqué rendu public le 9 mars dernier, Prudential a annoncé un chiffre d’affaires de 3,485 milliards £. Et son bénéfice après paiement d’impôts sera situé à 1,431 milliard £.

. Aliko DANGOTE. Comme nous le signalions dernièrement, le patron du groupe DANGOTE produit des ventes cumulées s’élevant annuellement à près 2 à 2,5 milliards USD. Ce nigérian, par ailleurs, avec DANGOTE SUGAR, permet à l’Afrique d’avoir la 2ème compagnie productrice de sucre au monde, en termes de tonnes.

. Constant NEMALE. Camerounais d’origine, cet homme de média est le Président et actionnaire majoritaire de la chaine de télévision d’information continue, AFRICA24. Monsieur Nemale est un de ces entrepreneurs africains qui doit faire face à la concurrence de puissantes organisations occidentales telles que CNN, TV5 ou France24 ou encore Euronews. Selon ses dirigeants, AFRICA24, en 2010 « est devenu officiellement la première chaîne mondiale d’information sur l’Afrique et surtout la chaine par satellite la plus regardée en Afrique Francophone. Un exploit au bout d’un an d’existence. »

. Severin Kezeu. Il est l’inventeur du système anticollision baptisé NAVIGATOR. Installé aux Émirats Arabes Unis, cet entrepreneur d’origine camerounaise, possède une entreprise qui est leader mondial sur son marché. Severin Kezeu estime que son groupe pèse 100 millions€.

Qu’on le veuille ou pas, l’Afrique est partie prenante active dans la mondialisation économique et beaucoup porte à croire que son influence y grandira!


Emprunt obligataire du Cameroun: Des conséquences pour la Cemac?

Comment les chantiers qui seront impactés par l’emprunt obligataire peuvent influer l’environnement économique de la sous-région?

Solidement implanté en Afrique centrale, doté de près de la moitié de la population et produisant plus du 1/3 du PIB sous-régional, limitrophe avec l’ensemble des pays de la CÉMAC – Communauté des Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale -, désirant être émergent en 2035, le Cameroun annonce et lance depuis plusieurs mois une série de projets de grande envergure. Pensons notamment au Fer de Mbalam. Selon Idriss Linge du journalducameroun.com, «le projet du fer de Mbalam représente donc un coût global de plus de 1 700 milliards de Fcfa. Selon le gouvernement camerounais, il pourrait impacter pour près de 17% sur le produit intérieur brut.». Selon le Ministère de l’Économie camerounais (MINEPAT), dans sa Lettre économique du Cameroun d’août 2009, annonçait que Rio Tinto Alcan investira 2500 milliards au Cameroun à compter de 2011. En décembre dernier a eu lieu, en faveur de l’État camerounais, la période de souscription à un emprunt obligataire d’une valeur de 200 milliards de FCFA (Environ 4 milliards de dollars canadiens). Le Conseil de l’Émetteur est constitué par trois banques situées sur le sol camerounais à savoir : Afriland First Bank, CitiBank Cameroon et la Société Générale des Banques au Cameroun (SGBC).

Cet emprunt, d’après la note d’information relative à l’emprunt obligataire, servira à financer 13 projets structurants dont le Cameroun a une quote-part évaluée précisément à 206 milliards. Cette une opération, à priori, intéressante car elle va dans le sens de faire du Cameroun un pays émergent en 2035. En effet selon plusieurs experts, dont l’économiste TOUNA MAMA, Conseiller spécial du Premier Ministre du Cameroun, notamment dans son livre « L’Économie Camerounaise : Pour un nouveau départ » (Éditions Afrédit), pour se développer, il faut que le taux d’investissement variant entre 25 et 30%. Donc s’endetter pour investir dans les grands projets est une excellente initiative car ces derniers permettent de : booster la productivité, renforcer l’appareil de production et améliorer l’attractivité du pays.

Des conséquences pour la CÉMAC

Il va de soi que l’ensemble des projets présentés plus haut ont un impact plus ou moins directs sur l’environnement économique de la CÉMAC mais, nous nous attarderons spécifiquement sur le Port en eau profonde de Kribi ainsi que la construction de la fibre optique.

Port en eau profonde de Kribi
La construction du port nécessitera près de 300 milliards, s’étalera sur 26 000 ha (environ 43 fois la superficie du port de Douala, capitale économique du Cameroun) et génèrera plusieurs dizaines de milliers d’emplois directs et indirects. D’après Éric Roland Kongou de Mutations, «le port de Kribi qui accueillera les navires de commerce d’une capacité de 100. 000 tonnes et d’un tirant d’eau de 16 mètres palliera le déficit du port de Douala jusqu’ici limité aux navires de 15. 000 tonnes et 7 mètres de tirant d’eau.». Dans un article sur jeuneafrique.com, paru en janvier 2010, Georges Dougueli mentionnait, en citant Nlend Banack, directeur du projet que : « Nous pourrons ainsi augmenter les flux de transports dans la sous-région à travers le corridor Kribi-Bangui [RCA]-Kisangani [RD Congo] »

Construction de 3 200 km de fibre optique
Ce projet coûtera près de 40 milliards de FCFA et la Chine le financera à hauteur de 85%. Là aussi, c’est un projet porteur qui à terme, permettra de contribuer à l’intégration de la sous-région Afrique centrale. Selon l’agence Xinhua : « le backbone national sera combiné avec le projet « Réseau de télécommunications haut débit à fibre optique de l’Afrique centrale » ou Central African Backbone (CAB), a expliqué Pierre Sonfack, coordonnateur de la composante nationale, lors du lancement officiel au Cameroun de ce projet concernant par ailleurs la Centrafrique et le Tchad. [.] »En ce qui concerne le projet CAB, il s’agit d’interconnecter les backbones des différents pays. Il faut également que ces pays- là mettent en place leurs backbones, c’est-à-dire leur infrastructure nationale à haut débit », a outre précisé M. Sonfack. [.]Prévu en deux phases, il consiste, d’une part, à l’interconnexion sur plus de 1.000 km du Cameroun, de la Centrafrique et du Tchad en s’appuyant sur la fibre optique posée le long du pipeline Tchad-Cameroun, et d’autre part, à l’extension du réseau aux trois autres pays (Congo, Gabon et Guinée équatoriale) de la CEMAC. ».

Différents projets qui bénéficieront de l’emprunt
Serge Tchaha (Source : Note d’information Emprunt Obligataire «ECMR 5,60% net 2010-2015»))/n

Communauté internationale: Après la Civilisation apportée lors de la colonisation, ils nous apportent désormais la légitimation à nos Présidents

Par Serge Tchaha

Depuis que ce monde est monde et que cette terre est terre, je ne connais pas au cours des derniers siècles, un peuple, aussi chanceux que le peuple qui remplit l’Afrique subsaharienne. Ils bénéficient de tellement d’amour de la part de la communauté internationale. Il est étonnant que les autres peuples n’aient pas encore fait la guerre pour bénéficier des mêmes attentions. Voilà des gens qui, c’est bien connu, ont été longuement et de tout temps d’ailleurs été choyés par la bienveillante communauté internationale. La dernière élection présidentielle en Côte d’Ivoire nous a encore donné l’occasion de mesurer toute la tendresse, la douceur, l’affection ô combien exceptionnelles que la communauté internationale portait à l’endroit des africains. Entendons-nous bien, l’objet de cette courte réflexion n’est pas de savoir si c’est ADO ou alors LG qui est le véritable vainqueur. Je veux vous inviter à réfléchir à l’amour éternel que nous porte la communauté internationale.

De la communauté internationale
De quoi s’agit-il ? Je préfère laisser le spécialiste des relations internationales, Hubert Védrine donner son avis sur cette expression. « Il n’y a pas encore de « communauté » internationale. C’est un terme sympathique mais prématuré. Le monde formera peut-être un jour une « communauté » mais ce n’est pas le cas aujourd’hui. Il y a dans ce monde des forces, des divisions et des tensions multiples. » (Word Policy, 2008, hubertvedrine.net). Je le rejoins parfaitement pour signaler qu’il y a tellement d’intérêts contradictoires entre acteurs internationaux qu’il n’existe point de «communauté» internationale car nous ne partageons pas toujours une «communauté» d’intérêts. Puisque je conçois que nombre de personnes puissent penser le contraire, je voudrais soumettre ceci à leur pensée :
– Parle-t-on de la même communauté internationale qui a refusé de reconnaître le Hamas alors qu’il avait été démocratiquement élu par les Palestiniens ?
– Parle-t-on de la même communauté internationale qui a soutenu des dictateurs et renversé des présidents démocratiquement élus ?
– Parle-t-on de la communauté internationale qui semble ignorer qu’il y a des millions de morts qui ont été tués en RDC au cours des dernières années ?
– Parle-t-on de cette communauté internationale qui n’a dit mot ou en tout cas n’a pas fait grand-chose de fondamental lors des élections présidentielles contestées au Gabon ou au Togo ?
– Est-ce toujours cette communauté internationale, dont certains membres, ne parlent de Bien Mal Acquis, que plusieurs décennies plus tard ?
– Est-ce bien de cette communauté internationale, dont un des membres les plus éminents, d’après WikiLeaks espionne les dirigeants des Nations Unies dont Ban KI MOON, Secrétaire Général ?
Sont-ce donc, ces défenseurs de la morale, de l’éthique et définisseur de ce qui est bien qui tentent de : « recueillir les  » empreintes digitales, photographies faciales, ADN et scanners de l’iris  » ou encore les numéros de cartes de crédit, mots de passe internet et autres détails privés des dirigeants de l’organisation. » ?
« Une directive similaire signée en avril 2009 d’Hillary Clinton réclame également des détails sur des personnalités dans trois pays africains: République démocratique du Congo, Rwanda et Burundi. La secrétaire d’Etat exige des données concernant des responsables d’avenir dans les domaines politique, militaire, commercial ou du renseignement. »(WikiLeaks, jeuneafrique.com, europe1.fr)

Quand la communauté internationale nous aide et nous aime

C’est bien connu, les colonisateurs ne sont arrivés en Afrique que pour nous faire du bien et civiliser les indigènes que nous étions. Faisant la constatation irréfutable, indémontable, implacable et irréversible selon laquelle nous n’avions ni culture, ni civilisation, ils nous ont généreusement donné et sans rien attendre – Que la Force de toutes les forces, comme l’appelait Senghor, soit loué et bénie à jamais – apporté religion, langue, bonnes manières et éducation. Au nom de cette attitude si bienveillante, je pense que les africains doivent continuer d’attendre, et même réclamer de cette «communauté» internationale une aide précieuse sans faille. Ils n’ont tellement rien d’autre à faire, ils n’ont tellement pas de souci à se faire, qu’ils peuvent bien s’occuper de nous et travailler pour nos intérêts. Contrairement à ce qu’avait affirmé Charles De Gaule, les États n’ont pas d’intérêts, ils n’ont que des amis. C’est bien connu dans le monde des relations internationales. Je défie Lapalisse de dire mieux!

Je rejoins donc sans réserve, l’esprit libéré, l’âme en paix, le c ur rempli d’amour, tous les africains qui ont applaudi, tellement fort que l’on a pensé qu’ils avaient quatre mains, quand la communauté internationale pour ne pas dire les occidentaux ont «adoubé» ADO, contre qui je n’ai rien en particulier. Tout au contraire, j’admire le parcours de l’homme, suis fier du rang de DGA qu’il a occupé au FMI et fus même séduit par sa façon d’envisager la politique économique de son pays. Une fois de plus, là n’est pas le débat, je pense que d’autres ont de meilleures réponses que moi.

À tous mes nouveaux amis, je veux dire, ceux qui célèbrent la reconnaissance par la «communauté» internationale, qui aurait ainsi «force de loi», je voudrais poser quelques questions :

.N’y a-t-il pas eu un empressement dans la reconnaissance de l’élection d’ADO ?
.N’y a-t-il pas une forme de néocolonialisme – encore que comme je l’ai démontré, la colonisation nous a tant apportée.- dans le mépris du Conseil Constitutionnel, instance suprême et habilitée à donner les résultats définitifs de l’élection présidentielle ? Le Président du Conseil Constitutionnel est un proche de Gbagbo ? Comme le rappelait l’Ambassadeur de Côte d’Ivoire en France, Son Excellence Monsieur Kipré, l’homologue français de YAO N’DRÉ est Monsieur DEBRÉ et ce dernier membre de l’UMP, parti présidentiel.
.N’aurait-il pas mieux valu adopter la position mesurée de Monsieur Henri Emmanuelli, ancien Président de l’Assemblée Nationale de France et député qui a déclaré : « Je le répète, le résultat n’est pas clair. Laurent Gbagbo est en tête dans la plupart des régions, sauf dans le Nord, où il est écrasé. Si les choses sont rétablies, le vote peut très bien être inversé. Donc, on attend. ». (Sud-Ouest.fr)
.Saviez-vous que plusieurs ambassadeurs africains dont ceux de l’Afrique du Sud – une démocratie africaine et première puissance économique du continent – et l’Angola – 3ème puissance économique de l’Afrique noire – ?
.La «communauté» internationale veillera-t-elle dans le futur proche, il y a de nombreuses élections en 2011 (Bénin, Cameroun, Nigéria.) à ce que la « vérité absolue » des urnes soit respectée sur tout le continent ? Sur toute la planète ?

Serge Tchaha
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« Le Nigéria: Futur pays-continent, quelles opportunités pour les pays de la Cemac? » par Serge TCHAHA

Quand on regarde le monde tel qu’il est, il apparait clairement qu’il y a des pays, permettez-moi l’expression, qui sont hors-normes. C’est sans doute pourquoi, ils sont appelés «pays-continent» ou pour certains «pays-monde». J’avoue ignorer s’il existe une définition scientifique universellement acceptée de ce mot-valise. Mais il est assez reconnu que les États-Unis d’Amérique avec plus de 300 millions d’habitants, 9 826 675 km2 et le quart de la richesse mondiale créée est un pays-continent. La Chine avec 1,3 milliard d’hommes et un territoire s’étendant 9 596 561 km2 fait également partie de cette catégorie. On pourrait aussi parler de l’Inde, de la Russie ou encore du Brésil, tant plusieurs de leurs statistiques peuvent sembler démesurées. Suite à des échanges avec un lecteur, j’ai décidé de faire ce papier car, à bien des égards, le Nigéria, dans les décennies à venir, pourrait être considéré comme un «pays-continent». Bien sûr que sur le plan économique, il n’aura la taille des pays précédemment cités mais l’observation de certaines tendances impose de se fasciner pour le pays des super eagles.

Le Nigéria, futur pays-continent?
Quelques faits :
.D’ici 30 à 40 ans, le Nigéria sera peuplé par près de 300 millions de personnes et sera encore le pays le plus populeux d’Afrique. Actuellement, il est le 8ème pays le plus peuplé au monde ;
.Sa superficie est de 923 768 km2, qui en fait la 32ème plus grande superficie au monde.
.Le pays actuellement dirigé par Goodluck Jonathan, est actuellement la deuxième économie de l’Afrique noire;
.Le Nigéria – si l’État et les plus puissants et influents industriels de l’industrie cinématographique sont visionnaires – aura l’occasion de s’imposer comme un phare culturel de l’Afrique, avec Nollywood. Rappelons que Nollywood est le pendant d’Hollywood aux États-Unis et de Bollywood en Inde. Selon un rapport publié fin 2009 par le Sénat français, le Nigéria aurait produit près de 10 000 films au cours des quinze dernières années. Nollywood en termes de nombre de films produits fait partie des trois premiers au monde, mais la qualité est de loin inférieure à celui des meilleurs standards internationaux. Selon Inaglobal.fr, « si l’on considère que moins d’un tiers de ce chiffre représente le coût de production des films (hors dépenses de duplication et de commercialisation), l’ensemble de la production annuelle du Nigeria dispose d’un budget inférieur à celui d’un seul film de Hollywood. Autrement dit, un film « nollywoodien » ne coûte pas plus que trois à quatre secondes d’un film américain. »
.Le Nigéria est candidat pour occuper un siège au Conseil permanent de sécurité de l’Organisation des Nations Unis (ONU).
.Le Nigéria ambitionne de créer à coups de plusieurs milliards de dollars la plus grande zone franche d’Afrique. Selon la télévision panafricaine AFRICA24, ces investissements seront 60% chinois et 40% nigérians. Cette zone permettra notamment à des entreprises chinoises de délocaliser au Nigéria. La réalisation de ce projet peut suggérer la place qu’entend prendre ce pays, qui a fêté ses 50 ans d’indépendance le 1er octobre, sur le plan industriel en Afrique. Ils ne doivent pas ignorer l’attractivité d’un marché composé par des centaines de millions de personnes.
.Toujours sur le plan économique, il convient de noter que le Nigéria est un des trois émergents africains en devenir qui est régulièrement cité dans le groupe que les spécialistes appellent les Next eleven ou Next thirteen. Selon le même rapport du Sénat français, « les gouvernements de M. Olusegun Obasanjo, premier Président de la IVe République, et de son successeur, M. Umaru Yar’Adua, ont tous mis en avant leur volonté réformatrice et ont multiplié, en conséquence, les programmes ambitieux de refonte de l’économie dans un sens néolibéral, avec l’objectif de faire du Nigeria une des vingt premières économies mondiales d’ici à 2050.»
Fort de ces constats, il est autorisé de penser que dans les décennies à venir, le Nigéria pourrait devenir (s’il ne l’est pas déjà d’ailleurs) en Afrique un géant politico-économico-culturel, et sur le plan global, ce que l’on pourrait appeler un «pays-continent».

Des possibles opportunités pour la CÉMAC
Il nous semble évident que les pays qui forment la Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale, au nom notamment de leur proximité avec le pays de Jay-Jay Okocha et de Nwanko Kanu, ont des bénéfices à tirer de l’émergence de cette République fédérale rassemblant 36 États.

Appliquons nous à en présenter trois :
.Premier marché africain. Je ne connais pas beaucoup d’entrepreneurs qui seraient mécontents d’avoir à quelques heures d’avion, 300 millions de consommateurs, réunis sous un même territoire et obéissant à une même loi? À ceux qui pensent qu’il n’y a pas la quantité qui compte, mais la qualité aussi! Ils ont évidemment raison, mais, ce qu’il faut bien voir c’est que, même si ce ne sont que 5% des «naija» qui ont des revenus situés dans les niveaux élevés, ils représenteront 15 millions de personnes. Si 10% de la population a des revenus classés dans la catégorie intermédiaire, ce seront 30 millions de personnes – Rappelons que le Cameroun qui pèse actuellement la moitié de la CÉMAC, comptera quelques 40 millions d’âmes selon le document gouvernemental : Cameroun Vision 2035 – On voit bien que le CÉMAC qui, par le Cameroun – lui-même frontalier avec l’ensemble des pays membres de la CÉMAC – est frontalière avec le Nigéria, a la possibilité de vendre ses produits à un marché potentiellement très juteux.

.Distribution des produits. Le Cameroun a, avec ses 1690 kilomètres de frontière, a naturellement un très fort potentiel pour devenir un partenaire stratégique du Nigéria. En effet, l’attractivité de son territoire en bénéficie car, elle permet aux investisseurs, d’atterrir au Cameroun en sachant que le Nigéria est à quelques kilomètres. Mais au surplus, les hommes d’affaires camerounais, ont la possibilité – notamment pour des produits non fabriqués au Cameroun – de devenir des distributeurs des entrepreneurs nigérians. Pourquoi eux? Au delà de la proximité géographique, il se trouve que le Cameroun est le seul pays de la CÉMAC officiellement anglophone. Cela l’aidera à faire un pont entre l’anglophone Nigéria et les pays francophones de l’Afrique centrale et orientale. D’ailleurs cet argument francophone s’accroitra si à l’avenir la francophonie économique se met en branle et tient ses promesses.

.Formation de coentreprises. Les pays de la CÉMAC n’auront pas seulement vocation à consommer les produits nigérians, ils devront mettre en uvre des stratégies visant à bénéficier de la croissance de ce futur émergent. Et pour se faire, ils pourront créer des coentreprises ou joint-ventures. Par ces alliances, les entrepreneurs issus de différents pays pourront ainsi non seulement acquérir des profits mais aussi bénéficier d’apprentissages mutuels. La Guinée Équatoriale avec les centaines de milliards engrangés grâce à son pétrole, pourrait disposer d’importantes sommes pour prendre des participations dans certains projets de grande envergure.
Sauf que.

Il est clair que la route ne sera pas aisée et il y aura de nombreux défis à dépasser. Arrêtons-nous à trois remarques :
.Conflits ethnico-religieux. La paix est obligatoire pour que le pays prospère. D’ailleurs, il faut que ladite paix soit très durable. Car autrement, le Nigéria ne sera pas le géant que l’on attend puisque ses dirigeants ne s’occuperont que gérer la une paix instable.

.MADE IN NIGERIA. Le gouvernement nigérian devra sans doute analysé la perception du MADE IN NIGERIA car pour nombre de personnes les produits nigérians sont souvent associés à imitation et mauvaise qualité.

.Le climat des affaires. Selon le Rapport Doing Business de la Banque Mondiale, le Nigéria se classe au 125ème rang (sur 183) des pays où il est le plus facile de faire des affaires. Pour rappel, Maurice, 1er pays africain dans ce classement, se situe au 17ème rang de ce classement.

Serge Tchaha
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Stratégie et prospective : La CÉMAC a-t-elle besoin de la CÉEAC?

Par Serge Tchaha

La Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale (CÉMAC) est un regroupement de six pays qui ont en commun le Franc CFA. Il faut ajouter que São Tomé et Principe y a un statut de membre observateur. L’équivalent en Afrique de l’Ouest, contrairement à ce que beaucoup pensent, est non pas la CÉDÉAO, mais l’UEMOA – Union Économique et Monétaire Ouest Africaine ­-. C’est une sorte d’héritage de la colonisation française. N’oublions pas le FCFA fut indexé au Franc français et aujourd’hui l’est sur l’euro.

Trois constatations se sont imposées à nous et nous ont poussé à réfléchir à la question suivante : La CÉMAC a-t-elle besoin de la CÉEAC?

Les voici :

1. La CÉMAC ne compte actuellement que quelque 40 millions d’habitants. Or, à l’UEMOA, on en dénombre plus de 100 millions (données agrégées à partir de l’Année stratégique 2010 de Pascal Boniface, 2009). Il faut cependant reconnaître qu’en termes de PIB, malgré cet écart dans la démographie, le PIB de la CÉMAC est tout à fait comparable à celui de l’UEMOA. On parle respectivement de près de 58 et de 62 milliards de dollars (données agrégées à partir de l’Année stratégique 2010 de Pascal Boniface, 2009).

2. L’observation du monde tel qu’il est, conduit à réaliser que les géants économiques ont un marché de consommation d’une certaine taille : le Brésil (environ 200 millions), les États-Unis (environ 300 millions de personnes), l’UE (environ 500 millions), la Chine (environ 1,3 milliard). Cela permet non seulement d’avoir une armée de travailleurs importante, mais en plus, l’on peut compter sur sa population pour consommer et assurer une partie de sa croissance.

3. La CÉEAC – dont le traité fut signé en 1983 à Libreville – compte outre tous les pays de la CÉMAC l’Angola, le Burundi, la RDC et São Tomé et Principe. Faut-il rappeler que l’Angola est la 3e économie d’Afrique noire? Et que la RDC, en plus de ses multiples richesses souterraines, est un des plus grands pays d’Afrique tant en termes de population que de superficie. Il faut cependant avouer que la RDC connaît une situation sociopolitique très particulière.

Au total donc, la CÉMAC a évidemment un potentiel intéressant, mais un regard plus global de l’Afrique laisse penser qu’une CÉEAC plus active serait plus intéressante pour tous. Car au vrai, pourquoi se regroupe-t-on si ce n’est pour avoir une certaine taille démographique, un marché commun costaud, pour permettre aux entreprises de bénéficier d’économies d’échelle? Pourquoi se regrouper si ce n’est pour permettre aux acteurs économiques d’accroître leur mobilité dans des pays économiquement intéressants?

La CÉEAC présente un potentiel plus important
Pour notre part, dans son discours prononcé lors de la Conférence internationale de Yaoundé en mai 2010, le Président Ali BONGO ne s’était pas trompé en signalant que l’Afrique centrale telle qu’il la voit, va jusqu’en Angola. Les chiffres sont là pour traduire la réalité de la CÉEAC : L’Angola, avec à peu près la même population que le Cameroun, fait près de 3 fois le PIB de ce dernier. Alors que le Cameroun lui-même pèse près de 35% du PIB de la sous-région CÉMAC. Selon The World Factbook de la CIA (2010), l’Angola a eu, en 2009, un PIB estimé à 68, 76 milliards de dollars. La CÉEAC nous fait passer d’un marché de 40 millions à un marché de près de 140 millions de consommateurs puisque la seule RDC compte un peu plus de 66 millions d’âmes. Les entrepreneurs du Cameroun, du Gabon, du Tchad. auront donc accès à un marché trois fois plus grand. Les investisseurs internationaux seront davantage intéressés par nos pays, car la mobilisation des ressources humaines et financières concernera 10 pays. Ainsi, en s’installant en Guinée Équatoriale ou en RCA, ils pourront simultanément avoir des vues sur le Congo et le Burundi, puisqu’il s’agit du même marché. Sauf que.

Il est permis de se demander jusqu’à quel point cette intégration est possible puisque les 6 pays de la CÉMAC eux-mêmes n’avancent pas au rythme attendu ou souhaitable. Qu’en est-il des passeports CÉMAC? Au moment où l’UEMOA effectue des opérations pour promouvoir le tourisme régional, qu’en est-il des routes censées relier les pays de la CÉMAC? Réunie à Bamako, la Conférence des Chefs d’État et de gouvernement de l’UEMOA avait en effet décidé que :

« Les Chefs d’État et de gouvernement ont adopté un projet d’Acte additionnel portant institution d’une Politique commune du Tourisme au sein de l’UEMOA. Celle-ci vise à faire de l’espace communautaire, un marché régional intégré, attractif, accessible, offrant des produits touristiques diversifiés et compétitifs sur les marchés émetteurs. La Conférence a instruit la Commission de procéder à la mise en uvre diligente de cette politique, afin de faire de l’Union un pôle majeur de développement touristique en Afrique. Les Chefs d’État et de gouvernement ont invité les États membres à appliquer la reconnaissance mutuelle de leurs visas respectifs, étape devant conduire à l’avènement d’un visa unique de l’UEMOA en 2011. » (Source : Communiqué final de la Conférence des Chefs d’État et de gouvernement de l’UEMOA, Bamako, 20 février 2010)

Il est permis de mentionner que plusieurs spécialistes ayant voix au chapitre, quelques pays de la CÉEAC sont davantage impliqués dans d’autres regroupements sous-régionaux. Cela peut poser un problème quant à la priorité que ces pays accordent ou accorderont à la CÉEAC. Les pays de la CÉMAC ont d’excellentes raisons de penser qu’une redynamisation de la CÉEAC leur serait grandement bénéfique. Ils en ont sans doute conscience. Espérons simplement que le temps politique ne sera submergé pas le temps économique, car il est à craindre qu’une trop longue attente ne permette pas la CÉEAC de traduire tout son potentiel

Serge Tchaha
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La CÉMAC peut-elle attirer plus d’investissements directs étrangers? par Serge Tchaha

Deux rapports récemment publiés démontrent très bien, de mon point de vue, comment nous avons changé d’ère. Il s’agit précisément du Rapport sur l’investissement dans le monde 2010 intitulé «Investir dans une économie à faible intensité de carbone» et du rapport présenté au Président Nicolas Sarkozy par l’ancien ministre et actuel Député-maire de Montereau-Fault-Yonne, intitulé «En finir avec la mondialisation anonyme – La traçabilité au service des consommateurs et de l’emploi». Ces documents indiquent clairement que nous sommes entrés dans l’ère de la consommation responsable et du green business. Il est clair que les gens ne veulent plus être des consommateurs, ils désirent devenir des CONSOMMACTEURS.

La lecture de ces deux rapports m’a convaincu de me livrer à une réflexion : la CÉMAC (Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale) peut-elle, à l’avenir, attirer davantage des investissements directs étrangers (IDE)?

Pourquoi?
Un des messages essentiels de la CNUCED dans ce document paru en juillet 2010 consiste à indiquer que, par leur puissance financière et leur déploiement mondial, les Sociétés Transnationales (STN) peuvent contribuer au ralentissement du réchauffement de la planète.

Selon la CNUCED (2010) :
« Il y a deux types d’investissements étrangers à faible intensité de carbone:

. Pour l’introduction de procédés à faible intensité de carbone qui réduisent les émissions de GES liées au mode de fabrication des produits. Cela inclut la modernisation des opérations des STN et de celles des entreprises qui leur sont apparentées dans le cadre de leurs chaînes mondiales de valeur;

. Pour la création de produits et services à faible intensité de carbone qui réduisent les émissions de GES à travers leurs modes d’utilisation. Les produits à faible intensité de carbone incluent par exemple les voitures électriques, les appareils électroniques «à faible consommation d’énergie» et les systèmes de transport en commun intégrés. Les services à faible intensité de carbone incluent les solutions technologiques fournies pour reconfigurer les procédés émettant des GES dans les entreprises locales. »

La même organisation signale que plusieurs secteurs d’activités contribuent ou pourraient contribuer de manière notable à la réduction des GES. Il s’agit notamment de l’énergie, de l’agriculture ainsi que la foresterie.

On le voit donc très bien, une courte analyse FFOM (Forces/Faiblesse Opportunités/Menaces) laisse imaginer que les 6 pays de cette sous-région pourraient, au nom de leurs ressources, attirer davantage de capitaux étrangers. D’ailleurs, dans la réflexion que la Commission de la CÉMAC a effectuée relativement à l’émergence de la sous-région, les secteurs d’activités cités apparaissaient parmi les piliers sur lesquels les dirigeants veulent miser.

Il faut par ailleurs noter que « selon les estimations, les investissements étrangers à faible intensité de carbone seraient déjà importants, avec des flux d’investissement d’environ 90 milliards de dollars en 2009 dans trois secteurs industriels clefs seulement: a) production d’électricité de sources nouvelles/renouvelables; b) recyclage; et c) fabrication de produits de technologie environnementale (tels que turbines éoliennes, panneaux solaires et biocombustibles). » (CNUCED, 2010).

La préoccupation pour l’environnement, la prise de conscience selon laquelle un achat est un vote, incite les consommateurs à attendre des entreprises des comportements plus responsables. Plusieurs pays d’Afrique centrale peuvent devenir des économies où fructifiera une part de ce green business. Ils en ont largement les capacités. Cette nouvelle donne internationale apparaît comme une tendance lourde d’avenir. Dans un dossier sur le Cameroun présenté par Suzanne Dansereau du journal LES AFFAIRES, le ministre de l’Économie du Cameroun, Louis-Paul MOTAZE déclare que « le Cameroun sera un vaste chantier ». Pour que le Cameroun et la CÉMAC tout entière soient un chantier, il faudra compter avec les IDÉ. Que Bangui, Brazzaville, Libreville, Malabo, N’Djamena et Yaoundé se donnent les moyens d’attirer ces capitaux étrangers. Mentionnons aussi que des transferts de technologies pourraient suivre ces flux financiers.

Comment?
Plusieurs stratégies sont naturellement possibles. Il pourrait par exemple s’agir de mettre en uvre des politiques fiscales pour attirer les capitaux étrangers. Il faudra également s’engager aux côtés des futurs investisseurs notamment pour la formation de la main-d’oeuvre. En effet, si des États ciblent des secteurs d’activités particuliers dans lesquels ils désireraient promouvoir les investissements, il faudrait dans le même temps que l’on puisse retrouver sur place des hommes/femmes capables d’occuper valablement les postes à l’usine.

Sauf que.

Les États doivent faire attention aux effets négatifs des IDE. Ils peuvent par exemple déstructurer les petits commerces locaux, créer des dépendances technologiques.

Les États de l’Afrique centrale, me semble-t-il, gagneraient à introduire, autant que possible, une dose de « patriotisme économique » pour ce green business, notamment en encourageant la mise sur pied de coentreprise ou à tout le moins de prise de participation des nationaux dans de nouveaux projets. De cette façon, le dynamisme économique créé enrichira mieux le (s) pays concerné (s). Mais surtout, l’expertise dans ce nouveau marché sera de plus en plus maîtrisée par les locaux.

Finalement, – c’est aussi l’intérêt du Rapport JÉGO-, espérons que les États de la sous-région CÉMAC voudront créer des marques-pays associés au green business. Naturellement, ça prendra plusieurs années, mais si nos dirigeants y croient, il est possible de se bâtir une réputation selon laquelle les économies de cette zone conçoivent et fabriquent des produits et technologies verts. Le green business n’est pas une vaine expression, elle est une part importante de l’économie du XXIe siècle. Aux pays de la sous-région de savoir s’ils désirent que leur marque-pays, le MADE IN Cameroon, Central African Republic, Chad, Congo, Equatorial Guinea, Gabon, soit associé au l’économie verte!