Le parquet de Paris a fait appel de la décision d’un juge d’instruction de recevoir une plainte contre le président du Cameroun dans l’affaire Lydie Eyoum
La décision du parquet de Paris
Le parquet de Paris a fait appel mardi 20 septembre 2011, de la décision d’un juge d’instruction d’enquêter sur des faits présumés de tortures, actes de barbarie et détention arbitraire dont serait victime Lydienne Eyoum, une avocate détenue depuis janvier 2010 au Cameroun. Le parquet de Paris s’était déjà opposé à la recevabilité de cette plainte estimant que Maître Eyoum ne possédait pas la nationalité française au moment de son incarcération. Fin juillet 2011, les avocats français de la victime présumée ont déposé une plainte avec constitution de partie civile à Paris contre le président camerounais Paul Biya et d’autres responsables officiels. Contre l’avis du parquet de Paris, la juge d’instruction Sylvia Zimmermann a décidé le 15 septembre d’enquêter sur les faits de torture et actes de barbarie à compter du 30 septembre 2010. Arrêtée pour un délit financier, la détention provisoire de Madame Eyoum Lydienne, selon les lois camerounaises, ne pouvait excéder 18 mois. Ce délai a expiré le 8 juillet 2011, date à laquelle la juge française a fixé le début de sa détention arbitraire. Sa plainte indique que jusqu’à mars 2011, l’avocate a vécu dans une cellule infestée de « rats, de cafards et de serpents » de 12 mètres carrés avec 17 co-détenues dans la prison N’Konguendi à Yaoundé. Mariée à un Français, Lydienne Eyoum a acquis le 30 septembre 2010 la nationalité française, alors qu’elle était en prison depuis près de neuf mois.
Une affaire attendue
Le parquet de Paris avait estimé le 5 septembre que la plainte, qui vise notamment le président camerounais Paul Biya, ne justifiait pas l’ouverture d’une information judiciaire. Il argumente encore aujourd’hui cette position, au motif que la victime présumée n’était pas française au moment de son arrestation. Pour sa part, Lydienne Eyoum qui avait obtenu la nationalité française le 30 septembre 2010 devrait tirer bénéfice sur les faits présumés de torture et actes de barbarie commis après cette date. Entre la lecture froide du Droit et la préservation des relations entre Paris et Yaoundé, les autorités françaises ont une marge. Les avocats de la désormais franco camerounaise savent qu’ils tiennent là une corde. Le parquet avait requis un refus d’informer, dans la ligne classique de sa subordination à l’égard des politiques français dont on connaît les relations pour le moins troubles avec les tyrans africains, a relevé Maitre Christian Charrière-Bournazel, autre avocat de Lydienne Eyoum. Ancienne avocate de l’Etat camerounais, Lydienne Yen-Eyoum a été arrêtée le 8 janvier 2010 dans le cadre de l’opération dite épervier, une campagne de lutte anti-corruption lancée par le gouvernement camerounais. Elle est aujourd’hui inculpée pour des faits qu’elle conteste encore. La Cour d’Appel de Paris statuera dans les prochaines semaines.
