Après avoir dénoncé l’importation massive d’huiles végétales non conformes, l’Asroc s’est récemment vu opposée elle-même le fait que la majorité de ses membres ne respectent pas la norme. Elle dément
C’est décidément à un jeu de chaises musicales auquel on assiste dans les prises de positions de l’Agence des normes et de la qualité (Anor) et de l’Association des raffineurs des oléagineux du Cameroun (Asroc), concernant la question de l’importation et la commercialisation des huiles végétales raffinées sur le marché camerounais.
Tandis que la première assure que certaines huiles importées sont conformes à la norme en vigueur au Cameroun, la seconde ne démord pas sur la nocivité de plusieurs huiles importées sur la santé des consommateurs, ainsi que sur le tissu industriel local. Pour tempérer l’ardeur des raffineurs locaux – qui veulent que les importations d’huiles végétales soient davantage contrôlées et, dans le meilleur des cas, réduites à une peau de chagrin – le DG de l’Anor a affirmé il y a trois jours que la majorité des entreprises membres de l’Asroc ne respectent pas elles même la norme en vigueur. Ce qui a provoqué l’ire des industriels locaux.
Ping-pong
Le secrétaire général de l’Asroc, Jacquis Kemleu Tchabgou, a convié les journalistes ce jeudi, 23 avril, afin d’apporter des clarifications en rapport avec «l’interprétation» faite à l’issue du point de presse tenu par le directeur général de l’ANOR, Charles Booto à Ngon, le 20 avril dernier à Yaoundé.
«Les huiles végétales produites par les unités industrielles de l’Asroc sont bien conformes à la norme NC 77: 2002-03, révisée en 2011 sur les huiles végétales portant un nom spécifique enrichies à la vitamine A», défend le SG de l’Asroc.
D’après la démonstration faite aux journalistes, documents à l’appui, l’association des raffineurs locaux soutient avoir participé à toutes les étapes qui ont conduit à l’adoption d’une norme relative à la fortification des huiles végétales. Il a cité, entre autres, la réunion du 13 avril 2010, tenue entre les raffineurs, les meuniers, le ministère de la Santé publique ainsi que l’ONG Hellen Keller International, qui a apporté le financement pour cette opération ; la réunion du 07 mai 2010 qui a vu la signature des accords de partenariat entre le gouvernement, son partenaire financier HKI et les entreprises locales.
L’Asroc affirme, au chapitre de la démonstration, avoir pris une part active aux enquêtes publiques qui se sont déroulées «entre le 22 octobre et le 29 novembre 2010» ; tout comme elle reconnait avoir participé à la normalisation de la fortification, validée au cours d’une session tenue les 15 et 16 février 2011. Cette dernière a été menée par un Comité technique logé au sein du ministère de l’Industrie, des Mines et du Développement technologique, «sous l’égide de l’Anor», précise l’association des raffineurs locaux.
Le propos de l’Anor qui fâche
Le 20 avril dernier, au cours d’un point de presse, comme rapporté par la télévision publique, le Dg de l’Anor eu à déclarer: «j’avais prescrit de faire analyser un certain nombre d’huiles végétales vendues sur le territoire national. Parmi les producteurs locaux, seuls deux membres de l’Association des raffineurs des oléagineux du Cameroun se sont rapprochés de l’Anor et ont obtenu leurs certificats». Charles Booto à Ngon a mentionné spécifiquement l’huile «Azur» d’azur S.A et «Mayor» de SCR Maya et Cie.
Outre ces deux entreprises, le DG de l’Anor a indiqué que les autres huiles, au nombre de 4, à avoir obtenu un certificat de conformité, sont toutes importées: Jadida de general business of Africa, l’huile de tournesol messidor, l’huile de soja Jadida de la Coppeq SARL (dont la qualité du produit a été remis en doute par l’Asroc à plusieurs reprises), et l’huile de soja Solior.
«Les unités industrielles membres de l’Asroc ont fait l’objet d’une évaluation de conformité de la part d’un comité interministériel, sous l’égide de l’ANOR», réitère Jacquis Kemleu Tchabgou. «Les documents sont constants, rien n’a changé entretemps», ajoute-t-il.
Un combat avant tout économique
L’Asroc compte une dizaine d’entreprises dont: SCR Maya et Cie ; Azur S.A ; SCS Rafca ; Sodecoton; SPFS; CCO SA; Sitron.
Ces dernières, d’après les explications qui ont été apportées aux médias jeudi à Yaoundé, font face à une situation dommageable pour leur survie. «Quatre entreprises viennent de fermer pour méventes», a révélé Jacquis Kemleu Tchabgou, sans donner plus de détail. Pamol à Douala a 2500 tonnes d’huile de palme qui n’ont pas trouvé de preneur, a-t-il renchérit ; ajoutant que la Socapalm n’a «quasiment pas fait de ventes ce mois».
La cause de cette mauvaise santé réside de manière implicite pour l’Asroc dans l’importation massive des huiles végétales, qui feraient preuve de dumping et de concurrence déloyale. Il aurait déjà été validé à cet effet, selon les informations du SG de l’Asroc, l’importation de «300 containers» pour cette année. Toutes choses dont il dit avoir pris connaissance sur le tard, indexant ici à nouveau la direction générale des douanes.
Si l’Association des raffineurs et l’Anor ont du mal à parler d’une même voix, l’Asroc compte tout de même sur le lancement d’un contrôle de l’Agence des normes sur les huiles végétales commercialisées au Cameroun pour tirer le bon grain de l’ivraie. Cette opération a été décidée à l’issue d’un séminaire tenu les 07 et 08 avril dernier à Ebolowa, et qui a vu la présence des ministères du Commerce, de l’Industrie, des Mines et du Développement technologique, de la Santé publique; de la Société générale de surveillance, de l’Asroc, des importateurs, et des représentants de l’Anor. Les produits hors normes recensés dans le cadre du contrôle de l’Anor seront retirés des circuits de distribution, détruits ou recyclés.
