Les malheurs de Michel Thierry Atangana

Libéré des geôles camerounaises par une grâce en février 2014, le Franco-camerounais se plaint de n’avoir été ni réhabilité ni indemnisé. En France, il lui est suggéré de s’inscire au RSA

Michel Thierry Atangana connaît toutes les voix de RFI. Emprisonné dix-sept ans durant dans une cellule de 7m2 sans fenêtre, soumis à l’isolement, ce Français d’origine camerounaise a réussi à obtenir de ses geôliers un poste de radio. Une faveur. Pendant toutes ces années, dans ce sous-sol du Secrétariat d’Etat à la défense du Cameroun où il est confiné, la bande FM sera sa seule compagne.

Grâce à elle, il suit de près toutes les affaires d’arrestations de Français à l’étranger, comme celle de Florence Cassez. Il connaît dans les moindres détails l’histoire de cette jeune femme arrêtée au Mexique et inculpée de complicité d’enlèvement. Il découvre la vaste campagne de mobilisation en sa faveur, sa libération en grande pompe, la campagne de réhabilitation qui a suivi. Du fond de sa cellule, il se demande s’il aura droit un jour, lui aussi, à une vague de soutien, à la compassion, aux honneurs.

Las. Rien de tel pour le financier français. Pas de mobilisation, pas d’avion de la République, pas de ministre pour l’accueillir sur le tarmac. Quand il est sorti de prison, le 24 février 2014, l’ambassadrice de France à Yaoundé l’a bien invité à déjeuner. Mais c’était pour lui signifier qu’il devrait payer lui-même son vol retour.

« Gangstérisme d’Etat »
L’« affaire Atangana » commence en 1994, lorsque le jeune ingénieur financier français, diplômé de l’Université de Clermont-Ferrand, est envoyé à Yaoundé pour gérer un consortium regroupant cinq géants français du BTP, supervisé par une structure publique franco-camerounaise. Objectif: développer un réseau d’autoroutes au Cameroun pour un budget de quelque 500 millions d’euros. Chargé d’attirer des investisseurs, Michel Atangana a la haute main sur le projet et l’oreille du président Paul Biya, dont il est le protégé. Tout lui sourit. Mais à l’approche de l’élection présidentielle de 1997, le climat entre les deux hommes se dégrade.

Le pouvoir le soupçonne de soutenir le ministre de la Santé Titus Edzoa, présenté comme un possible concurrent de Paul Biya. Le 20 avril, le ministre démissionne et annonce sa candidature. « Pour le pouvoir, ça a été la goutte de trop », dit Michel Atangana. Le 12 mai au petit matin, il est arrêté et jeté en prison. « Je n’avais aucune idée de ce qu’on me reprochait » dit-il, jurant aujourd’hui encore ne s’être « jamais mêlé de politique ».

Accusé d’avoir utilisé les caisses du consortium pour soutenir l’opposant, il passe 57 jours en prison avant de pouvoir rencontrer un avocat. Lors d’un premier procès en octobre 1997, puis en appel en 1999, Michel Atangana est accusé de détournement de fonds publics. Chef d’inculpation: « Grand gangstérisme d’Etat ». Aucune preuve de détournement n’a jamais pu être apportée. Mais il est condamné à quinze ans de prison ferme et dépouillé de tous ses biens. Les comptes du Consortium sont bloqués. Le président, qui a promis de faire de la lutte contre la corruption la priorité de son mandat, a décidé de faire de son cas un exemple. L’opinion publique camerounaise applaudit:

« J’étais français, avec un job prestigieux, qui aurait dû naturellement échoir à un haut fonctionnaire du pays ; j’avais forcément touché des commissions. »

Pour les Camerounais, qui ne reconnaissent pas la double nationalité, il est français. La France n’a pas bonne presse dans le pays. C’est le coupable idéal. Mais pour la France, malgré son passeport bien français, il est camerounais. Pourquoi dès lors s’en mêler? Derrière cette indifférence, sans doute un zeste de realpolitik: Paris entretient d’étroites relations avec le gouvernement en place à Yaoundé. Pas question de les mettre en péril pour cette sombre histoire. Atangana soupire:

« Quand la France est intéressée, elle sait s’impliquer. Là, ils se sont dit que c’était une histoire d’Africains entre eux, forcément louche. Que je ne valais pas la peine de créer un incident diplomatique. »

Quinze ans durant, il attendra en vain la visite d’un diplomate, une enquête parlementaire, au moins un peu de compassion. « La simple protection consulaire m’a été refusée. Même si la France considérait que j’étais coupable, on aurait pu au moins s’assurer que mes droits étaient respectés, vérifier mes conditions de détention. J’ai eu le sentiment que je n’étais pas un Français comme les autres. »

« Un Français de couleur »
Le soutien tant espéré viendra paradoxalement des Etats-Unis: en 2005, le département d’Etat Américain lui reconnaît le statut de prisonnier politique. En 2013, Amnesty International lui accorde le statut de prisonnier d’opinion. L’ONG américaine Freedom House le soutient. Mais pas une seule ONG française ne se mobilise. En 2009, le Défenseur des droits, Dominique Baudis, ému de son sort, regrette de ne rien pouvoir faire pour lui, mais lui promet d’en référer au Quai d’Orsay. En vain.

Sur sa petite radio, le prisonnier a suivi de près l’affaire de l’Arche de Zoé, dont les responsables, accusés d’enlèvements d’enfants, ont pu être extradés et jugés en France. « Même eux ont eu droit à plus d’égards que moi. » Il parle doucement, avec calme et beaucoup de dignité.

Mes geôliers disaient: si tu étais vraiment français, la France s’occuperait de toi.
Michel Thierry Atangana

« C’est ma meilleure thérapie. Je n’ai pas de place pour la haine. Mais je suis français. Pourquoi la France m’a-t-elle abandonné ? »

Il en est convaincu: « Il n’y a pas le même intérêt pour un Français de couleur. » En 2012, quinze ans après son arrestation, François Hollande sera le premier président à lui écrire, s’engageant à faire son possible pour l’aider. Il lui en est reconnaissant, sans savoir si l’intention a été suivie d’effet. « Mon cas n’était pas stratégique. » Il ne suscite guère d’émotion dans les médias. « Il y a eu un grand silence organisé », accuse-t-il. A quelques exceptions qu’il a méthodiquement recensées: un papier du « Canard Enchaîné », des passages sur RFI. Et cette enquête du journaliste François Caviglioli, grande plume du « Nouvel Observateur », qu’il évoque avec reconnaissance et émotion.

« Cet article a été décisif. Jusque-là, mes geôliers disaient: si tu étais vraiment français, la France s’occuperait de toi. Là, c’était la preuve, enfin, que je n’étais pas abandonné par mon pays. Sans lui, je serais peut-être encore en prison, ou mort. »

Au Cameroun, cet article, publié en avril 2013, mille fois photocopié, a circulé dans toutes les rédactions, sortant son cas de l’oubli. Enfin, la presse camerounaise finit par prendre son parti. Quelques mois plus tard, grande victoire: un groupe de travail sur la détention arbitraire de la commission des droits de l’homme de l’ONU reconnaît le statut arbitraire de sa détention et réclame sa libération, sa réhabilitation, et son indemnisation.

Le 24 février 2014, Paul Biya lui accorde la grâce présidentielle. Depuis, soutenu par plusieurs avocats français, et des personnalités politiques, il réclame inlassablement justice, frappe à toutes les portes, multiplie les courriers à la République…

En retour, il ressent beaucoup de condescendance. A 52 ans, sa vie est brisée. Divorcé, père de quatre enfants, il n’a plus rien. Reçu au Quai d’Orsay et à l’Elysée, il n’est à ce jour ni réhabilité ni indemnisé. En guise de réparation, il lui a été suggéré de tourner la page. Et de s’inscrire au RSA (Revenu de solidarité active. Il s’agit d’une aide donnée en France aux personnes sans ressource.)

Michel Thierry Atangana
Jeune Afrique)/n

A quoi s’occupent Titus Edzoa et Michel T. Atangana, un an après leur libération

Tous deux, libérés le 24 février 2014 après 17 ans de prison, avaient été condamnés pour des affaires de détournements de fonds publics

Il y a un an, le 24 février 2014, l’homme d’affaires français d’origine camerounaise, Michel Thierry Atangana, et le politique camerounais, Titus Edzoa (ancien secrétaire général à la présidence), étaient libérés après 17 ans de prison. Tous deux avaient été condamnés pour des affaires de détournements de fonds publics.

Ce dossier avait compliqué les relations entre Paris et Yaoundé. Il avait fallu des discussions diplomatiques et une prise de position officielle de l’ONU qui avait dénoncé les conditions de détention d’Atangana pour faire bouger les choses. C’est finalement un décret présidentiel de Paul Biya qui les avait sortis de prison. Un an plus tard, chacun à sa manière tente de reprendre le cours de ses activités.

Depuis sa libération, Titus Edzoa vit en famille, près de Yaoundé. Il lit énormément et passe une bonne partie de ses journées à travailler dans son bureau. Un de ses proches le décrit comme un homme en bonne santé, qui sort rarement. Une sorte de retraite spirituelle qui lui a permis de prendre de recul et de s’engager progressivement de nouveau dans la vie politique :

«Je prépare ma rentrée socio-politique, indique-t-il. Je suis toujours dans le même parti, je n’ai jamais démissionné du parti, jamais démissionné du gouvernement»]. Ce qui le motive ? « Après 17 ans de prison politique, sourit-il, on ne jette pas l’éponge comme ça.»

Atangana: «Effacer les condamnations»
De son côté, en France, Michel Thierry Atangana est un homme marqué par ses 17 années de détention. L’homme d’affaires tente de prendre du recul. Dès son retour, il lui a fallu reprendre des forces et trouver ses marques dans un monde qui lui paraissait changé, moderne: «J’étais détenu dans une cellule, souligne-t-il. Il faut impérativement procéder à une rééducation mentale, à une rééducation physique, psychique et sociale. Un an, c’est long et c’est peu. Pour l’instant, je suis encore très, très loin d’obtenir le plein équilibre qui me permettrait d’être autonome.»

Michel Thierry Atangana doit encore reconstituer son cercle familial qui s’est, dit-il, «brisé à cause de la prison». Sur le plan professionnel, cet ancien conseiller financier n’a pas retrouvé d’activité. Atangana raconte être happé par les blocages administratifs. Aujourd’hui, il se bat pour obtenir des réparations pour ses années passées en détention.

«Le carcan judiciaire qui m’a enfermé ne me permet pas pour l’instant d’exercer mon métier. J’ai été libéré par un décret présidentiel donnant une remise de peine. Cela est contradictoire avec les recommandations des Nations-Unies qui parlent clairement de détention arbitraire. A la suite de ce décret, la France elle aussi m’a délivré une attestation qui respecte à peu près l’esprit du décret qui a été signé au Cameroun. Donc pour l’instant il reste dans mon extrait de casier judiciaire, les séquelles de ces condamnations. Donc, mon combat actuel, c’est de les effacer», confie-t-il.

Michel Thierry Atangana
RFI)/n

Malgré ses années de prison, Titus Edzoa toujours fidèle au RDPC

D’après un média local, l’ancien Secrétaire général de la présidence de la République, incarcéré de 1997 à 2014, aurait renouvelé sa carte de membre du parti au pouvoir

D’après le quotidien privé Le Jour, édition de ce 13 février, l’ancien secrétaire général de la présidence de la République, aurait renouvelé sa carte d’électeur dans le cadre de l’ «opération spéciale de placement des cartes d’électeur» initié par le secrétaire général du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), entre le 22 novembre et le 31 décembre 2014.

«C’est au cours de cette campagne menée auprès des nouveaux et anciens membres du parti que Titus Edzoa, ancien secrétaire général de la présidence de la République, sorti de prison il y a 11 mois, a acquis contre 500 F CFA une nouvelle carte d’adhésion au parti des flammes», écrit le journal que dirige Haman Mana, proche de l’ex ministre.

Titus Edzoa, qui fut également l’ancien médecin du chef de l’Etat, a passé 17 années derrière les barreaux dans le cadre d’une affaire de détournement de deniers publics, rendue publique le 3 juillet 1997, trois mois après sa démission du poste de ministre de la Santé publique et l’annonce officielle de sa candidature à l’élection présidentielle qui devait se tenir au mois d’octobre de la même année.

Condamné une première fois à 17 ans de prison en 1997 puis une seconde fois à 20 ans de prison en 2012 pour des faits de détournements de biens publics qu’il a niés, Titus Edzoa s’est toujours défendu d’être un prisonnier politique. En février 2014, il a bénéficié d’une grâce présidentielle avec son co-accusé, le franco-camerounais Michel Thierry Atangana.

Le renouvellement de la carte de membre du RDPC pour cette personnalité n’a rien de surprenant si l’on se rapporte à des propos par lui tenus le 1er mars 2014, mois d’un mois après sa remise en liberté. «J’ai démissionné du gouvernement, mais cela ne veut pas dire que j’ai démissionné du Rdpc (le parti au pouvoir, ndlr). C’est clair. A moins que vous m’en démissionnez vous-mêmes», affirmait-il alors.

Comme Titus Edzoa, ils sont nombreux, ces anciens collaborateurs de Paul Biya – qui est par ailleurs président national du RDPC – qui critiquent le régime en place sans se départir du parti politique au pouvoir.

L’exemple de Marafa Hamidou Yaya, un autre ancien secrétaire général de la présidence de la République, condamné en 2012 à 25 ans de prison ferme dans le cadre d’un détournement de fonds liés à l’achat d’un avion présidentiel, est emblématique à cet égard. Celui qui fut par ailleurs ministre de l’Administration territoriale (Minatd) a écrit un livre et publié de nombreuses lettres critiques contre le chef de l’Etat camerounais, sans jamais démissionner du RDPC, comme l’a fait remarquer Jacques Fame Ndongo en décembre 2014.

Titus Edzoa, le 1er mars 2014, lors d’une conférence de presse à son domicile à Yaoundé
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Deux mois après la grâce présidentielle, combien de prisonniers ont été libérés?

Pour atténuer la polémique sur des pressions extérieures, le ministre de la Communication avait parlé de 24.000 prisonniers concernés

Le 18 février 2014, dans la fièvre de la célébration du cinquantenaire de la Réunification du Cameroun, Le chef de l’Etat, Paul Biya, avait signé un décret portant commutation et remise de peines d’une certaine catégorie de prisonniers, définitivement condamnés. Les premières personnes libérées, le 24 février 2014, ont été Titus Edzoa et Michel Thierry Atangana, sous de forts soupçons de pression extérieure, notamment de la France (du président François Hollande) et du Haut-commissariat des Nations-Unies pour les droits de l’homme qui avait jugé illégale la détention de Michel Thierry Atangana.

Face à cette polémique, le ministre de la Communication, Issa Tchiroma Bakary, porte-parole du gouvernement, avait jugé utile de tenir une conférence de presse, le 25 février 2014, pour rappeler qu’il s’agissait d’un acte de « mansuétude et d’humanisme » du chef de l’Etat, indiquant par ailleurs que 24.000 prisonniers en seraient bénéficiaires. Dans une émission télévisée de grande audience, un journaliste avait alors ironisé sur les estimations du ministre jugeant qu’il s’agirait par-là de « tous les prisonniers du Cameroun » qui sortiraient des prisons.

Combien ont effectivement bénéficié de cette grâce ? Journalducameroun.com a fait le décompte au vu des chiffres officiels publiés par le quotidien gouvernemental Cameroon Tribune selon les principales prisons, entre le 18 février 2014 et le 17 avril 2014. Les prisonniers l’ont été à grand renfort de publicité.

A la prison principale de Bafoussam, 183 prisonniers en ont été bénéficiaires ; A la prison centrale de Ngaoundéré, une cérémonie solennelle organisée le 05 mars 2014 a permis à 69 personnes de sortir de prison ; Au total dans cette prison du chef-lieu de la région de l’Adamaoua, c’est 195 personnes qui ont bénéficié du décret. A la prison principale de Nkongsamba, environ 140 ; A la prison centrale de Douala à New Bell : 538 bénéficiaires, dont 116 libérés au cours d’une cérémonie le 10 mars 2014 ; A la prison d’Ebolowa, 22 prisonniers ont recouvré la liberté le 10 mars pour un total de 81 bénéficiaires ; A la prison centrale de Yaoundé à Kondengui, 600 détenus ont bénéficié des mesures de la grâce ; Dans l’Extrême-Nord, inclus les prisons de Maroua et Kousseri, c’est 893 détenus qui ont bénéficié de ce décret ; A l’Est, la prison principale de Bertoua et les huit autres prisons secondaires (Batouri, Abong-Mbang, Yokadouma, Moloundou, Messamena, Betaré Oya, Doumé et Lomié) ont vu 235 prisonniers bénéficier de la grâce ; A la prison principale de Mfou dans le Centre, 83 détenus ont bénéficié de cette mesure ; Dans le Nord, Cameroon Tribune indiquait, dans son édition du 19 mars 2014, que 890 condamnés définitifs ont bénéficié de cette mesure dans les prisons de la région.

Dans ces divers milieux carcéraux, dont les chiffres ont été publiés, c’est un total de 3838 prisonniers qui ont pu bénéficier de la grâce présidentielle à travers la libération, après paiement d’éventuelles contraintes par corps, ou encore à travers une diminution de peine. Loin des 24.000 annoncés par Issa Tchiroma.

Pour les prisons dont les chiffres ont été rendus publics, il s’agit de quelque 3838 prisonniers qui ont bénéficié des mesures de la grace présidentielle

Michel Thierry Atangana prend ses marques avec Titus Edzoa

10 jours après sa libération, le Francocamerounais reconnait avoir demandé une grâce présidentielle et refuse qu’on le considère comme l’ancien directeur de campagne de Titus Edzoa

Dans un entretien accordé à Radio France Internationale ce matin, Michel Thierry Atangana est revenu sur le contexte de sa libération. Le Francocamerounais a en effet bénéficié d’une grâce présidentielle signée le 18 février 2014 et a recouvré la liberté le 24 du même mois, après avoir passé 17 ans dans les geôles camerounaises.

A la question du journaliste qui lui a demandé s’il a demandé la grâce, Michel Thierry Atangana a répondu par l’affirmative : « Oui ! j’ai écrit au président de la République pour lui demander une grâce. Et je dois le remercier. » Un propos à l’opposé de celui de son ancien compagnon, Titus Edzoa, avec qui il avait été solidairement condamné à 17 ans de prison en 1997 et 20 ans en 2012.

Dans un entretien accordé à RFI le 26 février dernier, l’ex-Secrétaire général à la présidence de la République, Titus Edzoa, a indiqué n’avoir jamais demandé de grâce. Le 1er mars, au cours d’une conférence de presse à sa résidence, Titus Edzoa l’a expliqué en d’autres termes : « D’aucuns disent que j’ai dit merci aux acteurs de l’extérieur sans le dire au président de la République. Ce dernier n’a pas besoin de gratitude [.] s’il n’avait pas autorisé mon arrestation, je n’aurais jamais été embastillé » avait alors déclaré Titus Edzoa.

La position de Michel Thierry Atangana est toute autre. Il ne trouve aucune responsabilité au chef de l’Etat camerounais mais plutôt à ses collaborateurs : « Le président de la République n’est pas responsable de cette situation. Ce sont des individus de mauvaise foi dans son entourage », affirme Michel Thierry Atangana dans l’entretien accordée à RFI ce 5 mars 2014. Il réfute également avoir été le directeur de campagne de Titus Edzoa, qui avait déclaré sa candidature à l’élection présidentielle d’octobre 1997

« Ce n’est pas vrai du tout ! Je crois que ça arrangeait tout le monde de présenter Atangana comme l’ennemi public n°1 [.] J’étais proche de Titus Edzoa, si vous le voulez. Ai-je été le seul dans tout le Cameroun à être proche du professeur Titus Edzoa ? M’a-t-il nommé à quelque chose pour que je lui sois redevable, non ! » Se défend le Franco-camerounais.

Au cours de cet entretien, Michel Thierry Atangana a par ailleurs salué l’action de la France dans sa libération. Il a reconnu premièrement que c’est sous Nicolas Sarkozy que les visites consulaires ont été rétablies. Entre 2007 et 2008, Michel Thierry Atangana recevait ainsi des visites de l’ex-ambassadeur de France au Cameroun, Bruno Gain.

L’hommage le plus important, il l’a adressé cependant à François Hollande, de qui il recevait des lettres en prison et les déclarations publiques du président français sur le caractère non tolérable de sa détention. Se réclamant français à cor et à cri, Michel Thierry Atangana a sorti cette petite phrase : « « On peut désespérer des hommes mais il ne faut jamais désespérer de la France ».

France pour laquelle il voudrait maintenant qu’elle s’intéresse au sort de Lydienne Eyoum, avocate « francocamerounaise » incarcérée depuis quatre ans pour avoir retenu illégalement devers elle plus d’un milliard de Francs CFA pour une affaire où elle fut l’avocate de l’Etat du Cameroun.

Michel Thierry Atangana, à Paris, le 28 février 2014
rfi)/n

Titus Edzoa: «Un président de la République n’a pas d’ami»

L’ex-collaborateur de Paul Biya, qui a bénéficié de la grâce présidentielle après 17 années passées en prison, estime, auprès de la presse nationale, avoir conservé ses convictions.

Dans une conférence de presse accordée à sa résidence samedi dernier, 1er mars, Titus Edzoa a fait part de ses sentiments envers le chef de l’Etat Paul Biya dont il fut le collaborateur avant de se retrouver en prison en 1997. « Un président de la République n’a pas d’ami. Cela veut dire que je n’ai jamais été l’ami du président de la République. En revanche, j’ai été son proche collaborateur », a indiqué l’ex Secrétaire général de la présidence de la République, dans son domaine au quartier Simbock à Yaoundé.

« D’aucuns disent que j’ai dit merci aux acteurs de l’extérieur sans le dire au président de la République. Ce dernier n’a pas besoin de gratitude. La politique n’aime pas les génuflexions. Il faut être digne. Respecter le président de la République car, s’il n’avait pas autorisé mon arrestation, je n’aurais jamais été embastillé. De l’autre côté, s’il n’avait jamais signé le décret, je n’aurais jamais été libéré », a-t-il ajouté.

L’ex haut commis de l’Etat a cependant indiqué qu’il pardonnait « aux autres » qui lui ont fait du mal. « Ils sont nombreux. Je les connais d’ailleurs nommément », a-t-il révélé. Titus Edzoa avait en effet été arrêté le 3 juillet 1997, trois mois après sa démission du poste de ministre de la Santé publique et l’annonce officielle de sa candidature à l’élection présidentielle qui devait se tenir au mois d’octobre de la même année. Condamnée une première fois à 17 ans de prison en 1997 puis une seconde fois à 20 ans de prison en 2012 pour des faits de détournements de biens publics qu’il a toujours niés, Titus Edzoa s’est toujours défendu d’être un prisonnier politique.

Celui qui a bénéficié de la grâce présidentielle du 18 février dernier en même temps que le Franco-camerounais Michel Thierry Atangana, a par ailleurs relevé qu’au moment de sa démission, il avait la vision d’un homme d’Etat. « Mais aujourd’hui, j’ai la vision d’un homme politique », a-t-il déclaré. A des questions de journalistes, curieux de savoir ce qu’il fera désormais en politique et s’il sera éventuellement candidat à l’élection présidentielle de 2018, Titus Edzoa a répondu : « J’ai démissionné du gouvernement, mais cela ne veut pas dire que j’ai démissionné du Rdpc (le parti au pouvoir, ndlr). C’est clair. A moins que vous m’en démissionnez vous-mêmes. [.] Vous faites déjà de moi un candidat de 2018, mais je dis d’attendre un peu ».

Titus Edzoa estime en outre que ses convictions n’ont pas été entamées après son séjour carcéral. Séjour d’ailleurs à propos duquel il estime : « On voit que vous n’avez pas été au Sed. Je n’ai pas été emprisonné, j’ai été séquestré. » Pour atténuer l’effet que la prison aurait eu sur lui, Titus Edzoa dit se porter relativement bien. A titre d’illustration, avant d’aller en prison je pesais 62 Kg. Hier (28 février, ndlr) je me suis pesé. Vous serez surpris peut-être. Je pèse encore 62 Kg. Donc, 17 ans n’ont pas entamé la santé mentale heureusement aussi la santé physique ». L’ex-sgpr a révélé néanmoins qu’il fera un autre livre sur les 17 années d’incarcération à la caserne militaire du Secrétariat d’Etat à la Défense, après « Méditations de prison », sorti en 2012.

Titus Edzoa le 01er mars 2014, dans sa résidence au quartier Simbock à Yaoundé
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Grâce présidentielle: Mounchipou Seidou, troisième personnalité libérée

Après Titus Edzoa et Michel Thierry Atangana, l’ex ministre camerounais des Postes et des Télécommunications a recouvré la liberté hier.

Mouchipou Seidou, ancien ministre des Postes et des Télécommunications, a recouvré la liberté le 27 février en soirée. Il lui restait six mois à passer en prison après sa condamnation à 15 ans d’emprisonnement par la cour d’appel du Centre en juin 2006. Après ce second jugement, il s’était pourvu en cassation à la Cour suprême sans obtenir de réponse. Mouchipou Seidou avait initialement été condamné en novembre 2003 à 20 ans d’emprisonnement pour détournements de biens publics liés à des marchés relatifs à la réfection de l’immeuble ministériel et l’acquisition d’équipements informatiques.

Il devient ainsi la troisième personnalité à bénéficier du décret de remise de peine signé par le chef de l’Etat camerounais le 18 février dernier, dans la mouvance de la célébration du cinquantenaire de la Réunification du Cameroun. Dans un point de presse tenu en début de semaine par le ministre de la Communication, l’on a appris que c’est en tout 24.000 prisonniers qui devraient bénéficier des mesures de cette grâce présidentielle. Mouchipou Seidou goute ainsi la grâce présidentielle, après Titus Edzoa, ancien secrétaire général de la présidence, et le Franco-camerounais Michel Thierry Atangana, condamnés solidairement tous les deux à 15 ans d’emprisonnement en 1997, puis à 20 ans en 2012, libres depuis le 24 février.

Le décret présidentiel du 18 février 2014 bénéficiera à 24.000 détenus
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Titus Edzoa : « S’il fallait recommencer, je le ferais »

L’ancien secrétaire général de la présidence de la République du Cameroun, libéré le 24 février dernier, estime toujours que son emprisonnement était exclusivement politique.

Titus Edzoa, l’ancien Secrétaire général de la présidence de la République (Sgpr), qui a été libéré suite au décret présidentiel de remise de peine du 18 février 2014, a accordé une interview à Radio France International (RFI) ce 26 février. Ancien médecin du chef de l’Etat et par ailleurs ministre de la Santé publique au moment de sa démission du gouvernement en 1997, Titus Edzoa avait été condamné à 15 ans de prison la même année.

Après avoir purgé cette première peine, il avait de nouveau été condamné à 20 ans d’emprisonnement en 2012 dans le cadre d’un second dossier de la même affaire sur des détournements de deniers publics. Titus Edzoa a indiqué à Rfi ce matin que c’était un problème fondamentalement politique. « J’étais un prisonnier politique », a affirmé Titus Edzoa.

Titus Edzoa avait déclaré sa candidature à l’élection présidentielle d’Octobre 1997 et a toujours vu cette prise de position comme la source des 17 années qu’il a passées en prison. Au journaliste de Rfi qui lui a demandé s’il regrette le geste posé en 1997, l’ex-Sgpr a indiqué : « S’il fallait recommencer, je le ferais, puisque ce sont ces convictions pour lesquelles j’ai démissionnées qui me soutiennent jusqu’aujourd’hui. »

A 69 ans, Titus Edzoa a indiqué qu’il prendra le temps de ses reposer « physiquement mais aussi mentalement » avant d’envisager un éventuel retour en politique. « Ce n’est pas exclu », a-t-il relevé. Titus Edzoa a déclaré qu’il n’a jamais demandé la grâce présidentielle, tout en remerciant l’Organisation des Nations Unies, l’Union Européenne et la France à travers le soutien du président François Hollande.

Titus Edzoa, libre, après avoir purgé 17 années d’emprisonnement.
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