Cameroun: la version des avocats sur ce qui s’est passé au Palais de justice de Bonanjo le 10 novembre 2020

Par Me Laurent Moukam et Me Hippolyte Meli Tiakouang

 

Des images faisant état d’accrochages entre avocats et gendarmes en salle d’audience ont été partagées sur la toile mardi. Ce qui s’est passé selon des avocats.

  1. – Le récit de Me Laurent Moukam

Deux jeunes confrères de Douala ont été placés sous mandat de détention provisoire hier [lundi 09 novembre] à la prison centrale de Douala pour outrages à magistrat, tentative de corruption et escroquerie. Ils passaient en flagrant délit ce jour [mardi 10 novembre] au TPI de Douala Bonanjo.

A l’occasion, les avocats se sont mobilisés en grand nombre (plus de 500) pour solliciter la mise en liberté provisoire de ces deux confrères.

Après des débats houleux entre les avocats et le parquet, le juge en charge du dossier a mis le dossier en délibéré sur la demande de mise en liberté pour l’audience du 25 Novembre 2020.

Cela a véritablement irrité les avocats qui s’attendaient à une décision sur le siège ou tout au plus à un délibéré à bref délai. Les voix se sont élevées, le juge a suspendu l’audience.

Les gendarmes et policiers présents en nombre impressionnant dans la Cour du Tribunal ont fait irruption dans la salle d’audience.

La position de Me Hippolyte Meli Tiakouang, du collectif Sylvain Souop

Le collectif a appris cet après-midi [du 10 novembre] qu’en violation des règles relatives à l’usage des armes à feu au cours des opérations de maintien de l’ordre et en dehors de toute nécessité, voire proportionnalité, certains éléments fonctionnaires de la force armée de la République, ont lancé un assaut militaire dans une salle d’audience procédant à des tirs qui ont blessé des avocats.

Le collectif qui n’est pas encore revenu des intimidations des voies de fait et des humiliations subies par ses membres au cours d’actes d’assistance de leurs clients, dans les unités de police et de gendarmerie, condamne toute intrusion de la force armée, militaire ou policière, sous quelques prétextes que ce soient, devant, et dans l’enceinte des Palais de justice, relevant de l’ordre judiciaire.

Le collectif rappelle que le recours à la force, au trafic d’influence, et aux moyens indignes voire inappropriés au sein des Palais de justice corrompent l’indépendance et l’impartialité de la justice.

Et appelle les organes élus du Barreau à prendre la mesure de la gravité de ces agissements qui signent l’acte de décès de la profession et à agir conséquemment.