Yaoundé: une campagne contre les mariages précoces à la Briqueterie en cours

Plan Cameroun, une structure internationale de soutien à l’épanouissement des enfants, a établi une unité pilote dans une école à proximité de ce quartier. Des centaines de filles y sont sensibilisées au quotidien

Dans l’école franco-arabe du quartier Briqueterie à Yaoundé, quelques jeunes filles voilées s’apprêtent à prier. Elles ont entre neuf et 11 ans. A cet âge-là, certaines jeunes filles ont été mariées de force.

Le mariage précoce n’est donc pas un sujet nouveau aux oreilles de ces petites filles qui, l’an prochain, devront entrer au cycle secondaire.

« Ma camarade, parce qu’elle ne va pas à l’école, son père a décidé de la marier. Elle avait entre 14 et 15 ans« , nous confie une jeune élève un peu apeurée de la présence de son enseignant pendant l’enregistrement.

Une autre élève de la même salle de classe laisse étaler les prétextes utilisés dans ce quartier populaire pour faire prospérer le mariage précoce.

« J’ai appris que beaucoup de petites filles sont un peu turbulentes, c’est pour cela qu’on les envoie en mariage « , déclare-t-elle toute naïvement.

Fort malheureusement, ni elle ni sa camarade de classe n’ont connu le mariage précoce.

Sauf qu’en la matière, ici, les points de vue des victimes du mariage précoce ne comptent pas toujours.

D’ailleurs, la liberté de ton de ces deux petites filles sur le mariage précoce contraste avec celle de l’administration et du personnel enseignant de l’école.

« Ce sujet est très sensible et heurte les conceptions traditionnelles voire religieuses du mariage« , nous glisse à demi-mots, hors micro, une responsable de l’école franco-arabe du quartier Briqueterie construite sur fonds privés islamiques.

Raison pour laquelle, « l’école franco-arabe du quartier Briqueterie ne fait aucune sensibilisation à propos« , renchérit-elle.

Du coup, les dénonciations ont lieu par le canal des associations. Certaines jeunes filles victimes de mariages précoces au quartier Briqueterie préfèrent s’y confier.

L’une de ces associations est basée dans ce quartier populaire. Elle lutte contre les violences faites aux femmes dans quatre régions du Cameroun.

Rabeantoandro Haingo Manga Ada, jeune malgache mariée à un Camerounais est la directrice de l’antenne de Yaoundé.

« Nous avons deux cas sous la main depuis février 2017. Ils concernent le quartier Briqueterie« , explique avec beaucoup d’engagement Mme Manga Ada.

Dans les détails, elle précise que le premier cas concerne une jeune fille mariée « islamiquement par sa tante, il y a 7 ans. Tout récemment, comme la jeune fille ne sait ni lire, ni écrire, sa belle-famille lui a fait signer un papier par lequel elle s’engageait dans le mariage polygamique sans le savoir« , relate Mme Manga Ada.

Pour le deuxième cas, l’association de lutte contre les violences faites aux femmes a constaté que, « la jeune fille mariée précocement, après avoir accouché de quatre enfants, est actuellement abandonnée par le mari qui, est polygame« , dénonce Mme Manga Ada.

Sans revenus pour survivre, la jeune fille abandonnée est rentrée avec sa progéniture sous le toit ses parents. Un cas pour lequel, l’association travaille pour restaurer la dignité de la victime.

L’école pilote contre le mariage précoce à Yaoundé

Pour espérer renverser la tendance des hausses de mariages précoces au quartier Briqueterie, la sensibilisation, des jeunes filles et parents d’élèves, s’est déportée dans une école publique située à la lisière du quartier Briqueterie.

Cette école est devenue une unité pilote pour les organismes internationaux depuis quelques années. Son choix ne s’est pas fait au hasard.

« Plan Cameroun- une structure internationale de soutien à l’épanouissement des enfants- vient sensibiliser les jeunes filles et les parents pour éviter les cas de mariages précoces ici« , affirme Mme Djoussi Berthe, directrice de l’école publique groupe 1 d’Ekoudou.

Le message véhiculé à l’occasion est simple, l’éducation de la jeune fille passe avant le mariage.

Plusieurs cas de jeunes filles mariées précocement ont été enregistrés dans notre école. nous explique Mme Djoussi.

Avec une telle résistance, la vaste campagne de lutte contre les mariages précoces au quartier Briqueterie, implique déjà les dignitaires musulmans qui relaient de plus en plus ce message dans les mosquées.

« Si on trouve encore certains cas, c’est en contradiction avec ce qui est mentionné dans les textes révélés. Les imams, les prédicateurs, ceux qui portent les conseils et ceux dont les voix sont entendus ont toujours besoin de multiplier d’efforts sur la question, dans la sensibilisation d’un certain nombre de parents sur la question des mariages précoces« , se défend Dr Hayatou Mohammadou, responsable de la prédication dans la région du centre, pour les deux mosquées de Yaoundé.

Reste à vaincre, les pesanteurs de la pauvreté dans ce quartier populaire de la Briqueterie où, parfois, pour rembouser une dette, les petites filles sont données en contre partie en mariage précocement. La loi camerounaise prévoit jusqu’à 10 ans d’emprisonnement contre toute personne qui contraint au mariage une mineure de moins de 18 ans.

La Briqueterie condamne les violences survenues à Mokolo

La communauté musulmane de ce quartier de Yaoundé, capitale camerounaise, a organisé samedi 09 janvier une marche pour la paix et la stabilité dans le pays, après l’incident survenu jeudi dernier

Brandissant des pancartes aux messages divers, des habitants du quartier Briqueterie à Yaoundé, dignitaires religieux, leaders de partis politiques et chefs traditionnels ont défilés dans les rues de l’arrondissement de Yaoundé II samedi, 09 janvier 2016.

A travers ce déploiement, les populations ont manifesté leur désir de voir la paix et la stabilité durer au Cameroun. Autre raison, mettre un terme à l’amalgame causée par des jeunes dudit quartier au marché Mokolo.

La marche de samedi survient au lendemain des actes de vandalisme survenus au marché Mokolo dans la capitale camerounaise, Yaoundé, et orchestrés par une cinquantaine de jeunes venus venger la mort d’un des lors tué au cours d’une opération de braquage.

« Cet acte représente un symbole de paix. Nous avons rencontré le sous-préfet, qui est une autorité administrative et l’avons rassuré que tous les éléments qui ont participé à ce désordre seront démasqués. Et nous l’avons également rassuré que ce genre d’actes ne se produiront plus jamais », a indiqué le 3e adjoint au maire de Yaoundé II, Palalou Midjinyaoua, au sujet de la marche de samedi.

Le sous-préfet qui a salué cette initiative a réitéré le v u de voir les populations s’impliquer dans la recherche des auteurs présumés de ces actes barbares.


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Insécurité à Yaoundé: Mokolo embrasé par des affrontements sanglants

Des habitants du quartier Briqueterie armés de lances, couteaux et machettes ont décidé de venger la mort d’un des leurs, lynché pour vol de moto

Le marché Mokolo, situé à Yaoundé, a été le théâtre de scènes de violence ce jeudi, 07 décembre 2016. C’est après une intervention énergique que la police camerounaise a réussi à rétablir le calme.

A l’origine de ce déploiement musclé, la ruée de jeunes habitants du quartier Briqueterie venus venger la mort d’un des leurs, lynché quelques jours plus tôt pour cause de vol de moto. Les assaillants armés de couteaux, de machettes et de lances ont commencé à poignarder des commerçants, des mototaximen et des passants qu’ils rencontraient au marché.

Bilan des attaques, de nombreuses personnes blessées transportées à l’hôpital et de nombreuses marchandises volées. Après quelques heures d’affrontement, policiers et gendarmes vont réussir à sécuriser le marché. Les forces de l’ordre vont également encercler le quartier Briqueterie, où des scènes de violence semblables sont régulières. Au cours de cette opération des forces de l’ordre, quelques suspects ont été interpellés.


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Série noire: Des enfants portés disparus à Yaoundé

Deux nouveaux cas d’enlèvements de petits enfants viennent de se greffer au quotidien du quartier Briqueterie de la capitale camerounaise. Le reportage d’Intégration

Dans sa bicoque à la dérive, Abdoulaye Mota est enfoncé dans une vieille chaise. Il ne cesse de croiser les jambes l’une sur l’autre. De temps en temps, il fronce le sourcil et abaisse son chapeau pour ne voir personne, ou le relever ensuite et découvrir son front et parler. On ne l’interrompt pas, on l’écoute aussi longtemps qu’il veut parler de Halimatou, sa dernière fille. Le 18 novembre 2013, cette dernière a été enlevée par des inconnus, pendant que ses parents s’occupaient à visionner la rencontre de football opposant le Cameroun à la Tunisie.

En cet après-midi du 18 juillet 2014, Hawa Kadi, son épouse, n’a pas encore trouvé d’autre moyen pour surmonter ses nostalgies. Elle ne peut que s’abandonner au pouvoir d’un au†delà consolateur. En cette période de Ramadan, la prière aux accents incantatoires du couple fait écho à l’aspiration la plus vive de revoir leur fille de 02 ans (née le 11 février 2012 à Yaoundé, NDLR). Sur une distance de 200 mètres, dans la cour d’une habitation plus humble, Judith Bassa (31 ans) pile du poivre sur une dure banquette. La scène est complétée par un long mémoire de doléances débité d’une façon peu déchiffrable par la jeune dame. «Pardon, dites à celui qui a pris mon fils de venir le revendre à sa mère», peut†on capter de justesse.

Depuis le 19 juin 2014 à 22 heures, l’infortunée n’a plus jamais revu son fils Souleymanou âgé de 03 ans. Il a disparu pendant le match Cameroun†Croatie de la dernière coupe du monde de football. Comme Judith Bassa, Aline Zenabou, une autre mère, est inconsolable. Ses paroles douloureuses lui font perdre la voix. Et sa peine est si grande qu’elle déambule dans les artères encombrées de la Briqueterie, sans se soucier de ses habits en désordre. Son fils, Ibrahim (02 ans), est aussi porté disparu. C’était le 11 juillet dernier pendant qu’elle écoulait nuitamment des beignets dans le corridor obscur qui talonne la petite mosquée de la Briqueterie.

Démarches
Halimatou, Souleymanou et Ibrahim; cela fait trois gosses enlevés au quartier Briqueterie. Au sein de leurs familles respectives, les espoirs de les retrouver ne sont pas évanouis. Et c’est aux forces de l’ordre et aux médias que les parents hurlent et murmurent leur espérance. Dans ce qui parait être un problème à partager, la Division régionale de la police judiciaire du Centre (DRPJC), le commissariat de sécurité publique du 2e arrondissement à Mokolo ainsi que la sous†préfecture de Yaoundé II sont devenus les tabernacles des avis de recherches. Abdoulaye Mota, le père de Halimatou Saada Abdoulaye, s’y rend de façon régulière, sans cependant exclure d’autres pistes qu’il a personnellement élaborées.

Il indique à cet effet avoir reçu deux appels anonymes. Pour le premier coup de fil, son interlocuteur prétendait être à Ombessa (région du Centre) et lui demandait pas moins de cinq millions pour l’«aider à retrouver Halimatou». C’était, situe Abdoulaye Mota, en début décembre 2013. Au lendemain du voyage infructueux d’Ombessa, le pauvre révèle avoir été joint par une dame prénommée Gisèle depuis Garoua†Boulaï, à la frontière du Cameroun avec la République centrafricaine. Une date, une heure et un objet précis: «12 février 2014 à 18 heures 26, toujours cinq millions».


De même, les parents des deux autres enfants éperonnent leurs montures: ils sont avides de la moindre information, même auprès des tradi-praticiens. Judith Bassa évalue difficilement les sommes faramineuses déboursées par elle chez ces derniers. A la DRPJC, «on est sur le dossier, de même qu’on s’intéresse à de possibles ravisseurs», révèle le chef d’unité, le commissaire divisionnaire Dr. Pierre Nith. «C’est une impérieuse obligation de retrouver ces enfants», ajoute†t†il.

Côté sous†préfecture de Yaoundé II, Yampen Ousmanou, le patron des lieux a convoqué le vendredi 18 juillet 2014 une réunion avec les chefs duquartier Ekoudou. Il pense que le sujet de la disparition d’enfants est préoccupant et ne devrait pas souffrir de lenteur. «On est à l’oeuvre», rassure†t†il. A Mokolo, au commissariat de sécurité publique du 2e arrondissement, le commissaire Marcel Ondoa Ndi s’active lui aussi. Depuis, il table sur la conviction d’être à la tête d’une unité enfouie dans l’un des girons les plus complexes de la capitale camerounaise. Des enlèvements d’enfants, il a décidé d’appliquer un moyen pratique, propre à prévenir le mal et empêcher son évolution: l’interpellation des enfants mineurs poussés dans la rue pour des raisons commerciales.

Souleymanou, à l’aube de son troisième anniversaire
Journal Intégration)/n

Indices
On considère souvent que le quartier Ekoudou (Briqueterie) fait partie des zones dans lesquelles l’ordre public subit permanemment des assauts. «C’est surtout là-bas qu’on a besoin de recourir aux superlatifs pour décrire l’environnement dans lequel vivent les populations», indique Yampen Ousmanou. C’est, de toute évidence, un état de choses dont l’une des grandes transpositions symbolique est la criminalité raffinée par les soins des habitants eux-mêmes. «Ici, l’information circule à grande peine; il y a pourtant un cortège de plaies et de maux ici», reconnait Aladji Baba Mallam Yaya, le chef du bloc D de la Briqueterie.

Cela traduit forcément, sous formes de tableaux dramatiques les enlèvements des enfants. A les décrypter, l’on se rend compte que depuis la disparition d’Halimatou en novembre 2013, les deux autres cas récents ont visé des gamins d’un âge presque identique. Bien plus, c’est lorsque les parents ont les yeux rivés sur le football ou sur leurs commerces que les tout†petits sont enlevés. On ne manque pas de signaler que dans le foisonnement des anecdotes liées à ces affaires, des gens au profil vraisemblablement équivoque sont rentrés dans le jeu. C’est le cas de ceux qui exigent des rançons. Encore, c’est presque dans la même zone, celle du bas†fond (vers la pharmacie Elobi) que les enlèvements ont lieu. Bien suspect tout çà.

Halimatou, disparue depuis novembre 2014
Journal Intégration)/n