Le secrétaire exécutif de la CEA, qui a annoncé son départ de l’ONU, estime qu’aucun pays ne peut avoir une politique économique immuable depuis 30 ans
Le franc CFA est un mécanisme désuet selon le secrétaire général adjoint de l’ONU, Carlos Lopes, sur le départ. Carlos Lopes, également secrétaire exécutif de la commission de l’ONU pour l’Afrique, a déclaré au journal Le Monde qu’il allait quitter le navire onusien. Cette sortie «franche» de l’économiste sur le franc CFA intervient alors que doivent se réunir vendredi 30 septembre à Paris les ministres des Finances de la zone franc.
«Il y a quelque chose qui cloche avec le franc CFA», a déclaré à l’AFP Carlos Lopes avant d’annoncer son départ de l’ONU, qui explique sans doute cette liberté de parole et cette charge franche contre un mécanisme qu’il juge «inadapté».
«Aucun pays au monde ne peut avoir une politique monétaire immuable depuis trente ans», s’émeut l’économiste bissau-guinéen.
Le franc CFA est arrimé à l’euro par un système de parité fixe. C’est un gage de stabilité qui présente l’inconvénient de contraindre les Etats membres de calquer leur politique monétaire sur l’euro, pointe des critiques et notamment l’ancien ministre togolais et directeur de la francophonie économique. Kako Nubukpo propose un arrimage sur un panier de devises.
La sortie de Lopes va-t-elle inspirer les ministres des Finances africains vendredi à Bercy et ouvrir le débat? C’est peu probable, indiquent plusieurs sources qui déplorent chez ces ministres une sorte de servitude volontaire.
La Zone Franc regroupe les Comores et 14 pays d’Afrique subsaharienne: le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun, la Côte d’Ivoire, le Congo, le Gabon, la Guinée-Bissau, la Guinée Equatoriale, le Mali, le Niger, le Sénégal, le Tchad, le Togo et la République centrafricaine.
Ils ont convenu samedi que les États doivent fournir des efforts pour améliorer la mobilisation des recettes et rationnaliser les dépenses
Les ministres des finances de la zone Franc (qui englobe 14 pays africains francophones et les Comores) veulent maintenir à court terme un cadre budgétaire et financier viable, rapporte un communiqué de ces plénipotentiaires.
Au cours d’un conclave tenu samedi à Yaoundé au Cameroun, ils ont mené une réflexion commune sur les réponses à apporter à la forte baisse des cours des matières premières, en particulier des hydrocarbures, qui touche depuis plusieurs mois de nombreux pays de la Zone franc.
Ainsi, reconnaissent les ministres, confrontés à ce choc, les États sont contraints d’adapter leurs politiques publiques pour tenir compte du ralentissement de l’activité et de la baisse des ressources budgétaires.
«Dans ce contexte, les participants ont débattu de la nécessité de mettre en uvre à court terme les politiques d’ajustement permettant de maintenir un cadre budgétaire et financier viable, et de déployer en parallèle les réformes structurelles à même de soutenir la croissance à long terme», souligne le communiqué.
Il ajoute que des efforts importants doivent être produits pour améliorer la mobilisation des recettes et rationnaliser les dépenses, sans toutefois remettre en question les investissements nécessaires au développement des États, mais en s’attachant plutôt à renforcer l’efficience des dépenses courantes.
Les ministres ont, en outre, ont reconnu le rôle que les bailleurs de fonds et les institutions financières internationales peuvent jouer pour soutenir l’ajustement budgétaire.
«Ces partenaires peuvent aider les Etats à développer de nouveaux instruments, notamment fiscaux, de mobilisation des ressources intérieures publiques», affirment-ils.
A cet égard, ils ont invité les partenaires techniques et financiers à étudier les modalités d’adaptation de leurs instruments à la situation particulière des États touchés par un choc sur les exportations de matières premières, afin de maximiser l’impact de ces instruments.
Les ministres de Finances réunis à l’hôtel Hilton de Yaoundé le 09 avril 2016minfi.gov.cm)/n
Plusieurs journaux parus lundi sont revenus sur la tenue en fin de semaine dernière à Yaoundé, la capitale du pays, de la rencontre semestrielle des ministres de la zone franc
L’avenir du franc CFA était en question lors de ces assises, titre Le Jour qui constate que rien de concret n’a été décidé par rapport à la monnaie commune à 15 pays d’Afrique du centre et de l’ouest.
L’idée de la mort du franc CFA, lié par une parité avec l’euro, n’emballe pas du tout les dirigeants africains, leur monnaie étant considérée comme un gage de stabilité économique et politique, analyse Emergence.
Pour le ministre français des Finances, Michel Sapin, cité par Le Quotidien de l’Economie et à propos de l’interchangeabilité entre la monnaie commune d’Afrique centrale et de l’ouest et la parité fixe avec l’euro, «la France ne décide pas à la place des autres».
Selon EcoMatin, «le choix de sortir ou de rester de la zone franc n’était pas au menu de cette réunion, mais de l’avis des spécialistes, il a été traité ipso facto en marge des activités prévues».
«A la vérité, les pourfendeurs du FCFA indiquent que la sortie des pays africains, lancés dans d’ambitieux projets de développement, est imminente. Côté Français, on semble prêt à jouer la carte du pragmatisme.»
«La zone Franc est une zone des Africains, pour les Africains, décidée par les Africains. La France est là pour accompagner. La France est là, comme vous le savez, pour garantir la stabilité de la monnaie. Nous nous engagerons à faire en sorte que cette monnaie reste stable par rapport à d’autres monnaies et cette stabilité est quelle chose de très utile aux pays concernés. Mais, c’est la décision des pays africains qui s’impose, pas celle de la France. S’il y a une volonté de voir évoluer cette zone, cela doit venir de la volonté des pays africains eux-mêmes et de leurs responsables», explique Michel Sapin au quotidien à capitaux publics Cameroon Tribune.
Mutations bat pourtant en brèche cet argumentaire plein de bon sens : l’Afrique compte 54 pays indépendants, et seuls 15 de ces pays ont lié leur sort financier à l’ancienne puissance coloniale alors que, à l’intérieur même de ces Etats, économistes et monétaristes parmi les plus célèbres de la planète ressassent, à tout vent, qu’une monnaie est d’abord un instrument de souveraineté avant d’être un moyen de change commercial, et un pays qui ne contrôle pas cet instrument est assujetti.
Attendu au Cameroun vendredi et samedi, Michel sapin rencontrera le chef de l’Etat; et aura aussi des entretiens avec les ministres ivoirien et camerounais des Finances
Le ministre français des Finances et des Comptes publics, Michel Sapin, se rend ce vendredi à Yaoundé dans le cadre de la réunion semestrielle des ministres des finances de la Zone franc.
Le programme officiel du déplacement de Michel Sapin prévoit l’arrivée du ministre français à l’aéroport international de Yaoundé – Nsimalen ce jour à 16h00. Entre 17h00 et 19h00, sauf changement de programme, Michel Sapin s’entretiendra avec le président de la République, Paul Biya; le ministre des Finances du Cameroun, Alamine Ousmane Mey; le ministre des Finances de Côte d’Ivoire, Adama Koné, avant de prendre part à un dîner avec les ministres des délégations de la Zone franc.
Selon le programme des travaux qui font l’objet principal de la venue de Michel Sapin au Cameroun, la journée du vendredi 08 avril sera consacrée à la réunion des experts de la Zone franc. Ces derniers doivent plancher sur divers thèmes comme l’intégration et le développement du crédit en Zone franc, l’adaptation des politiques publiques face à la baisse des cours des matières premières ; ou encore l’initiative France-Banque mondiale en faveur des Partenariats public-privé en Zone franc. Les experts achèveront leurs travaux par un projet de communiqué de presse, lequel sera soumis à l’approbation «sans discussion» samedi, lors de la réunion proprement dite des ministres des Finances et des gouverneurs de la Zone franc.
La rencontre prévue dans la capitale politique du Cameroun les 08 et 09 avril 2016 verra la présence – outre celle des ministres des finances des 14 pays de la Zone franc et des Comores – : du président de la Commission de la Communauté économique et monétaire des Etats de l’Afrique centrale (Cemac), Pierre Moussa; du président de la Commission de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa), Cheick Adjibou Soumare; du chef de mission du Fonds monétaire international pour la Cemac, Mario de Zamaroczy.
Michel Sapin aura un entretien samedi à Yaoundé avec le directeur du Centre de politique et d’administrations fiscales de l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE), Pascal Saint-Amans. Il est également prévu la signature d’un avenant à une convention d’aide budgétaire à l’UEMOA avec le président de la Commission de cette institution, Cheick Hadjibou Soumare.
Après les travaux de Yaoundé, le ministre français des Finances se rendra ensuite au Sénégal, les 10 et 11 avril, où il rencontrera le chef de l’Etat, le Premier ministre et le ministre sénégalais de l’Economie, des Finances et du plan ; ainsi que les dirigeants d’entreprises françaises implantées dans ce pays d’Afrique de l’Ouest.
Le ministre français des Finances Michel Sapin attend une conférence de presse, après la réunion des pays de la Zone franc, à Paris, le 2 octobre 2015AFP)/n
La capitale camerounaise, Yaoundé, accueille du 8 au 9 avril prochain la réunion semestrielle des ministres des Finances de la Zone franc, selon un communiqué publié mardi
La capitale camerounaise, Yaoundé, accueille du 8 au 9 avril prochain la réunion semestrielle des ministres des Finances de la Zone franc, selon un communiqué publié mardi par le ministre local du secteur Alamine Ousmane Mey.
En dehors des ministres, ces assises connaîtront également la participation des gouverneurs de Banques centrales, les chefs des institutions des 8 pays membres de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), des 6 pays membres de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), de l’Union des Comores et de la France.
Les thèmes à l’ordre du jour seront axés sur l’état de la convergence nominale réelle en zone franc, l’adaptation des politiques publiques face à la baisse des cours des matières extractives ainsi que l’amélioration et la mobilisation des ressources fiscales.
Les principaux intervenants annoncés sont le ministre français des Finances et des Comptes publics, Michel Sapin, le président de la commission de la CEMAC, Pierre Moussa, son homologue de l’UEMOA, Adjibou Soumaré ainsi que le chef de mission du Fonds monétaire international (FMI) pour la CEMAC, Mario de Zamaroczy.
La Zone franc, rappelle-t-on, est régie par quatre principes fondamentaux que sont la garantie de convertibilité illimitée du Trésor français, la fixité des parités, la libre transférabilité ainsi que la centralisation des réserves de change.
Elle regroupe les Comores et 14 pays d’Afrique subsaharienne: le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun, la Côte d’Ivoire, le Congo, le Gabon, la Guinée-Bissau, la Guinée Equatoriale, le Mali, le Niger, le Sénégal, le Tchad, le Togo et la République centrafricaine.
C’est l’une des résolutions de la réunion tenue le 02 octobre à Paris entre les ministres des finances, les gouverneurs des banques centrales et les présidents des institutions de la Zone franc
Réunion des ministres des finances de la Zone franc Paris, 2 octobre 2015. Communiqué de presse
Les ministres des finances, les gouverneurs des banques centrales et les présidents des institutions régionales de la Zone franc se sont réunis le vendredi 2 octobre 2015 à Paris, sous la présidence de M. Michel Sapin, ministre des Finances et des Comptes publics de la France.
Conscients de leurs responsabilités devant l’avenir, ils ont réitéré leur engagement à uvrer pour un développement durable, déjà formulé lors de la réunion de Bamako. Au cours d’un petit-déjeuner centré sur les enjeux du dérèglement climatique, ils sont convenus de la nécessité de s’impliquer sur le sujet de la finance climat, en vue de la COP 21 qui se déroulera à Paris du 30 novembre au 15 décembre 2015. Ces échanges ont permis de contribuer au développement de positions communes, afin de faire valoir le point de vue et les intérêts des pays africains et plus largement des pays en développement, et de mettre en valeur leur contribution à l’atténuation des effets du réchauffement climatique et à l’adaptation à ce changement.
Les participants ont souligné l’importance de développer des instruments financiers adaptés pour accompagner les pays en développement dans la mise en uvre de leurs stratégies de développement résilientes et sobres en émissions de gaz à effet de serre. Ils ont salué à ce titre les financements mis en place par les institutions financières et les banques de développement multilatérales, ainsi que les récentes annonces financières de plusieurs pays développés, qui envoient un signal encourageant en vue de la COP 21.
La réunion plénière a été l’occasion d’aborder lors d’une première table ronde les enjeux de l’intégration des marchés de capitaux en Zone franc. Le financement de l’économie est clef pour soutenir l’activité publique et privée, améliorer l’allocation de l’épargne et augmenter le taux de croissance à long terme. Les marchés de capitaux en Zone franc apparaissent en retrait comparés aux autres places d’Afrique en raison de fortes disparités d’une région à l’autre, d’une profondeur et d’une liquidité insuffisantes, de l’absence de taille critique et d’infrastructures encore perfectibles. Dès lors, l’approfondissement de l’intégration financière apparait comme un levier adéquat pour augmenter la taille de ces marchés et bénéficier des économies d’échelle. Or, un potentiel d’intégration notable existe, renforcé par l’existence de zones monétaires et d’une ancre commune entre les différentes sous-régions.
C’est la raison pour laquelle en avril 2015 à Bamako les ministres ont chargé les gouverneurs des banques centrales de la Zone franc d’engager une réflexion sur l’intégration des marchés de capitaux et de formuler des recommandations de politique publique concrètes et réalistes pour une mise en uvre à court ou moyen terme. Ces travaux ont été présentés au cours de la réunion de Paris, assortis d’une feuille de route pour faciliter l’appropriation des préconisations. Les ministres, gouverneurs et présidents d’institutions régionales ont approuvé cette feuille de route et se sont engagés à en tirer le meilleur parti.
Lors d’une seconde table ronde a été abordée la question de la lutte anti-blanchiment et contre le financement du terrorisme. Ce sujet conserve une forte actualité alors que plusieurs Etats de la Zone franc sont engagés dans la lutte contre des groupes terroristes, que ce soit dans le nord du Sahel ou dans le bassin du Lac Tchad. Les ministres des finances ont réaffirmé le rôle clef qu’ils jouent aux côtés de leurs collègues chargés de la sécurité intérieure et de la justice pour assurer les conditions d’un suivi et d’un contrôle des flux financiers efficaces, afin d’assécher les sources de financement des activités criminelles et terroristes.
Les ministres, gouverneurs et présidents d’institutions régionales ont réitéré leur souhait de renforcer la coopération sous- régionale et internationale en la matière, afin d’apporter des réponses coordonnées et de mettre en place un même niveau d’exigences légales et réglementaires au sein de la Zone franc. Ils ont affirmé la nécessité de converger vers les bonnes pratiques et standards internationaux, tels que promus par le Groupe d’action financière contre le blanchiment de capitaux (GAFI) et le Comité de liaison anti-blanchiment de la Zone franc (CLAB), de manière à garantir la fluidité des opérations financières de la zone avec le reste du monde.
Les participants ont également examiné l’état de la convergence nominale en 2014 en Zone franc. Ils ont souligné les bonnes performances macroéconomiques dans la zone l’an dernier, marquées par une croissance soutenue et une inflation modérée. Pour autant, ils ont appelé à la vigilance dans les mois à venir, dans un contexte d’incertitude sur la croissance mondiale, sur l’évolution du prix des matières premières, et notamment des hydrocarbures et sur les développements de la situation sécuritaire au Sahel et autour du Lac Tchad qui pèsent sur les finances publiques, notamment des pays de la ligne de front.
Ils ont donc souligné la nécessité de poursuivre la mise en uvre des réformes structurelles et des programmes de diversification des économies afin d’améliorer la résilience globale des économies et leur capacité à maintenir une trajectoire de croissance stable et forte sur le long terme.
Les participants ont enfin échangé sur l’actualité des institutions multilatérales afin de porter des messages convergents lors des réunions d’automne du FMI et de la Banque mondiale qui auront lieu du 9 au 11 octobre 2015 à Lima, au Pérou.
Les ministres, gouverneurs et présidents des institutions régionales ont chaleureusement remercié les autorités françaises pour l’organisation de cette réunion de la Zone franc et pour l’accueil réservé aux participants. Ils ont accepté l’invitation des autorités camerounaises de tenir la prochaine réunion des ministres des finances de la Zone franc au Cameroun, à Yaoundé.
Les pays africains sont courtisés par les temps qui courent. Ils sont perçus aujourd’hui comme les fers de lance de l’économie mondiale. Sept des dix économies dont la croissance sera la plus forte dans le monde au cours des cinq prochaines années se trouveront en Afrique : Ethiopie : 8,1 % ; Mozambique : 7,7 % ; Tanzanie : 7,2 % ; Congo : 7,0 %; Ghana : 7,0 % ; Zambie ; 6,9 % ; Nigeria : 6,8 %, révèle le magazine « the Economiste ».
Plusieurs facteurs ont contribué à la bonne santé économique de ces pays. Des décennies d’austérité sous la férule de multiples programmes d’ajustement structurel des institutions de Bretton Woods ont conduit à l’assainissement des finances publiques et à l’établissement d’un environnement propice aux investissements.
Sous l’ère de la mondialisation, les pays à industrialisation rapide dits « émergents » tels que la Chine, l’Inde, la Corée, la Malaisie, la Turquie ou le Brésil ne se sont pas fait prier pour investir massivement dans la région. D’autres facteurs sont venus renforcer les dynamiques de croissance dans bon nombre de pays d’Afrique subsaharienne.
Ils sont liés à des pratiques de meilleure gouvernance, à l’accroissement des transferts des émigrés dont le volume dépasse désormais les montants de l’aide publique au développement (APD) , ainsi qu’à l’éclosion d’une classe moyenne constituée de ceux qui dépensent 2 à 20 dollars par jour et dont le nombre a atteint 313 millions, selon un rapport de la Banque Africaine de Développement (BAD).
Ces développements ont incité les investisseurs américains et européens à revoir leurs stratégies en Afrique pour une redéfinition des termes de leurs échanges avec les pays de la région, avec un intérêt renouvelé pour les marchés en expansion du continent.
Lors du sommet Europe-Afrique qui s’est tenue à Bruxelles début Avril 2014, il a été question de redéfinir un nouveau cadre de coopération. En aout 2014, Barack Obama accueille les chefs d’Etat africains dans un sommet inédit : Etats Unis-Afrique.
Choix erroné de la Zone CFA : Taux d’intérêt élevés
Les pays de la zone franc, qui partagent une monnaie commune, le franc CFA, sont les laissés-pour-compte du réveil économique qui se fait jour en Afrique. Les taux de croissance régionale, selon le Fonds monétaire international (FMI), ont été en moyenne de 5,5 % dans l’Union Economique et Monétaire Ouest-Africaine (UEMOA) qui compte huit pays (Bénin, Burkina Faso, Côte-d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo). Etant donné que les populations y croissent en moyenne de 3%, autant dire que la progression du Produit intérieur brut (PIB) par tête d’habitant n’y est que de 2,5%.
Pour ce qui est de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), les taux de croissance moyens du PIB et de la population y sont respectivement de 4,6% et 2,8% avec un accroissement du PIB par tête d’habitant de 1,8%.
Il en résulte que les programmes de développement des pays de la zone franc se limitent dans un certain nombre de pays à des programmes de lutte contre la pauvreté, le Programme alimentaire Mondial (PAM) venant à leur rescousse pour nourrir une partie de leurs populations. C’est le cas par exemple du Sénégal, du Niger, du Mali, du Burkina Faso, du Tchad et du Cameroun.
Les raisons de ce décalage sont doubles. La première raison tient aux choix erronés qui sous-tendent la politique monétaire des deux banques centrales de la zone franc, la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest (BCEAO) et la Banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC). La deuxième raison est relative à l’absence de progrès dans le processus d’intégration économique dans l’UEMOA et la CEMAC.
Les choix erronés des banques centrales en matière de politique monétaire reposent d’une part sur leur stratégie de lutte contre l’inflation, et d’autre part sur le taux de change, la convertibilité et le libre transfert du franc CFA.
En matière de stratégie de lutte contre l’inflation, la BCEAO et la BEAC ont systématiquement eu recours à l’instauration de taux directeurs d’intérêt élevés pour la mener et assurer la stabilité des prix dans l’UEMOA et la CEMAC. Cette politique restrictive de crédit procède d’une mauvaise évaluation des véritables causes de la hausse des prix dans les pays de la zone franc.
Les deux banques centrales les associent à un excès d’offre de monnaie. Ce qui est faux, car la hausse des prix y est davantage d’origine exogène qu’endogène. Il existe certes des poussées inflationnistes dues à des facteurs internes tels que l’insuffisance et l’instabilité de l’offre agricole. Mais l’inflation y est essentiellement d’origine importée, car liée à une augmentation des coûts du pétrole et des denrées alimentaires. Le prix élevé du loyer de l’argent en Zone Franc ne peut en rien altérer ces paramètres.
Pour apporter une solution à l’insuffisance et à l’instabilité de l’offre agricole, il aurait été plus logique de promouvoir des politiques d’accès facile à des crédits bon marché aux producteurs pour stimuler la hausse de la production vivrière qui aurait conduit à la baisse et à la stabilisation des prix des denrées alimentaires.
L’enfermement des banques centrales de la zone franc dans cette logique anti-inflationniste les a détournées d’un autre aspect important de leur mission qui consiste à promouvoir la croissance économique de leurs pays membres. Selon l’économiste Kako Nubukpo (« Politique monétaire et servitude volontaire : la gestion du franc CFA par la BCEAO » 2007), en abusant de l’usage de taux directeurs élevés comme outil de régulation monétaire, elles ont délibérément exacerbé les difficultés d’accès au crédit des gouvernements et des agents économiques, pour financer leurs activités.
Elles ont davantage restreint la marge de man uvre des Etats, en mettant fin aux encours qu’elles leur accordaient jusqu’à hauteur de 20% des recettes fiscales de l’année précédente, les rendant encore plus otages des aides budgétaires français et des prêts des banques commerciales, principalement la Société Générale et la Banque Internationale pour le Commerce et l’Industrie, filiale de la BNP-Paribas.
Seules les entreprises françaises peuvent prospérer dans un tel environnement, grâce, à la fois, à la situation monopolistique dont elles jouissent dans les secteurs clés de l’économie, aux subventions de la France, aux garanties de la Coface, aux largesses des banques commerciales et des banques centrales en matière d’escompte et de réescompte et à la jouissance d’un marché protégé.
Dépositaires d’une grande partie de l’épargne nationale et des flux financiers, sanctuaires des capitaux spéculatifs induits par la libéralisation des politiques de change et en situation de sur-liquidité permanente, les banques commerciales françaises accumulent les profits en octroyant aux Etats des crédits à court terme de 5% à 6 % qu’elles accordent aux gouvernements de la Zone Franc pour financer leurs importations de pétrole, de denrées alimentaires, de biens d’équipement et autres.
Quant aux taux d’intérêt de prêts accordés aux locaux (entreprises et individus), ils peuvent aller jusqu’à 18%. Peut-on, dans des conditions pareilles, s’étonner de la faible bancarisation qui caractérise les pays de la Zone Franc et de leur désindustrialisation ?
Cette politique de taux d’intérêt élevés contraste singulièrement avec celle des autres banques centrales du reste du monde. Confrontées au ralentissement des activités économiques et aux menaces de récession que les retombées de la débâcle financière de 2008 et la crise de l’euro font peser sur le monde, celles-ci prônent des politiques de réduction de taux d’intérêt pour faciliter la reprise des affaires.
La Réserve fédérale des Etats-Unis, la banque centrale américaine, avait fixé à 1% le prix du loyer de l’argent après les attentats de septembre 2001. Elle a, depuis lors, maintenu cette politique de relaxation du crédit et s’est engagée à la maintenir au moins jusqu’en 2015. La Banque Centrale Européenne, la Banque d’Angleterre et la Banque du Japon mènent des politiques similaires. En toute logique, les banques centrales de la Zone Franc auraient dû en faire autant.
Autre choix erroné de la Zone CFA : Le franc CFA arrimé à l’euro
En matière de politique de change, le choix de la BCEAO et de la BEAC porte sur un taux de change du franc CFA arrimé à l’euro avec une parité fixe sur la convertibilité et sur le libre transfert de la monnaie.
Depuis son établissement en 1998, la Banque centrale européenne (BCE) pratique une politique de monnaie forte pour rehausser les ambitions de l’euro à briguer un statut de monnaie de réserve internationale. Mais si les Européens, dont les échanges intra-communautaires se montent à 60%, peuvent s’accommoder de l’appréciation de l’euro par rapport au dollar, il n’en est rien des pays de la Zone Franc.
Leurs échanges intra-régionaux sont limités au maigre taux de 12% et ils restent dépendants de leurs importations de denrées alimentaires, de biens manufacturés, et de produits courants de consommation. Leurs exportations (pétrole, café, cacao, coton, or, uranium, etc. ) sont libellées en dollar. L’appréciation du franc CFA vis-à-vis du dollar lamine la compétitivité des filières d’exportation de ces pays, creuse leurs déficits et alourdit leurs créances.
Etonnamment, les pays de la Zone Franc doivent payer pour toutes ces facilités qu’ils accordent à la France, en se délestant de leurs réserves de change au profit du Trésor français. C’est d’autant plus inouï que la France investit ces réserves qui représentent des dizaines de milliards de dollars, dans des bons du trésor qu’elle utilise ensuite pour garantir les prêts qu’elle lève pour financer son propre déficit public qui s’est élevé, en 2013, à 4,3 % de son PIB, loin du plafond de 3% des critères du pacte de stabilité et de croissance de l’Union européenne (UE).
A l’aube des indépendances, le dépôt de devises exigé par la France pour couvrir la masse monétaire du franc CFA était de 100 %. Il a été réduit à 65% en 1973, puis plafonné à 50% depuis le mois de septembre 2005. Les réserves de change des pays de la zone franc ont atteint un niveau excessif. A l’heure actuelle, selon la Banque de France, le taux de couverture de l’émission monétaire du franc CFA dépasse 110% alors qu’il devait être plafonné tout au plus à 20% conformes d’une part aux normes internationales admises en la matière, et d’autre part aux accords signés entre la France et les pays de la Zone Franc (Cf Rapport 2009 de la Zone Franc publié par la Banque de France en octobre 2010).
Or, la tendance générale des banques centrales est d’éviter d’accumuler des réserves excessives, du fait des pertes qu’elles entraînent. Dans la Zone Franc, ces pertes proviennent du coût de la non utilisation des surplus de réserves pour financer des dépenses d’équipement ou rembourser une partie de la dette extérieure et réduire ainsi les paiements d’intérêts, ainsi que du coût du différentiel de rendement entre la rémunération de 1,5% offerte par la France et celle plus élevée des instruments dans lesquels les réserves auraient pu être investies, et du coût des déficits générés par l’appréciation de la monnaie.
Toute la politique de réserve de la BCEAO et de la BEAC se résume en fait à un vaste subterfuge qui alimente un marché de dupes. Une parité fixe garante d’un franc CFA fort met les compagnies françaises (Bouygues, Areva, Total, Bolloré, Eiffage, Orange, BNP-Paribas, Société Générale, Air France, etc.) à l’abri des dépréciations monétaires courantes. La convertibilité et le libre transfert leur permettent d’exiler les profits et les fortunes qu’elles engrangent.
Alors que des sommes colossales de devises gagnées grâce au labeur de leurs populations sont ainsi soustraites arbitrairement par l’Hexagone au financement de leur développement, les pays de la Zone Franc sont confrontés à des déficits structurels chroniques et à de graves difficultés de paiements. Leurs activités économiques reposent essentiellement sur la production et l’exportation de produits de base.
A ce stade primaire de leur développement, la logique aurait voulu qu’ils adoptent une politique de change basée sur la non convertibilité et la non transférabilité du franc CFA, et à un taux de change fluctuant et avantageux, arrimé non exclusivement à l’euro mais à un panier de monnaies choisies parmi celles de leurs principaux partenaires commerciaux.
Pour ce faire, ils doivent décréter un régime de change qui leur donne le contrôle de toutes les opérations de change avec l’extérieur. Cette restriction légale leur assure une gestion rigoureuse des rentrées et des sorties de devises, ce qui permet de les allouer en priorité au développement des secteurs clés de l’économie.
C’est la politique monétaire suivie en Afrique par des pays comme l’Afrique du sud, le Nigeria, le Kenya, l’Ethiopie, l’Angola ou le Ghana, qui figurent tous maintenant dans le peloton de tête du développement en Afrique. C’est également le cas des pays émergents comme la Chine, l’Inde, la Corée, la Malaisie, la Turquie ou le Brésil.
Le géant chinois, par exemple, soucieux de ne pas faire peser des risques importants sur sa croissance économique par une sortie incontrôlée de devises, n’autorise pas la libéralisation de son marché des changes, et sa monnaie, le « renminbi », n’est ni librement convertible, ni librement transférable. Alors, pourquoi le franc CFA le serait-il ?
La deuxième raison des dysfonctionnements, qui affectent la Zone Franc, résulte de l’échec des politiques d’intégration économique avec des échanges intra-communautaires strangulés par les droits de douane qu’ils se prélèvent mutuellement.
Un énorme paradoxe du franc CFA est d’être la monnaie commune de pays qui ne partagent pas un marché commun. Pour y remédier, l’UEMOA et la CEMAC furent créées en 1994 au lendemain de la dévaluation du franc CFA. Les critères de convergence qu’elles ont retenus pour harmoniser les politiques d’intégration économique de leurs membres ont été copiés sur ceux du traité européen de Maastricht. Ils se réfèrent aux niveaux autorisés en matière d’inflation, de dette et de déficit budgétaire.
Le différentiel de développement entre les pays de l’Union européenne et les pays de la Zone Franc aurait dû inciter l’UEMOA et la CEMAC à faire preuve de plus de créativité et de pragmatisme dans la sélection de leurs propres critères de convergence. En ce qui concerne le niveau du déficit autorisé par exemple, elle aurait pu, en lieu et place de l’équilibre du déficit budgétaire de base, n’exiger que l’équilibre du solde structurel courant, c’est-à-dire hors investissement public; une conditionnalité plus adaptée aux réalités de l’UEMOA et de la CEMAC et qu’elles seraient plus aptes à satisfaire.
Il s’agit d’autoriser des déficits pour soutenir l’activité économique et pour jeter les bases de la croissance future, l’endettement des Etats devant être exclusivement consacré au financement des investissements publics.
En tout état de cause, les difficultés auxquelles les pays de la Zone Franc sont confrontés rendent illusoire le respect des critères édictés et le projet d’union économique reste en panne, aggravant leurs déséquilibres structuraux.
CEDEAO: Cadre idéal des reformes de la politique monétaire
Le franc CFA est donc à la croisée des chemins. Il avait été créé en temps d’exception en France, par décret signé par le Général de Gaulle le 25 décembre 1945, pour rationaliser l’exploitation des colonies françaises d’Afrique alors groupées en deux fédérations régionales distinctes, en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale.
L’abolition du franc CFA s’imposait, après que la France a démantelé les structures fédérales de ses colonies, quand elles ont accédé à l’indépendance. Dans les mêmes circonstances, la Grande Bretagne avait aboli la « livre sterling de l’Afrique de l’ouest », la monnaie commune de ses colonies du Nigeria, du Ghana, de la Sierra Leone et de la Gambie, quand ces pays ont recouvré leur indépendance.
Au regard de la piètre situation dans laquelle se trouvent les pays de la Zone Franc, après plus d’un demi-siècle d’indépendance, il serait grand temps qu’ils se décident de mener une politique monétaire indépendante, adaptée au cycle des économies de l’UEMOA et de la CEMAC.
Le meilleur cadre pour articuler ces réformes en Afrique de l’Ouest est la Communauté Economique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) qui compte 15 pays membres (Nigeria, Ghana, Côte-d’Ivoire, Sénégal, Niger, Gambie, Guinée, Mali, Guinée Bissau, Liberia, Sierra Leone, Bénin, Togo, Cap Vert, Burkina-Faso), conformément aux directives de l’Union africaine (UA).
Malheureusement, perçue par la France comme d’obédience anglophone, la CEDEAO n’a cessé d’être concurrencée dès son établissement par l’UEMOA et la CEMAC, deux organisations créées par les pays de la Zone Franc dans l’espoir déraisonnable d’endiguer l’influence britannique, américaine et nigériane dans ce qui est perçu comme une chasse-gardée française.
Il n’en demeure pas moins que la CEDEAO demeure le cadre idéal pour mener les politiques de convergence économique et financière, en vue de l’adoption d’un Tarif extérieur commun (TEC) et la réalisation d’une union douanière, qui sont les préalables à une intégration économique réussie, suivie d’une union politique des pays de la région. La boutade en vogue dans les milieux intellectuels de Lagos est qu’il y a deux grandes puissances au sein de la CEDEAO : le Nigeria et la France. Sans le bon vouloir de la France, point de salut pour la CEDEAO.
La présence de plus en plus affirmée sur la scène africaine d’acteurs comme la Chine, l’Inde, la Corée, la Malaisie, la Turquie et le Brésil a donné aux pays Africains une plateforme d’exportation accrue, ainsi que la mise en place d’un nouveau modèle de coopération, basé sur le commerce, l’investissement et le transfert de technologie; ce qui a élargi leurs options de croissance économique et leur a donné une plus grande marge de man uvre et des opportunités significatives de progresser dans la voie du développement. Il serait grand temps que les dirigeants de la Zone Franc s’inscrivent dans cette nouvelle dynamique.
Les multinationales françaises sont les premiers bénéficiaires du leurre que représentent les mécanismes de fonctionnement de la Zone Franc. Les seconds bénéficiaires sont les élites africaines. Le mode de fonctionnement corrompu du système leur permet de s’enrichir impunément, grâce aux importations et de s’approprier à tort les fonds publics qu’elles n’ont aucun mal à exporter à l’Hexagone, tout en menant à domicile un niveau de vie extravagant, sans aucune commune mesure avec les réalités du terrain.
Ces bénéficiaires encaissent des profits substantiels au détriment des populations africaines dont la majorité est confinée dans une pauvreté abjecte. Quant à l’Etat français, il est loisible de se demander la réalité des bénéfices qu’il tire de ce système. En dépit du contrôle quasi total (politique, diplomatique, militaire, économique et financier) que la France exerce dans son pré carré, son armée n’en est pas moins intervenue à plus de quarante reprises sur le sol africain, en l’espace d’un demi-siècle, pour sécuriser ses prébendes, maintenir au pouvoir ses poulains ou les en chasser selon son bon vouloir.
D’anciennes puissances coloniales, comme l’Allemagne et la Grande Bretagne, qui se sont débarrassées de leurs oripeaux coloniaux et paient rubis sur ongle au prix du marché leurs importations d’Afrique, sont en meilleure santé économique que la France. En 2013 un rapport du sénat français a eu pour titre : « L’Afrique est notre avenir ».
Chinois, Indiens, Brésiliens, Coréens, Malais, Turcs, entre autres, se sont faits à cette vérité et ont élaboré des stratégies qui ont contribué au bond des pays d’Afrique en dehors de la zone d’influence française. Il serait temps que les élites dirigeantes françaises et africaines se réveillent à cette réalité.
En cette année 2014, l’Afrique de l’Ouest devrait atteindre 7,2% contre 5,4% en Afrique centrale
L’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) devrait réaliser un taux de croissance plus important que la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) en 2014. Il est estimé à 7,2% dans la zone Uemoa contre 5,4% dans la Cemac et 3,9% aux Comores.
Ces perspectives ont été présentées vendredi, 03 octobre 2014, à Paris lors de la réunion des ministres de la Zone Franc. Elle a réuni, sous la présidence de Michel Sapin, ministre des Finances et des comptes publics de la République française : les ministres des Finances, les gouverneurs des banques centrales et les présidents des institutions régionales de la Zone Franc.
Les participants ont relevé, au cours des échanges, que la croissance a été plus soutenu 2013 en zone Uemoa avec un taux de croissance de 5,7% du fait de l’accroissement des investissements et des productions agricoles. En zone Cemac, on aura plutôt assisté à une «décélération avec un taux de croissance de 1,4% contre 5,8% en 2012» en raison de la contraction enregistrée par le secteur pétrolier et de la moindre progression du secteur non pétrolier.
Les ministres de Finances de la Zone Franc ont présenté leurs différentes politiques macroéconomiques à Paris et échangé sur d’autres sujets d’actualité comme la situation au Mali et en République centrafricaine ainsi que l’impact du virus Ebola sur les pays touchés par la fièvre hémorragique.
«Les ministres, gouverneurs et présidents des institutions régionales ont chaleureusement remercié les autorités françaises pour l’organisation de cette réunion de la Zone franc et pour l’accueil réservé aux participants», indique le communiqué ayant sanctionné ces travaux. La prochaine réunion des ministres de la Zone Franc se tiendra à Bamako, au Mali, le 10 avril 2015.
«Les fausses opinions ressemblent à la fausse monnaie qui est frappée d’abord par de grands coupables et dépensée ensuite par d’honnêtes gens qui perpétuent le crime sans savoir ce qu’ils font»
(Joseph de Maistre)
Lorsque le général de Gaulle signait le 25 décembre le décret créant le Franc des Colonies Françaises (CFA), il savait bien qu’il mettait ainsi sous perfusion monétaire les économies africaines. Seuls les pays Africains de la Zone Franc ne savaient rien. Il a fallu une lecture plate du Professeur Tchuindjang Pouemi, un intellectuel camerounais rigoureux, pour sortir le coté vicieux de cette monnaie. Depuis la parution de son ouvrage séminal de 1980, ils sont nombreux les économistes qui appellent à mettre fin à la coopération monétaire entre les Pays Africains de la Zone Franc (PAZF). Les nombreux écrits du Professeur Mamadou Koulibaly, de Nicolas Agbohou et nous-mêmes n’ont rien changé dans les habitudes des gouvernants africains. Et pourtant ces derniers critiquent souvent les conséquences de cette coopération monétaire tout en refusant de mettre un terme à plus d’un demi-siècle d’esclavage monétaire.
En effet, face aux médias dans le cadre de la présentation des actions de son département ministériel, le ministre du commerce ivoirien, Jean Louis Billon, a taxé le franc CFA comme seul responsable de l’inflation en Côte d’Ivoire. Selon lui, «Comme toute monnaie, le franc CFA est perfectible. Alors si on peut l’améliorer il faut le faire. Car, indexé à l’euro, le franc CFA est trop fort. Il faut donc une flexibilité». Cette déclaration du ministre nous fournit un prétexte pour mener cette présente réflexion sur la coopération monétaire qui existe entre les PAZF et la France. Pour dire les choses nettes, il ne suffit pas de donner un peu de flexibilité au franc CFA pour le mettre au service des Africains, il en faut plus. Le franc CFA doit d’abord être décolonisé, ensuite lui donner une flexibilité et enfin bien le géré pour qu’il contribue au développement.
Le franc CFA et la Zone Franc en quelques mots
Comme indiqué plus haut, le franc CFA est la monnaie commune à 14 pays africains situés au sud du Sahara. En Afrique centrale, les 6 pays de la CEMAC partagent le Franc de Coopération Financière Africaine tandis que les 8 pays de l’UEMOA partagent le Franc de Communauté Financière Africaine. Et tous ces pays ont signé chacun un accord de coopération avec la France. La Zone Franc, au sens strict, combine:
-un système de change fixe (déterminé par le Conseil des ministres) où le pays leader (hier la France et aujourd’hui l’Union européenne) conditionne le taux de change nominal, influence les taux d’intérêt et les taux d’inflation et donc le taux de change effectif bilatéral;
-des Unions monétaires caractérisées par une monnaie commune, des Banques centrales multinationales et une unité de la politique monétaire;
-un espace monétaire et financier tutélaire où le Trésor garantit la convertibilité des francs CFA grâce aux comptes d’opérations, incite au respect des règles et favorise la crédibilité de la politique monétaire.
La Zone Franc est un sous-système monétaire qui a historiquement été lié à l’espace colonial fermé, puis s’est intégré progressivement au système monétaire européen et au système monétaire international.
Le franc CFA est une escroquerie monétaire de la France
Commençons par rappeler les principes de la coopération monétaire contenus dans la convention de coopération entre les pays membres de l’Union monétaire ouest-africaine et la République française du 4 décembre 1973. Ils sont fondamentalement au nombre de quatre :
1) La fixité des parités avec la monnaie ancre : la parité des monnaies de la Zone avec l’euro est fixe et définie pour chaque sous-zone. Les monnaies de la Zone sont convertibles entre elles, à des parités fixes, sans limitation de montants.
2) La garantie de convertibilité illimitée du Trésor français : la convertibilité des monnaies émises par les différents instituts d’émission de la Zone franc est garantie sans limite par le Trésor français.
3) La libre transférabilité : les transferts sont, en principe, libres à l’intérieur de la Zone. A l’intérieur de chaque sous-zone, et entre chaque sous-zone et la France, les transferts de capitaux sont en principe libres.
4) La centralisation des réserves de change: elle apparaît à deux niveaux puisque les États centralisent leurs réserves de change dans chacune des deux Banques centrales tandis qu’en contrepartie de la convertibilité illimitée garantie par la France, les banques centrales africaines sont tenues de déposer, auprès du Trésor français sur le compte d’opérations ouvert au nom de chacune d’elles, une fraction de leurs réserves de change (50 % pour les avoirs extérieurs nets de la BCEAO et 60% jusqu’au 30 juin 2008, 55 % jusqu’au 30 juin 2009 et ensuite 50% pour la BEAC).
Pour être franc, la France escroque les pays africains depuis la création de cette monnaie. Les comptes d’opérations sont simplement un instrument de domination financière de la France. La France applique aux Africains ce qu’elle reprochait à l’Angleterre dans le passé. Maurice NIVEAU (dans Histoires des Faits Economiques contemporains, PUF, 1966, p.306-307) nous rapporte le sentiment français, par les propos de M. Emile MOREAU (gouverneur de la banque de France de 1926 à 1930) qui disait ceci à M. POINCARÉ (président du conseil):[i « j’expose au président du conseil que l’Angleterre ayant été le premier pays européen à retrouver une monnaie stable et sûre après la guerre, a profiter de cet avantage pour jeter sur l’Europe les bases d’une véritable domination financière. […] les remèdes comportent toujours l’installation auprès de la banque d’émission d’un contrôleur étranger anglais ou déguisé par la banque d’Angleterre, et le dépôt d’une partie de l’encaisse de la banque d’émission à la banque d’Angleterre, ce qui sert à la fois à soutenir la livre et à fortifier l’influence anglaise. »].
En avril 2014, l’hebdomadaire américain spécialisé sur les sujets économiques révélait l’escroquerie française du siècle. Selon l’hebdomadaire, le stock de liquidités des pays africains à la Banque de France est estimé à 20 milliards de dollars (US$) mais seulement rémunéré à un taux d’intérêt de 0.75%. Dans le même temps, ce même pays prête aux pays africains à taux usuriers. Pour atténuer l’indigence dans laquelle la France loge les pays africains, l’aide française est venue comme une bouée de sauvetage. En effet, les PAZF sont des principaux bénéficiaires de l’aide publique française au développement. La vérité, c’est que le franc CFA permet à la France d’acquérir cacao, bois, banane, ananas, uranium, l’or des Africains sans sortir une devise.
Le franc CFA pénalise la compétitivité et retarde l’industrialisation des pays africains
La théorie monétaire enseigne que les petits pays ont intérêt à construire leur crédibilité monétaire en arrimant simplement leur monnaie à celle d’un grand pays. Dans le cas des pays de la Zone Franc, cette recherche de stabilité devient déstabilisante et pénalisante. Il est évident que le souhait inavoué du ministre du commerce ivoirien est une dévaluation du franc CFA pour favoriser un développement plus rapide des pays de la zone franc. Mais le recours trop facile à la dévaluation n’est pas la solution. Le problème fondamental reste la parité fixe. Le régime de change devra changer. Cette parité fixe est défavorable à la compétitivité des économies de la Zone Franc. De 1985 à 1993, les performances économiques des PAZF sont moins bonnes à cause de la surévaluation du Franc CFA due, en partie, à la baisse du dollar par rapport au franc français. La politique du franc français fort, longtemps poursuivie en France, a entraîné une appréciation du franc français (FF) par rapport au dollar pour la période 1985-1992. Le dollar sert de monnaie de facturation pour de nombreux partenaires commerciaux des PAZF. Dans ce contexte, cela affecte négativement la compétitivité de ces pays au niveau de leurs exportations qui coûteront plus cher en devises pour l’étranger. Parallèlement, leurs importations coûteront moins cher. Ceci incitera à importer davantage. En fin de compte, la balance commerciale sera négativement affectée.
Selon le classement mondial de la compétitivité, établi tous les ans par le Forum économique mondial (WEF), pour 2014-2015, aucun PAZF ne fait partie du Top 10 africain. A l’échelle africaine, l’Ile Maurice (39è au classement mondial) est suivie par l’Afrique du Sud (56è au classement mondial), le Rwanda (62è), le Maroc (72è), le Botswana (74è), l’Algérie (79è), la Tunisie (87è) et la Namibie (88è). Le Kenya (90è) et la Zambie (96è) complètent le Top 10 africain. Le Gabon est le premier PAZF de la liste (11 africain et 106 au niveau mondial), le Sénégal (2ème PAZF, 14e africain et 114e au niveau mondial), la Côte d’Ivoire (3ème PAZF, 16e africain et 116e au niveau mondial). La compétitivité traduit plus généralement la capacité d’une économie ou d’une entreprise à faire face à la concurrence étrangère. Mais le calcul de l’indice de compétitivité d’un pays se fonde uniquement sur les prix : c’est le rapport entre l’indice prix des importations et l’indice des prix à la production. La monnaie a donc une influence importante sur la compétitivité. Avant d’adopter l’euro, l’Italie par exemple, a utilisé à plusieurs reprises l’arme redoutable de la « dévaluation compétitive ». Cela lui a permis de restaurer artificiellement et pour un temps, la compétitivité de ses produits exportés chez ses voisins européens.
Le système de change de la Zone Franc est à l’origine de la perpétuation du déséquilibre dans les pays périphériques. Un régime de change flexible pour nous aider à amortir les chocs extérieurs.
Il faut en finir définitivement avec le franc CFA
La Zone Franc a été historiquement et demeure davantage qu’un simple bloc monétaire du fait de l’unification des règles de change, de l’utilisation de la gestion des réserves. La Zone Franc constitue une chasse gardée de la France et ses entreprises. Les patrons des grands groupes capitalistes recherchent systématiquement à détenir des positions de monopole. Ces positions de monopole leur permettent de pratiquer souvent des prix plus élevés que dans les métropoles, dans des pays pourtant plus pauvres. Les entreprises françaises, ankylosées par des décennies de chasses gardées, encaissent difficilement les offensives d’une concurrence qui s’est aiguisée, même dans l’Afrique «marginalisée».
Les PAZF ont au moins trois bonnes raisons pour rompre la coopération monétaire avec la France.
En premier lieu, depuis 1994, la France n’est plus le tuteur des politiques économiques des PAZF. En effet, depuis la doctrine d’Abidjan exposée par le premier ministre Balladur en juillet 1993 et la dévaluation de janvier 1994, les règles du jeu ont largement changé. Les pays africains membres de la Zone ont perdu leurs droits de tirage automatique. La France est devenue un prêteur résiduel qui se situe en second rang par rapport aux institutions de Bretton Woods, et qui intervient après mobilisation des multilatéraux notamment la Banque africaine de développement.
En second lieu, le Franc CFA est désormais arrimé à l’Euro et non le franc français. Les PAZF ont signé un accord les liant avec le franc français et non l’euro et a fortiori les autres pays européens. Du coup, la légitimité par le rôle de garant du Trésor doit s’estomper. Il en découle que toutes les réserves de changes des PAZF détenues par la France n’est que purement du vol.
En troisième lieu, les PAZF n’ont pas choisi d’arrimer leur monnaie à l’Euro. Dans le cadre des accords de Maastricht, l’institution de la monnaie unique s’est faite avec le maintien des règles de la Zone franc : rattachement du FCFA et du Franc comorien au franc français et mécanismes du compte d’opérations. Les choix budgétaires restent du ressort de la souveraineté des États pendant que les accords de coopération monétaire engagent le Trésor français. En théorie, la garantie de convertibilité des monnaies est assurée par des comptes d’opérations ouverts au nom de chacune des trois banques centrales africaines auprès du Trésor français.
En France, c’est par voie référendaire que les Français ont ratifié en 1993, le traité sur l’Union Européenne. Dans le cas des PAZF, le passage technique de l’arrimage du franc CFA à l’euro a été imposé et forcé.
Aujourd’hui, la question du niveau de l’euro vis-à-vis du dollar est centrale non seulement pour la reprise de la croissance et la compétitivité européenne mais encore plus pour celles des pays africains. Ceux-ci affrontent la concurrence des pays dont la monnaie est ancrée sur le dollar et dont le commerce et les flux financiers sont largement libellés en dollars.
A maintes occasions, les pays Africains ont refusé de franchir le Rubicon monétaire. Les défis du développement n’autorisent plus les hésitations et le manque de courage des dirigeants africains.
La ministre française de l’économie a reçu les ministres des pays concernés, en préparation au prochain sommet du G20
De nombreux points retenus
Christine LAGARDE, ministre français de l’Economie, de l’Industrie, et de l’Emploi a reçu les autorités financières et économiques de la Zone Franc lundi 31 août 2009 à Paris. Cette réunion avait pour objectif de préparer la prochaine réunion des Ministres des Finances du G20, qui se tiendra à Londres les 4 et 5 septembre 2009, et le sommet des chefs d’Etat et de gouvernement du G20 prévu les 24-25 septembre à Pittsburgh. La rencontre a permis de faire plusieurs constats. Premier constat la zone Franc a mieux résisté à l’impact de la crise économique mondiale. Le deuxième point d’accord a été le fait qu’il faudrait que l’Afrique soit mieux représentée aux institutions de Brettons-Wood (FMI-Banque Mondiale).
Nous avons évoqué la réforme du fonds monétaire international, avec la répartition des sièges, des droits de vote et des équilibres entre pays développés, pays en développement, une bonne représentation qui doive nécessiter une meilleure représentation des pays africains.
Christine LAGARDE, ministre français de l’Economie, de l’Industrie, et de l’Emploi
Il a aussi été question de l’accès aux financements pour les pays avec la nécessaire flexibilité des instruments financiers, un meilleur accès au financement également pour les particuliers et les petites et moyennes entreprises, dans le cadre du microcrédit. L’initiative consiste à permettre un meilleur accès à des financements permettant de favoriser l’entreprenariat. D’après Essimi Menye le ministre camerounais des finances, la mesure est encourageante. Elle permet selon lui aux pays pauvres d’accéder aux financements avec des taux d’intérêts faibles. C’est pourquoi dit-il il est souhaitable que les mesures visant à soutenir les économies des pays de la zone franc soient effectivement tenues. Cela permettrait d’assurer la construction des infrastructures et la relance agricole.
La nécessiter de se détacher de la parité avec l’Euro
Pour de nombreux observateurs, la rencontre de Paris avait, au vu de ces mesures qui ont été prises un objectif constant: sensibiliser les pays de la zone franc sur la nécessité de conserver la parité fixe entre le franc CFA et l’Euro. Après plus de 40 ans de coopération monétaire, la zone Franc qui représente un vaste espace économique n’a presque jamais eu de répits avec les crises économiques. Depuis quelques années, économistes et cadres africains dénoncent de plus en plus la parité fixe entre l’Euro et le franc CFA. Celle ci selon eux pénalise les économies des pays de cette zone.
L’arrimage du franc CFA d’abord au franc français et ensuite à l’euro, contraint les deux Banques centrales des pays de cette zone (BEAC-BCEAO) à déposer annuellement 65 % de leurs réserves de devises étrangères sur un compte du Trésor français. Par contre, ces banques centrales n’ont pas le droit d’accorder aux pays membres des crédits supérieurs à 20% de leurs recettes publiques de l’année précédente. Les autorités camerounaises avaient déclaré que des concertations étaient en cours, afin que les pays de la zone Franc puissent avoir accès à 40% de leurs réserves de change. Demain risque de ne pas être la veille pour ce projet. Plusieurs études et analyses ont démontré que la réduction des taux d’intérêts n’est pas une solution, tant que les sommes prêtées le sont dans une monnaie dont les cours sont variables. La solution la plus difficile certes mais la plus objectives serait pour les pays de la zone Franc de se prendre en main et de mieux s’organiser, disent de nombreux experts.
Christine LAGARDE, ministre français de l’Economie, de l’Industrie, et de l’Emploiwww.impots-utiles.com)/n