Cameroun: Michel Thierry Atangana restera en prison !

Le pourvoi en cassation introduit par ses conseils a été rejeté ce mardi par les juges de la Cour Suprême à Yaoundé

Il aura fallu deux minutes aux juges de la Cour Suprême ce mardi pour solder l’affaire Atangana à Yaoundé. Ils ont rejeté le pourvoi en cassation introduit par les conseils du prisonnier. Pour ses soutiens, c’est une mascarade judiciaire : Tout était dessiné et la Cour Suprême attendait le retour de Paul Biya de la France. La première anomalie pour nous est l’extinction de voix du magistrat chargé de lire la décision, c’est du jamais entendu dans un tribunal. L’affaire a été ensuite renvoyée le lendemain. Le lendemain, à 10H au lieu de commencer par l’affaire Thierry Atangana, on démarre avec l’affaire Pierre Désiré Engo. Les proches de Michel Atangana y ont assisté jusqu’à 1H 30, sans repos. Les débats de son affaire sont allés jusqu’à 4H du matin. Pour nous, c’est une mascarade et c’est regrettable d’autant plus que le juge en question selon nos sources, refusait en réalité de lire une décision communiquée par le ministre de la justice réagit J.P Remy Ngono, membre du comité de soutien en France.

J.P Remy Ngono soutient la thèse du voyage de Paul Biya en France pour justifier les multiples renvois à la Cour Suprême : Nous ne nous attendions pas à une issue favorable. Si ça devait être le cas, on l’aurait jugé avant le départ de Paul Biya pour la France afin que ce dernier rappelle l’impartialité de la justice camerounaise. A partir du moment où il est venu, on a su que c’était les renvois étaient des parades pour que sa visite se passe dans de bonnes conditions et c’était donc un faux suspense. Ces derniers insistent aussi sur les conditions de détention qui se sont durcies : Il ne sort presque plus de sa cellule comme c’était le cas avant.

Michel Thierry Atangana avait introduit un recours le 04 octobre 2012 suite à la décision du Tribunal de Grande Instance de Yaoundé qui le condamnait à 20 ans de prison. Il est poursuivi pour des faits de détournements présumés de deniers publics. Condamné à 32 ans, il a déjà passé 15 ans en prison.

Michel Thierry Atangana restera en prison

Réformes à lancer en Afrique dès 2013: la bonne année panafricaine d’un économiste

Cet intellectuel croit en une Afrique qui offre de nombreuses possibilités, à conditions que des reformes judicieuses y soient menées

L’histoire a ceci de particulier qu’elle est faite une fois pour toute. Elle ne se pose jamais de questions sur elle-même et n’imagine jamais les conjectures contrefactuelles que nous faisons sur elle. Le passé est ce qui est advenu et non ce qui aurait pu ou dû advenir. Parler de l’Afrique économique en 2013 et au-delà montre cependant l’importance du passé car cela est un exercice qui exige une extrapolation des résultats passés sur le futur en essayant de modifier la trajectoire économique du continent. Réfléchir sur l’avenir de l’Afrique c’est croire fermement que nous pouvons encore le changer par des réformes idoines issues d’anticipations extrapolatives. Cela exige donc d’utiliser la technique du rétroviseur afin que notre discours sur l’Afrique économique de 2013 prenne racine sur des faits concrets passés et présents.

. La croissance économique et le défi de la diversification de ses sources
Les investisseurs internationaux qui, il y a quelques années, parlaient d’une Afrique perdue ou très mal partie sur le plan économique, sont les mêmes qui, aujourd’hui, ne jurent que par l’Afrique considérée comme un continent d’avenir. Après les décennies perdues du développement suite aux politiques d’ajustement structurel, le continent noir a en effet un taux de croissance moyen de 5 % depuis l’an 2000 malgré son fléchissement à 3,5 % observé en 2012 suite à la crise mondiale. Lorsqu’on ergote sur la croissance sous contrainte de la crise économique mondiale, on pense en premier à la Chine et à d’autres émergents en oubliant que les champions du monde dans ce domaine sont africains : la Gambie, la Zambie, le Mozambique et le Ghana auront en 2013 un taux de croissance avoisinant les 8 %, au dessus de la prévision moyenne de 5,5 % sur laquelle table le FMI pour toute l’Afrique. Mais là s’arrête les comparaisons car alors que les pays émergents ont largement diversifié leurs structures productives, les pays africains ont toujours une croissance erratique et fragile parce que largement dépendante des cours mondiaux des matières premières et des produits de rente. Jeter un regard sur les dessous des cartes de la croissance africaine permet de constater qu’en dehors de l’Afrique du Sud, aucun pays africain n’a construit un modèle productif diversifié et capable de créer de la richesse de façon indépendante des produits de rente et de leurs cours mondiaux. Autrement dit, les économies africaines sont toujours extraverties et hautement dépendantes des décisions qui se prennent ailleurs. A cela s’ajoute le fait qu’elles sont price-taker (preneuses de prix) et que l’élasticité-prix, c’est-à-dire la variation des quantités exportées par rapport à la variation des cours mondiaux des produits de rente est très faible. Les moteurs exogènes de la croissance africaine sont donc la croissance des pays émergents et la consommation des matières premières qu’elle entraîne, les investissements directs étrangers et la conjoncture mondiale favorable au cours des produits de rente. Cela est une externalité positive de la mondialisation économique sur l’Afrique subsaharienne. Cette externalité positive est cependant à relativiser car les dessous des cartes de la croissance africaine prouvent que ce continent est bloqué dans une spécialisation rentière incapable de transformer l’économie par la diversification, incapable de construire de nouveaux avantages comparatifs par la recherche et l’innovation, et incapable de créer plus d’emplois alors que d’après Bruno Losch, chercheur au Cirad, 330 millions de jeunes Africains arriveront sur le marché de l’emploi les quinze prochaines années. Cette spécialisation rentière fait que le haut taux de croissance qu’affichent de nombreux pays africains est une croissance purement nominale au sens de devises que la vente du pétrole fait entrer par exemple en Guinée Equatoriale. Un autre défi est donc d’être méticuleux dans l’investissement des surplus actuels des réserves de change afin de diversifier les économies. Ici apparaît la problématique du Fcfa car comment par exemple la Guinée Equatoriale peut investir de façon autonome ses réserves de change si celles-ci sont gérées par le Trésor public français, personnification financière d’un Etat étranger ?

. Le défi de la répartition des fruits de la croissance économique subsaharienne
Un autre défi à relever par les pays africains est celui d’éviter de tomber dans le fétichisme de la croissance économique qui deviendrait une fin pour elle-même sans effets positifs sur le bien-être des populations. Alors que nous menions une enquête sur la croissance dans un marché béninois il y a quelques années, les vendeurs et les vendeuses d’un marché populaire de Cotonou nous ont lancé cette boutade : « nous ne voyons pas cette croissance-là dans nos vies ; la croissance ne se mange pas ! ». Ce ressenti de l’homme de la rue par rapport à la rengaine officielle sur la bonne santé des économies africaines dans un monde en pleine crise économique, n’est pas à négliger. Il interpelle à la fois les pouvoirs publics africains sur une meilleure répartition des fruits de la croissance et les économistes africains dans l’explication des termes qu’ils utilisent et les méthodes de calcul. S’agissant de la répartition des richesses, l’Afrique reste le continent le plus inégalitaire au monde avec une polarisation de plus en plus prononcée entre les très riches et les très pauvres malgré l’émergence d’une classe moyenne dans certains pays comme l’Afrique du Sud. Aucune croissance n’est durable en Afrique subsaharienne avec de tels écarts de revenus entre les populations car la majeure partie de la population africaine n’a pas le minimum du revenu requis pour consommer et faire tourner l’économie. Qui plus est, la corrélation n’est pas toujours positive entre la hausse durable d’un indicateur de dimension (signification de la croissance économique) et l’amélioration du bien-être. De nombreux travaux faits en Occident montrent que le bien-être des Occidentaux ne se s’améliore pas avec la hausse de la croissance économique. La responsabilité de l’économiste africain est donc aussi de ne pas répéter à tort et à travers tel un perroquet des statistiques sur la croissance sans les relativiser et sans en expliquer les méthodes de calcul qui changent tout de façon considérable. Permettre à un taux positif de croissance économique qu’affiche un pays africain de traduire quelque chose de concret dans la vie réelle des populations, implique de reconnaître qu’il y a un grand écart entre ce que dit un indicateur métrique comme le PIB dans un environnement où le mesurable est encore marginale, et les conditions matérielles de production et d’amélioration réelles de la vie. Parler d’un taux de croissance moyen de 5 % en Afrique depuis l’an 2000 cache beaucoup d’inégalités entre les pays et au sein de ceux-ci car la moyenne nationale ou africaine est une statistique trompeuse avec des valeurs aberrantes au dessus d’elle et en dessous d’elle. Le calcul des indicateurs en Afrique et leurs significations présentent donc un défi épistémologique majeur pour le futur si on ne veut pas que comme en Tunisie, le discours macroéconomique sur les performances économiques positives ne devienne une façon de couvrir le pourrissement politique et sociale d’une société qui finit toujours par exploser en montrant ainsi la vacuité des indicateurs qui n’ont aucune pertinence dans la vie réelle. L’Afrique des affaires, du tourisme, des investissements directs étrangers et du pétrole n’est pas l’Afrique des peuples qui, majoritairement, croupissent encore dans la misère. Cela exige de relativiser ce qu’indiquent les indicateurs. On ne peut y arriver que par une pensée économique autonome, c’est-à-dire inspirée par la vie réelle en Afrique.

. Le défi du passage de la consommation à la production
Les 54 pays africains représentent un marché de consommateurs de 1,04 milliard d’habitants en 2012 sachant que ce chiffre devrait passer du simple au double d’ici vingt ans en faisant de l’Afrique le berceau de 20 % de la population mondiale. Si cette puissance démographique est non négligeable aucun pays riche au monde n’ayant une faible population, il faut néanmoins noter que cette croissance démographique est aussi une bombe à retardement car l’Afrique, notamment la partie subsaharienne, consomme tout et ne produit rien. Cela est vrai du jouet offert aux enfants pendant les fêtes de fin d’année à l’avion présidentiel en passant par le téléphone portable. Il est évident qu’elle ne peut aller nulle part si elle reste dans une telle situation. Les investisseurs internationaux qui vantent l’Afrique subsaharienne en la présentant comme la terre promise du futur, ne parlent d’elle qu’en termes de grand marché de consommateurs. C’est de bonne guerre car c’est pour leurs intérêts de producteurs, de vendeurs et d’investisseurs dans une Afrique qui a le second meilleur retour sur investissement au monde. Se situer au stade de la consommation en pleine mondialisation économique est le signe que ce continent n’occupe aucun des segments porteurs, c’est-à-dire à haute valeur ajoutée au sein de l’économie mondiale. La consommation est le stade qui précède la putréfaction et les déchets. C’est l’innovation, la conception et la distribution qui sont aujourd’hui porteurs dans un commerce mondial où la logique coloniale de complémentarité dans laquelle sont encore englués les Etats africains est battue en brèche par les échanges intra-branches entre pays se concurrençant dans les mêmes segments hauts de production. Il apparaît ainsi que la question de la diversification des structures productives est liée à celle de l’affectation des surplus actuels elle-même liée à celle de la monnaie qui elle-même joue un rôle majeur dans le développement financier lui-même central dans la mise en place des productions locales via la promotion d’une industrialisation du continent. Dans un continent africain où plus de la moitié de la population est âgé de moins de 20 ans, le capital humain, la recherche et l’innovation sont les choses qui permettront à l’Afrique d’éviter d’être pauvre avant d’être vieille comme le prévoient les démographes. C’est le travail, l’éducation, le progrès technique et l’organisation synergique de tout cela avec les réalités locales qui constituent les moteurs du développement économique.

. Le défi de la mise en place des systèmes politiques favorables à une émancipation ouverte à tous et à toutes
Parler d’économie africaine en 2013 sans évoquer le rôle que le champ politique doit y jouer serait une attitude de courte vue propre à l’économiste obtus qui oublie qu’une répartition moins inégalitaire de la richesse est un argument de croissance économique. Quoique l’on vive en pleine mondialisation économique, c’est toujours le politique qui met en place des politiques économiques même si le capitalisme, une fois qu’il a pris son envol, échappe souvent aux Etats qui le promeuvent au départ. Sans systèmes politiques démocratiques, c’est-à-dire promouvant une émancipation ouverte à toute la société africaine, les fruits de la croissance africaine resteront le monopole des coalitions élitistes au pouvoir. En fait, qui contrôle l’économie de rente en Afrique subsaharienne, contrôle le pouvoir politique et qui contrôle l’économie de rente, contrôle le pouvoir politique. C’est le cercle vicieux que construit une spécialisation rentière des économies africaines car la rente est toujours là qu’on travaille ou pas, qu’il y ait démocratie ou pas, qu’il y ait Etat de droit ou pas. D’où le fait que la diversification des structures productives africaines afin de dépendre moins de la rente des matières premières, est aussi la clé de sortie d’un champ politique immobile et des Etats mieux géré comme des vaches à lait car ils ne seront plus le seul canal via lequel les Africains peuvent accumuler. Si le système d’émancipation est ouvert alors le peuple africain participerait à la production des richesses par la hausse de son pouvoir d’achat. Si ce n’est pas le cas, les conflits armés autour du partage de la rente économique vont continuer comme c’est actuellement le cas en RDC et en Centrafrique. Ce qui est dommageable pour l’activité économique car la stabilité sociale est une variable essentielle pour la confiance des investisseurs. La réaliser revient donc à ouvrir l’émancipation socioéconomique à toutes les populations via l’Etat de droit, la démocratie et une meilleure répartition des richesses nationales.

. Le défi de la protection des embryons d’industries locales face à l’ogre chinois
Les pays africains sont à nouveaux économiquement attractifs non grâce à des réformes endogènes mais parce que la conjoncture mondiale leur est favorable comme cela fut le cas de 1960 aux années 1980. Ce qu’il ne faut pas oublier c’est que la prospérité des années 60 à 80 s’est abimée dans une crise totale avec la faillite des Etats africains endettés jusqu’au coup. La bonne santé purement statistique actuelle ne doit donc pas faire perdre de vue des mesures à prendre face aux nouveaux partenaires majeurs du continent. L’Afrique doit à nouveau avoir la main face à la multiplication de la demande qui s’adresse à ses matières premières. Les USA y sont dans le but de desserrer leur dépendance au pétrole moyen-orientale, les anciennes puissances coloniales essaient de préserver leurs prés carrés et la Chine doit alimenter sa croissance très énergivore. Ce que nous entendons par avoir la main veut dire que l’Afrique subsaharienne a en face d’elle une multitude de demandeurs qu’elle doit mettre en concurrence afin de signer des contrats avec le mieux disant sur le plan de son développement social et économique. Dès lors, coopérer avec la Chine devrait fonctionner suivant un principe directeur incontournable basé sur les intérêts et non sur une pseudo amitié tiers-mondiste : que la situation des Africains après les contrats sino-africains soit mieux que leur situation avant lesdits contrats : le contraire est inadmissible et scandaleux. Cela exige donc aussi que l’Afrique subsaharienne protège certains secteurs de la convoitise chinoise. Le secteur agricole, industriel et du petit commerce doivent bénéficier de protections ad hoc si l’Afrique veut donner un peu d’air aux producteurs locaux. Le fait d’avoir la main peut aussi conduire à mettre en place ce que la Chine fait elle-même, c’est-à-dire exiger des transferts technologiques et des formations de techniciens locaux à la technologie chinoise d’un secteur spécifique. L’Afrique le peut si elle le veut.

La Bonne année 2013 que j’adresse à l’Afrique est donc l’espoir que 2013 soit le début de telles réformes car être indépendant c’est aussi tenter des choses et en assumer l’entière responsabilité de la réussite ou de l’échec.


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Programme économie de CGULA pour 50 collectivités territoriales africaines

Par Thierry Téné, Directeur A2D Conseil

Cités et Gouvernements Locaux Unis d’Afrique (CGLU Afrique), lance un ambitieux programme d’économie verte à destination de cinquante (50) collectivités locales africaines de plus de 250 000 habitants.

L’objectif est d’accompagner pendant trois (3) ans au moins dix (10) collectivités territoriales dans la réalisation d’éco-projets dans le domaine des déchets, des énergies renouvelables, de l’efficacité énergétique, l’économie circulaire, la réduction de l’empreinte écologique et la création d’emplois verts.

Les collectivités territoriales, investisseurs potentiels et prestataires de service qui souhaitent s’impliquer dans cet ambitieux programme sont invités à participer à un atelier spécialisé destiné à l’économie verte le 5 décembre 2012 à Dakar lors de la 6ième édition du Sommet Africités

Cette initiative correspond à la réalisation de l’une des préconisations de la 5ème édition du Sommet Africités tenue à Marrakech (Maroc) du 16 au 20 décembre 2009. Les participants avaient alors insisté sur la nécessité de mettre en place un programme dédié à l’implication des collectivités locales dans la promotion de l’économie verte.

Afin d’envisager les modalités de déploiement de ce programme, CGLU Afrique a fait réalisé, par Thierry Téné, une étude de faisabilité sur l’implication des collectivités territoriales dans l’économie verte. Il en ressort qu’elle est particulièrement intéressante pour les cités et gouvernements locaux.

En effet l’économie verte présente de nombreuses opportunités pour les villes africaines. Les collectivités territoriales qui participent au programme bénéficieront des avantages suivants :

· Réduction des coûts du poste énergie, assainissement et traitement des déchets

· Mobilisation des parties prenantes pour la création d’emplois verts sur le territoire

· Lutte contre la pollution urbaine et les émissions de gaz à effet de serre

· Mis en place d’outils d’économie verte

· Renforcement des capacités dans le domaine de l’économie verte

· Mobilisation des sources de financement supplémentaires notamment la finance carbone

· Mise en place de projets d’efficacité énergétique, d’énergies renouvelables, de biocarburants, d’assainissement et de transports

L’implication des villes africaines dans une économie décarbonée est d’autant plus urgente qu’elles font face à une explosion démographique et à une urbanisation croissante.

La conjonction de ces deux phénomènes entraînent une consommation importante d’énergie, l’augmentation du gisement des déchets et les problèmes d’assainissement, de transport urbain et de pollutions diverses.

Actuellement 41 % des africains résident en ville et le taux de croissance est de 1 % tous les deux ans.

Face à la raréfaction des ressources et la flambée des cours de l’énergie et des matières premières, les élus locaux doivent donc intégrer l’économie verte dans leur stratégie de planification urbaine.

D’un point de vue opérationnel, les villes sélectionnées dans le cadre du programme seront encadrées de 2013 à 2015 pour la mise en uvre des projets dans le domaine de l’économie verte et du green business.

Cet appui porte aussi bien sur l’assistance technique dans la conception du projet, la recherche des partenaires techniques et financiers ainsi que le renforcement des capacités.

Thierry Téné, Directeur A2D Conseil
Thierry Téné)/n

Affaire Yves Michel Thierry Atangana: Le gouvernement réagit

Le ministre Issa Tchiroma de la communication a fait savoir que cette affaire relevait de la justice à l’exclusion de l’exécutif ou du politique

Selon le gouvernement camerounais, l’affaire qui a abouti à la condamnation du franco camerounais Yves Michel Thierry Atangana à 20 ans de prison, n’a rien à voir avec le pouvoir exécutif. « Cette affaire qui reste pendante devant les autorités judiciaires, relève de la compétence exclusive du pouvoir judiciaire, et se soustrait de ce fait à toute implication de l’exécutif. C’est pour cela qu’un certain nombre de précision s’avère nécessaire pour un décryptage et non un commentaire de la décision de justice rendue par le Tribunal de grande Instance du Mfoundi, rendue le 04 octobre 2012 », a fait savoir Issa Tchiroma le ministre en charge de la communication, lors d’une rencontre avec la presse mardi 09 octobre 2012. Le ministre a indiqué que cette décision ne sanctionne guère une affaire politique « contrairement à certains propos entendus çà et là à moins que le crime de détournement de deniers publics prévu et réprimé par l’article 184 du code pénal camerounais soit désormais qualifié d’infraction à caractère politique ». le ministre poursuit en argumentant que rien n’expliquerait un acharnement politique sur un homme qui n’est pas identifié comme un concurrent politique et surtout dans un contexte, selon le ministre Tchiroma, où « les pires pourfendeurs du régime en place sont libres de leurs propos, de leurs actes de leurs mouvements et en dépit de tout respectés ». Le ministre a aussi qualifié d’injustifiés les arguments parlant des lenteurs de procédure, avant d’expliquer dans le détail le déroulement de l’affaire.

La réaction du gouvernement est considérée par beaucoup de médias comme une réponse au commentaire de l’ambassadeur de France au Cameroun. Il y a quelques jours, un communiqué signé de Se. Bruno Gain faisait savoir sa « déception » sur le jugement rendu contre Michel Atangana. « Qu’il me soit néanmoins permis d’observer que la peine infligée à M. Atangana est particulièrement lourde. Ce dernier a déjà purgé une peine d’emprisonnement considérable. Cela fait plus de 5475 jours – 15 années déjà – qu’il est incarcéré. Une durée aussi longue est de nature à briser le plus résistant des hommes. Les autorités camerounaises disposent de bases juridiques qui leur permettraient de faire preuve de clémence à l’égard d’un justiciable qui a déjà largement payé sa dette vis-à-vis de la société. J’exprime ainsi le v u instant que Michel Thierry Atangana puisse dès que possible recouvrer la liberté », avait-il ajouté indiquant que des efforts se poursuivraient en vue d’obtenir la libération du Français. Issa Tchiroma a fait savoir qu’on ne pouvait vraiment dire que la peine était lourde. « De fait en limitant sa sanction à 20 ans, alors que le ministère public demandait la perpétuité, on ne peut pas dire que la justice n’a pas fait preuve de magnanimité », a-t-il indiqué. L’affaire est aujourd’hui en instance de recours, mais le ministre Tchiroma a tenu à y apporter des précisions. Il est revenu sur les faits évoqués par le gouvernement camerounais pour condamner Michel Atangana et son principal coaccusé Titus Edzoa. Des voix continuent de monter pour critiquer la condamnation du franco camerounais. Selon des documents fournis par un collectif soutenant sa libération en France, monsieur Atangana serait la victime d’un gouvernement qui se refuse à payer ses créances à son endroit. Dans une ambiance socio politique marquée par l’affairisme et le népotisme, il reste difficile de savoir où se trouve la vérité.

Yves Michel Thierry Atangana, français d’origine camerounaise, a été condamné à 20 ans de prison, accusé de détournement.

Cameroun/Affaire Titus Edzoa et Thierry Atangana: 20 ans de prison

Les avocats de la défense crient à la manipulation judiciaire et annoncent leur pourvoi en cassation pour la suite de l’Affaire

Les avocats et les familles de Titus Edzoa ancien haut responsable du régime au pouvoir et de Thierry Michel Atangana homme d’affaire français d’origine camerounaise, ont dénoncé un procès politique, à l’issue du verdict rendu jeudi 04 octobre 2012. Selon eux, ce procès est étroitement lié aux ambitions présidentielles de l’ancien ministre camerounais. « Là je suis surprise parce que tout va à l’encontre des débats qu’on a suivi, moi je pensais qu’on pouvait simplement relaxer mon mari. Je pense que c’est une justice qui est téléguidée, c’est une mascarade, un acharnement même », a déclaré Géneviève, l’épouse de Titus Edzoa dans une interview réalisée par Radio France International (RFI). « Nous avons eu aujourd’hui la confirmation juridique et judiciaire que ce procès est le fruit d’une grande manipulation du système judiciaire camerounais, et c’est extrêmement grave », a déclaré pour sa part Maître Tchoungang, un des avocats des deux condamnés. Le juge ayant prononcé le verdict, a parlé d’une décision prise à la majorité des voix. Une situation qui conforte les avocats dans leurs positions. Le verdict a été reporté à plusieurs reprises, pour cause de maladie d’une des trois juges affectées au procès. « Nous avons demandé qu’on nous indique la position du juge dissident, pour que nous puissions démontrer au monde entier, que dans cette affaire, on a retiré deux juges qui étaient contre, pour condamner des innocents », a poursuivi maître Tchoungang. « Ils sont emprisonnés depuis 15 ans. Même s’il (Atangana) avait été condamné en 1997 dans le cadre d’une autre affaire, le mandat de détention provisoire pour la procédure au sujet de laquelle un jugement a été rendu ce jour (jeudi) date de 15 ans », a déclaré Me Patrice Mbuny, un des avocats de M. Atangana.

Les avocats de la défense annoncent déjà une deuxième phase de la bataille judiciaire. « Le fait que nous soyons condamnés ne signifie pas que nous acceptons d’être coupables. Nous allons nous pourvoir en cassation, pour poursuivre cette affaire », a déclaré Maître patrice Mbuny, un des avocats de Thierry Michel Atangana. Au terme d’un nouveau procès long de 4 ans, le tribunal de grande instance du Mfoundi a condamné Titus Edzoa, ancien secrétaire général de la présidence de la république et Thierry Michel Atangana à 20 ans de prison. Ils devront aussi payer ensemble plus d’un milliard de FCFA à l’Etat du Cameroun. Ils ont finalement été reconnus coupables de détournements et tentative de détournement de 59,4 milliards de FCFA. Un autre ancien ministre Isaac Njiemoun en charge des postes et télécommunications, a été condamné à 10 ans de prison et Dieudonné Mapouna ancien secrétaire particulier de Titus Edzoa a été acquitté, il bénéficie d’une prescription des faits qui avaient conduit à son arrestation. « Ils sont emprisonnés depuis 15 ans. Même s’il (Atangana) avait été condamné en 1997 dans le cadre d’une autre affaire, le mandat de détention provisoire pour la procédure au sujet de laquelle un jugement a été rendu ce jour (jeudi) date de 15 ans », a déclaré l’avocat.En France comme au Cameroun, un collectif de soutien à Thierry Michel Atangana a été mis en place. Selon des documents de ce collectif, le procès à l’encontre de leur proche est lié aux intérêts économiques. Des communications transmises par le collectif font savoir que le gouvernement étant devenu créancier du consortium dirigé par monsieur Atangana, a décidé de le poursuivre en guise de dilatoire. « Nous pensons que ce sont ces enjeux financiers si importants qui font problème aujourd’hui. L’Etat du Cameroun persiste dans la voie du dilatoire pour ne pas respecter ses engagements », peut-on lire dans un communiqué. Quant à Titus Edzoa, il est désormais notoire que c’est parce que cet ancien médecin personnel du président Biya a eu des ambitions de pouvoir qu’il se retrouve en prison. Une constance demeure cependant, peu de ministres du gouvernement du renouveau usent du pouvoir sans en abuser. Plusieurs d’entre eux clament leur innocence, mais avec le président ils sont d’accord au moins en acte, personne ne déclare ses biens conformément à l’article 66 de la constitution.

Titus Edzoa et Thierry Michel Atangana ont été condamnés à 20 ans de prison
Journalducameroun.com)/n

Lettre au Président de la République française François Hollande au sujet de Michel Thierry Atangana

Par Philippe Missamou, avocat

Son excellence Monsieur le Président de la République

Monsieur le Président de la République,

J’ai l’honneur d’en référer à votre haute bienveillance afin de sauver la vie de Monsieur Michel Thierry ATANGANA, citoyen français en danger de mort violente dans une geôle située au sous sol du secrétariat à la défense du Cameroun.

En effet, Monsieur Michel Thierry ATANGANA considéré par le département d’Etat Américain comme un otage politique, est privé de liberté depuis plus de quinze ans à la suite d’un procès parodique organisé nuitamment au Tribunal de Grande Instance de Yaoundé, le 03 octobre 1997 à huis clos et sans l’assistance d’un avocat.

Ce faisant, les autorités judiciaires camerounaises n’ont de cesse de le citer à comparaitre en état de détention devant les juridictions d’instruction et de jugement pour l’entendre et le juger sur les mêmes faits et infractions que ceux ayant déjà donné lieu à sa condamnation à quinze années d’emprisonnement, aujourd’hui, exécutée entièrement .

Incontestablement, l’Etat camerounais n’entend pas lui offrir les garanties judiciaires requises tant dans l’ordre interne que dans l’ordre international, consistant dans le respect de la présomption d’innocence, du procès équitable et des droits de la défense.

Il apparaît que son état physique et mental est gravement altéré en raison de la dureté des conditions de détention et d’un défaut absolu de soins attentifs, consciencieux, appropriés et efficaces.

Force est de préciser que la peril de mort auquel Monsieur Michel Thierry ATANGANA est exposé requiert une prise en charge médicale immédiate et idoine que les autorités camerounaises n’ont pas cru devoir lui faire bénéficier jusqu’alors, fût ce à titre humanitaire.

Dès lors, l’intercession du Président de la République française en vue du transfèrement de Monsieur Michel Thierry ATANGANA est d’une nécessité impérieuse et ce, d’autant que les dispositions des articles 728-2 et suivants du code de procédure pénale, de la convention sur le transfèrement des personnes condamnées en date du 21 mars 1983 et de la convention consulaire bilatérale franco- camerounaise du 21 févier 1974, reconnaissent à chaque Etat le droit de solliciter aux autorités d’un état étranger le transfèrement de l’un de ses ressortissants condamnés à une peine privative de liberté, sans porter atteinte aux principes de droit international édictant la souveraineté et l’indépendance des Etats et la non-ingérence dans les affaires internes des Etats.

Ainsi, l’exercice de la protection dite personnelle en faveur de Monsieur Michel Thierry ATANGANA est l’affirmation solennelle de la reconnaissance universelle de la France en tant que patrie des Droits de l’Homme.

Nul ne peut comprendre que la France ne prenne fait et cause pour l’un de ses nationaux, victimes de traitements inhumains et dégradants inhérents aux agissements arbitraires des autorités judiciaires et politiques d’un Etat étranger.

A cette fin, l’urgence impérieuse commande de porter aide et assistance à Monsieur Michel Thierry ATANGANA dont la santé et la vie sont abimées à l’extrême.

Dans ces conditions, la persistance d’une expectative encore plus longue est source de perspective effroyable quant aux chances de survie de Monsieur Michel Thierry ATANGANA.

En conséquence, je vous saurais gré de bien vouloir faire diligence auprès des autorités camerounaises afin que Monsieur Michel Thierry ATANGANA soit transféré en France dans les meilleurs délais pour des raisons humanitaires.

Je vous prie de croire, Monsieur le Président de la République, en l’assurance de ma considération distinguée.

Dire non fait tant défaut aux Camerounais: Eto’o leur en donne l’exemple

Par Thierry Amougou, président de la Fondation Moumié

Eto’o vient de lancer à tous les Camerounais un défi d’individuation comme preuve de notre liberté au sein de n’importe quelle dictature et de sa logique embrigadante Les soubresauts de l’histoire des Lions Indomptables du Cameroun ressemblent comme deux gouttes d’eau à ceux de notre vie politique nationale. Cette oscillation en phase ne peut être surprenante pour peu qu’on veuille accepter que le football camerounais n’est qu’une variable endogène des modèles politiques qui régulent notre pays depuis l’indépendance, et dont le football est un des arguments performants via l’exploitation politique des exploits sportifs des Lions Indomptables. Sans aller dans les détails, force est de constater que si dire non est ce qui fait défaut au peuple camerounais tout entier face à la dictature en place depuis trente ans, dire non est aussi ce qui a toujours mis de brillants Lions Indomptables (Joseph Antoine Bell en l’occurrence) de côté parce qu’ils osèrent dénoncer les travers organisationnels et institutionnels d’un football adulé de l’extérieur, mais dont la cuisine interne révèle une marmite footballistique pleine de corps étrangers et de virus en ébullition sous un feu d’intrigues, dont la précédente catalyse la suivante au lieu d’en être la digue. Autant la dictature, l’incurie, la malversation et la malhonnêteté de ceux qui gèrent le football camerounais montrent leurs outrances multiples sur les Lions Indomptables depuis des années, autant le peuple camerounais, seul habileté à légitimer un pouvoir politique, est malmener depuis trente ans par des pompiers-pyromanes au pouvoir. Dès lors, il va sans dire que les performances envieuses de notre football doivent plus à une éclosion de talents exceptionnels sur notre sol et au fait que le football est devenu un moyen efficace de sortir de la pauvreté, qu’au sérieux institutionnel et organisationnel du Cameroun. La dictature règne donc en maîtres sur le pays tout entier et sur les Lions Indomptables, une de ses variables endogènes, parce que dire non ensemble fait autant défaut au peuple camerounais qu’aux joueurs qui composent notre équipe nationale, échantillon dudit peuple.

ETO’O-Fils est le meilleur joueur africain en activité
La providence aime bien le Cameroun. Après Roger Milla, le Cameroun a Samuel Eto’o-Fils le meilleur joueur africain en activité. Le Cameroun a certes d’autres joueurs mais ce sont des joueurs moyens. Avec tout le respect que nous devons à tous ceux qui défendent nos couleurs, il est une lapalissade que de dire que parmi tous les joueurs camerounais en activité, seul Samuel Eto’o-fils est capable de faire basculer un match à lui tout seul sur un geste ou une action individuelle. C’est cela qui fait la différence entre un très grand joueur et un bon joueur. Les bons joueurs nous en avons beaucoup en ce moment surtout en défense. Nos milieux de terrain sont ce qu’on appelle dans le jargon footballistique des « porteurs d’eau ». Nous avons donc beaucoup de bons défenseurs et de milieux défensifs. Nous n’avons ni des joueurs de flanc rapides à l’instar de Salomon Olembé, ni des manieurs de ballons exceptionnels à l’instar de Mbida Grégoire ou Théophile Abéga, ni des gardiens exceptionnels à la Thomas Nkono et Joseph Antoine Bell. Dans ces conditions, le rôle d’un Coach n’est pas de faire coalition avec la Fecafoot pour chercher noise au meilleur joueur africain de l’équipe, mais de faire de la prospection pour essayer de combler ces manques, et surtout de construire une équipe qui rende ultraperformant notre meilleur joueur. Michel Hidalgo, du temps où il entraînait l’équipe de France, avoua, lors d’une interview, qu’il composait son équipe et calibrait son recrutement en équipe de France en fonction des joueurs et des tempéraments qui permettaient à Michel Platini, son meilleur joueur d’antan, d’être dans les meilleures conditions de jeu possibles. Tout grand club de football, toute grande équipe nationale à un leader technique à partir duquel tout s’organise. C’est Didier Drogba en Côte-d’Ivoire, Messi au Barça et en Argentine, Ronaldo au Real de Madrid et au Portugal et Samuel Eto’o au Cameroun. Il en est ainsi simplement parce que ces joueurs-là sont largement meilleurs que les autres et que le sort de l’équipe en dépend largement. Ceci ne veut pas dire que les Lions ne peuvent gagner sans Eto’o, mais qu’ils gagnent facilement avec Eto’o, et plus facilement encore avec une équipe montée pour qu’Eto’o soit encore plus performant.

L’invention de la double peine : une innovation régressive de la Fecafoot
Nous avons déjà signalé dans une autre analyse le fait que la sanction a pour but de remettre de l’ordre dans la société lorsque l’équilibre entre les droits et les devoirs est rompu par un acte. Nous avons également montré, lorsque que Samuel Eto’o écopa de plusieurs match (es) de suspension, que la sanction perdait de son sens stabilisateur et éducateur dans un univers comme la Fecafoot et un pays comme le Cameroun où la prospérité du vice est prégnante et la récidive dans la malversation la règle. Avoir décidé, après la suspension de Samuel Eto’o, de lui ôter le brassard de capitaine des Lions, correspond à l’invention de la double peine par la Fecafoot et tous ceux qui sont à l’origine de cette décision. Le problème n’est pas tant le capitanat que le fait d’infliger deux sanctions successives à un joueur pour une seule et même faute. Cette dérive punitive sur un joueur par des individus dont la prison est l’endroit le plus indiqué où ils auraient dû être en ce moment, est une preuve irréfutable du fait que seuls les joueurs qui se taisent, seuls les joueurs qui ne savent pas dire Non, seuls des joueurs transformés en automates programmés pour jouer au football, trouvent grâce auprès des instances dirigeantes du football camerounais. Ceux qui osent critiquer les instances dirigeantes comme Joseph Antoine Bell, Etame Mayer, Makoun, Assou Ekotto et Samuel Eto’o, sont à bannir de l’équipe nationale. Tout se passe comme si, autant les Camerounais sont « les créatures » de Paul Biya à qui ils doivent tout selon les évangiles selon Jacques Fame Ndongo, autant chaque Lion Indomptable est « une créature » d’Iya Mohammed et de ses équipes. En conséquence, autant le peuple camerounais subit la double peine d’un pouvoir qui pille l’Etat en même temps qu’il immobilise l’Etat pour se juger lui-même, autant Eto’o est victime d’une double peine qui ne peut obéir qu’au besoin viscéral de la mafia du football camerounais de se défaire de l’influence de ceux qui osent dire non à ce qu’elle fait dans les coulisses. Il ne chaque donc personne que la double peine soit en vigueur puisque l’opération Epervier en use et jusqu’à la lie. Si des prisonniers politiques sont déclarés innocents mais restent en prison Eto’o peut aussi se voir infliger pour la même faute une suspension et une perte du capitanat.

Dire non c’est comprendre et comprendre c’est commencer à désobéir
Il fut un temps ou Eto’o était en très bons termes avec la Fecafoot et ses différents dirigeants comme il fut aussi un temps ou Marafa était en très bons termes avec Paul Biya et tout le Renouveau. Autant, comme Eto’o nous l’a dit lui-même, le courroux de la Fecafoot envers lui n’a pour seule et unique base que l’argent et toujours l’argent, autant l’affaire Albatros montre que c’est aussi l’argent qui explique le différend entre le Président de la République et Marafa. Nous sommes donc dans un pays où, autant c’est l’argent qui fait et défait tout à la place d’autres valeurs fondamentales et utiles à la construction d’un Etat, autant c’est cet argent qui empêche à ceux qui ne l’ont pas de dire non, c’est assez. Mais, étant donné que plusieurs qui ont de l’argent continuent à dire oui à la Fecafoot et au pouvoir en place pour mieux protéger leur butin, il est important de reconnaître à Eto’o-Fils et à Marafa, même s’ils ont un moment fait équipe avec les systèmes mafieux en place, leur capacité de dire non c’est assez. Ils ont enfin compris la logique inique des deux systèmes. Or comprendre la logique d’un système inique est le début de la désobéissance à celui-ci. Puisse le peuple camerounais apprendre à dire non avec Samuel Eto’o même si le problème éternel est celui des passagers clandestins qui font grève pour ne pas jouer un match mais n’en assument pas la logique en bloc : il en existe au sein des Camerounais et aux seins des joueurs de l’équipe national. Eto’o vient de lancer à tous les Camerounais un défi d’individuation comme preuve de notre liberté au sein de n’importe quelle dictature et de sa logique embrigadante. Peut-être que sa décision est facile parce qu’il a tout ce qu’il lui faut dans la vie mais celle des petites gens n’est pas plus difficile car ils n’ont rien et rien à perdre. Dire non c’est être un homme révolté à la camus mais c’est aussi être capable de dire oui quand les choses vont mieux. C’est montrer que derrière le footballeur et la star il y a un homme et des valeurs.

Thierry Amougou
africapresse.com)/n

Verdict attendu ce 18 juillet pour Titus Edzoa et Michel Atangana

En conclusion à un 2e procès à leur encontre, les tribunaux diront s’ils sont coupables des faits de détournement et de complicité qui leurs sont reprochés

Titus Edzoa, ancien secrétaire général à la présidence de la République (Sgpr) du Cameroun et l’homme d’affaire Franco-camerounais Thierry Atangana, devraient connaitre le verdict ce mercredi 18 juillet 2012 du deuxième procès intenté contre eux depuis leur mise en détention en 1997. En introduisant sa plaidoirie en faveur de Michel Thierry Atangana le 4 juillet 2012 dernier, Maitre Tchoungang a déclaré que le procès diligenté contre son client et ses coaccusés est le « procès de la dénonciation ». « C’est d’abord Ambassa Zang ancien ministre qui a été le premier à faire les dénonciations et sur la base desquelles la procédure a été initiée. Par la suite il a pris le chemin de l’exil. A son tour Mapouna a fait des dénonciations mettant en cause Titus Edzoa et Atangana Abega dans une affaire de pot de vin perçu de la Sonara et qui aurait versé 400 000 000 FCFA pour les récompenser d’avoir usé de leur influence auprès de la haute hiérarchie en vue d’obtenir la levée la suspension des travaux d’extension de cette société pétrolière. A cause de cette dénonciation Michel Atangana a été poursuivi avec Edzoa Titus pour « trafic d’influence ». Pour le dénonciateur sa part du butin (90 000 000 Fcfa) lui aurait permis d’acquérir une villa à Elig-Edzoa », a fait savoir l’avocat, démontrant au passage qu’à aucun moment une preuve formelle de décharge des sommes querellées dans le cadre de l’affaire, n’a été apportée. L’avocat estime que ses clients ont agi sur la base d’actes signés du Président de la République lui-même, et que si ces actes sont à l’origine de détournement, il revient à l’assemblée nationale de trancher d’une telle affaire. « La personne qui a exercé l’opportunité de poursuite dans cette affaire s’est trompée. Selon le conseil rien n’a été respecté dans cette procédure où son client a enduré 52 jours de garde à vue pour cause de grand banditisme, 4050 jours de détention préventive, 11 années d’instruction, 15 ans de prison sans cause », fait savoir maitre Tchoungang.

Le ministère public reproche aux deux principaux accusés en plus de certains autres, le trafic d’influence exercé sur les dirigeants de la Sonara pour obtenir de cette raffinerie, 400 millions dans le cadre des travaux d’extension de son usine en 1995. Le volet de ce procès concernant Titus Edzoa seul, l’accuse d’avoir détourné des véhicules de l’Etat. Une première décision de justice rendue en 2008, blanchissait totalement trois des quatre accusés et partiellement Titus Edzoa. Le juge Pascal Magnaguemabé avait pris une ordonnance de non-lieu partiel en faveur d’Atangana et les deux autres. Mais après appel introduit à la chambre d’instruction de la Cour d’appel, tous les quatre accusés ont été renvoyés devant le TGI. Réputé très proche de Paul Biya à l’époque où il était son medecin personnel, M. Edzoa avait démissionné du gouvernement en 1997 avant d’annoncer sa candidature à la présidentielle de la même année. Deux semaines après, il avait été arrêté puis inculpé de détournement de deniers publics. Au terme d’un procès jugé expéditif par ses défenseurs, il avait été condamné à 15 ans de prison, et purge sa peine dans une cellule de haute sécurité au Secrétariat général à la défense (SED), le siège de la gendarmerie à Yaoundé. Par la suite de nouvelles affaires se sont ajoutées, faisant dire à ses avocats que leur client était la victime d’une cabale. On en saura plus ce jour

Michel Thierry Atangana dans sa cellule à Yaoundé
Comité de soutien Michel ATANGANA)/n

Africains, la solution au développement durable est dans nos poubelles

Par Thierry Téné

Pour impulser une croissance verte inclusive et stimuler la création des milliers d’emplois verts nécessaires à l’insertion professionnelle du demi-milliard d’âmes que constitue la jeunesse africaine, orientons nos analyses et prospectives sur le contenu et le volume de nos POUBELLES. Telle serait l’une des pistes de réflexion de la deuxième édition du forum international des pionniers de la RSE et de la croissance verte inclusive en Afrique que la Confédération des Entreprises Citoyennes de Tunisie et l’Institut Afrique RSE organisent le 21 et 22 novembre 2012 à Tunis. En effet la première journée sera consacrée aux stratégies de croissance verte inclusive pour la réduction de la pauvreté et opportunités de green business en Afrique. Selon le rapport What a Waste : A Global Review of Solid Waste Management, l’Afrique Subsaharienne et MENA (Moyen-Orient Afrique du Nord) représentent respectivement 5 et 6 % de la production mondiale des déchets solides dans le monde. Par jour l’Afrique produit environ 169 tonnes de déchets. Mais en 2025 la population urbaine sera de 518 millions d’habitants avec une production de déchets qui passera à 0,85 kg par personne. Ce qui donne un total journalier de 441 tonnes de déchets. Pour MENA la production annuelle va passer de 1,1 kg/personne/jour à 1,43 pour un total de 369 tonnes / jour pour les 257 millions de personnes en zone urbaine en 2025. La prise en compte des résidus urbains très en amont des politiques publiques de planification urbaine et de développement durable du territoire est particulièrement intéressante en Afrique pour plusieurs raisons.

La première est financière. L’élimination des déchets, basée principalement sur la mise en décharge, représente généralement l’un des postes budgétaires les plus importants pour les collectivités territoriales africaines. Or la mise en place de filières de tri sélectif et de valorisation est économique plus rentable à moyen terme. La deuxième est industrielle. La gestion durable des déchets présente plusieurs opportunités de création d’éco-entreprises de collecte et de recyclage. Ce qui offre des possibilités d’insertion sociale aux jeunes africains (les 15-24) dont la population va passer de 133 millions de personnes au début du siècle à 246 millions en 2020. Et comme le rappelle le Bureau International du Travail, les emplois verts doivent être décents. Plusieurs milliers d’africains travaillent déjà dans le secteur informel de l’élimination des déchets. Il est donc important de formaliser ce secteur d’activité. Une quatrième raison est l’orientation du modèle d’industrialisation de l’Afrique. Dans une stratégie globale, la limitation de la quantité de déchets, renvoie au mode de production et de fabrication des biens et services. La réduction à la source pousse à l’innovation et au recours à certaines notions nouvelles comme l’économie circulaire, l’éco-conception, l’économie de la fonctionnalité et l’écologie industrielle. De plus les flux et la nature de déchets sont des indicateurs des modes de consommation. La cinquième raison est la production d’énergie. Selon le rapport de la Banque Mondiale, la poubelle africaine est composée majoritairement de déchets organiques (57 % en Afrique Subsaharienne et 61 % en MENA). Il y a donc des opportunités pour la production d’énergie pour la cuisson ou pour soulager le réseau électrique des villes souvent confronté à des délestages réguliers. Enfin le couplage santé – environnement est très fort sur le continent. Une gestion efficace des déchets permettra non seulement de limiter les pollutions mais favorisera aussi l’amélioration du cadre de vie et la situation sanitaire. La plupart des décès en Afrique sont causés par les maladies vectorielles (paludisme, fièvre jaune, etc.) dont la prolifération est fonction de la salubrité urbaine.

Une attention particulière devrait également être portée aux Déchets d’Équipements Électriques Électroniques (DEEE). D’après le rapport de l’ONU, DEEE ? Où en sommes-nous en Afrique la consommation intérieure est à l’origine de la majorité (jusqu’à 85 %) des DEEE en Afrique de l’Ouest. L’ONU a focalisé son analyse sur cinq pays : Bénin, Côte d’Ivoire, Ghana, Libéria et Nigeria. Il en ressort que 650 000 à 1 000 000 de tonnes de déchets électroniques issus de la consommation intérieure sont produits chaque année et doivent être gérés afin de protéger la santé et l’environnement de la région. Au final la gestion des déchets est un indicateur de performance des politiques publiques des gouvernements locaux. D’après la Banque Mondiale « une ville qui ne parvient pas à gérer efficacement ses déchets est rarement capable de gérer des services plus complexes, comme la santé, l’éducation ou les transports. L’amélioration de cet aspect est l’un des moyens les plus efficaces de renforcer la gestion municipale dans son ensemble. » Pour trouver les solutions durables au développement de l’Afrique et enclencher une dynamique de croissance verte inclusive, fouillons dans nos POUBELLES.

Thierry Téné
Journalducameroun.com)/n

Capital moral, capital économique et unité nationale: que rapporte l’Opération Epervier au peuple camerounais?

Par Thierry Amougou, président de la Fondation Moumié

Puisque trente ans de Renouveau National ont produit trente ans de déficit de rigueur dans la gestion, trente de déficit dans la moralisation des comportements et trente ans de déficit du développement moral du pays, il semble primordial de se demander ce que l’Opération Epervier, acharnement thérapeutique de dernière minute sur un projet de société mort-né, apporte au peuple camerounais et au pays tout entier en matière de développement. Lorsque, trente ans après, un régime plonge le pays dans une hyper judiciarisation de la vie politique et publique alors que l’Etat de droit recule drastiquement, cela n’est pas la conséquence d’un esprit des lois ayant contaminé toutes les transactions au sein dudit Etat au point où le droit dirait et ferrait tout. C’est plutôt, comme nous aimons à le dire, la justice et le pénal qu’on érige en assureurs en dernier ressort des carences trentenaires de son mode de gouvernance. En fait, chaque fois que le droit est très bavard comme c’est le cas en ce moment au Cameroun, il ne stabilise plus la société. Il devient un symptôme d’une instabilité sociétale et politique de fond. Le Cameroun est à ce stade-là. Un stade où, au lieu de manquer de place dans ses coffres forts pour ranger les gains de trente ans de Renouveau National, le pays cherche plutôt comment agrandir ses prisons désormais l’habitat préféré de ceux qui, sélectionnés maintes fois par le Président camerounais comme proches collaborateurs, ont dirigé le pays aux postes de responsabilité les plus élevés. Si nous faisons un bref bilan évaluatif des prisons camerounaises avant et après 1982, il va sans dire que le stock des hauts cadres et responsables politiques de haut niveau qui y séjournent pour avoir spolié l’Etat bat un record sous le Renouveau National. C’est, au bas mot, un bilan catastrophique car cela signifie que le Renouveau National est une machine hautement fiable et efficace dans la production de la délinquance d’Etat, la « feymania d’Etat ».

Pour un régime qui avait pour objectif premier la rigueur dans la gestion et la moralisation des comportements, se retrouver, trente ans après, de plains pieds dans les maux et les incivilités publiques que son programme politique promit d’éviter dès 1982, est la preuve d’un cuisant échec. C’est justement parce que la rigueur dans la gestion et la moralisation des comportements n’ont jamais réellement été appliquées depuis trente ans que la prison centrale de Yaoundé incarne désormais le vrai visage de la gouvernance du Biyaïsme : le visage de cette prison est celui de son bilan. Dès lors, appliquer la rigueur logique au leader du régime en place implique de considérer celui-ci comme le responsable numéro un de l’état actuel du pays. Moraliser les comportements devrait donc consister à prêcher par l’exemple en apprenant aux Camerounais que lorsqu’on se plante sur toute la ligne, on assume son fiasco et on s’en va. Cela ne se fait pas par le Prince car la crise civique que vit le pays traduit aussi le fait que le Cameroun a un chef d’Etat tout puissant mais responsable de rien comme le dit la Constituions de mars 2008. Le drame camerounais réside de ce fait dans un échec collectif qu’opposants politiques, intellectuels progressistes, responsables de la société civile et tout le peuple doivent assumer, étant donné que si la catastrophe politique qu’est le Renouveau National reste encore au pouvoir en 2011, alors nous n’avons pas, tous et toutes et autant que nous sommes, trouvé comment débarrasser le pays d’un régime s’étant situé à mille lieues en deçà de ses promesses initiales. Si le pouvoir et la politique ont encore un sens, ils doivent sans cesse être appréciés à l’aune de leurs résultats en confrontant leurs discours aux réalités des faits. Dès lors, puisque trente ans de Renouveau National ont produit trente ans de déficit de rigueur dans la gestion, trente de déficit dans la moralisation des comportements et trente ans de déficit du développement du pays, il semble primordial de se demander ce que l’Opération Epervier, acharnement thérapeutique de dernière minute sur un projet de société mort-né, apporte au peuple camerounais et au pays tout entier en matière de développement.

De la responsabilité du Prince à celle de ses collaborateurs et de leur système de gouvernance
Une des grandes caractéristiques du Biyaïsme est de mutualiser et d’externaliser les résultats incarnant la faillite du régime dont il est porteur. La mutualisation de la faillite du Renouveau National consiste à vouloir transformer en cause nationale la mise aux arrêts de quelques grandes têtes d’un système dont le fonctionnement clanique et médiocre se situe aux antipodes de l’Etat de droit au sens d’approche juridique d’une collectivité humaine régie par des droits et des devoirs. L’externalisation quant à elle vise à faire croire au peuple que les faits de mal gouvernance dont traite l’Opération Epervier, tombent du ciel alors que les responsables de la transformation du Cameroun en « un business », une « affaire juteuse » sont bien-là. Mutualisation des fautes et externalisation des causes de la défaite morale du pays participent donc de la manipulation des consciences, autre pratique loin de la moralisation des comportements que prédisait le Renouveau National dans son lexique. Cela étant, il est primordial, pour la gouverne des citoyens, de souligner que la responsabilité première de la transformation du Cameroun en une truanderie et en une pétaudière subsahariennes, revient à un leader, à son système et à ses serviteurs. La responsabilité du leader est une responsabilité individuelle autant que celle de ses serviteurs. Ils ont, pendant trente ans, pris ensemble les décisions dont l’Opération Epervier est aujourd’hui le résultat. Encore une fois, le capitaine d’un bateau ne peut être mis à l’écart, ni des turpitudes de son équipages, ni du naufrage du bateau, ni de son plan de navigation. Le capitaine donne le cap et l’équipage exécute les instructions de navigation pour le respecter. Vouloir nous dire, comme cela se fait d’habitude, que le Président est bon et son entourage mauvais, ne tient pas un seul instant la route car c’est le même Président qui, pendant un quart de siècle, disait aux Camerounais qu’il n’avait aucune preuve des détournements de deniers publics. Comment se fait-il qu’il sorte des preuves de son chapeau tel un magicien, uniquement une fois sa carrière politique derrière lui ? comment se fait-il que les preuves pleuvent uniquement dans une affaire qui concerne sa vie à savoir l’achat d’un avion pourri tombé en panne dès son premier usage ? Bref, dans tous les cas de figure, le Prince est comptable de « la feymania d’Etat » que son système a instauré depuis 1982. C’est en ce moment-là la responsabilité systémique qui devrait mettre aux arrêts autant la tête du système que ses serviteurs. Ceux qui doutent encore de la faillite mémorable du Renouveau National n’ont qu’à regarder le visage que présente son bilan de sa gouvernance : c’est la Prison centrale de Kondengui, guillotine camerounaise vers laquelle sont conduits les serviteurs d’hier accusés du crime de lèse majesté. Aussi, en matière de développement, l’Opération Epervier n’instaure pas une culture de « l’accountability » au Cameroun, étant donné que la responsabilisation, l’imputation et la traçabilité des actes que cela implique ne sont pas les points focaux d’une Opération Epervier téléguidée par la tête du système qu’elle dit combattre.

Comment compenser le manque à gagner du pays et de ses populations?
Répondre sérieusement à cette question exige que l’on dresse d’abord le tableau de bord de l’état des lieux réel du pays. Dans un premier temps, il est important de signaler que les faits dont traite l’Opération Epervier ne sont sûrement qu’un aspect des délits publics et décombres que l’on peut trouver dans la mémoire sécrète du Biyaïsme. Ces derniers temps, il suffit que Marafat Hamidou Yaya ouvre sa bouche un instant par missives interposées, pour que le pays mesure l’ampleur de la putréfaction politique à la tête du pays. Il suffit qu’on prenne en compte tous les détournements non sanctionnés parce que toujours fidèles au système, pour juger du manque à gagner de l’Etat. Si on ajoute à cela le fait que l’asymétrie d’information, l’opacité des règles et des procédures est ce qui fait la marque déposée de l’Opération Epervier, alors les Camerounais n’ont qu’une connaissance lacunaire de l’ampleur du désastre de trente ans de gabegie. Dans ces conditions, évaluer le manque à gagner du pays sous le Renouveau National relève du secret des Dieux car les bribes que nous connaissons de « la feymania d’Etat » ne sont que les éclats que la lutte entre crabes dans un panier laisse sortir du panier sans que nous ne sachions dans quel état réel est le panier lui-même : nous sommes en face des liquidateurs d’une République, jadis l’espoir de l’Afrique centrale. Néanmoins, il nous est possible, avec les bribes d’information que nous avons, de dire que la dette morale, la dette financière et la dette temporelle que traîne ce régime à l’égard des Camerounais est largement au dessus du plaisir solitaire que tire le Prince des incarcérations de ceux qui ont osé regarder vers son poste. Le manque à gagner des Camerounais est même en hausse constante avec cette Opération Epervier car, non seulement les capitaux financiers détournés ne sont pas récupérés par l’Etat, mais aussi cet Etat, c’est-à-dire les Camerounais, dépense encore en temps, ressources et travail pour s’occuper des procès du système. De même, la perte de temps ne peut être compensée quand on sait que trente années de vie d’un Africain sont déjà plus de la moitié son espérance de vie. Dès lors, mettre un haut dignitaire du Renouveau National en prison ne donne pas du travail à ceux qui sont au chômage parce que l’argent public n’a pas été orienté vers des investissements productifs. Envoyer au bagne des collaborateurs ne rend pas la vie aux Camerounais morts parce que l’argent public n’est pas allé vers l’équipement des hôpitaux. Multiplier les procès politiques ne redonne pas le sourire à un paysan camerounais qui, affamé, a bradé ses terres à un fonctionnaire milliardaire sur le dos de l’Etat. L’Opération Epervier n’apporte donc rien de concret au pays pour son développement moral et économique, étant donné qu’elle est une gestion de ses propres déficits de gouvernance par un système qui en constitue la cause première. Ce système a augmenté le risque pays que redoutent les investisseurs internationaux et la discrimination statistique qui fait que plusieurs Camerounais honnêtes sont considérés à l’extérieur du pays comme des truands en puissance. Que dire des diplômes camerounais de nos jours l’objet de suspicions dans plusieurs universités occidentales ? Compenser le manque à gagner des Camerounais ne peut donc se faire sur le plan financier, mais moral et politique. Il ne peut se faire que par une offre politique qui réconcilie ce pays avec lui-même et les valeurs républicaines de travail, de justice, de solidarité et d’excellence : le Biyaïsme a grillé tout son crédit dans ce domaine.

Et l’unité du pays que rappelle le 20 mai 2012 dans tout cela?
Le 1er janvier 1960, le Cameroun francophone accédait à l’indépendance. Le Cameroun anglophone sous tutelle Britannique le suivit le 1er octobre 1961 dans un Etat fédéral qui ne devint unitaire que le 20 mai 1972 après un référendum. Le 20 mai de chaque année est donc un grand jour pour le pays en ce sens qu’il sanctionne la sortie officielle du joug colonial où les Camerounais fêtaient le 14 juillet, fête nationale de la puissance colonisatrice. Les festivités qui meublent cette journée sont donc justifiées et ne peuvent être contestées par un Camerounais qui aime son pays. Cependant, le 20 mai ne saurait se limiter aux soirées dansantes bien arrosées et pleines de ripailles. Il ne peut se confiner aux discours officiels qui s’apparentent à une façon d’enterrer les informations de « la boite noire » du processus d’indépendance du pays. L’unité du Cameroun, symbole centrale de cette fête, doit être le prisme au travers duquel nous lisons, tant l’histoire de notre indépendance, que les résultats des régimes Ahidjo et Biya ayant succédé aux colons. Une fois cette problématique posée, l’unité du pays peut s’analyser à un triple niveau : territoriale, politique et intergénérationnelle.

Pour ce qui est de l’unité territoriale, la presqu’île de Bakassi a certes été reconnue camerounaise mais elle est toujours occupée par le Nigéria qui en exploite toujours le pétrole. Cela reste une atteinte à notre souveraineté territoriale. Au niveau politique, il ne faut pas oublier, et la Fondation Moumié y tient comme à la prunelle des yeux des Camerounais, que jusqu’en 1972, date du référendum pour l’Etat unitaire, le massacre des nationalistes camerounais se poursuivait, orchestré par la France et l’armée camerounaise. Parler d’unité nationale exige, sur le plan politique, une institutionnalisation officielle du travail de mémoire afin que ceux des fils du pays qui ont perdu la bataille et leurs descendants politiques se réconcilient avec les vainqueurs de cette bataille et leurs descendants politiques. Cela ne se fait pas en affichant deux à trois photos dans les couloirs de l’Assemblée nationale, mais comme le propose la Fondation Moumié, par la création d’une « maison camerounaise de la mémoire » et l’instauration d’une journée nationale des martyrs de notre indépendance. Tant que cette réconciliation politique n’est pas faite, l’unité politique de notre pays sera purement artificielle. Et quand nous parlons d’unité politique il faut entendre réconciliation entre le pays, son histoire et ses acteurs politiques qui garderont leur diversité dans l’arène politique. C’est de cette réconciliation du pays avec lui-même que dépend l’unité intergénérationnelle entre Camerounais. La jeunesse est ici la courroie de transmission à condition que toute l’histoire lui soit apprise, que des politiques solidaires et justes soient menées d’une génération à une autre, et que les moyens de trouver sa place dans le monde actuel lui soient donnés. Or, en 2012, force est de constater que le régime Ahidjo à ignoré la réconciliation du pays par la mise au cachot du travail de mémoire, que celui de Biya s’est contenté du strict minimum sans réintégrer les martyrs de façon institutionnelle dans le paysage politique du pays. On remarque même sur le plan politique que le Biyaïsme entraîne une rupture de l’unité intergénérationnelle car la jeunesse, fer de lance du Renouveau, est plus mal lotie que ses aînés qui ont fréquenté gratuitement aux frais de l’Etat camerounais. Le sort réservé à l’ADDEC n’est par exemple pas une façon de bâtir l’unité intergénérationnelle dans un pays. Cela dit, le moment que vivra le Cameroun le 20 mai 2012 n’est pas un moment d’unité car:

– Le Cameroun vit un moment kafkaïen où ceux qui sont arrêtés et humiliés ne savent pas ce qui leur arrive. Un moment où les prévenus passent des années en prisons avant qu’on ne s’aperçoive que le dossier d’accusation est vide. Un moment où après avoir purgé 15 ans de prison, d’autres dossiers mis au frigo par le pouvoir, réapparaissent pour vous maintenir en prison. Un moment où les régions camerounaises se divisent autant que les familles d’une même contrée, étant donné qu’on arrête certains et non d’autres ayant au moins spolié l’Etat autant que ceux qui sont pointés du doigt. C’est le moment d’un chapelet de procès politiques qui ne peuvent unifier le pays mais détruire la justice républicaine.

– Le Cameroun vit un moment machiavélien, message envoyé par l’Opération Epervier en ce sens qu’on peut transformer ses plus proches collaborateurs en matière politique de sa pérennité au pouvoir. Les dernières arrestations, sans dire que ceux qui sont arrêtés sont innocents, sont du pur machiavélisme car le Prince a attendu que ceux qui sont aujourd’hui à la prison centrale de Yaoundé fassent campagne pour lui et assurent son récent septennat.

– Le Cameroun vit enfin un moment de délation tous azimuts car les déclarations de Marafat sont la preuve qu’un régime de délateurs est désormais en place au Cameroun.

Donc, sans une reconnaissance institutionnalisée des victimes de notre indépendance par Ahidjo et Biya, sans sortie du pays de la défaite morale, du moment kafkaïen, du moment machiavélien et du moment de délation où il a été plongé par le Biyaïsme, la fête de l’Unité reste un simple mot car toutes ces dimensions divisent le pays moralement, politiquement et économiquement. Le Cameroun sera uni ou ne le sera pas avait dit le Prince dans un discours. Jugez-vous-même du résultat après trente ans.

Thierry Amougou, président de la Fondation Moumié
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La crise de l’Euro, l’Afrique et la stratégie de la Ligne Maginot

Par Thierry Amougou, président de la Fondation Moumié

De janvier 1884 à février 1885, l’Afrique fut dépecée et partagée par des pays occidentaux croyant dur comme fer à leur droit naturel d’apporter « la civilisation » aux « barbares ». Sans aucun Africain autour de la table des négociations, les conditions d’exploitation des ressources naturelles du continent noir furent aussi fixées suivant les seuls intérêts des grands acteurs coloniaux de l’époque. Cette attitude qui consista à traiter de l’Afrique et de ses problèmes en son absence, constitue ce qu’on peut appeler l’esprit de la conférence de Berlin. Les conséquences contemporaines de cet esprit sont encore robustes car le Fcfa, monnaie officielle de nombreux pays africains membres de la Zone Franc, est le fruit de l’Empire colonial français qui se déploya lui-même en s’appuyant sur les notions de « mise en valeur », « d’hinterland », « d’arrière pays » et de « commerce légal » érigées par ladite conférence au rang d’instruments stratégiques du PIDE (Pénétration, Installation, Domestication et Exploitation.)

Si, en 1884, l’Afrique n’était encore au yeux du « monde civilisé » qu’un ensemble de terres lointaines et étranges sans pouvoir de négociation et sans aucun intérêt à être intégrée par les puissances coloniales dans une négociation parlant de son avenir, tel n’est plus le cas depuis le XXème siècle où sont nés des États africains indépendants. Il est dès lors interpellant de constater que les pays africains qui, jadis, ont été contraints de rester au sein de la Zone Franc et de garder le Fcfa comme monnaie, remettent en selle l’esprit de la conférence de Berlin en adoptant la stratégie de la Ligne Maginot par rapport à leur avenir monétaire. Celle-ci, ainsi que le disait le Général de Gaule, est l’attentisme même. Elle consiste à attendre que les autres fassent quelque chose au sujet d’une problématique alors que notre avenir y est en jeu. En ce qui concerne le Fcfa, la stratégie de la Ligne Maginot semble prisée par les États africains de la Zone Franc. Cela s’est vérifié dans au moins quatre cas de figures où l’Afrique est restée coite en attendant que les autres fassent quelque chose pour elle sur des problèmes cruciaux qui engagent son avenir et son développement.

Premièrement, de 1948 à 1994, la France fixa, sans que les pays africains de la Zone Franc ne disent mot, le taux de change entre le Fcfa et le FF à un niveau si élevé qu’il obérait le prix des exportations africaines et ne bénéficiait qu’aux exportations françaises vers l’Afrique. Deuxièmement, dès que les pays africains de la Zone Franc sont entrés en crise dans les années 1980, le Fcfa a été dévaluée par décision unilatérale des institutions financières internationales et notamment de la France qui ne voulait plus supporter la charge d’ajustement puisque le compte d’opération prévoit à la fois une convertibilité illimité du Fcfa, et une possibilité de découvert au pays africains déficitaires de la Zone Franc. Troisièmement, le passage à l’Euro en 1999 par la France s’est aussi fait sans que l’Afrique ne réfléchisse sur son avenir monétaire et celui de la Zone Franc par rapport à cette évolution. Quatrièmement, la crise actuelle de l’Euro issue de celle de la dette souveraine au sein de l’UE elle-même liée à la crise de subprimes, semble ne pas intéresser le continent noir et ses pays de la Zone Franc alors qu’il s’agit d’une crise qui implique directement l’étalon international qui assure la convertibilité internationale du Fcfa : l’Euro. Quelle est la stratégie pensée par l’Afrique si la faillite de l’Euro devient effective ? Cette crise de l’Euro fait-elle réfléchir les pays africains de la Zone Franc sur leur avenir monétaire ? Les pays africains de la Zone Franc savent-ils que si l’Euro disparaît (ce qui n’est plus une hypothèse farfelue), ils perdront en même temps le point d’ancrage de la convertibilité du Fcfa et une baisse drastique de la valeur de leurs réserves de change suite à l’inflation que cela peut induire ? Attendent-ils, compte tenu de leur silence, que ce soit la France qui réfléchisse de ce qu’il faudrait faire dans une telle éventualité ? La Zone- Franc est-elle toujours une zone monétaire lorsqu’on sait que le Fcfa de la BCEAO et celui de la BEAC ne sont plus convertibles entre eux qu’au marché noir les deux instituts d’émissions considérant chacune la monnaie de l’autre comme de la mauvaise monnaie ?

Sortir de la stratégie de la Ligne Maginot exige que les pays africains de la Zone Franc trouvent des réponses à ce type de questions car la crise que connaît la Grèce est déjà un cas d’école pour tous les pays africains de la Zone Franc dont la souveraineté monétaire est déconnectée de la souveraineté politique. Comme tous les pays africains de la Zone Franc, la Grèce a renoncé à sa souveraineté monétaire en intégrant la zone monétaire européenne et en adoptant l’Euro comme monnaie de référence en lieu et place de la Drachme. Dès lors, la manipulation du taux de change comme instrument de lutte contre le déficit public n’est plus de son ressort comme cela est aussi le cas pour les pays africains de la Zone Franc. Donc si, d’un côté, les pays africains de la Zone Franc bénéficient de la convertibilité illimitée du Fcfa qu’assure l’Euro via le trésor français, de l’autre, ils renoncent à un instrument de développement qu’est le taux de change. De même, si le découvert que ces pays peuvent avoir de la part de la France via le compte d’opération est un avantage, il ne faut pas oublier, non seulement qu’en contrepartie, la France puise aussi dans le compte d’opération en périodes de prospérités de ces pays, mais aussi, qu’elle peut déstabiliser n’importe quel pays africain de la Zone Franc en manipulant la masse monétaire : des recherches démontrent que celle-ci augmente parfois dans uns pays africain lorsque la France y soutient un régime et veut créer une illusion monétaire chez les citoyens en période préélectorale, alors que les robinets peuvent se tarir lorsque l’équipe en place en Afrique n’est pas en bons termes avec Paris. Quelques mois sans de quoi payer ses fonctionnaires, et le régime africain impopulaire à Paris est tout de suite en grande difficultés.

Ce qui précède est la preuve que la monnaie n’est pas seulement un instrument de développement via plusieurs politiques où elle intervient (taux de change, monnaie de crédit, intermédiation financière, réserves de change, fonds souverains, prêteur en dernier ressort, base monétaire, monétisation .), mais aussi un paramètre de souveraineté économique qui doit être en cohérence avec la souveraineté politique des Etats. En outre, la monnaie unique est accélératrice d’intégration (cas de l’UE) et une arme géopolitique comme le montre la guerre des monnaies qui se joue entre le Dollar américain, le Yuan chinois, l’Euro, la Livre Sterling et Franc suisse par échanges internationaux interposés : les grandes monnaies sont en lutte permanente dans la conquête du territoire mondial au point où on peut parler de véritables géo monnaies. Cependant, étant donné que plusieurs pays africains sont hors Zone Franc et émettent leurs propres monnaies nationales avec des échecs (Zaïre), des retours au sein de la Zone Franc (Guinée), des succès (Nigeria, Maroc, Tunisie, Afrique du Sud, Kenya..), il semble que la problématique du choix cornélien entre l’institution d’une monnaie unique africaine et l’adoption des monnaies nationales, soit moins importante que celle de savoir qu’elle est le statut que les Africains veulent donner à leur monnaie par rapport à leurs objectifs de développement.

Étant donné que l’histoire monétaire mondiale montre que le décalage entre la souveraineté politique et la souveraineté monétaire aboutit toujours à des crises, le choix gagnant pour l’Afrique peut être des monnaies nationales comme étapes vers des monnaies régionales et des monnaies régionales comme étapes vers une monnaie unique africaine. Même si le manque de diversification des structures productives des pays africains de la Zone Franc, la bonne santé des pays africains aux monnaies nationales (Afrique du Sud, Nigeria) et l’effondrement de la Grèce prouvent qu’une zone monétaire n’entraîne pas obligatoirement du développement, il est important que l’Afrique essaie d’évoluer vers plus d’intégration afin de faire le poids face aux autres grands ensembles (UE, USA, ASEAN, Chine, Inde.) qui dominent l’échange mondial. Dans une telle perspective, la monnaie unique africaine devient un accélérateur d’intégration. La transformer en instrument de développement du continent noir reviendrait donc à apprendre de la crise actuelle de la zone Euro en mettant en place un gouvernement économique africain ; une banque centrale africaine ; un trésor africain ; des obligations de la dette africaine, un système fiscal cohérent (ce qui ne veut pas dire homogène), et un fonds de garantie africain. Autant de choses qui font défaut au sein de l’UE. C’est un projet de longue période, mais l’Afrique doit y réfléchir et y travailler de façon permanente en sortant de la stratégie de la ligne Maginot face à ses paramètres monétaires qu’elle doit automatiquement orienter pour son développement cinquante ans après les indépendances.

L’Euro n’est que le Mark allemand relooké en monnaie communautaire. La France et d’autres pays en paient aujourd’hui le prix et veulent revoir les accords de Maastricht. Comment les Africains qui utilisent le Mark allemand via le Fcfa après avoir utilisé le Franc français via le même Fcfa restent-ils impassibles face à cette situation cinquante après les indépendances ?

Thierry Amougou, président de la Fondation Moumié
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«Le Biyaïsme», l’électoralisme et la démocratie camerounaise

Par Thierry Amougou, président de la Fondation Moumié

Dans un écosystème socio-politique, le temps est une des choses qui lie un régime au peuple, au politique et à l’idéal démocratique. Il est le médium par et à travers lequel on saisit la nature profonde d’un régime, le lien qui s’établie entre celui-ci et le peuple puis, ce que son règne, en longue période, fait du politique et de l’idéal démocratique.

. Renouveau National et électoralisme : une union sacrée
Arrivé au pouvoir sans passer par le vote du peuple camerounais, une des caractéristiques du « Biyaïsme » est le fait d’avoir transformé le moment préélectoral et l’acte de voter en moyens de sanctuarisation de sa gouvernance et de perpétuation de l’autocratie afin que le pouvoir acquis en 1982 sans le concours du vote, se maintienne grâce à un vote et à son moment ritualisés en obstructions démocratiques : c’est l’électoralisme. C’est-à-dire la transformation des scrutins en schèmes démocratiques indépassables alors que ceux-ci (les scrutins), dans la conception du Renouveau National, ne sont que des moments intermittents de crispation, de cristallisation, de réduction, de confinement et de vidage de la vie politique et démocratique camerounaise de leur substance. L’électoralisme est en effet la fin de la vitalité démocratique au sens où, quoiqu’étant un instrument procédural important dans la vie démocratique, il ne dit rien sur le contexte du vote, c’est-à-dire sur la nature des structures de pouvoir et celle des institutions qui l’organisent, le sanctionnent et le mettent en vedette au Cameroun pour mieux se couvrir de leurs carences, turpitudes et malversations quotidiennes entre deux élections et pendant. « Le Biyaïsme » est donc aussi un électoralisme en ce sens qu’il transforme le temps préélectoral, le temps du vote et l’acte de voter moins en périodes et instruments d’expression réelle de la citoyenneté camerounaise, qu’en mécanismes d’abêtissement populaire par dépérissement de la rationalité publique en faisant du vote un facteur et un temps de non-intelligence du pays : réduire la démocratie au vote revient à la nier totalement. Négation d’autant plus draconienne que le Renouveau National a opté pour une élection présidentielle à un seul tour, le meilleur moyen pour que le vote serve à la conservation de la dictature et non à la transformation émancipatrice d’une société par sa mise en mouvement politique grâce à une présidentielle à deux tours.

. Congrès du RDPC : grand instant au service de l’électoralisme
Si « le Biyaïsme », par sa durée au pouvoir et la gouvernance de jouissance des privilèges du pouvoir qu’il a installée, est une réussite totale en termes purement personnels, machiavéliques, égocentriques et corporatistes, alors il est la médiocrité faite système et la médiocrité incarnée à la fois par son leader, ses équipes et leurs résultats sur le plan de la construction sociétale. A partir de là, il est un modèle politique et une gouvernance contre-exemplaires par rapport aux objectifs de développement du Cameroun et de l’Afrique Noire. Dès lors, aborder les liens incestueux, par rapport à l’idéal démocratique, que le Renouveau National entretient avec l’électoralisme et la démocratie, ne peut avoir meilleur point d’ancrage que le tableau panoramique présenté par le dernier Congrès du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC). Grand instant au service de l’électoralisme, ce Congrès fut en effet le lieu de confluence spatiale de tous les caciques du régime, l’espace de contraction temporelle de trente ans de Renouveau National, et l’instant de focalisation médiatique d’une masse plébéienne éberluée devant les fausses notes de la partition jouée par le chef d’orchestre Paul Biya mis en scène par lui-même pour lui-même. Ce moment de pure propagande politique fut, et c’est cela l’ironie du sort, une répétition contractée et révélatrice de la manière dont est gouverné le Cameroun depuis 1982.

Avec la tenue de ce Congrès, le RDPC que le Président camerounais présenta, dans le but de contrecarrer les revendications du multipartisme, comme le parti incubateur, laboratoire et facilitateur de la démocratie à la camerounaise, sortait d’une très longue période d’hibernation, à cause, non seulement d’un floue artistique volontairement entretenu par son candidat naturel, mais aussi d’obstruction de toutes les velléités progressistes et démocratiques en son sein. La démocratie que préparait le RDPC pour tout le Cameroun est donc connue trente ans après. C’est un électoralisme où le parti n’existe que par et pour Paul Biya qui le ressuscite en période électorale pour son auto-perpétuation et le plonge tout de suite après dans une profonde léthargie une fois que l’acte de voter et le moment électoral ont joué leur rôle d’effaceurs des principes démocratiques. Le Président Biya applique donc la même stratégie sur tout le pays: la direction par le mutisme et l’absence entre deux élections présidentielles ; le fonctionnement à vide et sans résultats du pouvoir comme argument pertinent de sa longue durée; l’instauration d’une présidence à vie par invention du « candidat naturel » comme type idéal autocratique adossé sur le droit naturel censé s’imposer à tout un peuple.

. « Paul Biya, le Président qui rassure » : l’électoralisme purificateur
Le temps du Congrès RDPC, version 2011, n’a pas dérogé à la règle qui régit la propagande politique. Le logo y était omniprésent, non seulement à travers l’accoutrement des membres et de la salle qui leur servit d’arène, mais aussi à travers ce qui constitue le prolongement politique du logo, c’est-à-dire le message politique qu’il véhicule et transmet. Parmi ces messages, « Paul Biya, le Président qui rassure » fut le plus marquant. C’est celui qui mettait en relief la photo du Président sortant tapissant le mur derrière la table d’honneur des cérémonies occupée par le Prince. C’est un message qui en dit long sur « le Biyaïsme » comme électoralisme et son pouvoir purificateur et rédempteur.

En effet, lire, dans tous les médias officiels, « Paul Biya, le Président qui rassure », est très trompeur un fois mis en évidence le fait que cette grande messe du régime rassure uniquement Paul Biya lui-même et ses adeptes dans leurs approches et exercices libidineuses du pouvoir car la démonstration de force que fut ce Congrès est pour eux le signe certains que les jouissances et les réjouissances des privilèges que procure le pouvoir qu’ils détiennent vont continuer. A contrario, « Paul Biya, le Président qui rassure », se mue en véritable escroquerie politique une fois qu’on le met en résonance avec la réalité sociale vécue et les résultats réels du régime depuis 1982. Dès lors, on se rend compte qu’au lieu d’être un Président qui rassure, Paul Biya est plutôt un Président qui abandonne le Cameroun chaque année à ses problèmes pendant des centaines de jours pour s’enfermer dans sa suite de l’Intercontinental en Suisse ; un Président qui a semé le désespoir chez plusieurs jeunes frappés par le chômage massif ; un Président qui rend instable la norme fondamentale camerounaise malmenée à sa guise ; un Président qui a semé la mort en mars 2008 en autorisant des tirs à balles réelles sur la jeunesse camerounaise ; un Président dont la politique de rigueur dans la gestion et de moralisation des comportements est un fiasco mémorable ; un Président à la politique étrangère paresseuse et contrite à la politique de la chaise vide. Bref, un Président qui, à 78 ans, fuit sa retraite comme la peste et refuse une commission électorale indépendante, ne rassure pas la jeunesse. Il obscurcie son avenir en instaurant un conservatisme anti-jeunes via son projet de société éternellement en route sans bilan ni horizon fini.

Dès lors, le temps préélectoral, le temps électoral et le vote deviennent des opérateurs politiques dont le rôle est de purifier, de sanctifier et de sanctuariser « le Biyaïsme » en présentant son leader comme un homme sans histoires, sans échecs et sans sang des Camerounais sur les mains. Cela se fait par effacement symbolique de tous les méfaits du régime de l’espace public par le biais du discours qui, à travers « Paul Biya, le Président qui rassure », construit un faux contrat social entre Biya et le peuple camerounais. Autrement dit, toutes les souffrances sociales engendrées par le fourvoiement du Renouveau National entre deux scrutins présidentiels depuis 1982, ne semblent plus exister devant la mise en scène du bourreau du peuple par effets d’annonce inflationnistes. On retrouve ici toute la caractéristique du « Biyaïsme » qui fonctionne à plein régime uniquement lorsqu’il fonctionne à vide, c’est-à-dire exclusivement orienté vers une politique par le verbe et pour le verbe. D’où le fait que le Président essaie de couvrir les échecs retentissants de son régime par un recours abusif aux superlatifs, signes d’une fuite en avant propre à la politique de l’autruche. Ces superlatifs ont pour but de cacher le vide des faits et des résultats tangibles. En conséquences, non seulement les Camerounais auraient pu se contenter d’ambitions modestes effectivement réalisées, le Président leur parle incessamment « des grandes ambitions » dont l’allumage a nécessité près de trente ans de pouvoir sans compter le fait que le même retard à l’allumage sera inévitablement plus grand pour « les grandes réalisations » qui, objectivement, ne verront jamais le jour car les trente ans d’incubation « des grandes ambitions » ont largement entamé le temps des réalisations concrètes et ne seront plus donnés par la nature au Prince âgé de 78 ans.

Le moment préélectoral, le moment électoral et le vote, démontrent, à travers ce Congrès, tant le déficit de sincérité et le déni de réalité qui habitent le régime, que le ratage de son rendez-vous avec lui-même dans l’histoire du pays. Le temps du vote devient ainsi l’instant où Paul Biya, l’hypo-Président aux hypo-résultats, essaie de se transformer et de se présenter en hyper- Président aux hyper-résultats. D’où l’éternelle prématurité du « Biyaïsme » qu’atteste avec une précision métronomique le fait qu’il lui a fallu trente ans pour qu’il pense à passer aux réalisations de ce qu’il promit. Comme si, par un coup de baguette magique, le temps perdu se rattrape aussi facilement. Comme si, les vies sacrifiées et détruites par la détention du pouvoir pour ne rien en faire, étaient réversibles. Pour Paul Biya, l’électoralisme purificateur véhicule l’image suivante : « après l’accident, la police efface rapidement les traces de sang sur la chaussée ; et lorsque vous passerez un quart d’heure plus tard, vous ne saurez même pas que quelqu’un vient de mourir : l’ambulance a déjà emporté le cadavre la circulation a repris son cours comme si de rien n’était, et les enfants recommencent à jouer sur le trottoir » : C’est ainsi que « le candidat naturel » reprend ses droits sur la vie des petites gens en annihilant le réel de ses victimes.

. Le complexe du salvateur : la perversion du caractère collectif du projet démocratique
Une des pièces fondamentales du « Biyaïsme » comme électoralisme est le complexe du salvateur dont souffre l’homme du 6 novembre 1982 en se targuant maintes fois d’être celui qui aura sauvé les Camerounais en leur apportant la démocratie. Non seulement cela est une ineptie une fois mise en évidence la foultitude de blocages qu’il fait à cette démocratie, mais aussi, c’est le même complexe du salvateur qui mène ledit Président à se présenter comme celui qui lutte contre la corruption et les détournements de deniers publics. Il est cependant vrai qu’autant l’électoralisme est un paramètre de médiocrité démocratique, autant le complexe du salvateur y contribue en dénaturant le caractère collectif de la construction d’une société démocratique et donc de sa justice. Ce n’est pas une seule personne qui incarne la justice dans un pays comme c’est le cas au Cameroun où Paul Biya pilote et dirige l’opération Épervier à sa guise : la justice et la vertu, en démocratie, se construisent à plusieurs. Elles sont l’ uvre même du progressif et du collectif, autant de choses aux antipodes du complexe du salvateur qui caractérise notre Président à vie. Au Cameroun, nous avons un superman à la tête de l’État car il dit avoir apporté la démocratie et être actuellement dans un one man show de lutte contre « la (dé)civilisations des m urs » que son régime a instaurée. D’où le fait que celui qui traîne le complexe du salvateur est le propre du paranoïaque car convaincu de son caractère exceptionnel alors que ses uvres ne font que faire reculer la naissance d’un espace public démocratique en détruisant la multiplicité d’infrastructures normatives et les contre-pouvoirs qui définissent les conditions de participation démocratique au sein d’une société.

. Que reste-t-il au peuple camerounais dans ce cas?
La conséquence du « Biyaïsme » comme électoralisme est le décalage colossal entre ses déclarations principielles sur l’idéal démocratique depuis 1982, et leur mise en pratique effective dans sa gouvernance. D’où, comme déjà signalé, le caractère non-exemplaire de ce système pour l’émancipation, la liberté et le progrès. Il devient plutôt, au sens machiavélique de la conception du pouvoir, un moyen efficace pour jouir toujours du pouvoir par le pouvoir et pour le pouvoir. Par voie de conséquence, la démocratie, version « biyaïste », reste purement prosaïque et se conçoit dans un éternel lexique politique comme l’aventure onirique d’un hiatus indépassable entre principes et réalités. Dès lors, le Prince ne s’est pas adossé sur le peuple mais sur l’arithmétique du peuple facile à profiler à sa guise ; le politique ne s’est pas transformé en moyen d’autonomisation et d’optimisation de l’agir citoyen mais en un mode de troncature et de constriction de celui-ci ; l’exercice du pouvoir n’a pas multiplié les chances de développement du Cameroun mais l’a transformé en un pays à hauts potentiels de risques d’implosion ; aucun principe cardinal et ordinal du jeu politique n’a été inventé pour construire un lien entre élites et peuple et créer une classe moyenne qui joue l’intermédiation politico-économique entre les deux ; le vote n’est pas devenue un procédure de choix libre, informée et sincère afin d’incarner le fondement solide d’une citoyenneté camerounaise, il est plutôt devenu l’orchestration d’une parodie funeste contre le développement d’une parole apte à délibérer, c’est-à-dire à peser dans le débat public.

Le danger ici est que la conscience de classe, dans ces conditions, peut s’affaiblir étant donné que les Camerounais commencent à penser qu’ils sont à leurs places et que leurs malheurs dépendent de leurs aptitudes et talents intrinsèques pas à la hauteur de la vie bonne dont ils rêvent. Et le politique devient un magma darwiniste qui oriente la société, non vers une lutte contre « la feymania d’État » qui le mine, mais vers le souci de la réalisation stricte de soi qui tue la force collective et dérive vers « la feymania populaire ». L’anomie sociale s’installe et plonge les Camerounais dans la médiocrité venue du haut d l’État. Ce peuple est pourtant la clé de tout changement au Cameroun à condition qu’il s’indigne de ce qu’il subit et retrouve son courage, seul capable de lui redonner sa souveraineté. A ce titre, l’élite camerounaise de l’intelligence à pour rôle de continuer à interroger, à critiquer sans concessions le système oppresseur et à informer le peuple. Le peuple lui-même a le droit et le devoir d’insolence, de désobéissance et de transgression de l’état du monde que ce système a érigé en règle. Ce peuple doit continuer la lutte en se rappelant ce que Zarathoustra dit à ses disciples en son temps : « Cherchez-vous un ennemi, faites votre guerre, battez-vous pour vos pensées. Et si votre pensée succombe, que votre probité chante victoire néanmoins (.) Je ne vous conseille pas le travail, mais la lutte. Je ne vous conseille pas la paix, mais la victoire. On ne peut garder le silence et rester en paix que si l’on a un arc et des flèches (.) la guerre et le courage ont accompli plus de grandes choses que l’amour du prochain ».

L’électoralisme n’étant pas la démocratie mais sa négation profonde, ce peuple ne doit jamais croire sa souveraineté restituée parce qu’on parle de vote et parce qu’il va voter. Alors cher compatriote vote et bats-toi encore, ne vote pas et bats-toi toujours pour ta liberté !

Thierry Amougou, président de la Fondation Moumié
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Présidentielles camerounaises de 2011 : La fondation Moumié remet le débat à l’endroit (I)

Par Thierry Amougou, président de la Fondation Moumié

I- Le Renouveau National face à l’illusion de purger le mal camerounais par des expédients électoralistes
Face à la crise multiforme que connaît le triangle national, seules des mesures de transformations structurelles et structurales du mode de transmission du pouvoir, de sa conception et de son exercice peuvent faire le poids. A la place, ce sont des expédients, ou mieux, une agitation de surface et de circonstance, que le Renouveau National offre ces derniers temps comme solutions politiques. Le régime de Yaoundé est en effet à l’heure des « mesurettes » qu’il pense capables de purger radicalement les maux profonds dont souffre le pays.

Dès lors, le recrutement circonstanciel de 25.000 jeunes Camerounais diplômés, les quatre tomes de « Paul Biya, l’appel du peuple », la rencontre du couple présidentiel avec certains musiciens camerounais sur le déclin, le droit de vote des Camerounais de la diaspora, et le nationalisme opportuniste du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC), sont les nouveaux instruments de l’attirail politique du Renouveau National. Savamment orchestrés par les médias officiels, ces instruments sont auréolés et enjolivés de qualités d’arguments pouvant transformer en mieux l’état du monde régressif dans lequel sont empêtrés les Camerounais depuis plus d’un quart de siècle. Ce qui, pour en dire le moins, est illusoire car la structure dictatoriale d’un pouvoir et ses conséquences néfastes sur la vie, ne se changent pas du jour au lendemain par des mesures conjoncturelles obéissant à un calendrier électoral : ce sont des épiphénomènes qui ne peuvent, ni faire évènement, ni construire l’amorce d’une nouvelle dynamique politique camerounaise.

Si la recherche de comment rester coûte que coûte Président de la République du Cameroun est de bonne guerre pour le Prince et son équipe au point d’être le seul horizon directeur des « mesurettes » actuelles, cet objectif ne peut être capable d’inspirer des réformes qui pensent le pays dans une perspective à la fois altruiste, de long terme et transformatrice de la condition camerounaise. Ainsi, la raison pour laquelle les différents griots du Renouveau National exaltent sans limites l’actuelle politique des expédients électoralistes, gît dans le fait qu’ils veulent, autant que le régime lui-même, faire du Président l’éternel homme de la situation. Statut qu’il mériterait dans un horizon temporel indépassable grâce à une construction artificielle d’un discours qui consiste à inculquer dans les esprits des Camerounais que sans Biya, c’est le chao tous azimuts au Cameroun. Raison pour laquelle, dernièrement à Mvomeka’a, le musicien Ottou Marcellin, manifestement pas à la hauteur de ses mélodies, expliqua au journaliste que sans la paix au Cameroun, il n’aurait pas pu élever ses neuf enfants et en sortir un ingénieur grâce à sa seule musique. Le message politique qu’il passa ainsi par le biais de sa propre histoire, est que le Président Biya devait rester au pouvoir car sans lui, le pays expérimenterait tristement l’absence de paix.

Il se construit ainsi, depuis quelques mois, une petite musique lancinante nous faisant croire qu’avoir un autre Président au Cameroun que Biya serait synonyme de guerre. Et pourtant, au lieu que ce talentueux parolier continue de chanter : « et un soldat tirera, tirera et retirera et la vie d’un homme tombera », il aurait été mieux inspiré et plus perspicace qu’il reconnût que le soldat a bien déjà tiré, tiré et retiré au Cameroun en 2008 et que les vies de jeunes Camerounais sont bien tombées. En outre, le Renouveau National n’incarne qu’une approche obtuse de la paix car tous les Camerounais qui ne mangent pas à leur faim, tous ceux qui sont au chômage, exilés ou sont sans logement vivent une situation de guerre contre la pauvreté : ils ne sont pas en paix.

Face à cette nouvelle doxa balistiquement organisée pour faire croire que « le Biya-nouveau » est arrivé pour 2011, que le régime peut se réformer de l’intérieur et qu’il est le seul garant de la paix, le peuple et le citoyen engagés doivent rester vigilants et faire appel à un questionnement plus profond du mal camerounais. D’après la Fondation Moumié, cela exige, non seulement que nous donnions une profondeur et une épaisseur historiques aux maux qui minent le pays, mais aussi, que nous mettions sur la balance les expédients électoralistes actuels du régime, et les défis contemporains du pays. Seule une telle démarche peut montrer aux Camerounais que les tréfonds du mal camerounais restent intacts sous l’agitation de surface du régime en conjoncture préélectorale. Ceci implique que la Fondation Moumié redonne de la profondeur au débat afin qu’il ne quitte l’endroit et sa signification historique par dérive sur les expédients et l’écume politique au service du pouvoir. Le faire nous pousse à analyser tour à tour :

. Le néonationalisme opportuniste du Renouveau National ;
. Le droit de vote congénital à l’esprit d’Etat-colonial ;
. Le droit de vote des Camerounais de la diaspora ;
. L’enjeu de 2011 comme date et moment émancipateur des Camerounais.

II- Le néonationalisme opportuniste ou le second meurtre de la mémoire nationaliste authentique
Face aux grandes puissances occidentales dont l’attitude à l’égard des projets d’éternité du Renouveau National semble ne plus être favorable, le RDPC s’est découvert des élans et des relents nationalistes. Ce nationalisme opportuniste, de circonstance ou mieux, sur le tard, est en effet une des armes de prédilection actuelles du pouvoir de Yaoundé. Le but est de mobiliser l’esprit patriotique Camerounais contre à la fois les silences ambigus de Sarkozy et les critiques à peine voilées d’Hilary Clinton à l’égard des chefs d’Etats africains qui ne veulent pas quitter le pouvoir. C’est dans cette conjoncture de mutation argumentaire que le Secrétaire national du RDPC déclara lors d’un récent meeting à Kribi : « Nous sommes mieux placés que quiconque pour savoir ce que nous voulons, pour savoir ce qui est bon pour nous et ce qui ne l’est pas. Et en toute logique, nous pensons que seuls les Camerounais peuvent et doivent avoir le dernier mot quand à la direction qu’ils entendent imprimer à leur destin commun. »

Cette déclaration est le signe tangible d’un régime dangereux parce que prêt à faire feu de tout bois pour continuer son action macabre sur les esprits et les corps en souffrance des Camerounais. Non seulement le Renouveau National ne peut dénoncer de façon crédible l’ingérence d’anciennes puissances coloniales, étant donné que celles-ci l’ont mis au pouvoir et le soutiennent depuis 1982, il initie aussi une troncature de l’histoire en perpétrant un second meurtre d’authentiques nationalistes camerounais, dont il est cosignataire de l’éradication par affiliation politique avec le premier régime camerounais. Le nationalisme authentique ne fut jamais un drapeau de ralliement que ses pères agitèrent aux yeux des Camerounais lorsque leur valeur marchande au sein du marché politique occidental était au plus bas. Il ne fut jamais mis à la place d’un serpent auquel on s’accroche lorsqu’on se noie politiquement au point d’en faire « un nationalisme sapeur pompier ». Il ne fut surtout pas le propre de « politiciens caméléons » qui, parce que le régime dont ils sont les dignitaires est en crise profonde, trouvent un nouveau dieu tutélaire dans les référents nationalistes avec l’espoir de changer la peau du régime à l’instar de serpents venimeux qui muent sans pour autant cesser d’être des serpents venimeux.

« Le nationalisme sapeur pompier », nouvel expédient politique du Renouveau, ne peut faire le poids face au mal camerounais dont il constitue même un symptôme contemporain de renforcement. Le Renouveau National étant la continuité du régime Ahidjo, il est consignataire de la décapitation historique du nationalisme camerounais et de ses leaders les plus influents. En conséquence, le régime actuel de Yaoundé est responsable, autant que son prédécesseur, de l’ingérence internationale qu’il feint aujourd’hui de dénoncer par pur esprit machiavélique de mettre de son côté l’âme immortelle de la fierté d’un peuple. Le danger qu’un tel régime représente pour le Cameroun est un révisionnisme politique au bout duquel la Fondation Moumié se pose la question de savoir de quoi hier sera fait avec le Renouveau National. Question cruciale vu que ce régime choisit, non seulement les bons côtés de l’histoire selon ses objectifs du moment, mais aussi, essaie de construire un néonationalisme instrumental qui s’appuie sur une population camerounaise qu’il opprime en faisant alliance avec un Occident qu’il tente désormais de présenter comme l’ennemi de la nation camerounaise. Les Camerounais ne doivent donc pas perdre de vue qu’ils font l’objet d’une nouvelle stratégie de tricherie car l’émancipation politique, statutaire et humaine que cherchait « l’UPC historique » est exactement ce que les adeptes du « nationalisme sur le tard » et leurs devanciers ont sabordé en pactisant avec l’ingérence occidentale qui revient actuellement à la gueule comme un boomerang : cela s’appelle un reflux revanchard de l’histoire qui, comme le dit le chanteur, revient du fond de sa défaite pour dire aux usurpateurs : « non je n’ai rien oublié ! ».

D’après la Fondation Moumié, les Camerounais sont face à une crise de ménage au sein du couple politique pouvoir camerounais /pouvoir occidentaux. Et comme dans toute crise de ménage, les amoureux de longue date peuvent se réconcilier à tout moment, non seulement parce que les adieux se passent souvent un peu trop bien, mais aussi parce que les rapports d’intérêts qui les unissent de très longue date sont, dans le cas d’espèce, toujours renégociables pour une nouvelle idylle dans le dos du peuple camerounais. La transformation émancipatrice du pays n’est donc à attendre, ni du Renouveau National, ni de l’extérieur, ni de la scène de couple entre cet extérieur et le régime en place. Elle est à trouver et à inventer dans et par l’intelligence populaire et collective camerounaise qui, seule, peut retrouver les sentiers de l’émancipation jadis portée par Félix Moumié et ses pairs. La démocratie pour laquelle se battent de nombreux Camerounais ne se concrétise pas de façon désincarnée. C’est l’histoire de l’émancipation du peuple camerounais et les arguments de son combat qui donneront sens, visage et fondements réels à celle-ci.

III-Les Camerounais votent depuis l’Etat-colonial pour renforcer des dictatures
Le vote d’un peuple est un moment important de la mystique démocratique. C’est le moment où le champ politique respire afin que la vie politique, sociale et institutionnelle reprenne son souffle et tisse de nouvelles confiances et de nouvelles délégations de pouvoir. Le vote est un temps où se concrétise la sécularisation de la source de la légitimité du pouvoir politique par l’onction populaire qui fait d’un citoyen l’élu de volontés et d’aspirations dont les conflits sont domestiqués et « civilisés » par le débat démocratique. C’est un temps politique où le bel écho d’un peuple sort de l’isoloir pour irradier les arcanes d’un pays du pouvoir populaire confié à un homme qui en devient automatiquement le dépositaire sous le contrôle de ce même peuple.

Cependant, le vote au Cameroun étant l’instrument d’un long processus de privatisation du pouvoir politique et de ses attributs par une alliance d’élites camerounaises et françaises, la Fondation Moumié souligne qu’il se situe encore à mille lieues de ses fonctions démocratiques. En effet, le vote n’est qu’une procédure de choix qui, même si elle est un élément du jeu démocratique, ne signifie rien si les conditions préalables d’un choix libre sont inexistantes. Il ne donne aucun pouvoir au peuple sans analyse de la nature profonde du système de pouvoir qui l’organise. Autrement dit, un vote non sous-tendu par un régime démocratique cesse d’être un moment important du jeu démocratique, pour devenir un instrument de consolidation et de recyclage des dictatures. Ne pas tenir compte de cette réalité cruciale entraîne qu’on tombe dans un fétichisme du vote, c’est-à-dire, dans une conception démocratique qui cesse de concevoir la démocratie comme une forme de société ponctuée par le vote pour faire de celui-ci la démocratie elle-même. Pour cela, le vote des Camerounais ne sert pas encore la mystique démocratique. Il ne signifie pas un moment démocratique tant qu’il demeure un moment de recyclage et de consolidation d’une dictature comme c’est le cas depuis l’Etat-colonial. Les Camerounais ont en effet voté sous le joug colonial lors du référendum sur la réunification, ils ont voté pendant tout le régime Ahidjo et l’ont aussi fait depuis 1982 sous Biya sans que cela ait, d’une quelconque façon, entraîné une transformation émancipatrice de leur situation. La Fondation Moumié s’appuie sur ces votations antérieures pour affirmer que le vote des Camerounais ne sert pas la démocratie s’il est organisé par des structures, un régime et des institutions antidémocratiques. Il en devient même le Cheval de Troie car au service de leur consolidation et validation aux yeux de la communauté internationale.

Ce n’est donc pas le vote en lui-même qu’il faut exalter et organiser pour faire démocratie au Cameroun, mais ce qu’il y a derrière le vote, c’est-à-dire, l’état du monde et le système dans lequel on vote et qui organisent le vote. Le vote est en effet une institution frappée de dégénérescence démocratique au Cameroun car la société lui a depuis longtemps retiré son estime qui seule, peut lui conférer un pouvoir, tant de libérateur, que de censeur procédural. Le Cameroun et les Camerounais étant face à un régime qui utilise le vote pour ne pas changer la conception et la structure du pouvoir qui opprime l’émancipation citoyenne, le fait de voter ne peut servir à la transformation structurale et structurelle qu’espèrent les populations en 2011. En effet, le vote n’est pas seulement la désignation d’un homme, mais aussi un mécanisme de sélection des normes et des structures de pouvoir d’un pays. Elecam ne peut garantir une telle aspiration car son objectif est de conserver les structures de pouvoir actuelles en utilisant le peuple comme argument de validation sans pour autant ouvrir de nouvelles opportunités de pouvoir pour ledit peuple. En conséquence, Elecam utilisera le vote des Camerounais à la présidentielle de 2011 pour assurer la continuation de la propagation du virus responsable du mal camerounais depuis 1960, c’est-à-dire la mise à l’écart du projet émancipateur du Cameroun et de ses populations.

Compte tenu de ce qui précède, la Fondation Moumié ne peut encourager le vote des Camerounais à la présidentielle de 2011 que si une commission électorale indépendante avec les pleins pouvoirs dans l’organisation du scrutin et la proclamation des résultats est l’instance qui l’organise sur le plan national et international. Toutes les personnalités qui refusent ces derniers temps de faire partie d’Elecam prouvent par leur défiance que cette structure ne peut organiser un vote crédible et transparent au Cameroun.

A suivre: IV- Le droit de vote des Camerounais de la diaspora : voir l’isoloir et mourir ?

Thierry Amougou, président de la Fondation Moumié
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« Au-delà de l’opposition Ouattara /Gbagbo, une question de fond », par Thierry Amougou

Au-delà de l’opposition Ouattara /Gbagbo, une question de fond: La conception du pouvoir politique en Afrique

Avec l’arrestation de Laurent Gbagbo, l’heure n’est ni à la dérive victimisante des pro-Gbagbo, ni à la jubilation exagérée des pro-Ouattara. L’une et l’autre attitude sont de courte vue. Elles faussent complètement le débat en versant dans l’invective et la diabolisation de l’autre différent de soi. Ces deux postures appauvrissent le débat, non seulement parce qu’on n’est guère trop malin en réfléchissant uniquement avec ses tripes, mais aussi, parce qu’elles laissent les émotions prendre le dessus sur les questions de fonds. Elles placent les arguments des uns et des autres dans les extrêmes et, ainsi, retombent obligatoirement dans la même logique que celle à la base de la crise ivoirienne.

Lorsque, sous le coup de la colère, des Africains promettent de loger une balle dans la tête à d’autres Africains parce que ceux-ci ne sont pas du même avis qu’eux, nous ne sortons pas de la logique meurtrière du conflit Ouattara/Gbagbo. Lorsque nous faisons une lecture manichéenne de l’histoire de l’Afrique et des Africains, nous restons dans l’amalgame de la connaissance des faits que vise l’histoire, et la reconnaissance des actions que cherche la mémoire. Lorsqu’on titre, suite à l’arrestation de Laurent Gbagbo « l’Afrique est en deuil ! », sans l’avoir dit un seul instant devant les milliers d’Ivoiriens passés de vie à trépas à cause de ce conflit, on construit une curieuse conception du deuil même dans son aspect symbolique ; lorsqu’on porte Laurent Gbagbo au panthéon des héros africains les plus illustres sans se poser un seul instant la question de savoir ce que sa trajectoire politique a en commun avec « le poison anti-panafricain qu’est l’ivoirité », nous restons superficiels autant qu’en prenant Ouattara pour la fin des problèmes alors qu’il est plus que jamais vu comme un Président installé par la France. Nous pouvons nous poser d’autres questions : suffit-il qu’un Africain se dise panafricaniste et soit bombardé par les Occidentaux pour qu’il soit comparé à Lumumba ou Um Nyobè, figures historiques qui n’ont jamais triché à une élection ? Le fait que ceux qui se disent panafricanistes finissent très souvent en prison est-il le signe de la justesse de leurs combats ou celui d’une maladresse politique ? Sont-ce les deux à la fois ?

Bien sûr, nous restons des hommes et nous ne pouvons mettre de côté nos émotions. Il est même rassurant que nous en ayons plusieurs en pareilles circonstances : un homme d’un certain âge, quel que soit son rang social, reste encore respecté et presque sacré en Afrique Noire. Voir le corps d’un adulte exhibé devant les caméras dont les images font le tour du monde en un clin d’ il, devrait faire un choc à tout Africain fût-il un ultra pro-Ouattara. Le propos de cette analyse n’est ni de condamner des émotions telles l’indignation de voir le corps d’un Africain adulte exhibé au monde entier, ni de nier l’intervention de la France et de l’Onuci dans l’arrestation de Laurent Gbagbo. Il est de nous amener à nous poser la question de savoir ce qui favorise de tels évènements malheureux en Afrique Noire. Notre thèse est simple: au-delà de l’opposition Gbagbo/Ouattara, la conception du pouvoir politique par les Africains à la tête de nos Etats, est ce qui fait prospérer la « Françafrique » et donne des alibis d’ingérence à la communauté internationale.

L’opposition Gbagbo/Ouattara qui s’est étendue au sein du peuple africain en le segmentant carrément en deux camps diamétralement opposés, mérite mieux et plus séreux de notre part. A long terme, ce qui semble en jeu n’est pas la défaite ou la victoire d’un camp ou d’un homme. C’est plutôt une conception du pouvoir politique capable de réconcilier la Côte-d’Ivoire et les Africains, non seulement avec eux-mêmes et leur histoire, mais aussi, avec les principes universels qu’ils veulent voir prospérer dans le champ politique africain de demain.

Les Africains doivent apprendre à savoir gagner et à savoir perdre une élection présidentielle
Une conception singulière du pouvoir politique semble en effet en bonne place des causes explicatives des conflits et guerres postcoloniales inter et intra-africaines. Il n’est pas besoin d’être un grand clerc pour souligner que le pouvoir politique est considéré par de nombreux leaders politiques africains, non comme un moyen d’action pour améliorer le sort de son pays et la vie de ses compatriotes, mais comme un instrument personnel pour échapper, tant à la mauvaise vie qu’à des morts évitables : le pouvoir en Afrique est donc une question de vie ou de mort dans tous les sens de ces deux mots. En effet, une fois que c’est uniquement lorsqu’on a le pouvoir suprême qu’on échappe aux carences ambiantes sur le plan matériel, organisationnel et institutionnel, ceux qui ne l’ont pas en Afrique vivent en grandeur nature tous les travers de l’absence totale d’un Etat de droit. L’Afrique est donc, grosso modo, divisée en deux parties diamétralement opposées. Ceux qui sont au pouvoir et acquièrent par lui le droit à la vie bonne et à un Etat de droit aménagé par eux pour eux. Et ceux qui meurent de faim, d’injustices, de misère et rêvent sans fin de pouvoir un seul instant jouir de leurs droits. Dans ces conditions, perdre une élection présidentielle devient automatiquement une question de mort pour les perdants et synonyme de vie pour les gagnants : avoir le pouvoir politique c’est être dans le monde de la vie et ne pas l’avoir c’est être dans le monde de la mort. En effet, puisque ne pas être au pouvoir signifie la mauvaise vie ou la possibilité de mourir de morts évitables, être au pouvoir signifie exactement le contraire. Avoir le pouvoir politique se transforme donc automatiquement en lutte à mort où tous les moyens sont permis pour être du côté de ceux qui gagnent et, ainsi, auront droit à la vie : savoir perdre et savoir gagner une élection présidentielle, sauf quelques exceptions qui confirment la règle, devient donc impossible pour les Africains en lutte pour un pouvoir politique synonyme de vie et une absence de ce pouvoir synonyme de mauvaise vie et de morts évitables.

Les Africains ne peuvent donc savoir perdre et savoir gagner que si la conception du pouvoir politique que nous venons d’esquisser change radicalement, afin de devenir centrifuge par rapport à l’intérêt général et non centripète par rapport à soi et à son entourage. Ce n’est que lorsque le pouvoir politique devient un instrument d’amélioration des conditions de vie du pays et de ses habitants que celui qui perd une élection présidentielle n’en fait pas la fin du monde car il sait que celui qui la gagne vient juste de remporter une bataille politique et travaillera pour le bien-être de tout le pays. Les Africains sortiraient de la conception du pouvoir politique comme une question de vie ou de mort que Ouattara et Gbagbo ne seraient pas arrivés à ce dénouement honteux pour le continent ; qu’Henri Konan Bédié n’aurait pas inventé « l’ivoirité » comme argument politique, que Sassou Nguésso n’aurait pas fait la guerre et tué des Congolais pour le reconquérir, que les constitutions africaines se seraient pas ainsi malmenées et que bien d’autres Présidents de révéraient pas en ce moment d’un pouvoir politique éternel. Il est interpellant de questionner la conception que les Africains ont du pouvoir politique lorsque, non seulement les pro-Ouattara prennent les armes pour installer ADO de force, mais aussi, lorsque le Président sortant ivoirien, après avoir perdu une élection, se terre avec femmes, enfants, petits-enfants et maman dans un bunker justement parce qu’il ne veut pas lâcher le pouvoir : la réponse semble claire au regard de ceux deux attitudes. On veut avoir le pouvoir politique en Afrique pour avoir droit à la vie et échapper aux problèmes de la vie que l’argent et le pouvoir permettent d’éviter. Les Ivoiriens du Nord voient leur mort se pointer avec Gbagbo au pouvoir et ceux du Sud la leur avec Ouattara. En conséquence, partout en Afrique, le défi politique actuel est de mettre en place un exercice du pouvoir politique qui disqualifie et rend désuètes ces formes de peurs.

C’est un pouvoir devenu une question de vie ou de mort qui construit les dictatures et alimente « la Françafrique » et l’ingérence internationale
Une fois que le pouvoir politique n’est plus un instrument d’action pour le bien-être du pays et de tous pour devenir un moyen d’échapper à la mort, l’objectif des Africains qui accèdent à la magistrature suprême n’est plus la promotion de l’Etat de droit. Mais d’utiliser le pouvoir pour garder le pouvoir et jouir des droits aménagés par lui que les autres Africains n’ont pas parce qu’ils n’ont pas le pouvoir. La dictature prend ainsi racine en Afrique Noire car la construction de l’Etat de droit étant, non seulement ce qui peut faire perdre ce caractère privatif au pouvoir politique, mais aussi, ce qui peut faire perdre des privilèges à celui qui le possède, durer au pouvoir et réprimer toux ceux qui veulent y accéder, devient le programme politique le plus partagé par les Présidents africains. La « Françafrique » ne peut alors que prospérer pour au moins deux raisons : 1) elle ne se porte jamais autant bien que lorsque les dictatures sont en place et construisent une gouvernance mafieuse qui lui sied à merveille car consubstantielle à son essence coloniale. 2) devenu synonyme du droit à la vie pour ceux qui l’exerce dans une Afrique sans Etat de droit, ceux qui sont au pouvoir, sans l’avis du peuple, sont aussi prêts à tisser des alliances avec la France pour le garder. De ce fait, combattre « la Françafrique » efficacement ne semble pouvoir se faire qu’en combattant à la fois cette conception du pouvoir qu’ont les Africains, et les dictatures qu’elle induit : la dictature africaine est le terreau le plus fertile pour le développement et la continuité de « la Françafrique » !

Si « la Françafrique » est déjà de l’ingérence, les événements de Côte-d’Ivoire et de Libye montrent aussi une Afrique et des Africains divisés dans l’approche et le rôle de la communauté internationale. Nous devons aussi nous rendre compte ici que le fait que nous condamnions la communauté internationale pour son « deux poids deux mesures » érigé en règle, n’enlève rien au fait que c’est la conception que les leaders africains ont du pouvoir politique et les dictatures qui en découlent, qui constituent la base argumentaire que la communauté internationale utilise comme alibi pour poursuivre ses intérêts. Autrement dit, le fait que nous condamnions les bombardements de l’OTAN sur la Lybie ne veut pas dire que Kadhafi n’est pas un dictateur qui tue son peuple ! Le fait d’être choqué par l’arrestation de Laurent Gbagbo ne veut pas dire que le fait qu’il ait refusé sa défaite soit faux ! Combattre la dictature et la conception sous-jacente du pouvoir politique est ce qui peut, à long terme, signer l’arrêt de mort de « la Françafrique » et annuler l’argument central de la communauté internationale qui consiste en ceci : ce sont d’affreux dictateurs desquels il faut sauver les populations civiles.

Le grand défi qui se pose aux Africains épris de liberté au 21ème siècle est de trouver les moyens de leurs politiques. Tant qu’ils n’en auront pas, ils ne pourront pas se faire « le Bien » qu’ils veulent pour le Continent Noir mais lui feront parfois « le Mal » qu’il ne lui souhaite pas.

On ne peut savoir perdre et savoir gagner une élection présidentielle que si on change la conception du pouvoir politique en Afrique en en faisant moins une fin en lui-même qu’un moyen.

Thierry Amougou, président de la Fondation Moumié
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Interview de Emmanuel Gustave Samnick, directeur de publication de l’Actu, le nouveau quotidien

«Il y a certes de nombreux journaux au Cameroun, mais beaucoup sont des parasites qui encombrent les kiosques»

Qu’est ce qui a motivé la création d’un nouveau quotidien, L’Actu?
C’est en réalité une nouvelle étape dans ma carrière professionnelle. J’ai connu beaucoup de rédactions et occupé pratiquement toutes les fonctions dans les organes qui ne m’appartenaient pas. C’est vrai qu’à la South Media Corporation, certaines divergences m’ont fait partir et j’ai créé mon propre produit qui est L’Actu.

Pourquoi le nom L’Actu?
On a eu plusieurs propositions et on a adopté L’Actu pour actualité. C’est un nom comme un autre, c’est un journal d’informations. L’espace médiatique est truffé de débats, opinions et autres. C’est pour cela qu’on a pensé à un journal qui respecte les canons du journalisme à savoir le traitement de l’information pure.

Qu’est ce qui différencie L’Actu des autres quotidiens?
C’est le lecteur qui va faire la différence. En plus, 6 quotidiens au Cameroun ce n’est pas encore assez. Ailleurs on est à la cinquantaine. Le problème au Cameroun en fait c’est qu’on manque de la qualité, il y a certes beaucoup de journaux, mais beaucoup sont des parasites qui encombrent les kiosques.

L’actu se lance directement en quotidien, est-ce facile sur le plan financier?
C’est un risque que de commencer comme quotidien, mais j’appellerais cela de l’ambition. La viabilité économique est la seule inconnue de l’équation, mais quant à la main d’ uvre de qualité, elle ne manque pas à L’Actu. Je dois préciser que nous n’avons bénéficié d’aucun appui extérieur. Au départ du projet nous sommes quatre à le porter et nous attendons la sympathie de tous.

Quelles sont les ambitions de New Pages Group sarl?
On ne se donne pas de limite. Mais pour l’instant, on va d’abord se battre pour faire vivre les deux titres qui ont été crées à savoir L’Actu Sport et L’Actu. Et si dans l’avenir il y a d’autres possibilités, on ne manquera pas d’exploiter.

C’est vrai que c’est assez précoce, mais comment le public cible a accueilli le produit?
Il semble positif. On a eu un problème de distribution du journal dans les kiosques. A ce moment de l’entretien il n’est pas encore présent dans tous les kiosques à journaux de Douala et Yaoundé. Mais on va vite faire de régler cela.

Certaines personnes disent que c’est par défi personnel que vous avez lancé votre journal. Votre avis ?
Je n’ai de compte à rendre à qui que ce soit. J’ai rêvé d’être journaliste et je le suis. Je n’ai pas de défi personnel, plutôt de défi professionnel. Et pour ce second aspect, je crois que j’y arriverai.

Que pensez-vous des gens qui disent que vous êtes rigoureux, voire même nerveux?
Je suis un être plutôt chaleureux, mais avec le travail, oui je suis rigoureux. Je peux par exemple faire foi à un reporter qui était censé être sur le terrain alors que c’est une pure invention. Je n’ai pas le don d’ubiquité, il va me ramener des citations alors que tout cela est faux. Moi j’aime les choses bien faites et dans le respect de l’art. En plus, je n’ai jamais refusé de rencontrer un journaliste et je suis toujours professionnellement disponible. Je suis plutôt très sociable.

Un mot à votre lectorat?
Je demande aux lecteurs d’être indulgents parce que les débuts sont souvent assez difficiles. On peut avoir des ratés mais on se réajustera rapidement. Je suis de ceux qui pensent qu’on peut vivre honnêtement en faisant son boulot. Nous leur demandons juste le temps de nous stabiliser et je crois qu’on sera en phase.

Emmanuel Samnick, directeur de publication du quotidien camerounais L’Actu
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Le quotidien L’Actu ouvre une nouvelle page de l’information au Cameroun

Officiellement lancé le 11 avril, le journal se fixe des ambitions continentales

S’imposer à moyen terme comme l’un des groupes de presse de référence au Cameroun et en Afrique est l’ambition du nouveau-né dans le paysage médiatique national New Pages Group sarl qui édite le quotidien L’Actu. Ce dernier qui a été officiellement lancé lundi 11 avril à Yaoundé et qui vient trouver en kiosque L’Actu Sport, édité par le même groupe qui lui est présent sur le marché depuis le 22 mars dernier.

Sixième né de la famille de la presse quotidienne camerounaise, L’Actu nait de la volonté de quatre personnes, toutes de nationalité camerounaise, qui pensent comme le dit le slogan, avoir: « Un regard innovant sur l’actualité ». Selon Emmanuel Gustave Samnick, Directeur Général et Directeur des publications: Nous mesurons, d’ici, l’ampleur de la tâche, dans un environnement déjà investi par des titres plus anciens et solidement installés, mais qui est surtout marqué par la pollution des étals de journaux par des dizaines de publications épisodiques à la solde de francs tireurs et parasites de tous bords; sans oublier les difficultés économiques énormes que rencontrent les entreprises de presse indépendantes. Et que dire de la déferlante appelée Internet et autres nouveaux médias, qui offrent à moindre coût si ce n’est gratuitement, un flot intarissable d’informations à un public ondoyant et divers, mais ravi de cette gracieuse abondance ?… Nous avons pourtant choisir d’agir, en renforçant les possibilités de choix de ce citoyen gâté du 21ème siècle, et pour cela nous ferons naturellement avec les aléas du terrain.

L’Actu dont la ligne éditoriale repose sur les fondamentaux du journalisme à savoir le traitement de l’information d’intérêt public sans complaisance et sans parti pris, dans le respect de la déontologie du métier et notamment de la fiabilité et de l’équilibre des sources, est publié en 16 pages avec comme couleur dominante de la première de couverture le vert. Le quotidien L’Actu ne se donnera aucune limite. Selon ses concepteurs: « L’Actu explorera donc tous les champs de l’actualité nationale et internationale, qu’elle soit issue du ressort politique, du monde économique, de l’univers culturel et sportif. » En perspective, l’équipe dirigeante veut créer un lien de proximité entre les lecteurs et le journal, en prenant en compte les idées, les critiques, les remarques et les souhaits, « pourvu que cela se fasse dans les règles cardinales de courtoisie et de bienfaisances » insiste le Directeur des rédactions.

Le quotidien compte pour le moment une vingtaine de personnes dont quinze journalistes. Il est imprimé à la Sopecam et la distribution est assurée par Messapresse. La rédaction du journal comme toute rédaction qui se veut sérieuse, a son organigramme. Et les jeunes journalistes, une dizaine environ, sont encadrés par les plus expérimentés. Parmi ces journalistes expérimentés, il y en a qui sont déjà connus du grand public comme Mbanga-Kack, Abel Mbengue, Cathy koum et bien d’autres. En plus des trois autres associés les journalistes Thierry Hot, Lambert Fotso et le publicitaire Albert Osée Miambo, Emmanuel Gustave Samnick annonce que la porte de l’actionnariat de la SARL New Pages Groupe reste ouverte à tous ceux qui adhèrent à l’esprit du groupe. Depuis le 11 avril 2011, la nouvelle page du quotidien L’Actu est ouverte, il ne reste plus qu’à y inscrire des informations captivantes qui rempliront ses 16 pages.


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Qu’avons-nous appris du vent révolutionnaire d’Afrique du Nord?

Par Thierry Amougou, président de la Fondation Moumié

2011 restera une année politique extraordinaire pour certains peuples du monde arabe. Les révolutions tunisienne et égyptienne sont des cas d’école en la matière et devraient, au-delà des luttes partisanes intra africaines, nous donner des enseignements sur la nature des dictatures, la dynamique de leurs soutiens extérieurs quand l’histoire se déchaîne, le cocktail déclencheur des révoltes, et le rôle des NTIC dans les luttes de libération au 21ème siècle.

Un peuple qui se soulève en masse transforme les soutiens externes de la dictature en forces alliées pour le changement
Les révolutions tunisienne et égyptienne ont ceci de positif qu’elles redonnent de l’espoir aux peuples africains en démontrant l’extrême fragilité des régimes iniques et dictatoriaux qu’on pensait intouchables. Ces révolutions mettent aussi en évidence le fait que les soutiens externes aux dictatures sont légion quand tout va bien, mais fondent comme neige au soleil une fois que le peuple se lève en masse pour dénoncer le caractère infréquentable du régime qui l’asservit depuis longtemps. Dès lors, la dictature fait face à deux adversaires dont « l’effet ciseau » a asymptotiquement raison d’elle : un ennemi interne qu’est son propre peuple « esclavagisé », et un ennemi externe constitué des soutiens externes qui se désolidarisent une fois que le dictateur devient un boulet pour eux. Ben Ali, Hosni Moubarak et Kadhafi ont été pris en tenailles par ces deux dynamiques et n’ont rien pu faire malgré leurs milliards en banque. Les anciens soutiens externes d’hier s’alignent du côté du peuple par purs intérêts machiavéliques, étant donné qu’ils veulent préserver de bons rapports avec le pays et ses nouvelles forces vives. Cette dynamique montre, tant toute la vanité et la malléabilité des soutiens extérieurs si le peuple se soulève en masse, que la bêtise du dictateur qui pense que les pays développés le soutiennent moins par intérêts que par amour.

Chaque dictateur encore en place pense toujours que ça n’arrive qu’aux autres
Si nous faisons une petite lecture rétro-prospective, il apparaît que chaque dictateur pense toujours que son congénère chassé par la rue l’a été parce qu’il ne s’est pas bien organisé comme lui. Mobutu s’est convaincu que c’en était fini de son pouvoir uniquement lorsque Laurent Désiré Kabila était à quelques kilomètres de Kinshasa. Ben Ali en prenant l’avion comptait mettre sa famille à l’abri et revenir prendre son poste. Sans doute qu’Hosni Moubarak se demandait comment Ben Ali pouvait se faire avoir comme un néophyte jusqu’à ce qu’il se rende compte que le peuple ne fait jamais dans la dentelle quand il décide de prendre son destin en main. Les armées sont obligées de s’aligner car tuer des citoyens ne devient qu’un combustible qui ravive la révolte et sa radicalisation. Moralité, de nombreux dictateurs encore en poste en Afrique Noire vivent toujours dans l’illusion d’invincibilité et de toute puissance qu’avaient encore des Mobutu, Ben Ali, Hosni Moubarak et Kadhafi alors que le glas de leur parcours avait sonné. En conséquence, si le changement n’est pas anticipé quand il faut à la tête de l’Etat parce qu’on veut s’y éterniser, il est déjà toujours trop tard lorsque le peuple se réveille car on ne peut que le subir.

La longue durée des dictatures peut se mettre fin en très courte durée
La dictature et le temps constituent un couple ami/ennemi. Le principal ennemi des dictatures est leur longue durée au pouvoir. Celle-ci fait que les uns et les autres perdent le sens des réalités et pensent être nés pour être Président et les autres citoyens, des moutons qu’on mène aux enclos à son rythme et selon ses choix. Avoir le pouvoir et donner des ordres aux autres devient tellement une habitude que cela devient une seconde nature. Cependant, alors que les dictateurs se plaisent dans une fonction présidentielle qu’ils prennent soin de privatiser toute la vie, le peuple lui ronge son frein. Le temps vécu du dictateur dans l’amour du pouvoir est un temps subi par la majeure partie de son peuple dans la souffrance de la carence. La logique implacable ici est que le temps qui permet au dictateur de jouir de la détention du pouvoir est le même qui sédimente les paramètres favorables à sa fin. Les révolutions tunisienne et égyptienne prouvent l’extrême puissance d’une révolution populaire en ce sens qu’elles contractent, non seulement l’espace de la dictature en choisissant des places symboliques pour la contester, mais aussi, le temps de la dictature en faisant chuter celles-ci en un temps record : le pouvoir en longue durée de la dictature est donc annulé et anéanti en très courte durée par le pouvoir du peuple. Le peuple est ainsi une force de réaction rapide qui se transforme en « une arme de destruction massive » des dictatures. En voici des preuves statistiques tirées de l’histoire immédiate :
– il a fallu 23 ans à Ben Ali pour construire sa dictature, mais seulement 1 mois au peuple tunisien pour y mettre fin définitivement ;
– il a fallu 30 ans à Hosni Moubarak pour diriger l’Egypte d’une main de fer, mais seulement 18 jours au peuple égyptien pour le mettre à genou ;
– il a fallu 42 ans à Kadhafi pour instaurer « la grande Jamahiriya libyenne populaire socialiste », autre nom de sa dictature, mais seulement deux semaines au peuple libyen pour qu’il ne contrôle plus que Tripoli et son bunker. Le fait que nous puissions avoir des réserves sur l’intervention de la coalition en Libye n’enlève rien au fait que Kadhafi est un affreux criminel que toute âme éprise de liberté devrait combattre.

Par conséquent, la révolte populaire est un véritable tsunami social qui contracte le temps et l’espace des dictatures et les asphyxie avec une célérité inouïe. Les fondations des dictatures sont donc peu profondes et peu solides parce que basées sur l’exploitation et l’injustice du plus grand nombre. Ce dernier devient une énorme force politique ravageuse une fois qu’elle est mise en branle.

Un cocktail mobilisateur et déclencheur de la révolte existe
Les cas tunisien et égyptien sont aussi les preuves par neuf qu’un certain cocktail est nécessaire pour mettre le feu aux poudres grâce au caractère mobilisateur du désespoir. Le malheur a besoin de compagnie mais les peuples en souffrance refusent celle des dictatures, causes de leur malheur. Ceci étant, de la chute de Ben Ali et d’Hosni Moubarak, surgit un cocktail mangeur de dictatures et de dictateurs. Il est constitué, grosso modo, de quatre éléments qui sont autant de mèches allumées. Ce sont :

– la très longue durée de la dictature et le ras le bol en latence depuis longtemps au sein de la population ;
– l’étendue du prolétariat cognitif constitué de hauts diplômés sans emplois ;
– le chômage de masse des petites gens ;
– le coût rédhibitoire et la misère de la vie quotidienne ;
– L’organisation clanique du pouvoir en place qui construit automatiquement un clan des exclus à celui-ci.

Chose fondamentale, il faut un fort sentiment d’indignation pour que tout ceci fasse un mélange explosif. Ce n’est donc pas où tombe le dictateur qu’il faut chercher les causes de sa chute, mais à l’endroit où il a depuis longtemps trébuché. Chercher la cohésion sociétale au Cameroun ne doit pas se confondre à chercher ses clés sous le lampadaire comme un saoulard attiré par l’endroit où se trouve la lumière alors que ses clés sont tombées dans l’obscurité. Ben Ali et Hosni Moubarak ont négligé le long processus de flux et de reflux des ranc urs et des souffrances populaires dont leurs derniers jours au pouvoir n’ont été que l’apothéose. Le cocktail explosif dont je parle est le résultat de ce long processus que le pouvoir empêche à ceux qui l’ont depuis longtemps de percevoir, tellement ils sont dans leur bulle.

Pas de révolution sans prix à payer en vies humaines
Celui qui veut la liberté est bien obligé d’en payer le prix parfois très lourd en vies humaines. C’est l’autre message qui nous vient d’Egypte et de Tunisie. Bien sûr les pertes en vies humaines ont été réduites grâce à des armées responsables et ayant le sens de l’histoire, mais la perte d’un seul Tunisien, d’un seul Libyen ou d’un seul Egyptien est déjà énorme et atroce pour les familles. Ce sont les dictatures qui, jusqu’au bout, continuent à tuer en comptant ressusciter grâce à une politique anthropophage et cannibale. Maille leur en prend car le sang qui coule fertilise le sol des révolutions et devient un combustible pour ceux qui restent en vie. Plus le sang coule, plus le volcan populaire crache des larves qui balaient les dernières poutres de la dictature. Ceux qui meurent s’en vont effectivement dans le feu de l’action parce qu’ils ne veulent pas reculer et permettre à « la Bête politique » de continuer son travail d’esclavage en plein 21ème siècle. Ce sont des graines humaines qui vont sous terre pour que la révolution vive et triomphe. Comme le dit le philosophe, celui qui n’a pas encore trouvé ce pourquoi il peut se sacrifier ne mérite pas d’être en vie. La contre-révolution esquissée par les partisans de Moubarak n’a servi à rien face au courroux du peuple égyptien déterminé à périr ou à triompher du mal.

Les nouvelles technologies de l’information et de la communication sont de puissants vecteurs d’une démocratie d’opinion et d’excellents supports à l’organisation citoyenne
Critiquer, dire sa colère, partager sa misère et s’organiser ont besoin de supports communicationnels. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication sont de ce fait devenues la bête noire des dictatures du monde. La démocratie d’opinion se porte bien et les services secrets n’ont aucun moyen pour interrompre Internet, Twitter, le matériel informatique, les téléphones portables, face book et bien d’autres canaux de communication qu’offrent la révolution cybernétique et la cyberdémocratie. Les peuples peuvent être mis en cage chez eux mais être complètement capables de s’organiser à distance grâce à ces outils du capitalisme moderne. Comme quoi, la mondialisation n’a pas que de mauvais côtés en faisant du monde « un grand village ». Les Africains peuvent donc combattre les dictatures de chez eux à distance en échappant ainsi à leurs basses polices qui ne tardent jamais à penser à l’élimination physique de ceux qui ne jouent pas au « griotisme » national consacré en gagne pain des esprits appauvris, clochardisées et contraints au vote censitaire.

Thierry Amougou, président de la Fondation Moumié
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Crise des crédits hypothécaires et raidissements nationalistes en Europe

« Le raidissement des référents nationalistes n’est jamais aussi fort qu’en période de crise économique profonde »

En effet, il est historiquement démontré que les périodes de forte croissance économique induisent des politiques d’immigration laxistes, quand les périodes de récession économique donnent lieu à un renforcement des contrôles et de reconduites aux frontières. L’explication de ce phénomène est simple : D’un coté, la forte croissance économique augmente l’activité et fait naître un besoin d’une force de travail étrangère que la prospérité ambiante entraîne les pays d’immigration à considérer moins comme un danger que comme une nécessité conjoncturelle. De l’autre, la crise économique annule le besoin de main-d’ uvre étrangère et installe une carence généralisée qui rend de nouveau visibles ceux qui viennent d’ailleurs. Le rétrécissement de la taille du banquet rend donc le contrôle des billets d’invitation plus sévère qu’en période de vache grasse.

ï ~Crise, idéal national et narcissisme européen
Si, en période de prospérité, l’ouverture au monde et aux autres cultures se fait aisément, on assiste à un recroquevillement national des Etats européens en période de crise, non seulement par le biais de politiques protectionnistes, mais aussi, par le retour aux valeurs nationales et ethno-raciales. Elles sont exaltées comme les seules forces de rappel de la prospérité perdue. Dans cette logique, la crise que vivent les pays au cours d’une période est toujours causée par la négligence des valeurs nationales et ethno-raciales lors des périodes précédentes. Toute la politique nationaliste consiste donc à chercher un bouc émissaire qui permette d’accepter et d’expliquer les troubles sociopolitiques et économiques induits par la crise au sein d’un Etat ou d’une société. La nation devient la nouvelle force tutélaire qui sauvera tout le monde du corps étranger (la crise) qui se trouve au-dedans d’une société. L’idée sous-jacente est que ladite société aurait dû rester pure si elle l’avait su plus tôt. De ce fait, les référents identitaires (culture), symboliques (drapeau, hymne national, langue.) et géologiques (lignage, race et lien de sang) prennent le pas sur l’ouverture, l’histoire et le dialogue entre les civilisations. Le fascisme et le nazisme se sont effectivement développés en Europe en utilisant comme terreau fertile les frustrations et les souffrances issues de la crise de 1929. En ce temps-là, la nouvelle terre promise devint la nation et les nouveaux dieux politiques naquirent autour de ceux qui l’exaltèrent sans vergogne contre les étrangers. La thèse du chroniqueur français Eric Zemmour est du même acabit. Elle fait des Arabes et des Noirs les nouveaux Barbares qui auront bientôt raison de la France par analogie aux Barbares qui eurent raison de Rome en son temps. C’est que l’idée nationaliste ne se développe jamais sans construction mentale d’une crise d’insécurité, sans fanatisme, sans haine et sans xénophobie qu’on essaie de cacher sous le couvert du patriotisme.

ï ~Quelques faits de l’air du temps nationaliste en Europe
Sans aller jusqu’à dire que l’histoire des lendemains de la crise des années trente serait en trait de se répéter en Europe en 2011, force est de constater que le petit matin de la crise des subprimes n’est pas très serein car l’étranger qu’on accepte chez soi doit être de nouveau être « un saint de corps et d’esprits ». En effet, les Suisses ont refusé les minarets chez eux et l’extrême droite du même pays vient d’introduire un projet de loi qui propose l’expulsion de tout Suisse d’origine étrangère et de tout étranger qui auraient été condamnés pour viol d’une Suissesse, d’infanticide ou de tout autre assassinat. La France vient à peine de sortir des dérives de son débat sur l’identité nationale que l’UMP lance un autre débat non moins plein de sous entendus sur l’islam. C’est également le gouvernement UMP qui construit deux catégories de Français par la promotion d’une déchéance de nationalité pour tous Français d’origine étrangère qui tuerait une force de l’ordre française. Pour la petite histoire, le gouvernement UMP ne dit pas ce qu’il advient de cette déchéance de nationalité lorsque le policier tué par le Français d’origine étrangère est lui-même d’origine étrangère ! Du côté belge, on assiste au durcissement de la procédure de nationalisation car ses nouveaux critères prévoient la possibilité de refuser la naturalisation pendant une période allant jusqu’à cinq ans après une condamnation à une peine de prison effective, pour des crimes graves. Sur le plan interne, la même Belgique connait une crise politique auréolée de revendications identitaires flamandes et wallonnes. Au mois de septembre dernier, Thilo Sarrazin, un haut fonctionnaire allemand siégeant à la Banque centrale, a dénoncé le déclin de l’Allemagne qu’il voit « s’abrutir » sous le poids des immigrés musulmans. La suite n’est pas plus rassurante car au succès dévastateur du livre de Thilo Sarrazin, ont succédé les déclarations d’Angela Merkel et de David Cameron, premier ministre britannique. Tous les deux pointent du doigt l’échec de la politique de multiculturalisme dans leurs pays. Bien avant, c’est la Grèce qui a eu toutes les peines du monde à bénéficier de la solidarité de l’UE pour solutionner un problème de dette souveraine. Ces derniers temps ce sont des sondages qui classent la candidate de l’extrême droite en tête du premier tour des présidentielles française de 2012. Au lieu de se poser la question de savoir ce qui se passe dans la société française, tous les commentateurs et politiciens français ont choisi de casser le thermomètre (les sondages) au lieu de chercher les causes de la fièvre qu’il signale (les intensions de votes nationalistes des Français).

ï ~Que dire au bout du compte ?
Il apparaît que les étrangers sont érigés en boucs émissaires permettant d’exorciser les désordres sociopolitiques et économiques induits par la crise des crédits hypothécaires au sein des sociétés européennes. Les étrangers deviennent l’objet de la haine mimétique permettant de trouver une cause exogène qui rassure les populations en ce sens que l’exaltation nationaliste constitue la preuve que « le péché » n’est pas du dedans mais du dehors. En outre, le raidissement des nationalismes européens peut aussi signifier l’échec du projet d’un Etat-nation et des politiques d’assimilation à la française. Politiques qui voulurent effacer les identités ethno-raciales par l’allégeance impersonnelle et suprême qu’est la citoyenneté. A l’heure de la mondialisation que d’aucuns présentèrent comme une uniformisation culturelle, la politique en Europe semble de plus en plus être l’inscription de son identité sur la scène publique. Comme quoi, la mondialisation fait irrémédiablement naître du local et de l’identitaire en réaction au dessaisissement démocratique que produisent les dynamiques globales. Cette réalité est une chance où la diversité est une richesse. Autre chose plus délétère est sa mise en forme politique nationaliste pour casser les ponts entre les peuples et les civilisations. Les demandes nationalistes peuvent être en dormance sans jamais disparaître ainsi que le prouve le vent en poupe qu’elles ont de nouveau dans une Europe qui vit une conjoncture de doute et de peur du lendemain suite à la crise des subprimes.

Thierry Amougou, président de la Fondation Moumié
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Les «dix péchés capitaux» aux fondements de cette révolution camerounaise II

Par Thierry Amougou, président de la Fondation Moumié

En ce qui concerne le Cameroun, centre d’intérêt de nos préoccupations, il serait hypocrite, et donc, inconséquent, de ne pas constater qu’en dehors de ceux qui émargent dans la cour du Prince, le rêve dont rêvent de nombreux Camerounais laissés à la touche du bien-être depuis trente ans par le Renouveau National, est de voir « Ben Ali dégage » et « Moubarak dégage » se transformer en « Paul Biya dégage » avec le même effet concret de changement à la tête de l’Etat.

Péché capital n°3: Le recyclage permanent des échecs en nouveaux arguments de campagne : Non seulement le Renouveau National se maintient au pouvoir par des moyens illicites, mais aussi il compte y faire mourir son leader en projetant sa continuité au-delà de 2011. Le cycle politico-économique (la propagande politique) qui prépare ce pouvoir ad vitam aeternam est basé sur un recyclage des échecs consommés en succès : l’opération épervier qui signe l’échec cuisant de trente ans de rigueur et de la moralisation théoriques et non pratiques, devient un succès ; le comice agro-pastoral d’Ebolawa, autre échec vieux de près de 20 ans, devient l’argument du couronnement de Paul Biya en « sages des sages » d’un Sud où « le paradoxe du pays organisateur » a montré que les populations étaient frappée du syndrome du Dieu loin de ceux qui habitent proche de l’Eglise ; la rencontre avec John Fru Ndi devient synonyme de démocratie apaisée ; un cinquantenaire sans portée historique devient un exploit quand une armée camerounaise qui tue encore des Camerounais au 21ème siècle est portée aux nues à Bamenda. Ça s’appelle de l’acharnement thérapeutique sur un Renouveau National mort de sa bonne mort comme idéologie politique.

Péché capital n°4 : Le bricolage politique sur les corps en souffrance des Camerounais depuis trente ans : L’acharnement thérapeutique dont je parle débouche automatiquement sur du bricolage politique car le Renouveau National veut faire feu de tout bois pour maintenir la flamme. Le grand danger d’une telle attitude est d’oublier que plus d’un quart de siècle de pouvoir ont laissé des femmes, des enfants et des hommes à la touche et que le bricolage qui est fait des échecs consommés ne fait que détériorer leur situation et l’état du monde qu’ils vivent. En un mot, le Renouveau National bricole avec la souffrance et avec la vie en souffrance de plusieurs Camerounais. Le Président a les médecins suisses pour son corps alors que les Camerounais ont ses échecs comme agents pathogènes des leurs.

Péché capital n°5 : Une démocratie apaisée bâtie sur la souffrance sociale et le sang versé pour garder le pouvoir : Parler de démocratie apaisée dans un pays où la modification constitutionnelle devient uns stratégie d’obstruction permanente du jeu démocratique, parler de démocratie apaisée dans un pays où le régime autorise des tirs à balles réelles sur ses propres citoyens, parler de démocratie apaisée au sein d’Etat où le commandement opérationnel de Douala a fait disparaître plusieurs Camerounais sans suite, parler de démocratie apaisée dans une post-colonie africaine où les noms des héros de nos indépendances restent tabous dans la bouche du Président lors d’un cinquantenaire célébrant lesdites indépendances, parler de démocratie apaisée dans un Cameroun où le corps de son premier Président reste en errance au Sénégal comme celui d’un apatride, parler de démocratie apaisée dans un pays où les étudiants sont encore réprimées par les forces de l’ordre, est tout simplement le masque que se construit une dictature pour avancer incognito. En effet, ces réalités sont en incompatibilité dirimante avec la réalité d’une démocratie apaisée. La démocratie apaisée, version Renouveau National, est donc synonyme de paix des puissants et des vainqueurs installée par la dictature. C’est ce que révèle le binôme Paul Biya/Fru Ndi, l’un détenteur du pouvoir depuis 1982, et l’autre du titre de leader de l’opposition camerounaise. Binôme qui prépare ainsi l’enterrement définitif du Cameroun en 2011. Il va donc sans dire que Paul Biya est plus dangereux pour le Cameroun qu’Ahidjo et Fru Ndi plus dangereux pour le Cameroun que Biya. Ahidjo avait un avantage positif sur eux parce qu’il était clair sur la nature dictatoriale de son régime alors que les deux autres feignent d’être des démocrates alors qu’ils n’en sont pas du tout.

Péché capital n°6 : La rue comme seul recours des sans voix et des laissés-pour-compte
Une fois que la Constitution devient le principal instrument de maintien au pouvoir, une fois que l’armée étouffe dans l’ uf toute tentative de contestation véritable, une fois qu’ELECAM devient le point final des revendications d’une commission électorale indépendante en rendant inopérante toute révolution par les urnes, alors la rue devient le seul et unique lieu où le peuple camerounais peut s’exprimer et reprendre le pouvoir qui est le sien en mettant les points sur les i. Si, à l’exception du Bénin et du Ghana, les régimes africains en place ne s’éduquent pas eux-mêmes en intégrant l’alternance comme modalité régulatrice de la vie politique, alors les peuples ont le droit de se charger de cette éducation des pouvoirs, afin de leur inculquer ce principe démocratique. La rue peut de ce fait devenir la caisse de résonnance du peuple en lieu et place d’un parlement camerounais mis au pas par le Renouveau National.

Péché capital n°7 : Le soldat comme valeur suprême de la société camerounaise : Les Camerounais ont le droit de se rebeller contre un pouvoir qui a fait du soudard l’individu les plus important de sa société. La crédibilité des armes ne peut en aucun cas, ainsi que l’a fait le Renouveau National, devenir la valeur suprême d’une société. Il faut un Cameroun qui restaure la vraie échelle des valeurs pouvant bâtir une société prospère. Les armées ont pour seule et unique fonction d’offrir la sécurité comme un bien public à tous les citoyens. Les armées égyptienne et tunisienne l’ont compris.

Péché capital n°8 : Un peuple mis à l’écart des changements de régimes depuis les luttes d’indépendance : Le peuple camerounais est avide d’élire lui-même un Président et de poser les bases d’un nouveau contrat social. Ce privilège ne lui a jamais été offert au regard de l’histoire politique du pays. Ahmadou Ahidjo a été imposé par l’administration coloniale française au détriment des nationalistes camerounais. Par la suite, Paul Biya a été imposé aux Camerounais par Ahmadou Ahidjo. Moralité, les Camerounais ont connu deux régimes qu’ils n’ont jamais eux-mêmes inaugurés. Chaque régime s’installe et met en place une dictature qui cherche encore comment garder le pouvoir dans la même élite coloniale et néocoloniale qui se reproduit de générations en générations. Si ELECAM bloque la voie des urnes et ainsi les voix du peuple, alors elles ne peuvent s’exprimer que par la révolte populaire. Le premier doit inaliénable de son indépendance que n’a jamais eu le peuple camerounais est celui du libre choix de ses dirigeants.

Péché capital n°9 : La hausse du risque quotidien et de l’incertitude du lendemain pour les chômeurs trentenaires : Des enfants nés en 1982 lorsque le Renouveau National accédait au pouvoir sont déjà trentenaires aujourd’hui et plusieurs d’entre eux n’ont jamais connu que le chômage ou des métiers de précarité. Ils sont en âge de fonder des familles mais incapables de le faire car vivant dans la précarité. Vouloir perpétuer le Renouveau National est une façon de proposer à ceux-ci un prolongement de l’incertitude et des risques qui émaillent leur vie quotidienne. Un nouveau régime avec de nouvelles idées et de nouveaux projets peut leur être utile car le chômage cognitif entraîne une dépréciation de l’intelligence quand le chômage de masse plombe les vies de plusieurs au stade du rêve éternel.

Péché capital n°10 : Une justice camerounaise qui se discrédite par une kyrielle de procès politiques au service d’un populisme pénal : Le Renouveau National n’a pas seulement transformé la Constitution camerounaise en paillasson pour ses ambitions de pouvoir jusqu’à ce que mort s’en suive. Il a aussi détruit un édifice au sein d’un Etat, la justice camerounaise. Cette dernière est devenue un instrument du pouvoir exécutif qui la régule par le biais des procès politiques qui jettent le discrédit sur elle. Le Renouveau National est en train de bâtir une justice où la sanction pénale a pour rôle de dédouaner le politique de ses erreurs et de ses échecs depuis trente ans. Le Cameroun, ainsi que le démontre l’opération épervier, est à l’heure d’une justice au service d’un populisme pénal lui-même au service de la campagne présidentielle du Renouveau National.

Ce sont, à mon avis, ces dix péchés capitaux qui fondent objectivement cette révolution camerounaise qui vient. Le Renouveau National peut y échapper sans que cela soit une victoire car, tant que les dynamiques décrites ci-dessus sont en place, ce sera toujours une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes et de tout régime qui suivra. Son temps sera connu quand l’heure sera venue. Seuls les Camerounais en décideront et la répression sanglante annoncée et appliquée le 23 février 2011 dernier n’y pourra rien.

Thierry Amougou, président de la Fondation Moumié
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Les «dix péchés capitaux» aux fondements de cette révolution camerounaise

Par Thierry Amougou, président de la Fondation Moumié

En ce qui concerne le Cameroun, centre d’intérêt de nos préoccupations, il serait hypocrite, et donc, inconséquent, de ne pas constater qu’en dehors de ceux qui émargent dans la cour du Prince, le rêve dont rêvent de nombreux Camerounais laissés à la touche du bien-être depuis trente ans par le Renouveau National, est de voir « Ben Ali dégage » et « Moubarak dégage » se transformer en « Paul Biya dégage » avec le même effet concret de changement à la tête de l’Etat.

I- Prolégomènes
Dans une Afrique Noire où règne très souvent le calme plat des intellectuels face aux dictatures, dans une Afrique Noire où le pauvre passe de vie à trépas uniquement parce que le destin le veut et jamais parce que le pouvoir l’aura affamé et tué, dans une Afrique Noire où seul le pouvoir enterre les hommes de pouvoir et fait l’éloge funèbre de ceux qui l’exercent à vie en refusant d’être jugés par les vivants, dans une Afrique Noire où les conditions de vie sont largement moins bonnes que celles des peuples d’Afrique du Nord qui nous donnent, en ce début d’année 2011, un exemple historique de prise de conscience citoyenne, l’heure n’est pas à la politique de la bouche cousue de l’intellectuel de système. L’heure n’est ni aux éternels concerts d’adulation, ni au silence complice et, encore moins, au poncepilatisme de ceux des nôtres dont les études et les diplômes accumulés n’ont pour unique but que leur bien-être personnel. Le monde et ses problèmes ne s’arrêtent pas aux dimensions de nos ventres ni à notre petite famille aux appétits privés et généalogiques. La souffrance des peuples est si grande que l’intellectuel subsaharien se doit d’être le premier à pointer du doigt ce qui empêche aux populations africaines du Sud du Sahara de vivre en abondance une vie décente. Le faire est un devoir citoyen et un impératif humaniste. Ce serait une démission collective et une défaite, tant de la raison que de la pensée, que de constater que les intérêts individuels et égoïstes de plusieurs de nos esprits les plus éclairés, deviennent les arguments les plus solides au service de la pérennité des régimes asservissants et handicapants qui broient des vies dans un continent qui, ayant connu la colonisation, devrait ériger la dignité et la vie humaine au rang des choses sacrées et intouchables.

La charité bien ordonnée commençant par soi-même, je pense, ainsi que je l’ai toujours fait, que la meilleure façon de parler de liberté aux populations est de l’exercer soi-même. Ce qui revient à se comporter en homme libre vis-à-vis des régimes que nombreux d’entre nous caressons dans le sens du poil, chacun attendant son tour chez le coiffeur. Sauf qu’à force de jouer à ce petit jeu égoïste et nombriliste de la chaise musicale, le peuple africain se dirige sûrement vers les abîmes de la pauvreté dans un continent qui abonde pourtant de richesses de toutes sortes. En ce qui concerne le Cameroun, centre d’intérêt de nos préoccupations, il serait hypocrite, et donc, inconséquent, de ne pas constater qu’en dehors de ceux qui émargent dans la cour du Prince, le rêve dont rêvent de nombreux Camerounais laissés à la touche du bien-être depuis trente ans par le Renouveau National, est de voir « Ben Ali dégage » et « Moubarak dégage », se transformer en « Paul Biya dégage » avec le même effet concret de changement à la tête de l’Etat. C’est aussi être réaliste et objectif, et non simplement un affreux et sombre opposant, que de constater qu’avoir un tel rêve après plus d’un quart de siècle de souffrance pour plusieurs, est un rêve à la fois légitime et beau. C’est, pour ces Camerounais-là, un rêve noble de se défaire d’un régime qui les oppresse et dans lequel ils n’ont jamais rencontré l’épanouissement que doit assurer un pouvoir juste. C’est un rêve jadis rêvé et réalisé par Toussaint Louverture, premier Président noir d’un Etat indépendant au sens occidental de ce terme. C’est un rêve caressé par les hébreux en esclavage en Egypte pendant 400 ans, par les déportés en camps de concentration nazis pendant la seconde guerre mondiale, et par des Africains sous le joug colonial pendant près d’un siècle. Bref, c’est le rêve d’un citoyen normal qui aspire à mieux que ce qu’il vit depuis près de trente ans du fait d’un des siens aux commandes de l’Etat. Au lieu de faire comme si avoir assez d’un régime vieux de trente ans n’est pas un sentiment humain, normal et compréhensible pour tous ceux qui refusent une servitude volontaire, il serait plus constructeur, pour l’avenir du pays, que les bourreaux de cette mise en perspective onirique de la vie heureuse de nombreux Camerounais, sachent qu’ils sont aux fondements du mal être et du malaise de plusieurs d’entre nous. C’est une chance et même un honneur que d’avoir des citoyens camerounais capables de dire qu’ils ont assez d’un régime qui ne fait rien d’autre que de chercher à durer et de toujours durer alors que ses résultats sont minables. Etant donné qu’ELECAM interdit à ces citoyens d’avoir confiance au scrutin et donc de prendre la voie des urnes pour que la voix du peuple sanctionne négativement le régime inique qu’ils condamnent, étant donné que la modification constitutionnelle de 2008 a montré la couleur d’un régime dont l’obsession de vie éternelle est chronique, il ne reste plus que la rue aux Camerounais : un régime qui ne laisse que la rue aux populations fait lui-même de cette rue l’agora et l’instrument qui le vomissent et le poussent à résipiscence.

Ceci étant dit, j’estime qu’il est de mon devoir de citoyen, non d’appeler à la révolution de montrer qu’il serait tout à fait normal et de l’ordre logique des choses que cette révolution survienne. Il est important de montrer que ceux qui appellent à l’insurrection populaire au Cameroun sont à la fois une production et une conséquence du régime en place et de ses effets. C’est ce régime la cause principale de l’apparition d’un Cameroun et d’une frange de citoyens transformés en « sans culotes » au propre comme au figuré. Remplir un tel devoir citoyen exige que je donne les fondements objectifs de cette révolution camerounaise qui vient. Révolution qui, je le pense, est inévitable dans l’état actuel de la société camerounaise. J’ai décidé d’apporter du grain à moudre au moulin de ceux qui veulent que le Renouveau National soit de l’histoire ancienne afin que naissent un Cameroun nouveau capable de nouveaux espoirs et de nouveaux rêves. Les arguments que j’avance sont baptisés « les 10 péchés capitaux qui fondent cette révolution camerounaise qui vient ». Pourquoi dix péchés capitaux ? Pour deux raisons : a) Le Renouveau National avait été présenté dès ses débuts comme un régime vertueux du seul fait que son leader était fils de catéchiste et ancien séminariste. b) la symbolique du péché est donc indiquée pour parler de ses fourvoiements réels. Ces péchés donnent, d’après moi, les conditions objectives d’un pays dont l’état sociopolitique autorise le droit de contester le régime en place, non par tous les moyens, mais par le seul et unique moyen qui reste aux populations, c’est-à-dire la rue.

L’intellectuel se doit de moins écouter son ventre lorsque la cohésion et la continuité paisible d’une société sont à ce niveau menacées par un régime atteint d’ivresse du pouvoir. Il se doit de soutenir les velléités de liberté car tout peuple, ainsi que le dit le philosophe, est déjà toujours prêt et mûr pour la liberté. Il se doit d’ uvrer pour transformer en flamme ardente la moindre étincèle de revendication au profit des libertés. C’est pourquoi je soutiens, avec enthousiasme, ce qui se passe en Tunisie et en Egypte. Les inquiétudes des conservateurs de tout bord ne m’inquiètent pas le moins du monde vu que c’est d’abord le sort des peuples qui prime. Les Tunisiens et les Egyptiens sont en train de combattre, avec succès, la seconde génération de la colonisation africaine inaugurée, après les années soixante, par les élites africaines au pouvoir. L’ uvre des peuples égyptien et tunisien sert ainsi, non seulement le parachèvement du processus d’indépendance du continent africain, mais aussi, à éduquer les pouvoirs africains par le biais d’une expression populaire qui sonne comme un rappel à l’ordre normal des choses : celui des pouvoirs au service d’un surplus de vie et non d’un surcroît de mort. Ce sont des révolutions saines parce que non estampillées libéralisme, socialisme ou communisme, mais tout simplement d’un droit naturel, la liberté. L’Afrique Noire mérite plus que Jamais des Présidents démocratiquement élus, des Présidents qui respectent la Constitution en ce sens qu’ils la changent, non pour une fin médiocre comme rester au pouvoir, mais uniquement lorsque ce changement est nécessaire au développement du pays et à l’épanouissement des populations. Les arguments avancés par de nombreux Africains pour accuser la main mise occidentale en Afrique Noire n’ont aucun poids réformateur si nos cerveaux et nos esprits évitent soigneusement de voir ce que nos propres élites, et ce, depuis la période coloniale, font de nos pays, atteintes qu’elles le sont d’une névrose du pouvoir à vie en lieu et place d’une névrose du développement du continent.

Thierry Amougou, président de la Fondation Moumié
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II- Les fondements objectifs de cette révolution camerounaise qui vient
Le tableau de bord politique et social du Cameroun est plus alarmant que ceux de la Tunisie et de l’Egypte, pays qui ont le même revenu par tête que la Chine actuelle. S’il faut parler comme l’économiste que je suis, je dirai que les fondamentaux à partir desquels on peut juger de la stabilité et de la cohésion d’une société sont tous au rouge. En conséquence, la question que devrait se poser ceux qui nous gouvernent et répriment dans le sang toute velléité de liberté, la question qu’ils devraient se poser face à la fronde populaire qu’ils provoquent, est celle de savoir quels sont les paramètres explicatifs de cet écho populaire qui les maudit et les vomit. Etant donné que les intéressés font semblant qu’il n’existe aucun argument objectif au fondement d’une révolution populaire au Cameroun, et préfèrent la politique de l’autruche aux avantages d’une réflexivité critique, je me sens le devoir et le droit de dire à haute et intelligible voix ce qui ne va pas au sein du triangle national.

Péché capital n°1 : Trente ans sous la coupe d’un seul et unique régime est une situation qui irrite et révolte d’autant plus que ce maintien s’est fait par des moyens en dehors des règles de l’art démocratique : Dans un premier temps, il est humain et même normal pour un citoyen, d’étouffer s’il passe trente ans sous la direction d’un régime quel qu’il soit. Le General De Gaulle qui avait libéré la France de l’occupation nazie avait une légitimité éternelle, mais les populations françaises en avaient déjà assez en mai 1968. Ceci dit, tous les peuples du monde ont besoin de respiration et de changement. Ce besoin de changement et de renouvellement est d’autant plus grand dans le cas camerounais que le Renouveau National se maintient au pouvoir par des tricheries politiques basées sur les truquages électoraux et les manipulations constitutionnelles. En pareilles situations, le peuple ne se sent plus maître et responsable de son destin. Son avenir devient défini par une espèce de force suprême qui régule la société en dehors et au-delà d’elle-même. C’est ce qu’est devenu le Renouveau National en 2011. Donc, non seulement il a trop duré, mais aussi, il l’a fait par des moyens illicites démocratiquement parlant. Un homme qui fait trois décennies à la tête d’un Etat sans être un roi est un dictateur à l’état pur car aucune démocratie au monde ne tolère et n’autorise une telle possibilité. Voici un Président qui disait aux Camerounais que la retraite n’était pas une sanction alors que tout ce qu’il fait pour garder le pouvoir prouve qu’il considère sa propre retraite comme une sanction.

Péché capital n°2 : La promesse fondatrice de la substance politique du Renouveau National n’a pas été tenue : Le Cameroun dont de nombreux compatriotes contestent la légitimité en tant que continuité politique et pratique encore aux affaires, est celui d’une grosse escroquerie politique. Celle-ci consiste à dire aux Camerounais que le fait qu’un régime promette rigueur et moralisation en 1982, mais récolte l’opération épervier trente ans après, est une promesse tenue. Cela s’appelle ne pas assumer ses échecs politiques en faisant de sa longévité au pouvoir une variable indépendante de ses résultats concrets. Cette pratique et cet exercice du pouvoir ont ainsi donné naissance à un peuple camerounais frustré parce que sans cesse « entubé » et infantilisé par un exercice du pouvoir basé sur la tricherie et le contre-pied permanents des aspirations populaires. Cela transforme le peuple en moutons de panurge, ce qu’il déteste plus que tout.

A suivre, péché capital n°3: Le recyclage permanent des échecs en nouveaux arguments de campagne

Appel à manifester au Cameroun par le Code (une des affiches)
Facebook)/n

Journaliste, consultant en communication, littéraire, conseiller d’affaires, poète… Thierry Mouelle II est un multicartes

Alors qu’il vient d’obtenir un International Executive MBA qui lui ouvre d’autres horizons, il a accepté de nous parler de lui. Entretien

Pendant longtemps journaliste et Conseiller en communication stratégique, on vous a retrouvé dans la peau d’un romancier avec « Le Pharaon Inattendu », un livre bien accueilli par les critiques. Aujourd’hui Consultant en Management International, vous êtes, entre autre, titulaire d’un International Executive MBA. Et si on vous demandait, qui est Thierry Mouelle II ?
Je suis né au Cameroun il y a une quarantaine d’années et je vis actuellement à Paris. J’ai commencé ma carrière professionnelle comme journaliste politique et économique même si j’ai toujours versé dans la sociologie, la sémiologie, la philosophie et la poésie. J’ai embrassé le journalisme par la passion du partage de la connaissance et de l’information. J’ai travaillé à la CRTV radio pendant trois ans. Ensuite, j’ai été recruté comme chef des services politique et économie à Génération, un hebdomadaire d’enquêtes et d’analyses qui paraissait à Yaoundé. Je travaillais aux côtés de feu Vianney Ombé Ndzana, Directeur de publication; Maurice Kamto, Administrateur délégué, feu Mongo Béti, Éditorialiste et Ambroise Ebonda, chef des services société et investigations. Je me suis assez vite rendu compte que la ligne éditoriale affichée contrastait profondément avec la réalité interne du journal.

Que s’est-il passé par la suite ?
J’y ai passé deux ans et je suis allé créer mon propre journal, Grands Horizons, un bimensuel. C’est à cette même époque qu’Ambroise Ebonda est également parti au journal Le Messager comme Rédacteur en Chef. Dans le contexte de remous sociopolitiques de l’époque et les sacrifices que cela demandait en termes de courage de positionnement, certaines grandes plumes du paysage médiatique camerounais, pour l’entretien de leur talent, d’autres pour m’apporter leur aide, ont contribué qualitativement au journal bien que ce fût essentiellement sous des pseudonymes. À ma satisfaction, ils estimaient que le ton et le format périodique de Grands Horizons étaient plus à même d’aller au fond des sujets. Quelques acteurs de la vie publique, ou du moins ceux qui souvent se présentaient comme tels, virent notre approche d’un mauvais il. Vous savez, beaucoup d’actes légalement ou moralement répréhensibles sont souvent posés par des individus zélés ou de moralité douteuse et qu’une certaine presse, par facilité, a tôt fait de mettre sur le dos personnel du Chef de l’État. J’en ai eu plus d’une preuve à l’époque. Ces acteurs politiques usaient de tout, y compris de la violence, pour que leurs abus ne soient pas rendus publics. Certains de ces acteurs sont aujourd’hui décédés ou ne sont plus au pouvoir par effet de renouvellement de l’élite gouvernante, d’autres sont en prison pour des actes que nous dénoncions déjà à l’époque.

Et comment cela se passait du côté de l’Opposition ?
À l’analyse, on avait du mal à cerner ses vraies motivations. En dehors d’une très forte agitation dans la rue, sa feuille de route politique manquait de clarté, comme si elle ne savait que faire du statut qui faisait d’elle, comme dans toute démocratie, l’incarnation « naturelle » de l’alternance. Beaucoup égrenaient une liste d’écarts politiques et socioéconomiques, qu’à leurs yeux, le Pouvoir ne cessait de creuser, ce qui était loin de les dédouaner des mêmes pratiques décriées. L’on avait l’impression qu’il s’agissait d’un règlement de compte entre princes d’une même famille, ou des leurres censés nous détourner de la priorité essentielle: la consolidation des frêles acquis démocratiques. Nous sortions à peine de longues années de censure administrative et de liberté sous contrôle! Directeur de journal, je rencontrais des décideurs au Pouvoir comme au sein de l’Opposition. S’il était clair pour le Pouvoir qu’on ne gère pas un État comme on gèrerait une épicerie, et que l’instabilité de la conjoncture économique internationale exigeait de réajuster constamment les plans de croissance de l’économie nationale et de redéfinir les priorités budgétaires, du côté de l’Opposition, j’avais fini par me lasser d’entendre le même slogan « Biya doit partir ». A la question de savoir ce qu’ils feraient à la place, vu la pertinence des arguments avancés par le Pouvoir pour justifier la flexibilité de ses actions, la réponse rendait perplexe : « Qu’il parte d’abord, ensuite on verra ».

A votre avis, quelles étaient les raisons d’une telle attitude ?
Peut-être une panne d’imagination ou l’Opposition manquait-elle de clairvoyance politique. Un troisième facteur y a sans doute joué un rôle clé: l’absence d’une vision stratégique à la fois globale et séquentielle dans l’esprit des décideurs. Tout le monde ne voyait pas demain comme un jour à construire, mais comme une fatalité. Demain sera là, quoiqu’on veuille. Peu importe son contenu. De même qu’il était de mon devoir d’analyser avec froideur ce que les faits me poussaient à relever comme sujets de dangerosité quant à la cohésion nationale, ce qui devait attirer l’attention des gouvernants, de même je ne faisais aucune concession au manque de responsabilité de certains membres de l’Opposition. Dans le cadre de mes missions de Consultant en Communication Stratégique, j’ai fait une série de propositions sur ce que devrait être la gestion stratégique de quelques dossiers conflictuels, et comment le marketing politique du Cameroun pourrait être envisagé sur le plan international pour donner de la voix au droit qui était déjà de notre côté sur ces sujets précis.

Comment ces propositions ont-elles été accueillies ?
Favorablement. Les politiques qui m’avaient approché me savaient conscient du caractère sensible de ces dossiers. Je partageais avec eux l’idée que lorsque le pays était attaqué dans son intégrité, il revenait à chacun de ses enfants de le défendre sans réserve, chacun avec ses armes, mais coordonnées par le décideur suprême, le Chef de l’État. J’appelle cette période, l’État d’Urgence Patriotique. Une fois la paix et la sécurité restaurées, chacun pouvait reprendre ses activités normales. En ce qui me concerne, il s’est toujours agi de séparer mes activités de Directeur de journal de celles de Consultant en Communication. Certaines personnes cernaient mal la différence, tant au sein du Pouvoir que de l’Opposition. Pour elles, un journal ne pouvait être indépendant que d’un bord et non de l’autre. Être indépendant des deux, était absurde. Le clivage informationnel était tel que pour beaucoup, on devait être soit du côté du Pouvoir, soit de celui de l’Opposition. Un peu comme devant un pavé mosaïque en noir et blanc, je quêtais perpétuellement la zone grise. Certains donnaient au mot « indépendance » le sens politique de sortie d’un système d’asservissement (ou de refus du futur asservissement qu’ils voyaient venir avec l’Opposition) et non celui d’absence de parti pris. L’indépendance journalistique se résumait à saper l’action du Gouvernement, ou celle de l’Opposition, peu importait sa pertinence. Certains journalistes dits « indépendants » se faisaient ainsi les principaux porte-voix du programme « Biya doit partir » imaginé par l’Opposition. Ou celui, simpliste, de « Fru Ndi est un illettré », imaginé par des universitaires proches du Pouvoir. À la suite de quoi, des directeurs de journaux « indépendants » se sont vu ministre des finances, du budget ou de Responsable de la Communication Présidentielle de l’après-Biya qu’on disait alors inéluctable. Certains journalistes « indépendants » eux aussi, mais travaillant pour le Pouvoir, se mirent à attendre les fruits de leur « indépendance » en traquant la moindre rumeur relative à leur nomination à la tête de la Sopécam, la CRTV, ou même, bonheur suprême, leur entrée au gouvernement. J’étais de ceux qui décriaient cette indépendance dépendante. Mais le Cameroun n’était pas prêt pour une information dépassionnée ; je ne sais pas s’il l’est déjà. Quelques professionnels comme Mutations ou Le Jour, montrent la voie. Le ministère de tutelle s’échine à clarifier le jeu, mais ce n’est pas facile. La course à la mangeoire n’a jamais épargné les milieux de la presse camerounaise.

Thierry Mouelle II
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Et puis vous avez quitté le Cameroun. C’était en 1998. Voulez-vous revenir sur les circonstances de ce départ ?
Non, le passé, c’est le passé. Seul l’avenir m’importe et je compte y intégrer tout le monde de bonne volonté. Ce n’était pas facile de venir d’Afrique et se faire accepter dans le cercle élitiste de journalistes français. J’avais vingt-neuf ans. Mon parcours rapide faisait peser un soupçon de faux sur mon CV. Parfois, je me sentais presque coupable d’être ce que je suis. Je fais à peine quelques piges dans les journaux associatifs qui souvent « oublient » de payer. J’écris pour un grand quotidien pour une saison ; je vends du contenu aux groupes de presse et de l’audiovisuel. Exercer en tant que journaliste en France quand on est d’origine africaine est extrêmement difficile. Ce n’est pas déjà facile pour les nationaux qui peuvent rester des années simples pigistes ou intermittents de spectacle alors qu’ils sont de vrais professionnels.

Comment avez-vous réagi face à ces difficultés ?
Il fallait opter pour de nouvelles perspectives avec des références françaises. Je suis retourné à l’Université pour faire un Bac+5 en informatique, réseaux et gestion de projets. Cela m’a permis plus tard d’administrer et de diriger la rédaction du site www.Africafoot.com pendant quelques temps de même que celle de la chaîne de Télévision 3A Telesud, où j’ai travaillé à la refondation de la formule en tant que Rédacteur en Chef et éditorialiste.

Et puis, une rencontre va tout changer. Radicalement. Racontez-nous.
À l’occasion d’un dîner-débat dans lequel j’intervenais sur l’économie internationale, je fais la connaissance d’un haut responsable de la Société Générale. Mon parcours l’intéresse, et il me recrute comme analyste chez Groupama Banque, une joint-venture que la SG mettait sur pied avec le géant de l’assurance Groupama. C’était fin 2002, début 2003. Formé à l’ouvrage et suivant des stages appropriés, je suis référent dans une équipe d’analystes de crédits. Je passe ensuite responsable des crédits aux particuliers, aux PME agricoles et aux Travailleurs Non Salariés, dès lors que ces crédits franchissent le seuil de 21 500 euros ou que le profil du client s’avère atypique et requiert une analyse de risque plus approfondie. En 2004, j’ai pour mission d’étudier et de proposer à la banque les mécanismes de mise en place de nouvelles normes de gestion de risque telles qu’émises par le Comité de Bâle, notamment Basel II, volets I & II. Basell II contraint les établissements à réorganiser en profondeur les métiers, à créer de nouveaux services, et à élever le niveau de formation et de sensibilisation aux fraudes et blanchiments d’argent. La systématisation de la diffusion du savoir au sein de la banque devient un facteur de sécurité, de qualité et un sérieux gage de fidélisation de la clientèle.

Votre transition du journalisme à la banque semble donc définitive.
En effet. Les bases du projet Basel II posées, je suis chargé par le Directoire de créer une Unité de Management de la Connaissance, en 2006. Le projet exige une forte connaissance des métiers de la banque en général, la gestion des bases de données dynamiques, les réseaux informatiques, et un savoir-faire rédactionnel. À l’ouvrage, je réalise le degré d’interrelation conjoncturelle existant entre les métiers de la banque et les métiers de l’assurance des biens et des personnes. Dès la fin des années 1990, les banques avaient débordé de leur périmètre traditionnel d’établissements de crédit pour rogner dans le domaine réservé des assurances dans le but de saturer la clientèle. Ce nouveau modèle économique appelé bancassurance, très étendu au sud de l’Europe, et quasi inconnu aux États-Unis et au Japon, a fortement contribué à l’atténuation des effets du crash financier de 2008-2009 sur les banques françaises.

Comment la bancassurance a-t-elle pu amortir le choc du crash financier en France ?
Le fait d’avoir une réserve de liquidité décentralisée dans leurs Unités d’Affaires Stratégiques que sont les comptoirs d’assurance, a permis aux banques françaises de garder une main sur l’économie réelle, contre la volatilité de l’économie spéculative des fonds de pensions issue du model de Wall Street. Elles ont pu ainsi contrebalancer les pertes. Le revers de la médaille, c’est que la bancassurance, en empiétant dans le domaine réservé des assureurs classiques, a contraint ces derniers à réagir. C’est ce qui poussa Groupama Assurance à requérir un mandat IOB (Intermédiaire en Opérations Bancaires) et à imaginer la création d’une banque en 2001.

Cette fois, il s’agit de l’assureur qui se fait banquier ?
Oui, et cela s’appelle de l’assurbanking. Mais les assureurs supposés distribuer les produits bancaires dans leur réseau n’y connaissent rien ;

Carnet de voyage d’un camerounais aux Etats-unis: Washington DC, un an après l’élection de Barack Obama

La capitale fédérale reste un carré dont les lignes ne bougeront pas de sitôt. Malgré les bonnes intentions et le discours de rupture

Conception W. Thomas et son époux n’ont pas quitté le site de fortune qu’ils occupent depuis 1981 devant la Maison Blanche. La vieille espagnole continue de protester et de sensibiliser contre les armes nucléaires. Les Obama, célèbres locataires de la Maison Blanche et non moins voisins de Conception W. Thomas, se sont vraisemblablement accoutumés à la présence de cette manifestante au discours dérangeant. La vie continuerait donc imperturbablement son cours normal dans la capitale fédérale américaine. A l’observation, il en faudra encore beaucoup à Barack Hussein Obama, pour faire bouger le mammouth de 173 kilomètres carrés, dessiné il y a deux siècles par l’architecte français Roger l’Enfant.

De fait, le caractère essentiellement administratif et bureaucratique de Washington District Columbia ne prédispose pas à des changements perceptibles à l’immédiat. D’autant plus que la tradition architecturale séculaire et la vision des Pères fondateurs de la nation américaine dominent toujours cette cité d’environ 600.000 habitants. En effet, la croix de la démocratie – au sens égyptien du terme – reste le modèle inspirateur des politiques américains. Le Capitole (avec son sénat et sa chambre des Représentants) est la tête de cette croix. C’est aussi le centre géographique de Washington, District Columbia. Coiffé de son célèbre dôme que supplante la Statue de la Liberté, le Capitole est le c ur du pouvoir aux Etats- Unis. Tout s’y décide. A l’aile gauche de la croix trône la Maison Blanche. C’est le siège du pouvoir exécutif. Les mémoriaux Jefferson (à droite), Washington encore connu sous l’appellation Obélix (au milieu) et Abraham Lincoln (au pied) constituent les autres parties de la croix de la démocratie américaine.

Thierry Ndong devant la maison blanche
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Aux grands hommes, la nation reconnaissante
Ces trois mémoriaux sont la parfaite illustration de l’attachement des américains à leur histoire. Georges Washington est le père bien adulé de l’indépendance des Etats- Unis. A la tête d’une armée sans étoffe – d’aucuns parleraient de milice -, il aura réussi à avoir raison des Anglais vers 1783. Il refuse pourtant de prendre les rennes du pays nouvellement émancipé du joug anglais. Il préfère démissionner de la tête de l’armée. Il s’en retourne dans sa ferme pour se consacrer aux activités agricoles. Elu président des Etats – Unis six années plus tard, il démissionne au terme de son deuxième mandat, optant pour la philosophie de la « Grande expérience », qui détermine la participation du citoyen à la vie publique. Abraham Lincoln, de son côté, est le père de l’abolition de l’esclavage. Il est aussi le président qui est venu à bout de la guerre civile aux Etats-Unis. Sa géante statue blanche, construite entre 1915 et 1922, est une grande reconnaissance de la nation. Elle se veut en outre l’hommage aux 615.000 morts de la guerre de sécession. La population américaine pendant la guerre 1861- 1865 s’évaluait à 13.000.000 habitants. Et selon des témoignages avisés, les séquelles de cette guerre sont encore perceptibles dans le quotidien des américains. Les blessures de la guerre du Vietnam (1959 – 1975) ne sont pas totalement cicatrisées. Au Mémorial des vétérans du Vietnam, vous découvrez la liste des décédés et des disparus sur un mur souterrain en marbre sombre. Aujourd’hui, avec beaucoup de recul, les américains parlent d’une guerre pour rien. Thomas Jefferson, en posant les bases d’un accès libre et gratuit à l’éducation pour tous, voulait pourtant éviter de telles erreurs. Mais, la vision des pères fondateurs a parfois souffert d’une interprétation ou d’une mise en uvre surannées.

Devoir de mémoire, devoir citoyen
Les musées restent également une institution dans la capitale fédérale. Il y en a pour tous les goûts et pour toutes les attentes. Ils sont les témoins privilégiés de l’évolution des Etats – Unis depuis près de trois siècles d’existence. Tous les domaines y passent: médias, politique, économie, etc. Les bibliothèques et les archives se découvrent également sans sourciller. A Washington, vous avez la possibilité de visiter la plus grande bibliothèque du monde, située à l’arrière du Capitole. Elle appartient au parlement fédéral américain; c’est le socle de la rédaction de tous les textes législatifs votés au Capitole depuis des siècles.

Statues des vétérans du Vietnam
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La capitale fédérale américaine propose par ailleurs d’autres charmes, à découvrir par la marche à pied. Il y a notamment ses quartiers célèbres. Adams Morgan est réputé pour le divertissement nocturne. L’Anacostia, quant à lui, conserve son architecture ouvrière de la fin du 19è siècle. Brookland, surnommé Little Rome, au nord – Est de la capitale fédérale, contient la plus large concentration d’institutions catholiques (plus de soixante) après le Vatican. Capitol Hill détient la plus importante communauté historique résidentielle de la ville. China Town, quartier chinois, frappe par ses enseignes colorées et ses restaurants asiatiques animés. Georgetown, autrefois port colonial florissant, est désormais une communauté historique florissante. Dupont Circle, jadis quartier chic de Washington, est aujourd’hui une plate-forme cosmopolite. Le quartier des ambassades, juste à côté de Dupont Circle, est l’adresse des 150 représentations diplomatiques et ambassades accréditées à Washington DC. La liste n’est pas exhaustive.
Barack Obama et l’Afrique.

Selon un sondage réalisé récemment au profit du Département d’Etat, la perception des américains sur l’Afrique n’a pas changé, une année après l’arrivée de M. Barack Obama à la Maison Blanche. En effet, pour beaucoup d’américains, l’Afrique reste le continent des conflits, de la famine et de la pauvreté. L’Afrique sera -t- elle par conséquent une priorité de la politique étrangère américaine ? Steve Mc Donald, directeur du Programme de conseil pour l’Afrique, répond par la négative. Il convoque des réalités objectives liées à l’environnement international: la crise financière internationale ; la complexité des situations au Moyen Orient et en Afghanistan ; la montée en puissance de la Chine, etc.

Qu’à cela ne tienne, reconnaît Steve Mc Donald, le ton et la nature de la relation (entre les Etats -Unis d’Amérique et l’Afrique) ont changé. En moins d’une année, le continent africain a reçu deux visites importantes : le Président Obama et la Secrétaire d’Etat Hilary Clinton. Bien plus, deux émissaires spéciaux de l’administration fédérale sont en poste dans les Grands Lacs et la Corne de l’Afrique. La nouvelle administration s’est par ailleurs entourée d’une équipe connaissant bien l’Afrique. Susan Rice, ambassadrice des Etats-Unis à l’Onu, en est l’exemple le mieux parlant. Une belle opportunité pour réinventer la relation Afrique / Etats-Unis, en espérant que cela impactera à moyen terme sur l’augmentation des ressources destinées au continent.

la manifestante contre les armes nucléaires devant la Maison Blanche
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Les préoccupations de l’heure aux Etats- Unis
Les grands défis de l’heure ne laissent pas Washington DC dans l’indifférence. Le gouvernement fédéral est de plus en plus sensible à la sécurité et à l’avenir de la planète. Les Etats – Unis viennent notamment de signer le Traité de non prolifération des armes nucléaires. La ratification imminente dudit traité est annoncée au niveau du Sénat américain. L’objectif avoué est la limitation de la circulation de l’arme nucléaire. Le réchauffement croissant de la planète fait désormais partie des discussions amorcées dans le cadre des échanges bilatéral et multilatéral. Le G20 va-t-il remplacer le G8 dans la prise des grandes décisions du monde ? Les Etats-Unis suivent avec beaucoup d’attention l’évolution de la nouvelle donne. Philip J. Crowley, Secrétaire d’Etat adjoint chargé des affaires publiques au Département d’Etat, confesse que la diplomatie mondiale traverse une période transitoire. La problématique aujourd’hui dans les relations internationales : trouver la bonne combinaison des institutions pouvant cibler et relever les défis qui interpellent l’humanité.

En politique intérieure, les bouleversements intervenus dans la presse – avec l’arrivée des nouveaux médias – sont suivis avec un très grand d’intérêt. Ce qui pose, entre autres, le problème de la rentabilisation des médias traditionnels. Que faire ? Les professionnels de la presse aux Etats – Unis sont sans voix. L’on en est encore à la recherche de modèles viables. En attendant, Washington DC ronge son frein. Son lobbying et son plaidoyer, en vue de devenir un Etat fédéré à part entière, n’ont toujours pas abouti. Ses délégués au Congrès gardent encore le statut d’observateur sans droit de vote. Ainsi va la capitale fédérale américaine, dont on ne saurait oublier de remonter sa réputée avenue (Pennsylvanie Avenue), en cette veille d’anniversaire de l’élection de Barack Obama à la tête du pays le plus puissant au monde.

Le Capitole
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